Pierre de La Forest ou Petrus Foresta (1305-1361)
Évêque de Tournai-Évêque de Paris-Archevêque de Rouen de 1352 à 1356-Cardinal avec le titre de cardinal-prêtre Douze Apôtres de 1356 à 1361
Fils de Philippe de la Forêt et de Marguerite de La Chapelle, sœur de Geoffroy, évêque du Mans [1].
Il obtient une licence in utroque [2] puis fut professeur de droit à l’université d’Orléans [3] et d’Angers [4]. En 1334, il est chanoine de Saint-Pierre de la Cour au Mans [5]. Il obtient peu après l’archidiaconé [6] de Montfort et le décanat [7] d’Ernée [8]. Il devint avocat au Parlement.
Élu évêque du Mans en 1347 à la mort de son oncle, Clément VI ne reconnaît pas l’élection et nomme à sa place Jean de Craon, archidiacre de Passais. Il devient au mois d’octobre chancelier du duc de Normandie. Il est nommé chancelier de France [9] le 13 juillet 1349.
Le 24 juillet 1349, il est nommé évêque de Tournai. Le 2 juillet 1350, il est nommé exécuteur testamentaire du roi de France. Le 20 décembre 1350, il est transféré à l’évêché de Paris. En septembre 1351, il est envoyé pour tenter de conclure un traité de paix avec les anglais. Puis le 8 février 1352, il est transféré à Rouen. Il fait l’acquisition de La Loupelande dans le Maine [10] et obtient des lettres d’anoblissement en octobre 1354.
Jean II le nomma chancelier de France le 13 juillet 1349 jusqu’à sa destitution sur demande des États généraux le 3 mars 1356, et rétablit le 28 mai 1359 jusqu’à sa mort le 25 juin 1361. Il fut également un des conseillers du régent Charles le futur Charles V.
Il effectue également au cours de sa carrière des missions diplomatiques : à Avignon en 1354 et à Bordeaux en 1356. Lors des émeutes conduites par Étienne Marcel en 1358, celui-ci voulut le départ du conseiller ainsi que celui de Simon de Buci qui avaient à charge de négocier la paix avec les Anglais, cette négociation représentait une gêne pour les émeutiers parisiens, mais le régent Charles n’en tint pas compte.
Ce fut Innocent VI qui le revêtit de la pourpre cardinalice lors du consistoire du 23 décembre 1356. Il entre dans la curie papale à Avignon en mai 1357. Le pape Innocent VI le nomme légat apostolique [11] en Sicile puis en France.
Il rédige son testament le 22 juin 1361 et décède sans doute de la peste à Villeneuve-lès-Avignon [12] le 27 juin 1361. Son cœur est enterré à Villeneuve tandis que son corps le sera dans le chœur de la cathédrale du Mans, près du tombeau de son oncle Geoffroi de La Chapelle, évêque du Mans.
Notes
[1] Le diocèse du Mans est une église particulière de l’Église catholique en France. Il a été érigé canoniquement au 5ème siècle. Le diocèse du Mans a été créé par saint Julien, qui en est le premier évêque. Depuis 836, le diocèse est jumelé à celui de Paderborn, en Allemagne. Sous l’Ancien régime, le diocèse du Mans s’étendait sur tout le Maine et au-delà.
[2] droit canon et civil
[3] Le 27 janvier 1306, l’université d’Orléans était officiellement fondée par le pape Clément V grâce à quatre bulles pontificales qui accordaient aux maîtres et aux écoliers d’Orléans le droit d’avoir une université, ainsi que les privilèges qui en découlaient. Le même jour, une cinquième bulle prévoyait d’indemniser les professeurs qui avaient porté la demande de création auprès du pape. Les habitants d’Orléans sont réticents aux privilèges accordés par le pape et tentent donc de s’opposer à l’établissement de l’université. Une émeute particulièrement violente se produit en 1309. Les représentants de l’université s’en remettent donc au roi Philippe le Bel qui confirme les privilèges et la fondation de l’université d’Orléans en 1312. L’acte de prise de possession de l’université des lois d’Orléans par l’autorité royale stipule que les matières enseignées seront le droit civil et le droit canonique. Elle devient alors la quatrième université française après celles de Paris, de Toulouse et de Montpellier. Au Moyen Âge, elle est surtout connue pour son enseignement du droit civil ou droit romain, célèbre par la rénovation de l’étude du Corpus Juris Civilis qui y est alors menée par les postglossateurs. En effet, en vertu d’une bulle d’Honorius III, il était interdit d’enseigner le droit romain à Paris, où seul le droit canonique était au programme. La proximité d’Orléans par rapport à Paris permet aux étudiants d’aller de l’une à l’autre assez facilement. Se spécialisant dans le droit, l’université d’Orléans n’a d’ailleurs pas officiellement de faculté des arts. Sous l’Ancien Régime, l’université est placée sous le contrôle du pouvoir royal. Sa réputation dans le domaine du droit reste reconnue au 16ème siècle où elle participe au mouvement humaniste.
[4] L’université d’Angers a été fondée au cours du 14ème siècle. C’est Charles V qui lui donne ses lettres de noblesse en 1364 en créant l’Université « Droit, médecine et théologie ».
[5] La collégiale Saint-Pierre-la-Cour est un édifice religieux situé dans la ville du Mans. Il s’agit de l’ancienne église dédiée aux comtes du Maine dont le palais était adjacent. Située au Sud-Ouest de la vieille ville, la collégiale sert aujourd’hui à diverses manifestations culturelles.
[6] Dans l’Église catholique, un archidiaconé est une circonscription religieuse, subdivision d’un diocèse. Placée sous l’autorité d’un archidiacre nommé par l’évêque pour le représenter. Dans l’ancien diocèse de Paris, on disait archidiaconat. C’est dans ce ressort que l’archidiacre effectuait ses visites archidiaconales dans les paroisses, accomplissant ainsi sa fonction de contrôle des curés par délégation de l’évêque.
[7] Dignité de doyen soit dans un corps ecclésiastique, soit dans une faculté de lettres, de droit, de médecine.
[8] Ernée est une commune française, située dans le département de la Mayenne. En 1231, après la trêve conclue à Saint-Aubin-du-Cormier, le 4 juillet, entre la reine Blanche de Castille, régente, et Pierre Mauclerc, duc de Bretagne, la ville d’Ernée est le lieu de l’entrevue entre Pierre Mauclerc et Philippe Hurepel, oncle du roi. Cette entrevue se solda par un échange solennel de serments. Pendant la guerre de Cent Ans, comme toute la région, la ville d’Ernée est dévastée et ruinée.
[9] Le chancelier de France est un important personnage de l’Ancien Régime, il est le second officier de la couronne, puis le premier, en 1627, avec la suppression du connétable et de l’amiral de France. La conservation d’une copie de tous les actes de gouvernement (édits, traités, capitulaires, dénombrements, etc.) est une des fonctions principales du chancelier. La clôture et l’expédition des actes étaient la fonction du garde des Sceaux qui conservait les sceaux des différents domaines et juridictions retenus par la couronne. La France a sans doute, après le Vatican, la seconde plus vieille chancellerie du monde, puisqu’elle conserve encore 47 actes originaux datant des rois mérovingiens (481-751). La collection des plus anciens, toujours appelée Trésor des Chartes, constitue le fonds original des Archives nationales de France. Lacunaires jusqu’au 12ème siècle, ce n’est qu’à partir de sa réorganisation par frère Guérin, évêque de Senlis et garde des Sceaux de Philippe Auguste, que l’on conserve véritablement au palais du roi à Paris un exemplaire de tous les actes expédiés ou reçus par le roi.
[10] Le Maine est d’abord apparu en tant que comté au Haut-Moyen-Âge. Initiallement possession de la dynastie des Rorgonides, le Maine a connu plusieurs crises de succession qui l’ont fait passer aux Robertiens et aux Hugonides. Ces derniers gardent le titre comtal jusqu’au 11ème siècle, lorsque le dernier comte, sans descendant, lègue son fief à Guillaume le Conquérant, duc de Normandie. Les seigneurs locaux contestent la décision et renversent les Normands au profit de la maison italienne d’Este, lointaine descendante des Hugonides. Suite à plusieurs mariages, le Maine passe au 12ème siècle aux comtes d’Anjou de la dynastie des Plantagenêts.
[11] Le légat apostolique, ou plus communément légat du pape, ou légat pontifical, est un représentant extraordinaire du pape chargé d’une mission spécifique, généralement diplomatique. Il se distingue en cela du nonce apostolique qui est un ambassadeur permanent du Saint Siège auprès des gouvernements étrangers.
[12] Villeneuve-lès-Avignon ou Villeneuve-lez-Avignon est une commune française située dans le département du Gard. Après 1181 et avant 1200, une muraille est construite autour du village, qui devient un castrum, probablement en liaison avec la construction du pont sur le Rhône achevé en 1185, les habitants de Saint-André voulant se protéger des Avignonnais. C’est probablement également à cette date que l’abbé donne son autonomie au village et affranchit une partie au moins de des serfs. Cependant, le bourg Saint-André est annexé par la commune d’Avignon au début du 13ème siècle, et en 1210, le comte de Provence Raymond V confirme cette annexion. Malgré une révolte des habitants de Saint-André en 1213, cette domination des Avignonnais est à nouveau confirmée en 1222. En 1226, l’armée du roi de France assiège Avignon, dans le cadre de la croisade des Albigeois. Avignon demeure fidèle au comte et refuse le passage de l’armée royale. Pendant les trois mois que dure le siège, le roi est l’hôte de l’abbé de Saint-André, qui va lui proposer de signer un traité de paréage. Ce traité place la seigneurie de Saint-André sous la protection du roi de France. Les termes de ce traité ne seront en fait jamais appliqués : la fin de la croisade des Albigeois en 1229 a dépecé le comté de Toulouse au profit des vainqueurs : Avignon est partagée entre deux frères du roi de France, les prétentions de la ville sur Saint-André sont réduites à néant.
À la fin du 13ème siècle, des changements géopolitiques vont avoir des conséquences sur la rive droite du Rhône. Le roi de France Philippe IV le Bel, qui a hérité de son oncle la moitié de la seigneurie d’Avignon, l’échange avec un cousin, roi de Naples, autre co-seigneur de la ville. Le roi de France perd le contrôle de la rive gauche du fleuve, il doit alors prendre le contrôle de la rive droite. L’installation en 1309 à Avignon de la papauté a d’énormes conséquences sur la ville naissante qui va recevoir les villégiatures des cardinaux et des souverains pontifes.