Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Accueil du site > Histoire du 1er siècle de notre ère > Pontius Pilatus dit Ponce Pilate

Pontius Pilatus dit Ponce Pilate

vendredi 1er juin 2018, par lucien jallamion

Pontius Pilatus dit Ponce Pilate (vers fin du 1er siècle av. jc- après 36 de notre ère)

Citoyen romain, membre de la classe équestre [1], qui, à partir de 26 sous le règne de l’empereur Tibère et durant 11 ans, a occupé la charge de préfet de Judée avant d’être renvoyé à Rome fin 36 ou au début 37 par le proconsul [2] de Syrie [3] Lucius Vitellius afin qu’il s’explique de sa gestion auprès de l’empereur. Après son arrivée à Rome, l’histoire perd sa trace.

Il est essentiellement connu pour avoir ordonné, selon les Évangiles, l’exécution et le crucifiement de Jésus de Nazareth, ce qui a conféré une notoriété exceptionnelle à un simple gouverneur de province, au nom mentionné dans les professions de foi des chrétiens.

L’absence de certitudes historiques a permis le développement de légendes à son sujet. Des traditions lui font trouver la mort à plusieurs endroits soit comme martyr à Rome, soit par suicide dans la vallée du Rhône, près de Vienne, ou à Lucerne [4] où une montagne porte son nom.

Ponce Pilate est nommé préfet en 26 sous le règne de l’empereur Tibère, sans qu’on en connaisse les motivations. Il prend la tête d’une province impériale d’un type particulier, généralement confiée à des membres de l’ordre équestre dont les gouverneurs ne reçoivent pas de l’empereur l’imperium proconsulaire comme cela se fait pour des provinces impériales plus importantes ou pour les provinces sénatoriales.

Succédant à Valerius Gratus Ponce Pilate est le 5ème des gouvernants romains qui se succèdent en Judée entre 6 et 36, tous issus de l’ordre équestre. Il est néanmoins le seul parmi eux dont la notoriété a traversé les siècles, notamment à travers les attestations de son contemporain Philon d’Alexandrie mais surtout des évangiles chrétiens et des écrits de l’historien judéo-romain Flavius Josèphe.

En qualité de Préfet, Ponce Pilate gouvernait donc une province où étaient stationnées des forces militaires.

Le poste qu’occupe Ponce Pilate, dans une région aux troubles et à l’insécurité permanents, est ingrat et redouté en même temps qu’il est sans prestige. Nombre de ses titulaires ne s’y maintiendront que très peu de temps mais certains, comme Pilate lui-même et son prédécesseur Valérius Gratus, restent plus de 10 ans, jouant des antagonismes ethniques et opposant les forces autochtones, même si la politique romaine s’appuie sur les institutions préexistantes et les élites locales pour les faire fonctionner.

L’officier romain chargé du gouvernement de la Judée dirige son administration ainsi que les troupes auxiliaires cantonnées dans sa juridiction qu’il peut, en cas de nécessité, voir augmentées par un appoint de troupes de la province de Syrie. Il détient l’autorité juridique suprême, même s’il reste une certaine autonomie aux autorités juives en matière de droit civil et de droit pénal. Il est également habilité à frapper monnaie et à collecter les impôts.

Durant les onze années de la préfecture de Pilate, on peut relever une série de 6 incidents entraînant des protestations plus ou moins graves dont l’histoire a conservé la trace. Dès 26, l’année de son arrivée, un incident concernant des images figurant l’empereur sur des enseignes romaines, un incident consécutif à la construction d’un aqueduc financé avec le trésor du Temple. Un incident concernant des pièces frappées avec un symbole cultuel païen, un épisode concernant les sacrifices sanglants galiléens [5], une affaire anodine de consécration de boucliers dorés à Jérusalem prise pour un outrage, et en 36, l’affaire mettant en scène un prophète samaritain se proclamant « Nouveau Moïse ». On peut y ajouter les arrestations et exécutions de Jean le Baptiste et de Jésus de Nazareth, voire l’arrestation du populaire Jésus Bar Abbas .

Dès sa nomination, une action de Pilate est lue comme une provocation par les Juifs, quand le préfet prend l’initiative d’introduire de nuit à Jérusalem des enseignes et des effigies de l’Empereur, alors qu’aucun autre gouverneur romain n’avait fait cela avant lui et que d’après Philon d’Alexandrie, cet interdit religieux avait été jusqu’alors respecté par les Rois et les Empereurs.

Lucius Vitellius est nommé légat [6] de Syrie par Tibère en 34. L’empereur lui confie la délicate mission de gérer le conflit arméno-parthe et de diriger “toutes les révolutions qui se préparaient en Orient”.

Celui-ci, ébranlé par les plaintes qui s’accumulent tant des Juifs que des Samaritains [7] sur les exactions de Pilate, décide de son renvoi à Rome pour qu’il s’en explique avec l’empereur.

Pilate, quitte sa charge pour Rome vers la fin de l’année 36 ou le début de l’année 37, au plus tard à la fin février quand arrive son successeur Marcellus ou Marullus

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Simon Claude Mimouni, Le judaïsme ancien du VIe siècle avant notre ère au IIIe siècle de notre ère : des prêtres aux rabbins, puf, coll. « Nouvelle clio »,‎ 2012/ Le petit mourre dictionnaire d’histoire universelle édition Bordas 2004 p 1027

Notes

[1] Les chevaliers sont un groupe de citoyens de la Rome antique appartenant à l’ordre équestre (equester ordo), sous la Royauté, la République et l’Empire. Choisis par les censeurs, ce sont les plus fortunés (au moins 400 000 sesterces du 2ème siècle av. jc, jusqu’au début de l’Empire) et les plus honorables des citoyens (en dehors des sénateurs). Cette appartenance pouvait être théoriquement remise en cause à chaque censure. En pratique elle était héréditaire. Le chevalier se reconnaît à la bande de pourpre étroite cousue sur sa tunique (tunique dite angusticlave), et au port de l’anneau d’or. Les chevaliers se virent attribuer un poids politique supplémentaire au motif qu’ils étaient capables financièrement de s’équiper pour servir dans l’armée à cheval. De plus l’appartenance à l’ordre équestre était nécessaire pour accéder aux postes d’officier dans l’armée.

[2] La fonction de proconsul dans la Rome antique correspond à la notion actuelle de gouverneur. Étymologiquement, ce terme vient du préfixe latin pro, à la place de, et consul. Le premier cas de proconsulat historiquement cité par Denys d’Halicarnasse date de 464 av. jc, lorsque Titus Quinctius Capitolinus Barbatus reçut le pouvoir de diriger une armée (imperium) pour aller au secours d’un consul assiégé. Il s’agit alors d’une solution improvisée sous la pression des événements. La fonction réapparaît avec l’agrandissement de la République romaine au 4ème siècle av. jc, lorsqu’un consul doit finir une campagne militaire ou doit gouverner un territoire au-delà de la durée normale de son mandat de consul (un an). Son pouvoir (imperium consulaire) est alors prolongé, en général pour une durée d’un an et toujours sur un territoire précis, le plus souvent une province. Le terme « proconsul » tient au fait que son titulaire exerçait un pouvoir consulaire ; cependant, tous les proconsuls n’étaient pas forcément d’anciens consuls.

[3] La Syrie est l’une des provinces les plus importantes de l’Empire romain, tant par sa richesse que sur le plan militaire. Étendue de la Méditerranée à l’Euphrate, elle constitue un riche creuset de civilisations, composées entre autres de Juifs, de Phéniciens, ou de Nabatéens, hellénisés pour la plupart d’entre eux. La Syrie est conquise par Pompée en 64 av. jc. En 63 av. jc, après avoir vaincu le roi Mithridate VI, il transforme le royaume de Syrie en province romaine, mettant ainsi fin à la dynastie séleucide. L’acquisition du territoire n’est cependant pas sa mission originelle. Le gouvernement de cette riche région constitue rapidement un enjeu majeur à Rome. Crassus, qui l’a obtenu, y trouve la mort en tentant une expédition militaire contre les Parthes en 53 av. jc, à Carrhes. Sous Auguste, la province est placée sous l’autorité d’un légat d’Auguste propréteur de rang consulaire, résidant à Antioche, la capitale. Les frontières de la province connaissent à plusieurs reprises des modifications. Le royaume de Judée, devenu province de Judée, est renommé Syrie-Palestine durant le règne de l’empereur Hadrien, mais n’appartient pas à la province de Syrie proprement dite. Les frontières varient aussi avec l’Arabie nabatéenne. La Syrie englobe l’Iturée et le territoire de Palmyre. Si les conquêtes de Trajan sont éphémères, la frontière sur l’Euphrate est durablement déplacée jusqu’à Doura Europos, lors de la guerre parthique de Lucius Verus, entre 161 et 166. À partir de la seconde moitié du 2ème siècle, le sénat romain comprend un nombre important de Syriens, comme Claudius Pompeianus ou Avidius Cassius sous Marc Aurèle. Dans la première moitié du 3ème siècle, des Syriens accèdent au pouvoir impérial, avec la dynastie des Sévères.

[4] Suisse

[5] La Galilée est souvent citée dans l’Ancien Testament, et sa partie septentrionale évoquée comme "la Galilée des Gentils" dans le Nouveau Testament. Elle est décrite par Flavius Josèphe qui évoque son histoire, son peuplement sa géographie, et lui donne deux parties : la Galilée supérieure, en grande partie peuplée de Gentils, et la Galilée inférieure, en grande partie peuplée de Juifs. Son nom de Galilée pourrait venir d’un peuplement celte, comme plus au nord la Galatie. Elle recouvrait avant la Captivité les territoires des tribus d’Issacar, de Zabulon, de Nephthali et d’Asher. Comme les Galiléens étaient de bons cultivateurs, plantant des figuiers, des oliviers, des noyers, des palmiers, des habiles artisans et de bons pêcheurs, la Galilée était prospère avec 400 villes, certaines très peuplées.

[6] Titre porté par les représentants officiels de la Rome antique. Les ambassadeurs étaient des légats du Sénat romain. Sous la République romaine, les consuls, proconsuls, préteurs en campagne pouvaient charger temporairement des légats du commandement de la cavalerie, des réserves ou même d’une légion entière et de plusieurs légions. Sous l’Empire romain, à partir d’Auguste, la fonction de ces légats militaires devint permanente. Désignés par l’empereur, ils le représentaient dans les provinces et les légions. On distingua alors les légats consulaires et les légats prétoriens, qui gouvernaient les provinces « impériales » et exerçaient le pouvoir militaire, et les légats de légion, officiers expérimentés, de rang sénatorial, qui étaient chef d’une légion. Le titre de légat se transmit de l’Empire romain à l’Église catholique ; il fut porté dans celle-ci par les envoyés personnels du souverain pontife. Ces envoyés sont généralement des cardinaux.

[7] Les Samaritains sont un peuple peu nombreux se définissant comme descendant des anciens Israélites, et vivant en Israël et en Cisjordanie. On appelle parfois leur religion le samaritanisme. Les Samaritains offrent le paradoxe d’être à la fois une des plus petites populations du monde, puisqu’ils sont 712 en 2007, et une des plus anciennes dotées d’une histoire écrite, puisque leur existence est attestée au 1er millénaire av. jc en Samarie. Ils ont dominé cette région jusqu’au 6ème siècle, dans le nord de l’actuel Israël.