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Al-Muzaffar Sayf ad-Dîn Qutuzn ou Qutuz

mardi 29 août 2023, par lucien jallamion

Al-Muzaffar Sayf ad-Dîn Qutuzn ou Qutuz

Sultan mamelouk baharite d’Égypte de 1259 à 1260

Qutuz se prétend d’origine noble et se dit le neveu du dernier roi Khorezmien [1] Jalal ad-Din pourchassé parles Mongols et éliminé par les Kurdes [2]. Il fut fait prisonnier par les Mongols qui l’ont vendu comme esclave en Syrie [3] sans qu’ils pensent qu’il sera un jour l’artisan de leur première lourde défaite au Moyen-Orient et du recul de l’Empire mongol. Il est revendu au dernier roi de la dynastie ayyoubide [4].

Il gravit les échelons militaires et devient le chef des armées d’Aybak [5] lorsque celui-ci prend le pouvoir avec son épouse la reine Chajar ad-Durr veuve du dernier sultan ayyoubideAs-Salih Ayyoub.

En 1257, après l’assassinat d ’Aybak et de son épouse Chajar ad-Durr, Qutuz devient le tuteur de leur fils Al-Mansur Nur ad-Dîn Ali ben Aybak . En novembre 1257 et avril 1258, il réussit à convaincre les mamelouks bahrites [6] de revenir de Palestine [7] dans un contexte difficile a savoir division dans le corps de l’armée, famine, crise économique, etc..

Il propose aux sultans ayyoubides d’Alep [8] et de Damas [9] Al-Malik an-Naser Salah ad-Dîn Yusuf dit Al-Nâsir Yûsuf , de les aider contre l’invasion mongole mais sa demande fut refusée. Les sultans se réveillent trop tard pour répondre à la menace mongole. De nombreux Syriens fuient vers l’Égypte qui se sent menacée à son tour. Les nouvelles de ces envahisseurs provoquent en Égypte une terreur générale.

Cette situation donne à Qutuz le prétexte de renverser Al-Mansur trop jeune pour assumer la guerre contre les Mongols. Qutuz commence par renforcer son pouvoir en convainquant les autres mamelouks qu’il n’avait agi ainsi que pour combattre les Mongols efficacement. Il promit également de leur octroyer ce qu’ils désiraient une fois la victoire acquise.

Le chef des armées mongoles, Houlagou Khan, lui demande de se rendre. Qutuz refuse et tue les ambassadeurs d’Hulagu pour rendre toute négociation impossible et d’engager tout le monde dans la guerre contre les Mongols.

En août 1260, Qutuz quitte l’Égypte à la tête des armées égyptienne et syrienne réunies pour aller affronter les Mongols. Il envoie le général Baybars en mission de reconnaissance avec une partie de l’armée. Au cours de cette reconnaissance Baybars dut affronter un contingent mongol et emporta la victoire. Ce premier succès contre les Mongols rehausse le moral des troupes musulmanes.

Baybars traverse ce qu’il reste du royaume de Jérusalem [10] et installe son camp devant Saint-Jean-d’Acre [11]. Les croisés d’Acre offrent leur soutien. Qutuz préfère obtenir simplement le gage de leur neutralité sous crainte de trahison des croisés. Il rejoint Baybars dans la vallée de `Ayn Jâlût*, entre Bîsân* et Naplouse*.

L’armée mongole, est menée par Kîtbûqâ depuis le départ soudain d’Hulagu provoqué par la mort de Möngke et des désordres successoraux qui en découlaient. Kîtbûqâ entreprend de rassembler ses troupes qui s’étaient éparpillées en Syrie, en une seule et unique armée. Sa vanité lui fait refuser d’attendre des renforts de la part de Hulagu.

Le 3 septembre 1260, Qutuz et Baybars viennent à bout de l’armée mongole conduite par Ketboğa à la bataille d’`Ayn Jâlût [12]. La Syrie revient aux mamelouks et les Mongols se retirent au-delà de l’Euphrate [13]. Cette victoire marque l’arrêt de l’avancée des Mongols qui ne paraissent plus invincibles.

Qutuz rentre en Égypte le 4 octobre 1260, suivi par Baybars qui assassine Qutuz de sa main lors d’une chasse au lièvre le 24 octobre. Baybars se fait proclamer sultan aussitôt par les chefs militaires.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Martijn Theodoor Houtsma, E. J. Brill’s First Encyclopaedia of Islam, 1913-1936, vol. 4, BRILL, 1993) (ISBN 978-90-04-09796-4)

Notes

[1] Les Khwârazm-Shahs étaient une dynastie perso-turque installée au Khwarezm, en Transoxiane et en Perse de 1077 à 1231.

[2] Le Kurdistan (signifiant littéralement « pays des Kurdes » ou simplement Kurdistan, est une région géographique et culturelle d’Asie occidentale, majoritairement peuplée par les Kurdes. Cette région s’étend dans le sud-est de la Turquie, dans le nord-est de l’Irak, dans le nord-ouest de l’Iran et sur deux petites régions au nord-est et au nord-ouest de la Syrie. Sur ces quatre pays, seuls deux reconnaissent officiellement une région sous la dénomination de « Kurdistan » : l’Iran avec sa province du Kurdistan et l’Irak avec sa région autonome du Kurdistan. Dans certaines villes kurdes, les établissements urbains peuvent remonter à la préhistoire, notamment à Piranshahr (8 000 ans d’habitat urbain) et à Erbil (6 000 ans d’habitation urbaine).

[3] La Syrie fut occupée successivement par les Cananéens, les Phéniciens, les Hébreux, les Araméens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Arméniens, les Romains, les Nabatéens, les Byzantins, les Arabes, et partiellement par les Croisés, par les Turcs Ottomans et enfin par les Français à qui la SDN confia un protectorat provisoire pour mettre en place, ainsi qu’au Liban, les conditions d’une future indépendance politique.

[4] La dynastie musulmane des Ayyoubides ou Ayyubides est une famille kurde et descendante d’Ayyoub. À l’origine ce sont des officiers des émirs Zengi puis Nur ad-Din. Ensuite, Saladin prend le pouvoir en Égypte en 1170, puis unifie la Syrie contre les Francs (appellation des Européens pendant les croisades), avant de conquérir la plus grande partie des États latins d’Orient. Après lui, les sultans Al-Adel et Al-Kâmil règnent en Égypte jusqu’en 1250, tandis que d’autres princes ayyoubides se succèdent en Syrie jusqu’en 1260 et au Yémen jusqu’en 1229.

[5] fondateur de la dynastie des mamelouks

[6] Les Bahrites ou Baharites sont la première dynastie des Mamelouks qui ont régné en Égypte de 1250 à 1382. Ces mamelouks étaient dans le principe de jeunes Turcs Kiptchaks qui avaient été vendus comme esclaves à des marchands égyptiens. Le sultan As-Sâlih Ayyûb, de la dynastie des Ayyoubides, les racheta de ces marchands au nombre de mille, et les fit instruire au métier des armes. Leurs casernements au Caire étaient sur l’île de Roda sur le Nil d’où leur nom de Mamelouks du fleuve ou bahrites. En réalité dès le début, il y a une rivalité entre ces Mamelouks Turcs et les Mamelouks Circassiens installés dans la citadelle (Burjites). Les Mamelouks bahrites censés protéger les sultans ayyoubides vont être à l’origine de la chute de la dynastie en 1250.

[7] Le nom Palestine désigne la région historique et géographique du Proche-Orient située entre la mer Méditerranée et le désert à l’est du Jourdain et au nord du Sinaï. Si le terme « Palestine » est attesté depuis le 5ème siècle av. jc par Hérodote, il est officiellement donné à la région par l’empereur Hadrien au 2ème siècle, désireux de punir les Juifs de leur révolte en 132-135. Elle est centrée sur les régions de la Galilée, de la Samarie et de la Judée. Ses limites sont au nord la Phénicie et le mont Liban et au sud la Philistie et l’Idumée. À l’époque des croisades, le Pérée au nord-est de la mer Morte, la Batanée et la Décapole au-delà du Jourdain y étaient attachés. La Palestine peut désigner le territoire situé uniquement à l’ouest du Jourdain. Historiquement, elle correspond à Canaan, à la Terre d’Israël et fait partie de la région de Syrie (Syrie-Palestine). Les Arabes, qui ont conquis la Palestine sur les Byzantins dans les années 630, divisent la province d’al-Sham en cinq districts (jund), dont l’un garde le nom de « Palestine » et s’étend du Sinaï jusqu’à Akko (connue par les Chrétiens sous le nom de Saint-Jean-d’Acre) ; son chef-lieu est d’abord Ludd (Lod) puis, dès 717, ar-Ramlah (Ramla) et plus tard Jérusalem. Les autres villes les plus importantes sont Rafah, Gaza, Jaffa, Césarée, Naplouse et Jéricho. Ce district de « Palestine » était bordé au nord et à l’est par celui de « Jordanie », al-Urdunn, qui avait pour capitale Tibériade et incluait Akko et Tyr. Les frontières entre ces deux districts ont plusieurs fois varié au cours de l’histoire. À partir du 10ème siècle, cette division a commencé à tomber en désuétude, pour faire place finalement au royaume chrétien de Jérusalem. Sous le gouvernement des Croisés, est fondé en 1099, le royaume latin de Jérusalem ; Jérusalem redevient capitale d’un État. Après la défaite et le départ des Croisés, aux 12ème et 13ème siècles, les jund (districts) arabo-musulmans sont réintroduits, mais leurs frontières sont sans cesse redéfinies.

[8] Alep est une ville de Syrie, chef-lieu du gouvernorat d’Alep, le gouvernorat de Syrie le plus peuplé, situé dans le Nord-Ouest du pays. Pendant des siècles, Alep a été la ville la plus grande de la région syrienne et la troisième plus grande ville de l’Empire ottoman

[9] Damas est l’une des plus anciennes villes continuellement habitées. Elle est aussi la ville la plus peuplée de la grande Syrie (Assyrie) (des traces archéologiques remontent au 4ème millénaire av. jc). Elle est citée dans la Bible, dans le livre de la Genèse, et plusieurs fois dans les Livres des Rois et des Prophètes. Damas connut l’influence de nombreuses civilisations dont celles des Assyriens, Perses, Grecs, Séleucides, Romains, Arabes et Turcs. De la fin du 12ème siècle av. jc à 734 av. jc, elle est la capitale du royaume d’Aram-Damas. Elle fut l’un des berceaux du christianisme et vit saint Paul prononcer ses premières prédications, notamment dans la maison d’Ananie, où celui-ci a ouvert une église domestique dès l’année 37. Cette dernière est la plus vieille de Syrie (aujourd’hui dans le quartier chrétien de Bab Touma). En 635, Damas se soumit aux musulmans et devint la capitale de la dynastie des Omeyyades de 661 à 750. Avec l’adoption de la langue arabe, elle devint le centre culturel et administratif de l’empire musulman durant près d’un siècle. Par la suite, elle demeura un foyer culturel majeur et un pôle économique de premier plan profitant de sa situation géographique privilégiée, à la croisée des chemins de La Mecque, l’Afrique, l’Anatolie, la mer Méditerranée et l’Asie (route de la soie en direction de la Chine et du commerce des épices avec l’Inde).

[10] Le royaume de Jérusalem fut fondé par des princes chrétiens à la fin de la première croisade, lorsqu’ils s’emparèrent de la ville. C’est l’un des États latins d’Orient. On peut distinguer plusieurs périodes dans son histoire : celles où le titre de roi de Jérusalem est associé à la mainmise croisée sur la ville (1099-1187 et 1229-1244), et celles où le titre représente le plus haut niveau de suzeraineté des croisés en Terre sainte, mais durant lesquelles la ville en elle-même n’appartient pas aux soldats croisés. Le royaume de Jérusalem fut créé en 1099 après la prise de la ville et ne disparut réellement qu’avec le départ des derniers croisés de Tortose en août 1291, soit moins de deux siècles plus tard.

[11] Acre est une ville d’Israël, située au nord de la baie de Haïfa, sur un promontoire et dotée d’un port en eaux profondes. Acre est située à 152 km de Jérusalem et dépend administrativement du district nord. Cette ville côtière donne son nom à la plaine d’Acre qui comporte plusieurs villages. Son ancien port de commerce florissant dans l’Antiquité, est devenu une zone de pêche et de plaisance de moindre importance. Elle devient au 13ème siècle la capitale du Royaume de Jérusalem et le principal port de Terre sainte.

[12] La bataille d’Ain Jalut a eu lieu en septembre 1260 entre les Mamelouks musulmans et les Mongols au sud-est de Galilee, dans la vallée de Jezréel, à proximité de Nazareth, non loin du site de Zir’in.

[13] L’Euphrate est un fleuve d’Asie de 2 780 km de long. Il forme avec le Tigre dans sa partie basse la Mésopotamie. Son débit est particulièrement irrégulier puisque plus de la moitié de son flux s’écoule de mars à mai et que le débit peut tomber à 300 m3/s contre un débit moyen de 830 m3/s à l’entrée en Syrie. En période de crue, il peut atteindre 5 200 m3/s pouvant provoquer de graves inondations. Les deux branches mères de l’Euphrate naissent sur le haut-plateau anatolien : celle de l’ouest, ou Karasu, naît près d’Erzurum, dont elle traverse la plaine ; celle de l’est, le Murat, se forme au Nord du lac de Van, sur les flancs d’un contrefort occidental de l’Ararat. Il traverse ensuite la zone de piémont, zone aride partagée entre la Syrie et l’Irak. Arrivé aux environs de Ramadi en Irak, il entre dans la plaine fertile de Mésopotamie, passant par Fallujah à proximité de Bagdad, et puis à environ 1 km à l’ouest des ruines de Babylone. Il rejoint le Tigre dans le sud-est du pays à Qurna à environ 100 km au nord-ouest de Bassorah pour former le Chatt-el-Arab et se jeter dans le golfe Persique.