Marcus Antonius Primus
Sénateur d’origine gauloise
Il vécut au 1er siècle, originaire de Tolosa [1], surnommé Beccus [2] dans sa jeunesse. Il assura l’Empire à Vespasien par son activité militaire, et remporta sur les partisans de Vitellius la victoire de Crémone [3] en 69.
En 61 sous Néron, il est impliqué dans une affaire de faux testament et est condamné par Néron, exclu du Sénat et exilé.
En 68, Galba le réintègre au Sénat, et lui donne le commandement de la VIIe légion Galbiana, nouvelle unité basée en Pannonie [4]. Après l’assassinat de Galba en 69, Antonius aurait envoyé des courriers à son successeur Othon, demandant un commandement plus important contre son soutien face à Vitellius, courriers que Othon laissa sans suite.
Il prend parti pour Vespasien contre Vitellius avec les autres gouverneurs de Mésie [5] et de Dalmatie [6]. Partisan d’une offensive sans attendre l’armée de Vespasien qui est en Orient, il descend sur l’Italie avec quelques détachements et de la cavalerie, occupe Aquilée [7], puis Padoue [8], Este [9], Vicence [10] et Vérone [11]. Il outrepasse ainsi les consignes écrites de Vespasien qui ordonnait de s’arrêter à Aquilée pour l’attendre, mais coupe la route venant du col du Brenner [12] aux éventuels renforts de Germanie [13] qu’espère Vitellius.
Peu à peu, 5 légions des armées danubiennes se regroupent à Vérone. Antonius se montre seul capable d’en assurer le commandement après avoir calmé deux séditions de soldats qui s’en prenaient à leurs chefs. En face de lui, Alienus Caecina, à la tête de 8 légions, tergiverse : il parlemente, puis annonce subitement son ralliement à Vespasien, ses soldats s’insurgent et l’emprisonnent.
Après un bref affrontement à la bataille de Bedriacum le 24 octobre 69 [14], les Vitelliens se replient en direction de Crémone. Antonius les suit, et les affronte dans une bataille de rencontre improvisée et confuse.
Maître du terrain, Antonius regroupe les légions près de Crémone, et doit faire face à une nouvelle armée vitellienne arrivée à marche forcée. Antonius n’a que le temps d’organiser ses troupes en ligne de bataille. Les combats durent toute la nuit. Vainqueurs à l’aube et désireux de faire du butin, les soldats d’Antonius s’emparent de la cité de Crémone dans un dernier effort, et Antonius leur laisse libre cours pour la piller et l’incendier pendant 4 jours.
Après la bataille de Crémone, chaque camp se réorganise : les partisans de Vespasien dominent maintenant la plaine du Pô [15] et les deux rives de la mer Adriatique [16]. Antonius se pose en chef des forces de Vespasien, il veut poursuivre l’offensive et franchir les Apennins [17] malgré l’approche de l’hiver.
Mucien, légat [18] de Syrie [19], progresse vers l’Italie avec ses légions. Les échanges de courrier entre Mucien et Antonius tournent vite à l’aigre. Dans l’autre camp, Fabius Valens, général de Vitellius, abandonne son armée dans l’Italie centrale, afin d’aller chercher des renforts en Gaule et en Germanie. Tandis qu’Antonius envoie des lettres de contrordre aux unités qui faisaient route depuis la Germanie à l’appel des vitelliens, Fabius Valens est capturé près de Massilia [20] et transféré en Italie. Cette capture provoque le ralliement à Vespasien de l’Espagne et des Gaules.
Antonius franchit les Apennins en Ombrie [21] sans rencontrer de résistance. Près de Narni [22], les dernières troupes vitelliennes ont été abandonnées par les chefs. Pour les démoraliser, on exécute Fabius Valens et on exhibe sa tête, ainsi Antonius obtient leur capitulation.
La guerre civile semble s’achever mi-décembre 69, avec la perspective d’une abdication de Vitellius, négociée à Rome par Titus Flavius Sabinus, préfet de Rome [23] et frère aîné de Vespasien. Antonius apprend la détérioration subite de la situation à Rome, les partisans de Vitellius refusent son abdication et assiègent Flavius Sabinus dans la forteresse du Capitole [24]. Antonius gagne Rome aussi rapidement que possible, mais quand il arrive, le Capitole est en feu et Flavius Sabinus a été exécuté.
Les soldats d’Antonius pénètrent dans Rome, malgré une ultime résistance dans les faubourgs et dans le camp des prétoriens [25], puis se livrent à une chasse à l’homme contre tous ceux qui semblent avoir été des soutiens de Vitellius.
Le 20 décembre 69, le Sénat proclame Vespasien empereur et le désigne consul pour l’année 70 avec son fils Titus. Vitellius est appréhendé et sommairement exécuté quelques jours plus tard. Antonius doit se contenter des insignes consulaires. Il ne peut obtenir le triomphe pour ses victoires car elles ont été remportées contre des Romains. C’est donc à son concurrent Mucien que le Sénat décerne les insignes triomphaux, pour une campagne sur les Sarmates [26].
Quelques jours plus tard, l’arrivée de Mucien à Rome met un terme à la puissance d’Antonius. Mucien se comporte en maître, et s’attribue tout le mérite du succès contre Vitellius en se vantant d’avoir tenu le pouvoir entre ses mains pour le donner ensuite à Vespasien.
À partir de ce moment, faute de source antique, nous ne disposons plus d’information sur la carrière publique d’Antonius.
Notes
[1] Toulouse
[2] bec de coq
[3] Crémone st une ville italienne, chef-lieu de la province du même nom en Lombardie, dans la région de la plaine du Pô, dans le nord de l’Italie.
[4] La Pannonie est une ancienne région de l’Europe centrale, limitée au Nord par le Danube et située à l’emplacement de l’actuelle Hongrie, et partiellement de la Croatie et de la Serbie. Les habitants originaux sont les Pannoniens, qui sont envahis par les Celtes et les Boïens au 4ème siècle av. jc. Vers 105 apr. jc, Trajan divise la province en Pannonie supérieure à l’ouest et Pannonie inférieure à l’est. Ces qualificatifs ne sont pas seulement déterminés par le sens du cours du Danube, mais aussi par l’éloignement par rapport à Rome en suivant les itinéraires routiers : le voyageur venant d’Italie rencontre d’abord la Pannonie supérieure, puis la Pannonie inférieure. Le Pannonien Maximien est associé au pouvoir en 285. Les tétrarques réorganisent les provinces pour en améliorer l’administration et la défense : la Pannonie inférieure est divisée en deux : au nord la Valeria, du nom de famille de Dioclétien, avec pour capitale Aquincum ; au sud, la Pannonia Secunda, avec pour capitale Sirmium
[5] La Mésie est une ancienne région géographique et historique située au sud du cours inférieur du Danube, dans les actuelles Serbie, Bulgarie (nord) et Roumanie (extrémité sud-est).
[6] La Dalmatie est une région littorale de la Croatie, le long de la mer Adriatique, qui va de l’île de Pag, au nord-ouest, à Dubrovnik et la baie de Kotor au Monténégro au sud-est.
[7] Aquilée est une commune de la province d’Udine dans la région du Frioul Vénétie julienne en Italie. Historiquement, la ville, fondée en 181 av.jc fut, à son apogée, une des villes les plus importantes de l’Empire romain. Aquilée a également été un centre religieux chrétien de premier plan, entre le 4ème siècle et le 15ème siècle, siège du patriarcat d’Aquilée.
[8] Padoue est une ville italienne de la région de la Vénétie, située au nord de la péninsule dans la plaine du Pô, à 40 kilomètres de Venise, sur la rivière Bacchiglione. À partir de 1405 la ville fut sous la domination vénitienne. Durant une brève période, pendant la guerre de la Ligue de Cambrai en 1509, la ville changea de mains. Le 10 décembre 1508, les représentants de la papauté, de la France, du Saint Empire romain germanique et de Ferdinand II d’Aragon conclurent une alliance (la Ligue de Cambrai) contre la République. L’accord prévoyait le démembrement complet du territoire de Venise en Italie et son partage entre les signataires : l’empereur Maximilien 1er de Habsbourg devait recevoir Padoue, en plus de Vérone et d’autres territoires. En 1509, Padoue passa pendant quelques semaines sous le contrôle des partisans de l’Empire. Les troupes vénitiennes récupérèrent rapidement la ville qui fut défendue avec succès durant le siège de Padoue par les troupes impériales en 1509. Entre 1507 et 1544, Venise construisit à Padoue de nouveaux murs, agrémentés d’une série de portes monumentales.
[9] Este est une commune italienne, autrefois nommée Ateste, située dans la province de Padoue, en Vénétie au sud des monts Euganéens et au nord du Pô, au sud-ouest du chef-lieu de la province. Elle est connue depuis l’âge du fer comme site majeur de la culture « atestina » ou culture « paléo-vénète ».
[10] Vicence est une ville du Nord de l’Italie, chef-lieu de la province du même nom en Vénétie (Italie). Vicence est administrée par des évêques-comtes de Aicardus (ou Sicardus) (872-882) à Aribertus (1164-1179) puis par des Podestats à partir Ezzelino 1er da Romano. Elle devint au 12ème siècle une des républiques de la Haute Italie, et prit part aux deux ligues lombardes : Frédéric II la saccagea en 1236. Elle eut ensuite à subir la tyrannie des Romano, obéit quelque temps aux Della Scala avant de devenir, ainsi que tout le Vicentin, province vénitienne en 1404.
[11] Vérone est une très ancienne ville italienne, dans la région de Vénétie (plaine du Pô), sur les rives de l’Adige, à proximité du lac de Garde.
[12] Le col du Brenner est un col des Alpes séparant l’Italie (la commune de Brennero dans la province autonome de Bolzano) de l’Autriche (Gries dans le land du Tyrol) depuis l’entrée en vigueur du traité de Saint-Germain-en-Laye en 1919. Avec 1 370 m d’altitude, il est le passage le plus bas et le plus fréquenté entre le nord et le sud de la crête principale des Alpes.
[13] La Germanie est le nom donné, dans l’Antiquité, à la région d’Europe centrale séparée du monde romain par le Rhin et le Danube et s’étendant approximativement, à l’est, jusqu’à la Vistule. Le territoire de la Germanie était peuplée par les Celtes avant que divers peuples germaniques ne s’y installent au cours du 1er millénaire av. jc. La Germanie antique ne correspond pas à l’Allemagne actuelle, même si certains territoires importants des unes et des autres peuvent se superposer. Le nom de Germanie est utilisé par les Romains, avec différents qualificatifs, incluant des territoires qui ne sont pas aujourd’hui allemands d’une part, et des contrées actuellement allemandes sans aucune équivoque possible, qui n’étaient pas d’un point de vue administratif en Germanie romaine, d’autre part. Les anciens, depuis le 2ème siècle av. jc jusqu’à l’arrivée massive des peuples slaves au vie siècle, nommaient Germanie l’espace limité au nord par la mer Baltique et la mer du Nord, au sud par les Beskides occidentales et le nord des Alpes, à l’est par la Vistule et à l’ouest par le Rhin.
[14] Bataille de Bedriacum ou bataille de Crémone est le nom de deux batailles livrées en 69, l’année dite « Année des quatre empereurs », pour déterminer le successeur de l’empereur romain Néron. Elles ont lieu à Bedriacum (Bedriaco en italien) près de Crémone (Italie). La première bataille de Bedriacum eut lieu le 14 avril 69 à Bedriacum, près de Crémone, entre l’armée de Othon et celle de Vitellius, deux prétendants au trône de l’Empire romain après la mort de Néron et Galba.
[15] Le Pô est le plus important fleuve italien tant par sa longueur, 652 kilomètres, par son débit maximum, 10 000 m3/s à Pontelagoscuro, une localité sur le territoire de la commune de Ferrare, que par son bassin hydrographique qui couvre 71 057 km2, soit le quart du territoire national de l’Italie. Le bassin du Pô s’étend aussi en partie en Suisse et (dans une moindre mesure) en France.
[16] La mer Adriatique sépare la péninsule italienne de la péninsule balkanique. L’Adriatique est le bras de la Méditerranée situé le plus au nord en s’étendant du canal d’Otrante (qu’elle inclut et où elle rejoint la mer Ionienne) jusqu’aux villes de Venise et de Trieste et à l’embouchure du Pô. Les pays côtiers sont l’Italie, la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et l’Albanie, ainsi que la Grèce par l’île de Corfou.
[17] Les Apennins (ou l’Apennin) sont une chaîne de montagnes de la ceinture alpine qui parcourent l’Italie et Saint-Marin sur mille kilomètres du nord au sud, à travers quinze des vingt régions italiennes.
[18] Titre porté par les représentants officiels de la Rome antique. Les ambassadeurs étaient des légats du Sénat romain. Sous la République romaine, les consuls, proconsuls, préteurs en campagne pouvaient charger temporairement des légats du commandement de la cavalerie, des réserves ou même d’une légion entière et de plusieurs légions. Sous l’Empire romain, à partir d’Auguste, la fonction de ces légats militaires devint permanente. Désignés par l’empereur, ils le représentaient dans les provinces et les légions. On distingua alors les légats consulaires et les légats prétoriens, qui gouvernaient les provinces « impériales » et exerçaient le pouvoir militaire, et les légats de légion, officiers expérimentés, de rang sénatorial, qui étaient chef d’une légion. Le titre de légat se transmit de l’Empire romain à l’Église catholique
[19] La Syrie fut occupée successivement par les Cananéens, les Phéniciens, les Hébreux, les Araméens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Arméniens, les Romains, les Nabatéens, les Byzantins, les Arabes, et partiellement par les Croisés, par les Turcs Ottomans et enfin par les Français à qui la SDN confia un protectorat provisoire pour mettre en place, ainsi qu’au Liban, les conditions d’une future indépendance politique.
[20] Marseille
[21] Le nom de la région est issu de la tribu des Umbri (Ombriens), un peuple qui a fini par être absorbé par l’expansion romaine. Leur langue était l’Ombrien, une des langues italiques. Les Umbri, comme les tribus voisines sont probablement issus de la culture Terramare et de Villanova d’Italie du nord et centrale, et ont pénétré dans le nord-est de l’Italie au début de l’âge du Bronze. Les Étrusques étaient en conflit avec les Umbri, et l’invasion étrusque est passée de la côte ouest vers le Nord et l’est (700 à 500 av. jc), en poussant les Ombriens vers les hautes terres des Apennins. Néanmoins, la population Ombrienne ne semble pas avoir été éradiquée dans les districts conquis. Après la chute des Étrusques, les Umbri ont tenté d’aider les Samnites dans leur lutte contre Rome (308 av. jc) ; toutefois les communications avec le Samnium ont été entravées par la forteresse romaine de Narni et la grande bataille de Sentinum,(295 av. jc). La victoire romaine de Sentinum, commence une période d’intégration sous les souverains romains, qui a mis en place des colonies (Spolète) et construit la via Flaminia (220 av. jc), qui est devenu le principal vecteur de développement romain en Ombrie. Au cours de l’invasion d’Hannibal de la deuxième guerre punique, la bataille du lac Trasimène a vu les Umbri conserver une certaine neutralité. Pendant la guerre civile romaine entre Marc-Antoine et Octave (40 av. jc), la ville de Pérouse, prise par Antoine fut presque entièrement détruite par ce dernier. Au temps de Pline l’Ancien, 49 communautés indépendantes existent toujours en Ombrie et l’abondance des inscriptions et la forte proportion de recrues dans l’armée impériale atteste de sa population. La région moderne de l’Ombrie, cependant, est très différente de l’Ombrie de l’époque romaine dont l’étendue débutait dans ce qui est maintenant les Marches du Nord, depuis Ravenne, excluait la rive occidentale du Tibre. Pérouse se situait donc en Étrurie, et les environs de Norcia dans le territoire des Sabins. Après l’effondrement de l’Empire romain, les Ostrogoths et les Byzantins ont lutté pour la suprématie dans la région. Les Lombards fondent le duché de Spolète, couvrant la majeure partie de l’Ombrie d’aujourd’hui.
[22] Narni est une commune de la province de Terni en Ombrie (Italie). L’ancien nom latin de la ville de Narni est Narnia, fondée en 299 av.jc et devenue municipium en 90 av.jc.
[23] Le préfet de Rome ou préfet de la Ville est une magistrature romaine non collégiale et non élective, chargée de gouverner la ville. Si les historiens romains mentionnent durant la monarchie romaine et la République archaïque une délégation temporaire et épisodique pour défendre la ville en l’absence des titulaires du pouvoir, la préfecture de Rome n’est une magistrature réelle que sous l’Empire.
[24] Le Capitole est l’une des sept collines de Rome. C’est le centre religieux de la ville avec le temple consacré à la triade Jupiter, Junon et Minerve. Par extension chaque cité romaine se doit d’avoir son Capitole.
[25] Dans l’Antiquité romaine, la garde prétorienne était une unité de l’armée romaine constituée de soldats d’élite initialement recrutés en Italie. Ces unités tirent leur origine du petit groupe d’hommes dont s’entouraient les magistrats républicains connus sous le nom de préteurs et leur nom du camp des légions romaines où était dressée la tente du commandant de la légion, le prétoire, quand ils partaient en campagne. C’est l’une des unités militaires les plus célèbres de l’histoire romaine.
[26] Les Sarmates sont un ancien peuple scythique de nomades des steppes, appartenant sur le plan ethno-linguistique au rameau iranien septentrional du grand ensemble indo-européen. Ils étaient établis à l’origine entre le Don et l’Oural. C’est aux 3ème et 2ème siècles av. jc que les Sarmates supplantent ces derniers en Ukraine. Leur poussée vers l’ouest se poursuit jusqu’au 1er siècle. À partir du 1er siècle av. jc, alors qu’ils dominent la steppe européenne, les Iazyges, les Urges, les Roxolans et les Scythes royaux, qui reconnaissaient l’autorité d’un roi, vont former une coalition. Des lanciers sarmates sont recrutés par Rome au cours du 2èmesiècle. L’intégration de ces unités auxiliaires se traduit par l’adoption de l’armement et des techniques militaires steppiques ainsi que par la création d’unités spécialisés. À partir du 3ème siècle une partie des Sarmates fut soumise aux Goths. Dès lors, ils font partie d’une coalition de peuples germaniques et non-germaniques, connue sous le nom de culture de Tcherniakov. À la fin du 4ème siècle, sous la pression des Huns certains groupes de Sarmates prirent part aux migrations et s’installèrent sur le territoire romain.