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Jean III Scholastique dit Jean III le Scholastique

lundi 21 octobre 2019

Jean III Scholastique dit Jean III le Scholastique

Patriarcat œcuménique de ConstantinopleNatif de Sirimis, près d’Antioche [1], il commença par être avocat dans cette dernière ville. Ayant été ordonné, il devint spécialiste des questions juridiques dans l’Église d’Antioche [2], et constitua un nouveau code de droit canonique dans lequel les décrets des conciles n’étaient plus rangés chronologiquement, mais par matière, en 50 parties. Il ajouta 89 canons tirés des actes du concile de Sardique [3] et de la Lettre canonique de Basile de Césarée. Plus tard, à Constantinople [4], il publia un Nomocanon [5] qui était un abrégé de son ouvrage précédent, mais avec une mise en parallèle de la législation civile, notamment les Novelles de Justinien [6].

Représentant le patriarcat d’Antioche [7] à Constantinople depuis quelques années, il fut choisi pour remplacer le patriarche Eutychius de Constantinople , démis et exilé par Justinien à la fin janvier 565, à cause de la controverse causée par l’édit impérial sur l’aphthartodocétisme [8].

Habilement, Jean déclara qu’il n’avaliserait l’édit qu’en même temps que les autres patriarches, et on put faire traîner les choses jusqu’à la mort de Justinien, âgé de 83 ans, en novembre. Jean entretint ensuite des relations étroites avec le nouvel empereur, Justin II, dont il favorisa sans doute l’avènement.

L’empereur et le patriarche conduisirent des négociations très ouvertes avec les monophysites [9], d’abord Théodose d’Alexandrie, installé à Constantinople, qui mourut en juin 566, ensuite les responsables de différentes tendances de la mouvance, y compris Jacques Baradée , poursuivi par la police impériale au temps de Justinien, et les trithéistes [10] Conon de Tarse et Eugène de Séleucie.

Un édit impérial contenant les termes d’une possible réconciliation fut promulgué en 567, mais il fut rejeté par un synode monophysite réuni à Callinicum [11]. Les négociations se poursuivirent jusqu’à la promulgation en 571 d’un nouvel édit, qui déclarait que la doctrine du concile de Chalcédoine [12] et celle de Sévère d’Antioche revenaient au même. Cet édit fut d’abord contresigné par plusieurs hauts responsables monophysites, dont le patriarche d’Antioche Paul le Noir , mais la base ne suivit pas, et ces responsables se rétractèrent.

L’empereur perdit alors complètement patience, fit arrêter les responsables qui avaient retiré leur signature, et lança une nouvelle persécution contre les monophysites.

Pendant cette période, le patriarche avait entre autres choses organisé une réunion autour du traité trithéiste du philosophe Jean Philopon, avec d’un côté les évêques Conon de Tarse et Eugène de Séleucie, qui défendaient ce traité, et de l’autre Paul le Noir et un autre évêque monophysite, Étienne de Chypre, qui le condamnaient.

Les actes de ce débat font l’objet du codex 24 de la Bibliothèque de Photius. Selon celui-ci (codex 75), Jean publia en 568 un Catéchisme contre lequel Jean Philopon polémiqua ensuite.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du livre de Vladimir Benechevitch, La Synagogue selon cinquante travaux et d’autres sources juridiques de Jean Scholastique, Saint-Pétersbourg, 1914, traduit en allemand en 1937.

Notes

[1] Antioche est une ville de Turquie proche de la frontière syrienne, chef-lieu de la province de Hatay.

[2] L’Église d’Antioche ou Église de Syrie fut une des premières Églises chrétiennes et une des composantes de la pentarchie. Selon la tradition, elle aurait été fondée en 38 par les apôtres Pierre et Paul. Un de ses évêques les plus célèbres est Ignace d’Antioche. Elle a connu plusieurs schismes au cours de son histoire et aujourd’hui plusieurs Églises, appartenant à des communions différentes, en sont les héritières

[3] Le concile de Sardique est convoqué par les empereurs Constant et Constance, sur l’instance du pape Jules 1er. Le concile de Sardique a lieu à Sardica ou Serdica, actuelle Sofia, en Bulgarie. Le motif de ce synode était l’examen du conflit entre les évêques occidentaux orientaux catholiques, d’une part, et des orientaux arianisants. Le concile est présidé par Ossius de Cordoue et réunit 170 évêques. Il répondit au concile de Philippopolis, conciliabule où les évêques favorables à l’arianisme avaient osé excommunier Ossius, le pape Jules Ier et Protogène de Sardique après avoir confirmé les mesures irrégulières prises au cours du conciliabule d’Antioche de 341 contre S. Athanase. Le concile de Sardique affirme la primauté du Pontife romain, suprême recours et suprême juridiction de l’Église, et combat les Ariens.

[4] Constantinople est l’appellation ancienne et historique de l’actuelle ville d’Istanbul en Turquie (du 11 mai 330 au 28 mars 1930). Son nom originel, Byzance, n’était plus en usage à l’époque de l’Empire, mais a été repris depuis le 16ème siècle par les historiens modernes.

[5] Un nomocanon, dans l’Empire byzantin, était une collection organisée de textes juridiques relatifs à la vie ecclésiastique et religieuse, où se trouvaient unies à la fois des « lois » d’origine séculière (droit romain, « constitutions » impériales) et des « règles normatives » émanant d’autorités religieuses, conciles ou Pères de l’Église. Ce mot composé, qui apparaît au 11ème siècle (mais pour désigner des recueils plus anciens), exprime l’interpénétration de plus en plus grande qui s’est faite entre les deux sources de législation.

[6] Les Novellae Constitutiones, quae post nostri codicis confectionem late sunt (de leur titre complet en latin signifiant littéralement « nouvelles constitutions produites après la rédaction de notre code »), ou simplement Novellae Constitutiones, communément appelées les Novelles de Justinien en français, sont l’une des quatre composantes du Corpus juris civilis rédigé sous l’empereur byzantin Justinien (les trois autres sont le Code de Justinien, le Digeste et les Institutes). Les Novelles comprennent les lois promulguées par l’empereur après la parution de la deuxième édition de son Code en 534. Contrairement aux trois autres livres, celles-ci sont souvent rédigées en grec lorsqu’elles s’adressent aux régions orientales de l’empire ; d’autres le sont en latin, et certaines dans les deux langues.

[7] Le titre de « patriarche d’Antioche » est traditionnellement porté par l’évêque d’Antioche (dans l’actuelle Turquie). L’Église d’Antioche est l’une des plus anciennes de la chrétienté, son institution remontant à l’apôtre Pierre. Aujourd’hui, pas moins de cinq chefs d’Église, dont trois catholiques, portent le titre de « patriarche d’Antioche ». Aucun d’entre eux ne réside à Antioche / Antakya depuis la présence musulmane majoritaire en Turquie.

[8] L’aphthartodocétisme est une doctrine apparue au début du 6ème siècle enseignant l’incorruptibilité du corps du Christ avant sa résurrection. Cette doctrine christologique a connu son heure de gloire sous Justinien, qui, d’après le De sectis attribué à Léonce de Byzance, aurait fini par y adhérer. Elle consiste à dire que le corps du Christ étant inséparable de sa divinité (selon un point de vue propre à Cyrille d’Alexandrie et au monophysisme), il n’a pas pu lui-même, de par sa nature propre, s’altérer dans la mort ni même souffrir, Dieu n’étant pas sujet à la corruption de la matière. Elle a été formulée par Julien d’Halicarnasse, d’où le nom de Julianistes donné parfois à ses partisans. On les appelle aussi Phantasiates (les souffrances du Christ, quoique réelles, sont apparentes, elles ne sont pas dues à sa nature mais à sa volonté) et Gaianites (du nom du premier évêque de l’Église dissidente, qui a essaimé principalement dans le monde syriaque). Justinien y adhéra à la fin de sa vie, et la consacra par un édit de janvier 565. Il s’aliéna ainsi tout le clergé orthodoxe et fit déposer et exiler le patriarche de Constantinople Eutychius.

[9] Le monophysisme est une doctrine christologique apparue au 5ème siècle dans l’Empire byzantin en réaction au nestorianisme, et ardemment défendue par Eutychès et Dioscore d’Alexandrie.

[10] Le trithéisme est la croyance qu’il y a trois principes divins qui forment une triade. Il s’agit souvent de trois dieux ayant des pouvoirs et des sphères d’influence distincts mais complémentaires. De cette manière, le trithéisme diffère du dualisme qui envisage deux principes divins antagonistes.

[11] Raqqa, est une ville du centre de la Syrie. C’est la capitale éponyme du gouvernorat de Raqqa. Située dans le Nord du pays, la ville de Raqqa est établie sur les rives de l’Euphrate en aval du lac el-Assad, à 170 km à l’est d’Alep. Elle doit sa fondation sous le nom de Nikephorion, au roi Séleucos 1er qui règne de 305 à 281 av. jc. Vers 244, Séleucos II fait agrandir la ville et la renomme d’après son surnom Kallinikos (latinisé en Callinicum) signifiant « grand vainqueur ». Elle fait alors partie de l’Osroène.

[12] Le concile de Chalcédoine est le quatrième concile œcuménique et a eu lieu du 8 octobre au 1er novembre 451 dans l’église Sainte-Euphémie de la ville éponyme, aujourd’hui Kadıköy, un quartier chic de la rive asiatique d’Istanbul. Convoqué par l’empereur byzantin Marcien et son épouse l’impératrice Pulchérie, à partir du 8 octobre 451, le concile réunit 343 évêques dont quatre seulement viennent d’Occident. Dans la continuité des conciles précédents, il s’intéresse à divers problèmes christologiques et condamne en particulier le monophysisme d’Eutychès sur la base de la lettre du pape Léon 1er intitulée Tome à Flavien (nom du patriarche de Constantinople, destinataire de la lettre du pape).