Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Accueil du site > Histoire du 1er siècle de notre ère > Barabbas dit Jésus Bar Abbas

Barabbas dit Jésus Bar Abbas

mardi 21 septembre 2021, par lucien jallamion

Barabbas dit Jésus Bar Abbas

Personnage des Évangiles

N’apparaissant qu’au cours du procès de Jésus. Il y est présenté comme un prisonnier célèbre qui a provoqué un meurtre dans la sédition, sans toutefois préciser laquelle.

Ponce Pilate, qui estime Jésus innocent et qui aurait été obligé de libérer un prisonnier à chaque fête, propose à la foule de libérer Jésus ou Barabbas. La foule réclame sa libération plutôt que celle de Jésus .

Le consensus historien s’accorde généralement sur l’historicité d’un prisonnier nommé Barabbas distinct de Jésus mais qu’une tendance à accentuer le parallèle entre les deux personnages a pu se développer au fil des rédactions successives des évangiles. Pour certains auteurs, cet épisode, écrit dans les années 60-70, est à considérer comme un procédé littéraire utilisé afin de minimiser la responsabilité des Romains dans la crucifixion de Jésus, pour que l’Évangile selon Marc [1] ne puisse pas être soupçonné de contenir la moindre critique des autorités romaines et le moindre soutien aux participants à la Grande révolte juive de 66-74 [2].

Barabbas est un personnage qui n’apparaît qu’au cours du procès de Jésus, dans une seule source, les évangiles, alors que Ponce Pilate a déjà interrogé Jésus en lui demandant s’il est le roi des Juifs. Jésus acquiesce à cette question par la formule Tu le dis. Dans les évangiles attribués à Marc et Matthieu, Jésus refuse alors de répondre aux autres accusations formulées par Pilate.

C’est alors que Barabbas est introduit dans le récit en invoquant ce que la critique a par la suite appelée le privilège pascal, bien que les évangiles synoptiques [3] fassent références à toutes les fêtes et pas seulement à une coutume qui n’aurait eu lieu qu’à Pâque.

La substitution entre deux prisonniers, Jésus Barabbas et Jésus, le roi des Juifs proposée par Ponce Pilate tel qu’elle est décrite dans les évangiles, est due au fait que le gouverneur romain pouvait, selon les évangiles, relâcher le prisonnier que la foule désignait lors de la fête de Pâque. L’évangile selon Matthieu décrit ainsi ce privilège pascal.

Si ce privilège pascal non attesté est jugé peu probable pour des gouverneurs romains, il semble presque invraisemblable pour un préfet en Judée. En effet, depuis la mort d’Hérode le Grand, puis la prise de contrôle directe de la Judée par les Romains, la Galilée [4], mais aussi la Judée et même parfois la Samarie [5], sont traversées de révoltes, alors que parallèlement des groupes appelés brigands par les Romains infestent le pays. Une telle obligation pour un gouverneur de Judée aurait donc été à haut risque.

En tout cas, Flavius Josèphe, qui s’était proposé de noter tous les privilèges que les Romains avaient accordés aux Juifs, n’a pas cité ce privilège.

Alors qu’il mentionne des dizaines de répressions et des centaines de crucifixions, Josèphe n’en profite à aucun moment pour donner un exemple de prisonnier relâché pour une raison de ce type dans son récit en sept volumes de la “Guerre des Juifs”, ni dans ceux des “Antiquités judaïques” correspondant à cette période.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Simon Claude Mimouni, Le judaïsme ancien du 6ème siècle avant notre ère au 3ème siècle de notre ère : des prêtres aux rabbins, puf, coll. « Nouvelle clio », 2012, 968 p. (ISBN 978-2130563969)

Notes

[1] L’Évangile selon Marc forme, avec les trois autres évangiles, le cœur du Nouveau Testament, la partie la plus récente de la Bible chrétienne. Le deuxième (par sa place) des quatre Évangiles canoniques est aussi le plus bref et probablement le plus ancien ; c’est l’un des trois « Évangiles synoptiques ». La tradition chrétienne attribue sa rédaction à Marc, identifié au Marc compagnon de Paul puis de Pierre, personnage mentionné par le Nouveau Testament, spécialement les Actes des Apôtres et les épîtres de Paul et de Pierre. Son antériorité par rapport aux deux autres synoptiques (Matthieu et Luc) est aujourd’hui admise par le consensus historien, tout comme son utilisation par Matthieu et Luc, dont il constitue l’une des deux sources principales.

[2] La première guerre judéo-romaine, qui s’est déroulée entre 66 et 73., parfois appelée la Grande Révolte, fut la première des trois révoltes des juifs de la province de Judée contre l’Empire romain, telle que relatée principalement par Flavius Josèphe. Elle commença en 66, à la suite des tensions religieuses croissantes entre Grecs et Juifs. Elle s’acheva lorsque les légions romaines de Titus assiégèrent, pillèrent puis détruisirent Jérusalem et le temple d’Hérode en 70 (en 68 selon les sages du Talmud) puis les places fortes des Juifs (principalement Gamla en 67 et Massada en 73).

[3] évangile de Marc, évangile de Matthieu et évangile de Luc

[4] La Galilée est souvent citée dans l’Ancien Testament, et sa partie septentrionale évoquée comme "la Galilée des Gentils" dans le Nouveau Testament. Elle est décrite par Flavius Josèphe qui évoque son histoire, son peuplement sa géographie, et lui donne deux parties : la Galilée supérieure, en grande partie peuplée de Gentils, et la Galilée inférieure, en grande partie peuplée de Juifs. Son nom de Galilée pourrait venir d’un peuplement celte, comme plus au nord la Galatie. Elle recouvrait avant la Captivité les territoires des tribus d’Issacar, de Zabulon, de Nephthali et d’Asher. Comme les Galiléens étaient de bons cultivateurs, plantant des figuiers, des oliviers, des noyers, des palmiers, des habiles artisans et de bons pêcheurs, la Galilée était prospère avec 400 villes, certaines très peuplées.

[5] La Samarie est le nom historique et biblique d’une région montagneuse du Proche-Orient ayant constitué l’ancien royaume d’Israël autour de son ancienne capitale Samarie, proche de Sichem (près de l’actuelle ville de Naplouse), royaume rival de son voisin judéen du sud, celui de Juda. Elle se situe aujourd’hui à cheval sur les territoires de Cisjordanie et d’Israël, dans ce qui représente le tiers septentrional de l’actuelle Cisjordanie et la bande côtière s’étendant au nord de Tel-Aviv jusqu’aux frontières libanaises.