Chevau-légers lanciers
1er régiment :
Lors de son entrée à Varsovie [1], en décembre 1806, Napoléon fut escorté par une garde d’honneur composée de nobles polonais dont la superbe allure le séduisit. Aussi, dès le 2 mars 1807, l’Empereur ordonna-t-il la formation d’un poulk [2] de 4 escadrons destinés à faire partie de sa Garde.
Tout Polonais, qu’il fût paysan libre, noble ou bourgeois, pouvait s’y engager. L’effectif total du régiment se montait à 968 hommes, état-major compris, qui reçurent le nom de chevau-légers polonais.
Arrivés en France, ils prirent leurs quartiers à Chantilly. Après la campagne de 1809 et l’adoption de la lance, le régiment prit le titre de chevau-légers lanciers polonais, communément celui de lanciers polonais.
Le 11 mars 1812, un 5ème escadron fut créé. Le 8 octobre de la même année, le régiment fut porté à 1.500 hommes montés, sans augmentation de l’effectif des cadres.
Les brillants exploits des lanciers polonais sont innombrables, notamment le combat de Somosierra [3] ou ils délogèrent, avec un seul escadron, 15.000 Espagnols bien retranchés et munis de canons. Semant leurs morts par paquets, tout au long d’une pénible escalade, ils reviendront à 15 seulement, mais victorieux.
A Wagram [4] en 1809, ils s’étaient improvisés lanciers en arrachant aux uhlans autrichiens [5] leurs lances pour mieux les pourchasser ensuite.
Après la défaite de 1814, 120 lanciers polonais accompagnèrent Napoléon à l’île d’Elbe [6]. Pendant les Cent-Jours [7], les rescapés restés en France formèrent avec ceux de l’île d’Elbe un escadron qui conserva la dénomination de lanciers polonais et combattit vaillamment à Ligny [8]. Les lanciers polonais firent toujours partie de la Vielle Garde [9].
2e régiment :
Le 2e régiment, créé le 13 septembre 1810 et célèbre sous le nom de lanciers rouges [10], il était composé des hussards de la Garde hollandaise, éléments des troupes du roi Louis incorporées à celle de la France.
Au 10 janvier 1813, le régiment était fort de 8 escadrons, chacun de 250 hommes. Le 23 février suivant, l’escadron des dragons de la Garde municipale de Paris y fut intégré, portant l’effectif à 2.500 hommes répartis en 10 escadrons. Les escadrons 1, 2, 3 et 4, constitués de Hollandais, firent partie de la Moyenne Garde ; les suivants, composés de Français, appartinrent à la Jeune Garde.
Pendant les Cent-Jours, le régiment fut organisé dans le cadre de la Vieille Garde, sous le nom de régiment de chevau-légers lanciers de la Garde impériale. Il comprenait l’escadron de lanciers polonais.
Les lanciers rouges d’origine française étaient généralement originaires d’Alsace ou de Lorraine. Ils rivalisèrent de bravoure avec leurs aînés les Polonais. Ils se distinguèrent pendant la campagne de Russie [11] et firent beaucoup de mal à la fameuse Garde anglaise sur le champ de bataille de Waterloo.
3e régiment :
D’une existence éphémère et formé en Lituanie [12] le 12 septembre 1812. Il fut détruit presque complètement à Slonim [13] et son chef, le général Konapka , héros du 1er régiment pendant la guerre d’Espagne [14], fut blessé et fait prisonnier.
Les Dragons
Par décret impérial daté du palais de Saint-Cloud [15], le 15 avril 1806, un régiment de dragons fut organisé sur le modèle des grenadiers à cheval.
Le recrutement se faisait dans les différents régiments de dragons de la ligne, parmi les soldats de belle prestance, totalisant 10 ans de service et mesurant 5 pieds 4 pouces [16].
C’est lors de sa première présentation au cours d’une revue sur la place du Carrousel [17] que l’Impératrice Joséphine décida d’être la marraine de ce nouveau corps, qui s’appela désormais fièrement dragons de l’Impératrice.
En marche, un escadron comptait 200 dragons plus 50 vélites*, incorporés pour l’occasion de façon que, si le régiment réunissait ses 44 escadrons, il alignât 1.000 hommes dont 800 anciens et 200 bleus.
Transformé pour le temps de la première Restauration en Corps royal des dragons de France, le régiment fut rétabli par l’Empereur à son retour d’exil dans la nouvelle organisation de la Garde, le 8 avril 1815.
Après la capitulation de Paris, le régiment se retira derrière la Loire et se dispersa. Tout était fini et pourtant, pendant de longues années et jusqu’à ce que le dernier dragon de l’Impératrice eût rendu le dernier soupir, le château de la Malmaison [18] fut le lieu d’un pèlerinage annuel qui réunissait, le jour anniversaire de la mort de Joséphine, les survivants des fringants cavaliers dont elle avait été la marraine.
les Eclaireurs
Trois régiments d’éclaireurs à cheval furent créés dans la Garde le 9 décembre 1813. Chacun se divisait en 4 escadrons de 250 hommes. On recruta le premier et le deuxième régiment au moyen de conscrits et de cavaliers de la ligne, le troisième parmi les Polonais.
Ces régiments étaient attachés respectivement aux grenadiers à cheval, aux dragons et aux lanciers polonais. Les deux premiers étaient composés à parts égales de Vieille et de Jeune Garde.
Pleins de fougue et de courage, ces soldats ne jouèrent jamais le rôle de véritables éclaireurs ; en 1814, les deux premiers régiments furent incorporés dans la ligne et le troisième renvoyé en Pologne.
Comme armement, les éclaireurs avaient pour une moitié la lance à fanion cramoisi et blanc, pour l’autre moitié la carabine. Tous avaient deux pistolets et un sabre à fourreau en fer avec garde et bracelets en cuivre.
Notes
[1] Varsovie est depuis 1596 la capitale de la Pologne. Elle est située sur la Vistule, à environ 320 km de la mer Baltique et des Carpates. La ville est citée à partir du 14ème siècle sous les noms de Warseuiensis (1321) et Varschewia (1342), puis Warschouia (1482), pour devenir plus tard Warszowa et enfin Warszawa, le nom polonais actuel de Varsovie. La couronne polonaise y fut transférée en 1596, quand le roi Sigismond Vasa déplaça la cour de Cracovie à Varsovie. Dans les années qui suivirent, la ville s’étendit sur les terres de l’actuelle banlieue, sous forme de vastes domaines privés indépendants, possédés par la haute noblesse et administrés selon leurs propres lois. Entre 1655 et 1658, la ville fut assiégée trois fois et trois fois elle fut prise et pillée par les troupes suédoises, brandebourgeoises et transylvaniennes
[2] corps de cavalerie polonaise
[3] La bataille de Somosierra a lieu le 30 novembre 1808 durant la guerre d’Espagne. Une armée espagnole en large infériorité numérique, en position défensive dans les gorges de Somosierra dans la sierra de Guadarrama au nord de Madrid, est battue. Cette victoire permet à Napoléon de prendre Madrid.
[4] La bataille de Wagram est une bataille de la guerre de la Cinquième Coalition, qui fut décisive pour son issue. Elle a eu lieu du 5 au 6 juillet 1809 dans les plaines Marchfeld, sur la rive nord du Danube, la principale zone de combats se localisant aux environs du village de Deutsch-Wagram, à 10 km au nord-est de Vienne. Les deux jours de lutte ont vu s’imposer l’armée impériale française, sous le commandement de Napoléon 1er face à l’armée impériale autrichienne commandée par l’archiduc Charles d’Autriche-Teschen. La bataille de Wagram fut la plus meurtrière des batailles qui avaient eu lieu jusqu’alors, et ne sera égalée ou dépassée que par les batailles de la Moskova et Leipzig. Après le combat, épuisées et ayant subi de très lourdes pertes, les forces françaises ne peuvent poursuivre leur ennemi. Quant aux Autrichiens, leur situation, déjà très difficile avant le combat, devient désespérée après la défaite.
[5] Un uhlan est un cavalier armé d’une lance dans les armées slaves et germaniques, similaire au lancier des armées françaises. Les premiers régiments d’uhlans ont été créés au 18ème siècle. Ils étaient à l’origine des cavaliers légers polonais ou lituaniens armés de lances, d’épées et de carabines. Des corps d’uhlans furent incorporés dans les années 1780 dans l’armée autrichienne puis dans les armées de Prusse par le commandant von Hotze (officier instructeur mercenaire qui fut successivement au service de ces deux pays), l’Union de la Pologne et de la Lituanie étant, à l’époque, occupée et partagée entre ces grandes puissances.
[6] L’île d’Elbe est la plus grande île de l’archipel toscan avec 224 km² de superficie. Elle est située entre la Corse et la Toscane, à la frontière entre les mers Ligure et Tyrrhénienne. Elle est séparée de la péninsule italienne par le canal de Piombino, large d’une dizaine de kilomètres. C’est un site protégé par un parc national (parc national de l’archipel toscan, qui comprend aussi six autres îles)
[7] Les Cent-Jours sont la période de l’histoire de France comprise entre le retour en France de l’empereur Napoléon 1er, le 1er mars 1815, et la dissolution de la Commission Napoléon II, chargée du pouvoir exécutif après la seconde abdication de Napoléon 1er, le 7 juillet 1815. Du 1er au 20 mars 1815, la reconquête du pouvoir par Napoléon est rythmée par son débarquement à Golfe-Juan et sa marche de plus en plus triomphale vers Paris. Cette période est surnommée le vol de l’Aigle par l’historiographie favorable à l’empereur. Du 20 mars au 22 juin 1815, c’est le second règne impérial de Napoléon 1er. Cette période voit le rétablissement du contrôle de l’administration et de l’armée par Napoléon, la modification de la Constitution avec l’Acte additionnel, et la reprise de la guerre contre les Alliés qui s’achève par la défaite française à Waterloo (Septième Coalition), et l’abdication de l’empereur. Du 22 juin au 7 juillet 1815, la Commission de gouvernement, établie à la suite de la seconde abdication, maintient l’existence des pouvoirs exécutifs pendant deux semaines, puis laisse remonter sur le trône Louis XVIII, alors réfugié à Gand, après l’occupation de Paris par les armées britannique et prussienne
[8] La bataille de Ligny, également appelée bataille de Fleurus, opposa l’armée prussienne menée par le maréchal Blücher à une partie de l’armée française commandée par Napoléon 1er. Elle se déroula le 16 juin 1815, soit deux jours avant la bataille de Waterloo. Ligny fut la dernière victoire de Napoléon. Mais elle fut moins importante et décisive que ne le crut Napoléon, car, après un combat d’une grande férocité et de nombreuses pertes dans les deux camps, les Prussiens réussirent leur repli sur les ailes, sans être poursuivis la nuit venue par les troupes napoléoniennes. En outre, les Prussiens n’avaient engagé que trois corps d’armée sur quatre, le dernier étant alors stationné à Liège. C’est ce corps qui combattra le plus tôt et le plus lourdement à Waterloo.
[9] La Vieille Garde était l’unité d’élite de la Garde impériale de la Grande Armée durant les guerres napoléoniennes. Souvent appelée « l’élite de l’élite » ou « la crème de la crème », elle fut fondée sous le nom de garde consulaire en 1799 et rebaptisée en 1804. Elle était une unité de choc, normalement utilisée pour démoraliser et dérouter l’ennemi. Elle est dissoute avec la disparition du Premier Empire en 1815.
[10] du fait de leur uniforme à dominante rouge écarlate, ils forment quatre escadrons de Moyenne Garde issus du régiment de hussards de la Garde royale hollandaise. De 1810 à 1815, son commandant est le général Pierre-David de Colbert-Chabanais.
[11] La campagne de Russie, également connue en Russie comme la guerre patriotique de 1812, est une campagne militaire menée par l’empereur Napoléon I1er désignant l’invasion française de la Russie impériale en 1812. Elle a pour principale cause la levée par Alexandre 1er de Russie du blocus continental imposé par Napoléon à toute l’Europe depuis 1806, contre le Royaume-Uni. Jusqu’à la prise de Moscou, face à une armée impériale russe inférieure en nombre au début de l’invasion, l’avantage est aux forces napoléoniennes. Mais le prince russe Mikhaïl Koutouzov, général en chef, relève le moral de son armée et l’encourage à mener une contre-offensive, en organisant le harcèlement de la Grande Armée lors de la retraite française. C’est ainsi que les maladies, l’hiver, mais aussi les soldats et la population russes, sont responsables de la défaite de Napoléon en Russie.
[12] Pays d’Europe du Nord, sur la côte orientale de la mer Baltique. C’est le plus méridional des pays baltes ainsi que le plus peuplé et le plus étendu. Il partage des frontières avec la Pologne au sud-ouest, à l’ouest et au sud-ouest avec la Russie (exclave de Kaliningrad), au nord avec la Lettonie, au sud-est avec la Biélorussie. Sa capitale est Vilnius. La Lituanie est héritière du grand-duché de Lituanie, qui a existé du 12ème au 18ème siècle et dont l’expansion a été très importante. Mais sa situation et son histoire mouvementée ont longtemps placé la Lituanie sous dominations étrangères. Elle a ainsi fait partie de l’Empire russe du 18ème siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale
[13] Russie
[14] La guerre d’indépendance espagnole opposa l’Espagne des Bourbons, le Portugal et le Royaume-Uni à la France du Premier Empire entre 1808 et 1814, dans le contexte des guerres napoléoniennes.
[15] Le château de Saint-Cloud était un château royal situé à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) dans un site surplombant la Seine. Le 18 mai 1804, la proclamation de Napoléon 1er comme empereur des Français se déroule au château de Saint-Cloud. Napoléon le fait remettre en état et en fait sa deuxième résidence, après le palais des Tuileries. Le 1er avril 1810, le mariage civil de Napoléon avec l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche a lieu dans la galerie d’Apollon du château de Saint-Cloud, suivi le lendemain par une cérémonie religieuse au palais du Louvre. Le 23 juin 1811, d’importantes festivités ouvertes au public sont données dans le parc de Saint-Cloud à l’occasion de la naissance, le 20 mars 1811, de leur fils, le futur Napoléon II. L’Empereur et l’impératrice parcourent le parc en calèche, acclamés par quelque 300 000 personnes qui peuvent jouer à des jeux alors que des buffets, puis un feu d’artifice, leur sont offerts. À l’issue des Cent-jours, le château de Saint-Cloud est occupé par le maréchal Blücher, dont les troupes cantonnent dans le parc, y occasionnant des déprédations. Le 3 juillet 1815, Blücher reçoit au château de Saint-Cloud la capitulation des troupes impériales, après leurs derniers combats, à l’ouest de Paris. À la Restauration, Louis XVIII, qui se déplace difficilement, vient peu à Saint-Cloud mais y fait faire des aménagements, en particulier le jardin du Trocadéro, sur le coteau de Montretout, derrière l’aile droite du château, pour les enfants du Duc de Berry, ainsi nommé en souvenir d’une bataille remportée pendant l’expédition d’Espagne, en 1823. Charles X apprécie Saint Cloud, où il fait de longs séjours à la belle saison durant son règne, avec sa famille, tout en continuant à diriger le gouvernement de la France. Sa belle-fille, la duchesse d’Angoulême, réside alors non loin de là, au château de Villeneuve l’Étang.
[16] 1,73 m
[17] La place du Carrousel est une place de Paris située entre les ailes Denon et Richelieu du palais du Louvre, à l’ouest de la pyramide. Avant le 17ème, le lieu était constitué d’un terrain vague pris entre le palais des Tuileries et l’enceinte de Charles V, rendue inutile au 16ème par la construction de l’enceinte des Fossés Jaunes plus à l’ouest. En 1600, un jardin, dit « de Mademoiselle » en référence à Marie de Bourbon-Montpensier, y est aménagé. Il est détruit en 1655. La place est créée en 1662 pour permettre la tenue du carrousel qui lui donne son nom. D’une taille plus modeste qu’aujourd’hui, la place du Carrousel se trouvait entre l’hôtel de Longueville et la cour du palais des Tuileries, qui était fermée par une grille. Edmond et Jules de Goncourt y situent l’hôtel particulier où Louise-Julie-Constance de Brionne tint salon au 18ème siècle. Pendant la Révolution, la place est renommée « place de la Fraternité ». L’arc de triomphe du Carrousel est édifié entre 1806 et 1808 pour servir d’entrée d’honneur au palais des Tuileries
[18] Le château de Malmaison est situé dans la commune de Rueil-Malmaison dans le département des Hauts-de-Seine. Le château entre dans l’histoire de France pendant le Directoire, lorsque Joséphine de Beauharnais, épouse de Napoléon Bonaparte, l’achète le 21 avril 1799 pour la somme de 325 000 francs de l’époque, à Le Couteulx du Molay, sur les conseils de Jean Chanorier. C’est Ouvrard qui consent à Joséphine des prêts pour cet achat. Bonaparte le reprend à son compte après le coup d’État du 18 Brumaire, probablement avec des fonds provenant de la première campagne d’Italie.L’acquisition porte sur le château, ses dépendances et le domaine attenant, qui s’étend sur quelque 260 hectares. Napoléon 1er demande aux architectes Charles Percier et Pierre Fontaine de rénover et redécorer la bâtisse au goût du jour. Fontaine conçoit un grand projet de reconstruction du château ; ambition qui sera freinée par l’Empereur, préférant une simple rénovation. Le château est même le cœur du gouvernement français (avec les Tuileries) pendant le Consulat et Napoléon y séjourne régulièrement jusqu’en 1804 avant de choisir le château de Saint-Cloud, plus digne de son nouveau rang. Il y vient encore jusqu’à son divorce d’avec Joséphine en 1809. Joséphine reçoit alors une pension de 2 millions de livres par an et La Malmaison en toute propriété. Dès lors, le château devient la demeure principale de Joséphine. Après son divorce, elle y mène une vie désœuvrée sans Bonaparte, qui lui rend visite régulièrement. Elle y reçoit le tsar Alexandre 1er de Russie, le 28 mai 1814, la veille de sa mort. Elle est inhumée dans l’église Saint Pierre Saint Paul de Rueil-Malmaison.