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Ruga dit Rugila le Grand

vendredi 17 janvier 2025, par lucien jallamion

Ruga dit Rugila le Grand (mort en 434)

Roi des Huns

Prédécesseur immédiat de ses neveux Bleda et Attila. Il joue un rôle majeur dans les premières victoires hunniques sur l’Empire romain.

Ruga est roi des Huns [1], d’abord conjointement avec son frère Octar , puis seul à la mort de ce dernier. Il semblerait que les deux frères se répartissent géographiquement leur souveraineté, Octar à l’ouest et Ruga à l’est.

Il est de religion chrétienne, mais sous la forme de l’arianisme [2], qui a largement touché les Germains, notamment les Goths [3], à partir des années 340 ; or les Ostrogoths [4] jouent un rôle important au sein de l’empire hunnique à partir de 375.

Ruga et Octar luttent contre l’Empereur romain d’Occident Honorius, mais à sa mort en 423, ils se réconcilient avec l’empire d’Occident où à la fin de 423 s’installe l’usurpateur Jean. Un des officiers ralliés à Jean, Aetius, qui a passé plusieurs années comme otage à la cour hunnique où il s’est lié d’amitié avec Attila, est envoyé auprès des Huns pour obtenir de l’aide. Il ramène plusieurs milliers de soldats, mais, devancé par l’armée de l’Empire d’Orient qui s’empare de Ravenne [5], préfère se rallier au nouveau pouvoir : le jeune empereur, Valentinien III et sa mère, la régente Galla Placidia. Aetius est ensuite un des hommes les plus importants dans le gouvernement de l’Empire d’Occident, devenant responsable de la défense de la Gaule en 426, avec des troupes dans lesquelles les Huns sont très nombreux.

Ruga devient seul roi à la mort d’Octar, vers 430, durant une campagne contre les Burgondes [6].

Sous son égide, les Huns envahissent le territoire romain et, après avoir atteint Rome et menacé le Capitole [7], parviennent à se faire accorder un tribut par l’empereur. Ruga oblige aussi les Romains à rendre tous les soldats hunniques qu’ils avaient acquis au fil des ans. Son acte de bravoure, cependant, fut d’unir les Huns sous sa seule férule vers 432. Il apparaît comme un précurseur d’Attila.

Il entreprend des campagnes contre les Marcomans [8], les Ostrogoths et l’Empire romain d’Orient [9]. C’est d’ailleurs lors d’une offensive contre Théodose II en Thrace [10] qu’il est tué par la foudre en 434.

Ses neveux Bleda et Attila, fils de Moundzouk , lui succèdent et exercent conjointement le pouvoir sur les tribus hunniques.

Il est le premier roi des Huns à faire parler de lui dans des textes d’hommes d’Église et de combattants soumis, comme les Magyars [11] et les Arméniens [12] qui rejoignirent les rangs armés des Huns pour combattre leurs frères.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de John Drinkwater et Timothy Venning, Chronology of the Roman Empire, London/New York, Continuum International Publishing Group, 2011 (ISBN 978-1-4411-5478-1)

Notes

[1] Les Huns sont un ancien peuple nomade originaire de l’Asie centrale, dont la présence en Europe est attestée à partir du 4ème siècle et qui y établirent le vaste empire hunnique. L’origine des Huns est disputée. Les Huns ont joué un rôle important dans le cadre des grandes invasions qui contribuèrent à l’écroulement de l’Empire romain d’Occident. Sous le règne d’Attila, l’empire est unifié mais ne lui survit pas plus d’un an. Les descendants et successeurs des Huns occupent encore diverses parties de l’Europe de l’Est et d’Asie centrale entre les 4ème et 6ème siècles, et laissent encore quelques traces dans le Caucase jusqu’au début du 8ème siècle.

[2] L’arianisme est un courant de pensée théologique des débuts du christianisme, due à Arius, théologien alexandrin au début du 4ème siècle. La pensée de l’arianisme affirme que si Dieu est divin, son Fils, lui, est d’abord humain, mais un humain disposant d’une part de divinité. Le premier concile de Nicée, convoqué par Constantin en 325, rejeta l’arianisme. Il fut dès lors qualifié d’hérésie par les chrétiens trinitaires, mais les controverses sur la double nature, divine et humaine, du Christ (Dieu fait homme), se prolongèrent pendant plus d’un demi-siècle. Les empereurs succédant à Constantin revinrent à l’arianisme et c’est à cette foi que se convertirent la plupart des peuples germaniques qui rejoignirent l’empire en tant que peuples fédérés. Les wisigoths d’Hispanie restèrent ariens jusqu’à la fin du 6ème siècle et les Lombards jusqu’à la moitié du 7ème siècle.

[3] Les Goths faisaient partie des peuples germaniques. Selon leurs propres traditions, ils seraient originaires de la Scandinavie. Ils provenaient peut-être de l’île de Gotland. Mais ils pourraient également être issus du Götaland en Suède méridionale ou bien du Nord de la Pologne actuelle. Au début de notre ère, ils s’installèrent dans la région de l’estuaire de la Vistule. Dans la seconde partie du 2ème siècle, une partie des Goths migrèrent vers le sud-est en direction de la mer Noire. Dès le 3ème siècle les Goths étaient fixés dans la région de l’Ukraine moderne et de la Biélorussie où ils furent probablement rejoints par d’autres groupes qui ont été plus ou moins intégrés dans la tribu. Les Goths formaient un seul peuple jusqu’à la fin du 3ème siècle. Après un premier affrontement avec l’Empire romain dans le sud-est de l’Europe au début du siècle, ils se séparèrent en deux groupes : les Greuthunges à l’Est et les Tervinges à l’Ouest qui deviendront par la suite les Ostrogoths ou « Goths brillants », à l’Est, et les Wisigoths ou « Goths sages » à l’Ouest.

[4] Les Ostrogoths étaient une des deux fractions des Goths, peuple germanique

[5] Ravenne est une ville italienne de la province de Ravenne en Émilie-Romagne. Elle est considérée comme la capitale mondiale de la mosaïque. Ravenne fut une cité de première importance au tournant de l’Antiquité et du Moyen Âge. En 402, pendant le règne d’Honorius, elle fut, du fait de sa position stratégique plus favorable, élevée au rang de capitale de l’Empire romain d’Occident en lieu et place de Milan, trop exposée aux attaques terrestres des barbares. Son port de grande capacité, sur l’Adriatique, la mettait en communication aisée avec Constantinople, capitale de l’Empire romain d’Orient. La cité continua d’être le centre de l’Empire d’Occident jusqu’à la chute de celui-ci en 476. Elle devint alors la capitale du royaume d’Italie d’Odoacre, puis à partir de 493 celle du royaume des Ostrogoths, sous Théodoric le Grand, qui englobait l’Italie, la Rhétie, la Dalmatie et la Sicile. En 540, sous le règne de Justinien 1er, Ravenne fut conquise par le général de l’Empire d’orient Bélisaire ; elle fut ensuite reconquise par les Ostrogoths avant d’être à nouveau reprise par le général de l’Empire d’orient Narsès en 552. C’est pour contrer le danger né de l’invasion des Lombards en Italie à partir de 568, que Ravenne devint le siège de l’exarchat byzantin d’Italie, par décision de l’empereur Maurice. La concentration de tous les pouvoirs civils et militaires entre les mains de l’exarque, représentant personnel de l’empereur byzantin favorisa, à long terme, l’émancipation des territoires du nord de l’Italie vis-à-vis du pouvoir impérial. Ravenne fut prise en 752 par Aistolf, roi des Lombards. Deux ans après, Pépin le Bref, roi des Francs, la lui enleva et la donna au Saint-Siège.

[6] D’abord cantonnés en Sapaudia les Burgondes commencèrent par grignoter le territoire gaulois vers l’ouest. En 457, Gondioc et Chilpéric Ier saisirent une première occasion de pousser leurs frontières. A l’été 457 le Valais, la Tarentaise, les villes de Besançon, Chalon sur Saône, Langres, Autun, Grenoble ainsi que Lugdunum, la vieille capitale des Gaules, se livrèrent pacifiquement aux Burgondes. Egidius, le généralissime de Majorien en Gaule reprit aussitôt la capitale des Gaules mais il abandonna aux rois Burgondes leurs nouvelles terres. Lugdunum reviendra aux Burgondes vers 467 lorsque Chilpéric 1er s’en empara, comme il s’empara également à la même époque de la ville de Vienne. Il profita probablement des troubles qui secouèrent entre 469 et 475 un Empire d’Occident, alors à l’agonie, pour porter jusqu’à la Durance les limites de son royaume. Les villes de Viviers, Gap, Embrun, Die, Sisteron, Orange, Apt, Cavaillon, Avignon devinrent villes burgondes. L’empereur Népos reconnut leurs conquêtes. Dès ce moment le royaume burgonde eut, ou peu s’en faut, les limites qu’il conserva dès lors. Ce territoire ne comprenait pas moins de 25 diocèses ou anciennes cités romaines : Auxerre, Langres, Besançon, Chalon sur Saône, Autun, Lugdunum, Genève, Windisch, Octodurum actuellement Martigny, en Suisse, Vienne, Valence, Carpentras, Orange, Avignon, Cavaillon, Vaison, Gap, Embrun, Sisteron, Grenoble, Aoste, Die, Viviers, Saint-Paul-Trois-Châteaux, Apt. Mais les Burgondes gagnent ou perdent incessamment du terrain. Marseille et son port, Arles et la Provence gagnés vers 484, et perdus après la guerre contre les Francs, conquêtes éphémères, auront un moment fait partie de leur territoire. À son apogée, les contours du royaume burgonde touchaient, au nord, la ligne des Vosges et la Durance au midi ; d’orient en occident, ils s’étendaient de l’Aar à la Saône et la Haute-Loire. Ce fut le territoire soumis à cette royauté qui prit, une première fois, le nom de Burgondia dans une correspondance de Cassiodore et rédigée en 507 au nom de Théodoric le Grand.

[7] Le Capitole est l’une des sept collines de Rome. C’est le centre religieux de la ville avec le temple consacré à la triade Jupiter, Junon et Minerve. Par extension chaque cité romaine se doit d’avoir son Capitole.

[8] Les Marcomans sont un peuple germanique occidental, connu notamment grâce à l’historien romain Tacite qui les situe entre Naristes et Quades, dans l’actuelle Moravie. Au 2ème siècle de l’ère chrétienne, les Marcomans, établis sur le bas-Danube, font peser, avec les Quades, une menace constante sur le limes danubien, probablement sous la pression des Goths et des Gépides. En 166–167, les Marcomans sont alliés aux Lombards et tentent de franchir le Danube en Pannonie. Ils réalisent ensuite plusieurs incursions sur le territoire impérial, jusqu’au traité de paix de 180 : en 169, ils sont vaincus avec les Quades par l’Empereur Marc-Aurèle et soumis pendant un temps, mais se révoltent à nouveau. En 180, l’empereur Commode signe un traité de paix avec eux, selon lesquels ils doivent fournir céréales, armes et recrues pour les troupes auxiliaires de l’armée romaine.

[9] L’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient désigne l’État apparu vers le 4ème siècle dans la partie orientale de l’Empire romain, au moment où celui-ci se divise progressivement en deux. L’Empire byzantin se caractérise par sa longévité. Il puise ses origines dans la fondation même de Rome, et la datation de ses débuts change selon les critères choisis par chaque historien. La fondation de Constantinople, sa capitale, par Constantin 1er en 330, autant que la division d’un Empire romain de plus en plus difficile à gouverner et qui devient définitive en 395, sont parfois citées. Quoi qu’il en soit, plus dynamique qu’un monde romain occidental brisé par les invasions barbares, l’Empire d’Orient s’affirme progressivement comme une construction politique originale. Indubitablement romain, cet Empire est aussi chrétien et de langue principalement grecque. À la frontière entre l’Orient et l’Occident, mêlant des éléments provenant directement de l’Antiquité avec des aspects innovants dans un Moyen Âge parfois décrit comme grec, il devient le siège d’une culture originale qui déborde bien au-delà de ses frontières, lesquelles sont constamment assaillies par des peuples nouveaux. Tenant d’un universalisme romain, il parvient à s’étendre sous Justinien (empereur de 527 à 565), retrouvant une partie des antiques frontières impériales, avant de connaître une profonde rétractation. C’est à partir du 7ème siècle que de profonds bouleversements frappent l’Empire byzantin. Contraint de s’adapter à un monde nouveau dans lequel son autorité universelle est contestée, il rénove ses structures et parvient, au terme d’une crise iconoclaste, à connaître une nouvelle vague d’expansion qui atteint son apogée sous Basile II (qui règne de 976 à 1025). Les guerres civiles autant que l’apparition de nouvelles menaces forcent l’Empire à se transformer à nouveau sous l’impulsion des Comnènes avant d’être disloqué par la quatrième croisade lorsque les croisés s’emparent de Constantinople en 1204. S’il renaît en 1261, c’est sous une forme affaiblie qui ne peut résister aux envahisseurs ottomans et à la concurrence économique des républiques italiennes (Gênes et Venise). La chute de Constantinople en 1453 marque sa fin.

[10] La Thrace désigne une région de la péninsule balkanique partagée entre la Grèce, la Bulgarie et la Turquie ; elle doit son nom aux Thraces, la peuplade qui occupait la région dans l’Antiquité. Au 21ème siècle, la Thrace fait partie, à l’ouest, de la Grèce, Thrace occidentale, au nord, de la Bulgarie et, à l’est, de la Turquie, Thrace orientale.

[11] Les Magyars ou Hongrois sont à l’origine un groupe ethno-linguistique finno-ougrien originaire d’Asie centrale et dont les migrations successives, d’abord vers l’Oural, ensuite vers la mer Noire (pays d’Etelköz, l’actuelle Ukraine) ont finalement abouti à la création du « pays magyar » (Magyarország), c’est-à-dire la Hongrie. Des débats historiographiques récurrents évoquent l’existence de « Magyars orientaux » (keleti Magyarok) dans le Caucase et en Asie centrale. De nos jours, le qualificatif « magyar » est souvent utilisé comme un ethnonyme, pour désigner la catégorie ethnique dans son sens historique (avant la création de l’État hongrois) ou dans son sens socio-culturel, pour désigner les Magyars d’outre-frontières, à savoir les minorités de langue hongroise dans les pays frontaliers de la Hongrie. En hongrois, le qualificatif magyar est également utilisé dans un sens politique, pour désigner tout ce qui est relatif à la Hongrie comme État-nation moderne et par extension tous les citoyens hongrois, quelles que soient leurs origines socio-culturelles.

[12] L’histoire de l’Arménie et des Arméniens est constituée de périodes d’indépendance interrompue par les conquêtes d’autres peuples. Le premier État arménien est établi vers le début du 6ème siècle av. jc, sous suzeraineté perse. À son apogée sous l’Artaxiade Tigrane II, le royaume arménien s’étend du Caucase jusqu’à ce qui est maintenant la Turquie centrale, le Liban et l’Iran du nord-ouest. Le règne de Tigrane II le Grand est la seule période de l’histoire arménienne durant laquelle l’Arménie est perçue comme une rivale sérieuse par ses puissants voisins. Par la suite, l’Arménie fait brièvement partie de l’Empire romain. En 301, sous les Arsacides, l’Arménie devient la première nation à adopter le christianisme en tant que religion d’État, déclenchant ainsi une nouvelle ère dans l’histoire du peuple arménien. Pour affirmer l’identité nationale arménienne, Mesrop Machtots invente l’alphabet arménien en 405 ; cet alphabet est encore utilisé aujourd’hui. Dès lors, l’âge d’or de la culture arménienne commence ; plusieurs livres étrangers sont traduits en arménien, devenant donc plus accessibles. L’Arménie perd sa souveraineté à la suite de son rattachement aux empires byzantin et perse en 428.