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Ramire 1er d’Oviedo

vendredi 25 juin 2021, par ljallamion

Ramire 1er d’Oviedo (vers 790-850)

Roi des Asturies de 842 à 850

Fils de Bermude 1er, roi des Asturies [1], roi de Léon [2] de 788 à 791, mais aussi diacre [3], et de Ozenda ou Ursinda, qui serait selon certains auteurs une fille de Flavio Ataúlfo, magnat galicien [4], lequel serait lui-même petit-fils de Wittiza, roi wisigoth [5] d’Espagne régnant de 698/702 à 709/710.

Cousin et successeur d’Alphonse II le Chaste, qui lui confie le gouvernement dès 835. Après une rébellion, il règne en tant que roi des Asturies, de 842 à 850. Ramire vit dans une période de guerre continuelle contre les musulmans. Il bat les Maures [6] à la bataille de Clavijo [7], victoire qui vaut aux Wisigoths des Asturies Calahorra [8] et ses environs.

Pour prévenir les troubles qui presque toujours accompagnent l’élection d’un souverain, les rois des Asturies prennent la précaution de nommer leur successeur, et de faire approuver leur choix par les grands. C’est ainsi qu’Alphonse avait assuré la couronne à Ramire1er, en vain.

Ramire Ier, désigné successeur d’Alphonse II le Chaste, parti se marier, est absent lorsque le roi meurt en 842. Il est dans la famille de sa seconde femme, Paterna de Castille , dans le comté de Bardulia. Népotien, le principal officier de la cour, profite de l’absence de Ramire, et usurpe la couronne.

C’est la première des rébellions fomentées par des groupes montants de l’aristocratie courtisane et par des grands propriétaires, qui sur la base du développement économique de la région, tentent de supplanter la famille régnante des descendants de Pélage le Conquérant.

Cette importante rébellion de Népotien fait partie de ce processus de transformation économique, politique, sociale et culturelle du royaume asturien qui aura lieu entre le 8ème siècle et le 9ème siècle. Le soulèvement de Népotien trouve un soutien dans quelques régions asturiennes et chez les Basques. Des Galiciens s’unissent à la cause de Ramire 1er. Le roi, avec une rare vigueur de décision, rassemble près de Lugo [9] une forte armée, et entre dans les Asturies, où il met tout à feu et à sang.

Népotien marche au-devant de lui. Les deux armées se rencontrent près de la Narcea, à l’ouest d’Oviedo [10]. Mais à l’approche de Ramire, au pont de Cornellana, Népotien est abandonné par ses troupes, et prend la fuite. Il est arrêté et conduit à Ramire, qui le relègue dans un monastère, après lui avoir fait arracher les yeux. Ramire 1er est élu roi, après cette guerre civile, par les “alto omes”.

Ramire emploie la tactique dont Alphonse s’était déjà servi plusieurs fois avec succès. Il profite pour s’agrandir des divisions qui règnent parmi les Maures ; souvent même il favorise les rebelles par des secours d’armes, de vivres et d’argent. Il construit à Logroño [11] l’église Santiago et crée le premier ordre de chevalerie.

En 844, une flotte normande apparaît sur la côte de Gijón [12]. Les guerriers qui débarquent ne sont pas stoppés et pénètrent jusqu’au lieu que les chroniques appellent le Phare de Brigantio* ( [13]). Au bruit des excès commis par ces ennemis nouveaux, Ramire rassemble ses gens, marche contre les pirates, en tue un grand nombre et brûle des bateaux. Il les force à abandonner leur butin et à fuir sur les bateaux restants, qui seront ultérieurement dispersés par la tempête. Selon d’autres chroniques, les Normands poursuivent leurs incursions vers Al Andalus [14].

En 844, Ramire, subit une sévère défaite à Albelda, face à l’armée de Abd al-Rahman II.

Selon la légende, s’étant retiré sur la proche colline de Clavijo pour passer la nuit, saint Jacques lui apparaît en songe, l’encourage à reprendre les armes le lendemain et l’assure de sa protection. Au cours de ce nouveau combat, il mène à la victoire, et libère du tribut des cent vierges que l’émir percevait chaque année depuis le règne de Mauregat, 7ème roi des Asturies.

Le 25 mai 844, en signe de gratitude, le roi Ramire institua le Voto de Santiago, un tribut dû à la cathédrale de Compostelle [15], renouvelable chaque année, sur les céréales, par les agriculteurs du nord de l’Espagne. Il ne sera aboli qu’en 1812 par les Cortès de Cadix [16].

L’an 845, les Maures prennent, pillent et brûlent la ville de León [17].

En 846, Ramire, voulant reconquérir les territoires détenus par les musulmans fait une irruption dans la Vieille-Castille [18]. Abd al-Rahman II, leur roi, se met à la tête de ses troupes, et rencontre l’ennemi dans la plaine d’Alvéda, une place forte. Le combat est sanglant. La nuit seule sépare les combattants. Ramire voyant son armée considérablement diminuée, profite des ténèbres pour se retirer sur un coteau voisin. Cette retraite fait croire aux Sarrasins [19] qu’ils sont vainqueurs. Ils attendent le jour en célébrant leur triomphe, lorsque tout à coup les Chrétiens, animés par le désespoir aux premiers rayons de lumière, les pressent, les accablent et les mettent en fuite à leur tour. La prise d’Alvéda et de Calahorra est le fruit de cette victoire

D’autres révoltes viennent encore troubler ce règne agité. Elles prouvent que la royauté des Asturies vaut déjà la peine d’être convoitée. Un grand du palais Aldrete ou Aldroïtus, ayant conspiré contre son souverain, a aussi les yeux crevés, aux termes de la loi gothique. En 848, il découvre une conjuration formée contre lui, et punit de mort Piniola, qui en était le chef, et ses 7 fils.

Ramire 1er meurt âgé, d’une fièvre aiguë, le 1er février 850 dans son palais de Naranco [20] édifié sur la colline du même nom, aujourd’hui église, qui domine la ville d’Oviedo, après avoir régné l’espace de 7 ans. Il est inhumé au panthéon des rois des Asturies, à Oviedo, à côté de sa femme, Paterna de Castille, morte en 848

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Adeline Rucquoi Histoire médiévale de la Péninsule ibérique Point Histoire H 180 éditions du Seuil Paris 1993 (ISBN 2020129353).

Notes

[1] Le royaume des Asturies fut la première entité politique chrétienne établie sur la Péninsule Ibérique après la chute du Royaume wisigoth (qui suivit la mort du Roi Rodrigue à la Bataille de Guadalete) et la Conquête musulmane de l’Hispanie. Le royaume perdura de 718 à 925, lorsque Fruela II accéda au trône du Royaume de León.

[2] Le royaume de León, une des 15 grandes anciennes divisions de l’Espagne et du Portugal, fut un des royaumes médiévaux de la Péninsule Ibérique, successeur du royaume des Asturies, qui eut un rôle dans la Reconquista et la formation des royaumes chrétiens successifs de l’occident péninsulaire.

[3] Fonction créée par les Apôtres pour se décharger des soucis matériels. Ainsi, le diacre est chargé de distribuer les aumônes à leur place. Peu à peu, il assiste le prêtre dans des tâches spirituelles telles que la distribution de l’eucharistie et le baptême. Saint Etienne a été le premier diacre.

[4] La Galice est une communauté autonome avec un statut de nation historique située à l’extrémité nord-ouest de l’Espagne. Elle est entourée par la principauté des Asturies, la Castille-et-León, le Portugal, l’océan Atlantique et la mer Cantabrique. Elle recouvre une superficie de 29 574 km². La Galice se compose de quatre provinces : La Corogne, Lugo, Ourense et Pontevedra. Saint-Jacques-de-Compostelle, cinquième ville galicienne par sa population et située dans la Province de La Corogne, est la capitale politique de la communauté autonome, sans être celle de la province, qu’est La Corogne, ancienne capitale politique de la Galice et ville la plus importante de la région.

[5] Les Wisigoths entrent en Gaule, ruinée par les invasions des années 407/409. En 416 les Wisigoths et leur roi Wallia continuent leur invasion en Espagne, où ils sont envoyés à la solde de Rome pour combattre d’autres Barbares. Lorsque la paix avec les Romains fut conclue par le fœdus de 418, Honorius accorda aux Wisigoths des terres dans la province Aquitaine seconde. La sédentarisation en Aquitaine a lieu après la mort de Wallia. Les Wisigoths pénétrèrent en Espagne dès 414, comme fédérés de l’Empire romain. Le royaume des Wisigoths eut d’abord Toulouse comme capitale. Lorsque Clovis battit les Wisigoths à la bataille de Vouillé en 507, ces derniers ne conservent que la Septimanie, correspondant au Languedoc et une partie de la Provence avec l’aide des Ostrogoths. Les Wisigoths installèrent alors leur capitale à Tolède pour toute la suite. En 575 ils conquièrent le royaume des Suèves situé dans le nord du Portugal et la Galice. En 711 le royaume est conquis par les musulmans.

[6] Les Maures, ou anciennement Mores, sont originellement des populations berbères peuplant le Maghreb. Ce terme a changé de signification durant plusieurs périodes de l’histoire médiévale et contemporaine. À partir des conquêtes arabo-musulmanes du 7ème siècle, l’Empire arabe omeyyade, à l’aide du général berbère Tariq Ibn Zyad, conquiert l’Espagne, sous le nom d’Al Andalus. C’est le début de l’Espagne musulmane. À partir de cette époque, le terme « maure » va devenir un synonyme de « musulman », plus particulièrement de n’importe quel musulman vivant en Andalousie, qu’il soit d’origine berbère, arabe ou ibérique. Une population qui s’installera par la suite essentiellement au Maroc après la reconquête de l’Andalousie par l’armée espagnole.

[7] La bataille de Clavijo est une bataille légendaire qui opposa, le 23 mai 844, les troupes du roi Ramire 1er des Asturies à l’armée maure d’Abd al-Rahman II. Une grande partie du récit de la bataille se rapporte à l’hagiographie de saint Jacques.

[8] Calahorra est une commune de la communauté autonome de La Rioja, dans le nord de l’Espagne appartenant à la région de la Rioja Baja.

[9] Lugo est une ville du nord-ouest de l’Espagne, capitale de la province de Lugo, dans la communauté autonome de Galice. Elle est située à une centaine de kilomètres de la « Costa Verde » sur le golfe de Gascogne. La ville est connue pour les remparts qui entourent la ville, vestige bien conservé de la civilisation romaine datant du 3ème siècle. Lors du déclin de l’Empire romain, les Suèves, un peuple germanique qui avait envahi l’Hispanie en 409, s’emparèrent de Lugo et de tout le nord-ouest de la péninsule Ibérique, et fondèrent dans la région un royaume avec Braga pour capitale. Ce royaume sera annexé en 585 par les Wisigoths. Lugo fit alors partie du royaume wisigoth d’Espagne, jusqu’à la conquête musulmane du début du 8ème siècle. Occupée par les Arabes en 714, la ville sera reconquise par le roi Alphonse 1er des Asturies en 741.

[10] Oviedo est une ville du nord de l’Espagne fondée au 8ème siècle, capitale de la communauté autonome et de la province des Asturies (Principauté des Asturies).

[11] Logroño ou Logrogne est une ville du nord de l’Espagne, sur l’Èbre. Elle est la capitale de La Rioja, communauté autonome espagnole. Le Camino francés du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle passe par Logroño. C’était la « Vareia » des Romains, citée par d’anciens géographes comme une des haltes dans la voie romaine qui, de l’Italie rejoignait la Galice. La ville de Logroño conserve encore de nombreuses ruines, vestiges de cette époque.

[12] Gijon était une véritable forteresse naturelle et situé sur une péninsule, la seule entrée de la ville était dans un couloir de sable effacé à marée haute, qu’une armée assiégeant avait très peu de points pour accéder à la ville

[13] La Corogne

[14] Al-Andalus est le terme qui désigne l’ensemble des territoires de la péninsule Ibérique et de la Septimanie qui furent sous domination musulmane de 711 (premier débarquement) à 1492 (chute de Grenade). L’Andalousie actuelle, qui en tire son nom, n’en constitua longtemps qu’une petite partie. La conquête et la domination du pays par les Maures furent aussi rapides qu’imprévues et correspondirent à l’essor du monde musulman. Al-Andalus devint alors un foyer de haute culture au sein de l’Europe médiévale, attirant un grand nombre de savants et ouvrant ainsi une période de riche épanouissement culturel

[15] La cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle est une cathédrale située dans le centre historique de la ville de Saint-Jacques-de-Compostelle (Galice), but de l’un des plus grands pèlerinages de l’Europe médiévale

[16] Cadix est la capitale de la province de Cadix appartenant à la Communauté autonome d’Andalousie, en Espagne, dans le sud-ouest extrême de l’Europe continentale. Elle est avec Jerez de la Frontera l’une des deux grandes villes de la baie de Cadix. Cadix se situe à environ 30 kilomètres au sud de l’embouchure du Guadalquivir.

[17] León est une ville espagnole de la comarque de Tierra de León. C’est la capitale de la province de León, dans la communauté autonome de Castille-et-León. Le Camino francés (« chemin français ») du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle passe par cette ville. Le Camino real (« chemin royal ») y aboutit également. Elle fut conquise par les musulmans en 712. Désertée à la suite de l’invasion musulmane en 717, la ville garda néanmoins le nom de Legionis, qui donna León. Vers 846, un groupe de mozárabes (chrétiens alors sous domination musulmane) tenta de reconquérir la ville, mais une attaque musulmane mit fin à cette initiative. En 856, sous le règne d’Ordoño 1er d’Oviedo, une tentative de reconquête eut lieu, avec succès cette fois, et, plus tard, le roi Ordoño II en fit la capitale du royaume asturléonais en 914. Au 10ème siècle, sous le règne d’Alphonse III le Grand, avec l’expansion du territoire, le roi asturien et ses descendants bâtirent les murailles sur les ruines de fortifications romaines. León devint un royaume chrétien indépendant vers 910, lorsque les Asturies furent partagées entre les trois fils d’Alphonse III, après l’abdication de ce dernier.

[18] La Vieille-Castille est le nom d’une région historique espagnole située dans le Nord du royaume de Castille, au nord du Système central. Par définition, elle serait constituée des provinces de Santander (la Cantabrie depuis 1982), Logroño (La Rioja depuis 1980), de Burgos, de Palencia, Valladolid, Soria, Ségovie et Ávila. Ces provinces sont répertoriées comme appartenant à la région de la Vieille Castille dans la division territoriale de l’Espagne de 1833 (formant les provinces), bien que les régions définies dans cette division n’ont aucune fonction juridictionnelle ou administrative ; en effet, il n’existait aucun niveau administratif supérieur à celui de la province.

[19] Sarrasins ou Sarrazins est l’un des noms donnés durant l’époque médiévale en Europe aux peuples de confession musulmane. On les appelle aussi Arabes, Ismaélites ou Agaréniens. D’autres termes sont employés également comme Maures, qui renvoient aux Berbères de l’Afrique du Nord après la conquête musulmane. Le terme de Sarrasin se cristallise finalement sur l’opposition avec l’ennemi dans le contexte des Croisades menées par l’Occident chrétien en Terre sainte.

[20] Le palais a été consacré le 23 juin 848, pendant le règne de Ramire 1er comme résidence palatiale, il était proche d’une forêt permettant la chasse. Le palais fut converti, après le transfert de la capitale du royaume à León, en 913, en une église, dédiée à Santa Maria del Naranco.