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L’histoire pour le plaisir

Sun Jian

vendredi 7 janvier 2022, par ljallamion

Sun Jian (155/156-191/192)

Officier et général sous la dynastie Han

Descendant du légendaire Sun Tzu , Sun Jian était un guerrier dont la réputation était d’avoir des nerfs d’acier. Originaire du Jiangdong [1], il fut surnommé le Tigre enragé du Chaos ou le Tigre du Jiang Dong après avoir tué un de ces animaux à l’âge de 10 ans.

Sun Jian naquit dans le comté de Fuchun [2] dans la commanderie [3] de Wu, dans la province de Yang.

Selon le Wu Shu, son ascendance vieille de 600 ans remonterait à Sun Tzu ou Sun Wu, le légendaire général de l’État du Wu [4], concepteur de l’Art de la Guerre, durant la période des Printemps et Automnes [5].

Toujours selon lui, les descendants de Sun Tzu auraient vécu dans la région et ce même après la destruction de l’État en 473 av. jc.

Il devint par la suite commandant des forces du comté de Fuchun tout en conservant un poste civil. Instaurant l’ordre et faisant régner la sécurité dans ce petit comté, il fut remarqué par Zang Min, l’inspecteur impérial de la province de Yang qui le recommanda à la cour. Cette dernière le recommanda au poste d’assistant magistrat au comté de Yandu, dans la province de Guangling [6], ainsi que le titre de "Piété filiale et incorruptible" et "Talent plein d’avenir". Ce titre lui offrait des possibilités d’élévation sociale. Mais Sun Jian était connu de l’administration locale, et commanda des troupes pour celle-ci.

À 19 ans, il épousa Madame Wu, dont le nom est inconnu. Cette union fut difficile, car Madame Wu est issue d’une prestigieuse famille du Sud, venant de la ville de Wu, capitale de la commanderie du même nom. Orpheline, elle vécut avec son frère Wu Jing et d’autres de son clan. La demande de mariage de Sun Jian ne fut pas acceptée par le clan Wu, ce dernier prétextant un statut social trop peu élevé pour une telle considération. Entêté, Sun Jian revint à la charge et eut finalement gain de cause, le clan Wu, impressionné par le charisme du jeune homme et également par le fait que ce dernier avait acquis entretemps une certaine renommée. Madame Wu plaidait également en sa faveur. De cette union naquit une progéniture nombreuse, dont Sun Ce en 175 et Sun Quan en 182. Grâce à son poste, il fut itinérant, se déplaçant dans 3 comtés. Il se fixa à Xia Pi, où il n’acquit pas de promotion mais se fit reconnaître de la population. C’est seulement en 184 qu’il obtint cette promotion en devenant officier mineur du bureau impérial.

Durant la révolte des Turbans Jaunes [7], il acquit un prestige et une reconnaissance de la part du pouvoir impérial. Commencée en 184, cette révolte populaire aux considérations religieuses de très grande ampleur mobilisa les ressources militaires de l’Empire. En effet des rébellions éclatèrent dans toutes les plaines centrales, mais échoua à Luoyang [8], la capitale impériale. Trois armées furent envoyées pour écraser cette révolte commandée par les généraux Huangfu Song et Zhu Jun. Ce dernier originaire de Kuaiji, demanda l’aide de Sun Jian, et le recommanda au titre temporaire de "Commandant des Forces détachées".

Les batailles furent dures, notamment dans la région de Runan [9]. Mais vers mai 184, Huangfu Song et Zhu Jun combinèrent leurs forces, Sun Jian suivant ce dernier pour vaincre Bo Cai, un des chefs de la révolte et reprirent Runan, en juin 184. Sun Jian participa à ces batailles et selon Pei Songzhi, fut blessé dans une embuscade. Il mena l’attaque contre Wan, l’un des principaux sièges de la révolte, en étant selon sa biographie, le premier sur les remparts. La capture de cette ville fut un coup dur pour la révolte qui commença à s’essouffler, bien qu’elle continua.

En effet une nouvelle révolte éclata dans la province de Liang [10] en 185. Sun Jian fit partie de l’armée impériale menée par le vainqueur des Turbans Jaunes, Huangfu Song. Il servit sous le commandement de Zhang Wen et incita ce dernier à punir Dong Zhuo pour insubordination, ce dernier peu enclin à exécuter les ordres de son supérieur hiérarchique, mais d’un rang supérieur, et meilleur général de Zhang Wen. Pour ces services, il obtint la gouvernance de Changsha [11] en devenant grand administrateur de cette commanderie en 187.

Affecté au plus haut poste hors de la capitale impériale et à un territoire clef de l’Empire, il mena à bien sa nouvelle assignation. La commanderie de Changsha, avec sa capitale Linxiang [12] contrôle le bassin moyen du fleuve Xiang, à proximité des commanderies de LingLing [13] et de Guiyang [14], ainsi que les principales voies de communication vers le centre et le nord de la Chine.

Peuplée d’un million d’habitants, sa population et sa situation géographique en font une des commanderies les plus importantes de l’Empire Han [15]. C’est également l’une des plus troublées. Un bandit, Ou Xing, s’est proclamé général et attaque les villes de la commanderie.

En 187, Sun Jian régla le problème rapidement et intervient hors de sa juridiction, dans les commanderies voisines de Lingling et Guiyang à l’appel des administrateurs, incapables de régler les problèmes de banditisme dans leur région. De facto, il administre bientôt tout le sud de la province de Jing. Pour ses accomplissements, il reçut le titre de Marquis de Wucheng [16]. En 189, l’Empereur Ling mourut, et son très jeune fils lui succéda avec une régence exercée par sa mère, l’Impératrice Douairière He et son frère He Jin . He Jin voulut s’attaquer aux Eunuques [17], et fut assassiné.

Dong Zhuo, arriva à Luoyang avec son armée sous prétexte de restaurer l’ordre et dès lors contrôla l’Empereur. Mais rapidement il fit face à une opposition de seigneurs qui avaient fui la capitale et s’étaient installés localement dans les provinces comme Yuan Shao ou Yuan Shu, du clan Yuan ou encore Cao Cao . Une coalition sous l’égide de Yuan Shao fut mise en place et Sun Jian y répondit.

À partir de 189, Sun Jian se mobilisa contre Dong Zhuo et rallia la coalition menée par Yuan Shao. Fort de son prestige, il rallia des hommes du Jiangdong [18] ainsi que ses fidèles Hang Dang, Huang Gai, Cheng Pu qui le suivent depuis la révolte des Turbans Jaunes. Il fut également rejoint par son neveu Sun Ben, fils de Sun Qiang, son frère jumeau. Il convergea vers Luyang où il rencontra Yuan Shu, auquel il se mit au service.

Ce dernier lui conféra le titre de "Général qui écrase les lâches" ainsi que le titre d’Inspecteur de la province de Yu. Il se mit dès lors en marche et avança vers le nord en direction de Luoyang. Défait en 190 par Xu Rong, il se remit rapidement et battit Hu Zhen . Sa pugnacité et son action commencèrent à inquiéter Yuan Shao et Yuan Shu de la possible victoire de Sun Jian sur Dong Zhuo, et s’il parvenait à prendre Luoyang et l’empereur, il pourrait être plus difficile à "abattre". Ce dernier lui coupa même son approvisionnement en ravitaillement mais l’a rétablit.

Sun Jian fut le plus actif et le plus loyaliste de tous les coalisés, n’ayant plus de domaine. Yuan Shao et les autres profitèrent de cette situation de déliquescence du pouvoir impérial pour se tailler des domaines en annexant purement et simplement des provinces. Son avance fit peur à Dong Zhuo qui fit évacuer la capitale pour Chang An [19]. Arrivé en premier dans les ruines de Luoyang, en 190, il y découvrit le sceau impérial des Han, que, selon le Zhengyi, il transféra à Yuan Shu. Il regagna le Sud, peu après.

Début 191, la coalition contre Dong Zhuo commençait à se fracturer. Yuan Shao et Yuan Shu entrèrent en conflit indirectement, puis directement. Très vite en danger, Yuan Shao s’allia avec Liu Biao ,

Administrateur de la province de Jing. Devant cette menace, d’être pris en tenaille Yuan Shu, contrôlant Nanyang [20] et voulant s’étendre dans cette province, envoya Sun Jian combattre Liu Biao à Xiangyang [21].

Liu Biao envoya son armée commandée par Huang Zu combattre Sun Jian. Ce dernier l’écrasa mais ne put le capturer. Alors que ses troupes assiégeaient Xiangyang, Huang Zu le piégea dans une embuscade, dans laquelle il fut gravement blessé. Sun Jian mourut de ses blessures dans les jours suivants.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Rafe de Crespigny, Generals of The South, Cambrera, The Australian National University, 1990

Notes

[1] Le Jiangdong, est le nom d’une région située au sud-est de la Chine. Plus précisément situé au sud-est du Yangzi, au sud de l’actuelle province du Jiangsu et au nord de celle du Zhejiang. Historiquement, le terme Jiangdong était une désignation alternative pour le royaume de Wu durant l’époque des Trois Royaumes. Les deux termes font référence au sud de la Chine, mais Jiangdong souligne l’aspect géographique alors que Wu met plutôt l’accent sur la tradition pré dynastie Han de la région. Le stratège Sun Tzu y était né, ainsi que Sun Jian et plusieurs membres de la famille Sun. Il fut le point de départ du royaume de Wu. Sun Ce en fit la conquête, battant notamment les seigneurs de guerre Liu Yao, Yan Baihu et Wang Lang, qui occupaient le territoire.

[2] actuel Fuyang

[3] Une commanderie, ou préfecture suivant les traductions, est une ancienne division administrative chinoise utilisée depuis la période de la dynastie Zhou (vers 1046 av. jc-256 av. jc) jusqu’au début de la dynastie Tang (618-907).

[4] Le royaume de Wu, connu également sous le nom Sun Wu, est l’un des royaumes de la période des Trois Royaumes en lutte pour le contrôle de la Chine après la chute de la dynastie Han. Il était situé au sud du Yangzi Jiang dans la région des actuelles villes de Nankin, Shanghai et Suzhou, à l’emplacement de l’ancien État de Wu de la Période des Printemps et Automnes. La capitale principale du royaume était Jianye, près de l’actuelle ville de Nankin (Nanjing), mais parfois la capitale fut déplacée à Wuchang, actuelle Ezhou, Hubei. Plus puissant que le royaume du Shu mais plus faible que celui du Wei, le royaume de Wu fut celui qui vécut le plus longtemps des Trois Royaumes de Chine. Il exista pendant 51 ans, de sa fondation en 229 à sa conquête en 280 par le premier empereur de la dynastie Jin, Sima Yan.

[5] La période des Printemps et Automnes ou période Chunqiu désigne, dans l’histoire de la Chine, la première partie de la dynastie des Zhou orientaux (771-256 av. jc), c’est-à-dire une période allant d’environ 771 à 481/453 av. jc. Elle tire son nom des Annales des Printemps et Automnes, une chronique des événements survenus entre 722 et 481 av. jc issue des scribes de l’État de Lu mais concernant aussi les autres États.

[6] Le district de Guangling est une subdivision administrative de la province du Jiangsu en Chine. Il est placé sous la juridiction de la ville préfecture de Yangzhou.

[7] La rébellion des Turbans jaunes est une révolte paysanne majeure en Chine, à la fin du 2ème siècle. Le soulèvement &clate en 184 sous le règne de l’empereur Han Lingdi lorsque Zhang Jiao, fondateur de la secte taoïste Taiping (« grande paix »), soulève une partie de la population chinoise contre la dynastie Han, jugée décadente et corrompue. Assiégés, les Han lancent un appel à l’aide et ordonnent une campagne contre les Turbans jaunes qui se comptent par centaines de milliers. De puissants et célèbres généraux, tels que Yuan Shao, Cao Cao, Sun Jian et Ma Teng répondent à cet appel. De son côté, le général Lu Zhi recrute des volontaires. Parmi eux, Liu Bei, Guan Yu et Zhang Fei qui, selon l’Histoire des Trois royaumes, se jurent fraternité et s’en vont combattre les Turbans jaunes. Ils viennent en aide au général Dong Zhuo. Les frères de Zhang Jiao, Bao et Liang, sont battus par Cao Cao et Sun Jian. Bien que la rébellion principale ait été défaite en 185, des poches de résistances restent invaincues et des soulèvements de plus petites ampleurs émergent sporadiquement. Ce n’est qu’en 205, après 21 années de révoltes, que les Turbans jaunes sont définitivement vaincus. La rébellion, qui tire son nom de la couleur dans laquelle les rebelles se drapaient, a été particulièrement importante dans l’histoire de la Chine comme dans celle du taoïsme, à cause des collusions nombreuses entre rebelles et sociétés taoïstes secrètes.

[8] Luoyang, ou Loyang est une ville-préfecture de la province du Henan en Chine. On y parle le dialecte de Luoyang du mandarin zhongyuan. Située sur le Fleuve Jaune, c’est l’une des quatre capitales historiques de la Chine.

[9] Le xian de Runan est un district administratif de la province du Henan en Chine. Il est placé sous la juridiction de la ville préfecture de Zhumadian.

[10] La rébellion de la Province de Liang (184/189) commence comme une insurrection du peuple Qiang contre la dynastie Han dans la province occidentale de Liang (qui correspond plus ou moins aujourd’hui à Wuwei, dans la province du Gansu) dans la Chine du 2ème siècle. Mais assez vite, les Yuezhi et des rebelles pro-Han se joignent aux combats pour le contrôle de la province aux dépens de l’autorité centrale. Cette rébellion, qui a suivi de près celle des Turbans jaunes, fait partie d’une série de troubles qui ont conduit au déclin et à la chute de la dynastie Han

[11] Changsha est la capitale de la province chinoise du Hunan. Elle est située à l’est du Hunan, au bord de la rivière Xiang dont la longue île sablonneuse lui a donné son nom.

[12] Linxiang est une ville de la province du Hunan en Chine. C’est une ville district placée sous la juridiction de la ville préfecture de Yueyang.

[13] Le district de Lingling est une subdivision administrative de la province du Hunan en Chine. Il est plac& sous la juridiction de la ville préfecture de Yongzhou.

[14] Guiyang est la capitale de la province du Guizhou en Chine. On y parle le dialecte de Guiyang du mandarin du sud-ouest.

[15] La dynastie Han régna sur la Chine de 206 av. jc à 220 apr. jc. Deuxième des dynasties impériales, elle succéda à la dynastie Qin (221/206 av. jc) et fut suivie de la période des Trois Royaumes (220/265). Fondée par Liu Bang, chef de guerre d’origine paysanne révolté contre la dynastie Qin, elle compta 28 empereurs.

[16] Le district de Wucheng est une subdivision administrative de la province du Zhejiang en Chine. Il est placé sous la juridiction de la ville préfecture de Jinhua.

[17] Un eunuque est un homme castré. La castration se limite généralement à l’ablation des testicules mais il arrive qu’elle concerne également le pénis, connue alors sous le nom de pénectomie. Dans la Chine ancienne, la castration était à la fois une punition traditionnelle (jusqu’à la dynastie Sui) et un moyen d’obtenir un emploi dans le service impérial. À la fin de la dynastie Ming, il y avait 70 000 eunuques dans la Cité interdite. La valeur d’un tel poste était importante car elle pouvait permettre d’obtenir un pouvoir immense qui dépassait parfois celui du premier ministre. Cependant, la castration par elle-même fut finalement interdite. Le nombre d’eunuques n’était plus estimé qu’à 470 en 1912, lorsque la fonction fut abolie. La justification de cette obligation pour les fonctionnaires de haut rang était la suivante : puisqu’ils ne pouvaient procréer, ils ne seraient pas tentés de prendre le pouvoir pour fonder une dynastie. À certaines périodes, un système similaire a existé au Viêt Nam, en Inde, en Corée et dans d’autres contrées du monde.

[18] Le Jiangdong, est le nom d’une région située au sud-est de la Chine. Plus précisément situé au sud-est du Yangzi, au sud de l’actuelle province du Jiangsu et au nord de celle du Zhejiang. Historiquement, le terme Jiangdong était une désignation alternative pour le royaume de Wu durant l’époque des Trois Royaumes. Les deux termes font référence au sud de la Chine, mais Jiangdong souligne l’aspect géographique alors que Wu met plutôt l’accent sur la tradition pré dynastie Han de la région. Le stratège Sun Tzu y était né, ainsi que Sun Jian et plusieurs membres de la famille Sun. Il fut le point de départ du royaume de Wu. Sun Ce en fit la conquête, battant notamment les seigneurs de guerre Liu Yao, Yan Baihu et Wang Lang, qui occupaient le territoire.

[19] Chang’an aujourd’hui Xi’an dans la province du Shaanxi, fut la capitale de plus de dix dynasties durant toute l’Histoire de la Chine. Son nom signifie "paix perpétuelle" en chinois classique, car cette capitale fut utilisée à plusieurs reprises par des nouveaux dirigeants chinois venant de fonder une dynastie.

[20] Nanyang est une ville préfecture du sud-ouest de la province du Henan en Chine. On y parle le dialecte de Nanyang du mandarin zhongyuan.

[21] Xiangyang est une ville du nord-ouest de la province du Hubei en Chine. Sa superficie est de 19 700 km². La ville port le nom de Xiangfan jusqu’en 2010. Xiangyang est la réunion des deux villes de Xiang Yang et Fan Cheng, situées de part et d’autre de la rivière Han, affluent du Yangzi.