Préambule
Une fois de plus, Napoléon est face aux armées autrichiennes. Le Danube [1] sépare les 2 armées.
Après l’échec d’Aspern-Essling, Napoléon prend six semaines pour repenser ses plans et envisager la fin de la campagne de 1809. Il a pour avantage de dominer la ville de Vienne [2] avec ses arsenaux et magasins. Il prend un soin particulier pour organiser la traversée du Danube, faisant ériger de solides ponts où des patrouilles sont chargées de surveiller d’éventuelles tentatives de sabotage. Après avoir fait croire qu’il allait répéter l’attaque d’Aspern, Napoléon organise ses troupes sur le côté est de l’île Napoléon (Lobau) et les fait traverser sous une pluie battante par le bras nord du fleuve.
Au début de l’été 1809, Frédéric Guillaume, duc de Brunswick-Wolfenbüttel cousin et beau-frère du Prince Régent britannique, le futur George IV , décida d’entrer dans le conflit avec la France. Il était particulièrement amer depuis que son territoire de Brunswick [3] avait été intégré au royaume de Westphalie [4] de Jérôme Bonaparte , en 1807. Il décida de créer un corps de partisans avec le soutien de l’Empire autrichien. Le 25 février 1809, le Duc signa une convention d’amitié à Vienne avec l’archiduc Charles et l’Oberstleutnant [5] Guillaune t. Freiherr v. Steinmetzen, alliant l’Autriche et le Brunswick.
Les 18 articles de la convention visaient à aider le duc de Brunswick à récupérer son territoire, et organisaient à cet effet un “Freikorps”. Placé sous la protection autrichienne, entièrement financé par le duc de Brunswick, ce corps indépendant était composé de 1 200 soldats d’infanterie et 500 cavaliers.
Ces hommes de Brunswick, dont la devise était “la victoire ou la mort”, furent vite appelés les Hussards noirs, en raison de la couleur noire de leur uniforme. Le 11 juin 1809, les Hussards noirs et quelques troupes autrichiennes, conduits par le général Amende, occupèrent la ville clé de Dresde [6], en Saxe, ville depuis laquelle le duc de Brunswick adressa à son peuple une proclamation l’incitant à résister, de toutes ses forces, à l’occupant français.
Le roi de Saxe, Frédéric Auguste , demanda de l’aide au roi de Westphalie. Le roi Jérôme envoya, le 21 juin 1809, 11 000 hommes menés par le général Louis Alexandre Albignac , pour bouter les forces autrichiennes et les Hussards noirs hors de Dresde. L’affrontement qui se tint près de Waldheim [7], le 27 juin fut indécis, les deux camps se proclamant vainqueurs. Le duc de Brunswick se replia alors vers le sud de la Franconie [8], avec la ferme intention de continuer à se battre.
Le 1er juillet 1809, Napoléon installe sa tente sur la petite île de Lobau [9], rebaptisée “île Napoléon”, au milieu de ses troupes qui y sont depuis quelques semaines. Les deux armées française et autrichienne sont alors situées chacune sur l’une des rives du Danube. Napoléon avait choisi comme point de passage, au sud, Lobau, qui sépare le fleuve en deux bras et se situe à l’est de Vienne. Le premier passage tenté les 21-22 maiEssling avait été un échec. Un second passage sera tenté le 5 juillet. En ce début de juillet, Napoléon 1er dispose alors de 150 000 hommes stationnés sur l’île, et l’archiduc Charles de 170 000 hommes au nord du Danube
Le 4 juillet, Napoléon fait occuper l’île Lobau. Un violent orage, vers 21 heures, permet à l’empereur de faire jeter sur le bras nord du fleuve 3 ponts, par lesquels ses troupes passent.
La bataille de Wagram est une bataille de la guerre de la Cinquième Coalition [10], qui fut décisive pour son issue. Elle a eu lieu du 5 au 6 juillet 1809 dans les plaines de Marchfeld [11], sur la rive nord du Danube, la principale zone de combats se localisant aux environs du village de Deutsch-Wagram [12], à 10 km au nord-est de Vienne [13]. Les 2 jours de lutte ont vu s’imposer l’armée impériale française, sous le commandement de Napoléon 1er face à l’armée impériale autrichienne commandée par l’archiduc Charles d’Autriche-Teschen.
La bataille de Wagram fut la plus meurtrière des batailles qui avaient eu lieu jusqu’alors, et ne sera égalée ou dépassée que par les batailles de la Moskova [14] et Leipzig [15]. Après le combat, épuisées et ayant subi de très lourdes pertes, les forces françaises ne peuvent poursuivre leur ennemi. Quant aux Autrichiens, leur situation, déjà très difficile avant le combat, devient désespérée après la défaite.
Après la défaite autrichienne à la bataille d’Austerlitz en décembre 1805, l’empereur François II d’Autriche ratifia le traité de Presbourg [16] qui concluait une paix coûteuse avec la France impériale. En effet, l’Autriche dut verser à la France une indemnité de guerre s’élevant à 40 millions de florins, cédant en parallèle 10 % de sa population de 24 millions de sujets à l’autorité française, qui fournissait à l’Empire 16 % de ses revenus annuels. Cette population nouvellement francisée vint peupler les républiques sœurs créées par Napoléon à l’issue de ce traité, en Italie et en Bavière [17], qui agissent comme des états-tampons contre les ennemis de l’est, lui procurant également de nouvelles zones de recrutement militaire. La défaite prussienne à l’issue de la campagne de 1806 poussa enfin François II à abandonner son titre de Saint-Empereur, ne conservant que le titre d’empereur d’Autriche. Bien évidemment, ce traité s’avéra impopulaire dans les cercles décisionnels autrichiens, et un parti belliqueux se forma. L’archiduc Charles, stratège reconnu et le seul général autrichien pouvant tenir tête à Napoléon, fut désigné comme Generalissimus [18], avec l’ordre de réformer l’armée, dont l’incompétence fut exposée au grand jour après la défaite de 1805. En parallèle, l’Autriche se mit en quête d’alliés. Après le traité de Tilsit de 1807, la Russie devenait alliée de Napoléon.
La Prusse remit les négociations à plus tard, pour ensuite refuser l’invitation à la guerre. La Grande-Bretagne, déjà en guerre contre la France, reçut favorablement cette proposition, mais elle fut incapable de participer à l’effort de guerre autrichien, ses forces militaires étant mobilisées en Espagne.
L’Autriche dut conduire cette guerre seule, mais nourrissant cependant l’espoir de rallier à sa cause les mouvements nationalistes naissants en Allemagne et en Italie. Finalement, hormis la révolte pro-autrichienne d’ Andreas Hofer dans le Tyrol bavarois [19], la tentative isolée du major Ferdinand von Schill , l’action idéaliste du jeune Friedrich Staps , les peuples allemands sous autorité française demeurèrent fidèles à Napoléon.
Début des hostilités
Le 9 avril 1809, les armées impériales sous le commandement de l’archiduc Charles envahissent l’Italie par le nord et la Bavière, sans préalablement déclarer la guerre, un simple message de Charles : J’ai ordonné à mes forces d’avancer et de considérer comme ennemis tous ceux qui s’opposeront à elles, parvenant aux avant-postes français. Quelques heures plus tard, les Autrichiens attaquent. Malgré le fait que Napoléon s’attendait à une attaque autrichienne, elle vint plus tôt qu’il ne l’avait prédit, et de ce fait était encore à Paris lorsque Charles avançait. La lenteur de l’attaque ne l’empêcha cependant pas d’être initialement réussie, Munich [20] tombant aux mains des Autrichiens ; devant eux ne se dressait plus qu’une armée française divisée. Cependant, l’arrivée de Napoléon 1er avec la Garde Impériale changea la donne.
En effet, à l’issue de contre-attaques réussies à Abensberg [21], Landshut [22], Eckmühl [23] et Ratisbonne [24], il parvint à refouler les Autrichiens sur la rive nord du Danube.
Napoléon continua sur sa lancée, capturant Vienne le 12 mai ce qui ne provoqua pas pour autant la capitulation autrichienne. En effet, Charles conservait intact son corps principal stationné au nord-est de la ville impériale. Napoléon décida alors de traverser le Danube afin de rencontrer et vaincre l’armée autrichienne. L’archiduc, qui avait anticipé ce mouvement, attendit jusqu’à ce qu’une partie de l’armée française vînt s’établir dans le saillant de Mühlau [25] et les villages d’Aspern et d’Essling pour la flanquer et attaquer ensuite la tête de pont française.
Napoléon tenta de renforcer sa position en envoyant des renforts, mais l’acheminement de ces derniers fut rendu impossible par les barges autrichiennes chargées de pierres et destinées à s’écraser contre les chétifs ponts français.
S’ensuivirent 2 jours d’intenses combats, où les Français en sous-nombre et constamment à court de munitions durent repousser les Autrichiens, et à l’issue desquels Napoléon ordonna une retraite sur l’île de Lobau. Napoléon y laissa 7 000 morts et l’un de ses maréchaux les plus compétents, le maréchal Lannes . À Lobau, il exposa ses hommes aux canons ennemis, les denses paquets de troupes françaises offrant des cibles de choix aux canonniers autrichiens. Cependant, Charles préféra placer un corps d’observation sur la rive gauche et se replia quelques kilomètres en arrière. Napoléon reconnut nécessaire une nouvelle traversée du Danube, et s’y prépara avec plus de minutie.
Le 1er juin, les ingénieurs français commencèrent la construction d’un ponton et de ponts, cette fois-ci bien plus solides que les précédents. Les ponts furent achevés le 21 juin. Des bateaux furent réquisitionnés, chargés de canons afin de patrouiller le long du Danube. Enfin, Lobau devint une gigantesque base de ravitaillement pour l’armée impériale, recelant provisions, munitions et troupes.
Le 4 juillet, ayant pris place sur l’île, l’empereur a transformé le site en une véritable forteresse garnie de pièces de gros calibres prises à l’arsenal de Vienne. Les troupes françaises se préparent à affronter l’archiduc Charles qui avait fait avancer les siennes dès le 30 juin au nord d’Aspern et d’Essling. Ce dernier est convaincu que Napoléon utilisera la même stratégie qu’au mois de mai et fera déboucher ses troupes dans la plaine du Marchfeld. Aussi, l’archiduc Charles fait occuper et organiser les villages d’Aspern, Essling et Enzersdorf [26]. Une diversion effectuée par Masséna le 30 juin le confirme dans cette idée. Mais, le 3 juillet, voyant que l’offensive française ne se développe pas, il se retire dans les hauteurs au nord de Russbach.
Vers 21h30, Napoléon fait débuter le franchissement du bras du Danube par ses troupes, sous un violent orage.
Le 5 juillet à 6h du matin, Oudinot , Masséna et la division Friant du corps de Davout sont passés sur la rive gauche. Ce sont plus de 30 000 hommes massés au nord. Jusqu’à 9h, les ponts de Enzersdorf, Wittau et Mühllein sont sous contrôle français. Les Français se sont déployés en quart de cercle, la droite au Russbach, la gauche près du Danube. Les Autrichiens se tiennent à l’extérieur de ce quart de cercle, parallèlement à la ligne française. La mission la plus importante est confiée à Masséna et son 5ème corps, puisqu’il devra à lui seul couvrir toute l’aile gauche du dispositif. A 19h, la division Molitor atteint Breitenlee [27], Boudet atteint Kagern, Carra Saint-Cyr , Leopoldau et Claude Juste Alexandre Louis Legrand , Sussenbrünn. Le corps de Masséna tient à lui seul un front de 7 à 8 km. Mais en se déployant, les troupes françaises sont fragilisées à la droite des Autrichiens qui ne manquent pas de marcher sur Aspern.
L’armée française affronte en vain les Autrichiens.
Le 5 juillet, 162 000 soldats français se retrouvèrent sur la rive gauche du Danube. Les plaines de Marchfeld furent alors la prochaine destination des troupes impériales. Cette plaine constituait un terrain d’entraînement pour les soldats autrichiens, et était donc bien connue de l’archiduc, qui avait déployé ses troupes défensivement tout au long du Wagram [28], versant sud d’une terrasse alluviale, et derrière le Russbach [29].
Leur position en équerre surprend l’empereur. Mais le 6, son plan de bataille prend en compte ce qu’il a découvert. La bataille commence par une intense préparation d’artillerie. Et l’attaque est lancée à la charnière de l’équerre autrichienne.
L’armée autrichienne, coupée en deux, se replie. Epuisée, la cavalerie française ne parvient pas à poursuivre les fuyards.
Le lendemain, elles s’affrontent, observées à la lorgnette par l’empereur d’Autriche, qui a pour l’occasion quitté sa retraite de Wolkersdorf pour venir s’installer sur une butte [30] près de Pillichsdorf [31], au nord de Wagram
Pendant les 2 jours de bataille, Charles ne put compter que sur la principale armée autrichienne, “la Kaiserlich-königliche Armee”. L’archiduc avait prévu que l’armée de l’archiduc Jean d’Autriche participe à la bataille, mais cette dernière n’arriva qu’à la fin du second jour. Par conséquent, les forces autrichiennes disponibles se chiffrent à 137 000 hommes et 415 pièces d’artillerie.
Contrairement à son homologue autrichien, Napoléon put rassembler 2 armées secondaires pour la bataille à venir. La première, l’armée d’Italie, vint d’Italie du Nord jusqu’à Vienne et était sous le commandement du vice-roi d’Italie, le prince Eugène de Beauharnais . La seconde était le XIème corps de l’armée de Dalmatie [32], commandé par le général de division Auguste de Marmont . Cependant, ces deux armées n’arrivèrent sur le champ de bataille que le 6 juillet à midi, en même temps que la division bavaroise du général Carl Philipp von Wrede du VIIème corps. Par conséquent, Napoléon rassembla 165 000 hommes et 433 pièces d’artillerie, organisés en corps, divisant la Grande Armée d’Allemagne.
La bataille eut lieu à environ 10 km au nord-est de Vienne, dans les plaines de Marchfeld. Située sur la rive gauche du Danube, la ville de Presbourg [33], où l’armée de l’archiduc Jean est stationnée, n’est située qu’à 40 km du champ de bataille. La plaine de Marchfeld était une vaste et presque entièrement plate étendue agricole, recouverte partiellement de cultures en ce mois de juillet. En 1809, il existait plusieurs villages, séparés par de courtes distances, la plaine était délimitée au nord par un fleuve, le Russbach, aux rives couvertes de végétations fluviales. Le fleuve fut un véritable obstacle à la cavalerie, et la traversée de l’artillerie nécessita la construction de ponts. Au nord du fleuve existait une sorte d’escarpement au niveau du village de Deutsch-Wagram, lui donnant ainsi son nom. Les villages tout au long du Russbach représentent pour l’armée autrichienne des positions défensives stratégiques, alors que derrière le Russbach s’étend l’escarpement de Wagram, excellent point d’observation. Le champ de bataille sera délimité au nord par le village de Deutsch-Wagram, à l’ouest par le village de Kagran [34], au sud par les villages d’Aspen et d’Essling et à l’est par le village de Glinzendorf [35].
Le 5 juillet, Lobau fut transformée en un entrepôt géant, et Napoléon était prêt.
La stratégie de Napoléon consista à faire diversion au nord de Lobau, au niveau du site de la bataille d’Aspern-Essling, dans le but d’attirer l’armée autrichienne à ce niveau, avec quelques troupes. Parallèlement, il comptait traverser le Danube à l’Est de ce point, avec le gros de l’armée, afin de pouvoir flanquer l’armée autrichienne. Cette stratégie lui évitait une attaque directe en traversant le Russbach, et lui permettait d’encercler une armée autrichienne sans issue.
Charles savait quant à lui que Napoléon allait traverser au même endroit que précédemment. Mais plutôt que de défendre la rive gauche sous le feu de l’artillerie française de Lobau, ou même essayer de défendre les plaines de Marchfeld, le terrain accidenté étant trop avantageux pour les troupes légères de Napoléon, il retira la majeure partie de son armée derrière le Russbach, en forme de V, ses deux extrémités se situant au niveau des villages de Süssenbrunn à l’ouest et de Markgrafneusiedl [36] à l’Est, le sommet de ce dernier se situant au niveau du village de Wagram. Charles oscilla constamment entre une stratégie offensive et défensive, mais à l’aube de la bataille, il décida de conserver cette disposition dans le but d’utiliser une aile afin d’encercler Napoléon lors de son attaque sur l’autre aile. La communication étant défaillante, il en résulta que le lieutenant-général [37] Nordmann qui commandait l’avant-garde sur la gauche autrichienne, conserva une position qu’il ne devait pas occuper.
Une fois les troupes françaises déployées, André Masséna, duc de Rivoli, commande à gauche devant Aspern et Essling du fond d’une calèche qu’une blessure l’empêche de quitter, Louis-Nicolas Davout, duc d’Auerstaedt, à droite autour de Glinzendorf .
Tous deux ont une certaine liberté de manœuvre car Napoléon, qui a installé son quartier général au centre, au nord de Raschdorf, avec Jean-Baptiste Jules Bernadotte et le prince Eugène de Beauharnais toujours chaperonné par Étienne Macdonald , n’est informé qu’avec retard de ce qui se passe sur ses ailes.
Grâce à sa tête de pont fortifiée, Napoléon fit traverser le Danube à ses 165 000 hommes pendant la nuit du 4-5 juillet. Son armée était composée du IIème corps d’Oudinot, du IIIème corps de Davout, du IVème corps de Masséna, de l’armée d’Italie de Beauharnais, du IXème corps saxon de Bernadotte et du XIème corps de Marmont. Notons également la présence de la Garde Impériale, de la réserve de cavalerie de Jean Baptiste Bessières et du contingent bavarois de Carl von Wrede, qui arriva le 6 juillet après 6 jours de marche.
Le dispositif en équerre adopté par l’archiduc Charles, dans la plaine et sur le plateau de Wagram, surprend Napoléon. Vers 18 ou 19 heures, l’ensemble de ses forces ayant fini de traverser le fleuve, il tente d’en finir rapidement en lançant une attaque frontale sur Wagram.
Parallèlement, Charles ne prit pas le soin de réunir toutes ses forces disponibles. Une brigade du corps de Johann Kollowrat fut mise à l’écart, le Vème corps du prince Heinrich XV de Reuss-Plauen fut considéré comme réserve et conservé au nord-ouest, et les forces de l’archiduc Jean furent laissées à Presbourg. Enfin, quelques divisions supplémentaires pouvaient être appelées en renfort de Galicie [38] et de Bohême [39]. Si Charles avait rassemblé toutes ses forces à Wagram, il aurait bénéficié de 60 000 hommes supplémentaires. Son armée était composée de l’avant-garde d’ Armand von Nordmann , du 1er corps d’ Heinrich-Johann de Bellegarde , du IIème corps du prince Friedrich de Hohenzollern-Hechingen , du IIIème corps de Kollowrat, du IVème corps du prince Franz Seraph de Rosenberg-Orsini , du VIème corps de Johann von Klenau , de la réserve de grenadiers et de la cavalerie de Johann Liechtenstein dit Jean 1er prince de Liechtenstein . Le 5 juillet, Napoléon déployait ses troupes près d’Aspern et d’Essling.
L’artillerie autrichienne pilonnait intensément les deux villages pendant que l’armée française se déployait. Quelques avant-postes sous le commandement de Nordmann et Klenau ont été envoyés, les troupes de Nordmann ayant perdu 50 % de leurs effectifs mais conservant cohésion et efficacité. À midi, toute la zone voisine d’Aspern et d’Essling fut aux mains des Français. Plus tard dans l’après-midi, l’armée française forma un demi-cercle avec Masséna à l’extrême gauche, Bernadotte, Eugène et Oudinot au centre, et Davout à l’extrême droite, épaulé par deux brigades de cavalerie couvrant son propre flanc droit afin de faire face à l’arrivée anticipée de l’archiduc Jean.
Macdonald enfonce les lignes ennemies et Bernadotte pénètre dans le village mais l’archiduc Charles rassemble ses forces et parvient à repousser les assaillants. À Baumersdorf [40], alors que Napoléon en personne assiste au combat, Oudinot échoue devant l’héroïque résistance des troupes du général-major Ignaz zu Hardegg ou Ignaz Franz Graf zu Hardegg .
De durs combats de rue ont lieu dans le village d’Aderklaa [41]. Quand le désordre gagne la ligne française, par suite d’une confusion entre les uniformes autrichiens et ceux des Saxons que commande Bernadotte, l’attaque est abandonnée. La journée se termine sans qu’aucun des 2 belligérants n’ait pu faire la décision.
Aux environs de 18 h, dans le but de commettre une action décisive lui donnant l’avantage au terme de cette première journée mais également afin d’éviter l’arrivée de l’archiduc Jean, Napoléon ordonna une attaque sur le centre autrichien, visant en particulier les corps de Bellegarde et Hohenzollern tout au long du Russbach. L’attaque fut peu coordonnée et s’avéra être désastreuse. Les forces autrichiennes furent préalablement repoussées de Wagram, avant que Charles ne puisse rallier à lui ses hommes et ne repousse les Français. Les contre-attaques autrichiennes permirent alors de récupérer tout le terrain concédé à Napoléon pendant son offensive. Les combats de rue d’Aderklaa furent un avant-goût de la bataille du lendemain, et se sont caractérisés par une abondance de tirs dits amis, notamment lorsque les Italiens de MacDonald tirèrent sur les troupes saxonnes de Bernadotte, leurs uniformes blancs les ayant fait confondre avec les Autrichiens.
Durant la nuit, les deux adversaires revoient leur dispositif dans un sens opposé. Tandis que Napoléon rassemble son armée, l’archiduc Charles, persuadé que ses troupes établies sur le plateau de Wagram sont capables de résister à tous les assauts, les dégarnit pour porter ses forces sur les deux ailes.
À son examen de la situation tactique, Charles conclut que la relative petitesse du front français et de la profondeur de ses lignes permettaient à Napoléon de frapper et de briser sa ligne n’importe où. Afin d’y remédier, il ordonna une attaque simultanée, à la fois sur les 2 flancs français et sur le centre. Une attaque sur le front droit constitua une feinte dans le but d’attirer les réserves françaises et de les éloigner. La véritable attaque visait en fait le flanc gauche de l’armée française à Aderklaa. Si sa stratégie réussissait, il recréerait l’exploit d’Hannibal à Cannes [42] puisque les Français seraient encerclés, le Danube coupant toute retraite.
À 4 h, au matin du 6 juillet, les premières attaques autrichiennes visèrent le flanc droit français. Peu coordonnée, cette attaque fut interrompue par les hommes de Davout. Cependant, les 3ème et 6ème corps représentèrent une menace réelle pour Napoléon sur son aile gauche.
Les Autrichiens passent à l’offensive. Le général Franz Seraph von Rosenberg-Orsini tente de déborder Davout sur sa droite ; sur l’aute aile, les généraux Johann von Klenau et Johann Karl von Kollowrath longent le Danube pour tourner le duc de Rivoli (Masséna) et couper la ligne de retraite française ; au centre, un intense feu d’artillerie se concentre sur les Français qui entament un repli sur le village de Raschdorf.
Cependant, la longueur du front autrichien, l’État-Major incompétent et la non-arrivée de Jean eurent raison de la stratégie de Charles.
Au centre, les Autrichiens réussirent à repousser le 9ème corps de Jean-Baptiste Bernadotte, abandonnant Aderklaa, qui tomba aux mains des Autrichiens sans un coup de feu. En avançant dans le village, les Autrichiens repoussèrent les Saxons qui se débandèrent malgré les tentatives de ralliement de Bernadotte. Napoléon rencontra alors Bernadotte qui tentait de rallier ses troupes, et lui retira le commandement du 9ème corps immédiatement. Dans le but de repousser les Autrichiens, Napoléon rassembla 112 canons de tout calibre et forma en son centre une grande batterie, qui arrosa de plomb les colonnes autrichiennes. L’artillerie et les attaques de cavalerie stoppèrent la progression du corps de Kallowrat. Klenau entra en contact avec une division française, mais s’exposa aux canons de Jean-Louis-Ébénézer Reynier de Lobau. Le corps de Masséna, qui s’était retiré vers le nord, revint ensuite vers Aspern-Essling sous le feu autrichien, et fondit sur le flanc gauche de Klenau pendant qu’il essayait de se frayer un chemin dans les arrières gauches de Napoléon. Ce mouvement stabilisa le flanc gauche français.
A neuf heures du matin, l’armée française forme un demi-cercle entre Aspern et Groshofen [43] mais la division de Jean Boudet , à l’extrême gauche du dispositif, est séparée du centre par un intervalle énorme qui la force à se replier vers Enzersdorf [44], mettant les Autrichiens à portée des ponts de bateaux français sur le Danube.
Au nord, les Autrichiens ont interrompu leur progression pour ne pas se couper du gros de leurs forces ; Au centre, toute la plaine de Wagram à Aspern est couverte d’artillerie et soumise à un feu intense. Partout, les Autrichiens progressent rapidement ou maîtrisent la situation.
Napoléon lance alors son centre à l’assaut. Il fait marcher les troupes de Macdonald en colonnes d’attaque, soutenues parla Garde à cheval, les cuirassiers d’ Etienne-Marie-Antoine-Champion de Nansouty et une centaine de pièces d’artillerie. Celles-ci, sous le commandement de Jacques Alexandre Law de Lauriston , étouffent le feu des Autrichiens et arrêtent leur progression.
Les Français s’avancent mais le centre ennemi résiste. Immobilisées, les deux armées se portent mutuellement des coups très durs sans qu’aucune ne cède. Ce jour-là est mise en action la plus importante concentration d’artillerie jamais utilisée jusqu’alors.
Mais Napoléon dispose encore de réserves tandis que les Autrichiens ont jeté toutes leurs forces dans la bataille. A gauche, Masséna reçoit des renforts et reprend l’offensive ; à droite, Davout, à la tête des divisions de Charles Antoine Louis Alexis Morand , Louis Friant , Charles Étienne Gudin , Louis-Pierre Montbrun et Emmanuel de Grouchy , monte à l’assaut des hauteurs qui dominent le village de Markgrafneusiedl.
La zone voisine au village fut le théâtre d’un combat intense et le corps de Davout refoula les troupes de Rosenberg hors du village pour le capturer vers 15 h. Davout attaquait ensuite le flanc gauche.
Malgré, là aussi, un intense bombardement d’artillerie et une résistance opiniâtre des Autrichiens, Davout prend pied sur le plateau de Wagram.
Vers midi, Napoléon, voyant les succès de Davout, ordonne aux corps des généraux Macdonald et Oudinot une grande attaque centrale.
Le premier avance vers Süssenbrunn à la tête d‘un immense carré de 8 000 hommes, le second traverse le Rüssbach, prend le village de Wagram, grimpe sur le plateau et se réunit aux troupes de Davout.
Une attaque majeure fut maintenant lancée contre le centre autrichien qui avançait, sous le commandement du général de division MacDonald, qui était rattaché à l’armée d’Italie sous le commandement de Beauharnais. MacDonald lança sa formation sur le centre autrichien. Ces derniers ripostèrent par un barrage intense d’artillerie et plusieurs attaques de cavalerie légères.
Le général Antoine Charles Louis de Lasalle vint alors appuyer MacDonald avec ses hussards. Après une féroce mêlée, l’attaque du général s’interrompit sans pouvoir briser le centre autrichien. Elle empêcha cependant Charles de pouvoir renforcer son flanc gauche, et les Autrichiens commencèrent alors à évacuer la position, se retirant proprement vers Znaim [45] au nord-ouest.
La cavalerie française, harassée et dispersée, ne peut mener une poursuite en règle. Le mouvement rétrograde des Autrichiens se fait donc sans désordre, malgré les efforts de Jean Baptiste Bessières, interrompus lorsque le maréchal est blessé par un boulet et ceux du général Antoine Charles Louis de Lasalle, qui y perd la vie. La défaite autrichienne ne se transformera donc pas en déroute.
Épuisée par près de 40 heures de combats, l’armée française suivit plutôt qu’elle ne poursuivit les Autrichiens. MacDonald reçut ce jour-là, et sur le champ de bataille, son bâton de maréchal.
Napoléon a pourtant gagné la bataille. À sa droite, Louis-Nicolas Davout dérobe Hohenzellern ; au centre Eugène de Beauharnais et Nicolas-Charles Oudinot avancent ; au sud André Masséna repousse Klénau. Vaincue mais non mise en déroute, l’armée autrichienne abandonne le champ de bataille.
A 19 heures, l’arrivé de l’armée commandée par l’archiduc Jean, que les Autrichiens ont espéré tout au long de la bataille, intervient trop tard pour influer sur le sort du combat. Tout est déjà consommé et il ne reste plus au général autrichien qu’à imiter son frère en faisant retraite à son tour.
L’ennemi, étonné de la célérité de ces opérations, s’éloigne précipitamment pour prendre une nouvelle position sur la ligne de Wagram, en avant de laquelle il s’engagea, dès le même soir, un combat qui devint général sans être décisif. Les deux armées restèrent en présence pendant le reste de la nuit.
Au point du jour, une nouvelle attaque française eu lieu, à laquelle les ennemis opposèrent d’abord une forte résistance : mais bientôt leur aile gauche est enfoncée ; et, tandis que la droite, vivement serrée sur le Danube, résiste à peine, le centre, menacé par le corps de réserve composé de la garde impériale et royale, voit à chaque instant ses rangs éclaircis par le feu de l’artillerie légère de ce corps qui semble se multiplier pour se porter sur tous les points. Enfin, les lignes des Autrichiens sont enlevées, leurs divisions dispersées ou détruites par l’effet terrible de l’artillerie, et la victoire est complète.
Après cette victoire à Wagram, Napoléon perd la trace de l’armée autrichienne. Mais très vite, il acquiert la certitude qu’elle se replie sur Znaïm et se lance à sa poursuite. Les combats reprennent à Znaïm dès le 10 juillet 1809
Napoléon vainquit l’avant-garde autrichienne à Znaïm, et Charles proposa un armistice, que Napoléon accepta.
MacDonald fut promu maréchal sur le champ de bataille, pour ses qualités de commandant lors de son attaque du centre. Oudinot et Marmont reçurent leurs bâtons à Znaim, Marmont étant quelque peu surpris de cet honneur. Rapidement, les soldats mirent au point un chant relatif à la promotion de ces 3 hommes.
Wagram fut la première bataille à l’issue de laquelle Napoléon échoua à obtenir une victoire décisive sans éprouver beaucoup de pertes. En effet, les Français perdirent près de 34 000 hommes à Wagram, auxquels se rajoutent les 20 000 perdus à Aspern-Essling. Contrairement à la campagne de 1807 où la victoire difficile et marginale d’Eylau avait été suivie d’un succès écrasant à Friedland, la campagne de 1809 s’est finalement achevée par une victoire coûteuse en hommes et peu convaincante.
Ceci pourrait être interprété comme étant la manifestation du déclin progressif de la qualité des troupes napoléoniennes, et de l’amélioration de celles de ses adversaires, qui ont désormais compris leurs erreurs passées et ont globalement appréhendé les stratégies de Napoléon. Ces lourdes pertes, qui incluaient des troupes expérimentées et une trentaine de généraux dont Lasalle et du maréchal Lannes à Aspern-Essling, ne purent être compensées par la suite. La mise à l’écart du commandement de Bernadotte, conséquence de son échec à la bataille de Wagram, eut des conséquences inattendues. Elu à la surprise générale héritier au trône de Suède l’année suivante, l’ancien maréchal s’avérera être par la suite un soutien décisif pour les Alliés.
Wagram restera dans l’histoire comme l’une des plus grandes batailles avec la présence de 300 000 soldats pour 2 jours de combats et ses très nombreuses pertes humaine.