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Davith Saharouni ou Davit Saharouni

dimanche 29 septembre 2019, par lucien jallamion

Davith Saharouni ou Davit Saharouni

Gouverneur byzantin d’Arménie de 635 à 638

L'Arménie perse au 5ème siècleDe 614 à 629, l’empereur byzantin Héraclius 1er combat l’Empire sassanide [1] et plusieurs campagnes menées en Arménie lui permettent de prendre le contrôle de cette région, puis d’en obtenir la cession d’une partie du roi Kavadh II. Peu avant, en 628 à Gandzak [2] où il hivernait, il avait élevé un de ses partisans arméniens, Mejēj II Gnouni, à la dignité de strategos [3].

En 628, Kavadh II nomme Varaz-Tiroç II Bagratouni marzban [4] de la partie d’Arménie restée perse, tandis qu’Héraclius nomme en 630 Mejēj Gnouni gouverneur de la partie byzantine de l’Arménie. Ce dernier se rend rapidement impopulaire par sa politique cherchant à rallier l’Église arménienne à l’orthodoxie grecque et aux formules chalcédoniennes [5].

Mejēj Gnouni calomnie Varaz-Tiroç auprès du perse Rôstahm, commandant de l’Azerbaidjan [6], allant même jusqu’à demander son rappel, faute de quoi la guerre reprendrait entre Byzance et la Perse. Il envoie également son frère Garikhpet se saisir de Varaz-Tiroç, mais ce dernier s’enfuit et se réfugie à Byzance, où Héraclius reconnaît la calomnie dont il a été victime et l’élève à la dignité de patrice Patrice est un titre de l’empire romain, créé par Constantin 1er. Dans les années 310-320, Constantin abolit le patriciat romain, vieille distinction sociale qui avait ses racines au début de la république romaine. Le titre de patrice est désormais accordé par l’empereur à des personnes de son choix, et non plus à des familles entières. Dès son apparition, le titre de patrice permet à son titulaire d’intégrer la nobilitas, comme le faisait déjà le patriciat républicain. Le titre était décerné à des personnages puissants mais non membres de la famille impériale ; il vient dans la hiérarchie immédiatement après les titres d’Auguste et de César. Ce titre fut ensuite conféré à des généraux barbares au service de l’empire. Le titre fut encore porté par des notables gallo-romains au 6ème siècle. Sous les Mérovingiens, le titre de patrice était donné au commandant des armées burgondes. Les papes l’ont notamment décerné à plusieurs reprises pour honorer des personnages qui les avait bien servis. Le titre fut également conservé dans l’Empire byzantin, et son importance fut même accrue au 6ème siècle par Justinien 1er, qui en fit la dignité la plus haute de la hiérarchie aulique. C’était une dignité accordée par brevet. Dans les siècles suivants, elle fut progressivement dévaluée par la création de nouveaux titres. La dignité de patrice disparut à Byzance au 12ème siècle..

Cependant compromis dans un complot contre l’empereur, Varaz-Tiroç est exilé dans une île lointaine en 635. Davit Saharouni, compromis dans le même complot, est arrêté par Mejēj Gnouni et envoyé à Byzance, mais il brise ses fers, revient en Arménie et rallie les contingents arméniens de l’armée, surprend Mejēj Gnouni et le tue, ainsi que Varaz-Gnel.

Davith obtient le soutien des féodaux et des fonctionnaires arméniens qui intercèdent en sa faveur auprès d’Héraclius, qui reconnaît le fait accompli, lui pardonne sa participation au complot et le nomme curopalate [7] d’Arménie. Il exerce cette fonction pendant trois ans, pendant lesquels il fait construire une église à Mrèn.

Cependant l’insubordination des Nakharar [8] augmente au cours du temps. Ces derniers se révoltent en 638 et chassent Davith Saharouni.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Christian Settipani, Continuité des élites à Byzance durant les siècles obscurs. Les princes caucasiens et l’Empire du vie au ixe siècle, Paris, de Boccard,‎ 2006, 634 p. (ISBN 978-2-7018-0226-8).

Notes

[1] Les Sassanides règnent sur le Grand Iran de 224 jusqu’à l’invasion musulmane des Arabes en 651. Cette période constitue un âge d’or pour la région, tant sur le plan artistique que politique et religieux. Avec l’Empire romano byzantin, cet empire a été l’une des grandes puissances en Asie occidentale pendant plus de quatre cents ans. Fondée par Ardashir (Ardéchir), qui met en déroute Artaban V, le dernier roi parthe (arsacide), elle prend fin lors de la défaite du dernier roi des rois (empereur) Yazdgard III. Ce dernier, après quatorze ans de lutte, ne parvient pas à enrayer la progression du califat arabe, le premier des empires islamiques. Le territoire de l’Empire sassanide englobe alors la totalité de l’Iran actuel, l’Irak, l’Arménie d’aujourd’hui ainsi que le Caucase sud (Transcaucasie), y compris le Daghestan du sud, l’Asie centrale du sud-ouest, l’Afghanistan occidental, des fragments de la Turquie (Anatolie) et de la Syrie d’aujourd’hui, une partie de la côte de la péninsule arabe, la région du golfe persique et des fragments du Pakistan occidental. Les Sassanides appelaient leur empire Eranshahr, « l’Empire iranien », ou Empire des Aryens.

[2] Gandja est la deuxième plus grande ville de la république d’Azerbaïdjan. Elle était nommée Elizavetpol de 1804 à 1918 et Kirovabad de 1935 à 1990. Quand l’Azerbaïdjan a pris son indépendance en 1991, le nom historique, Gandja, a été restauré

[3] Un stratège est un membre du pouvoir exécutif d’une cité grecque, qu’il soit élu ou coopté. Il est utilisé en grec pour désigner un militaire général. Dans le monde hellénistique et l’Empire Byzantin, le terme a également été utilisé pour décrire un gouverneur militaire. Dans la Grèce contemporaine (19ème siècle jusqu’à nos jours), le stratège est un général et a le rang d’officier le plus élevé.

[4] Le marzpanat ou marzbanat est le système de gouvernement instauré par les Sassanides en Arménie, en vigueur de 428 à 646. À sa tête est installé un marzpan ou marzban (« gouverneur »).

[5] Le concile de Chalcédoine est le quatrième concile œcuménique et a eu lieu du 8 octobre au 1er novembre 451 dans l’église Sainte-Euphémie de la ville éponyme, aujourd’hui Kadıköy, un quartier chic de la rive asiatique d’Istanbul. Convoqué par l’empereur byzantin Marcien et son épouse l’impératrice Pulchérie, à partir du 8 octobre 451, le concile réunit 343 évêques dont quatre seulement viennent d’Occident. Dans la continuité des conciles précédents, il s’intéresse à divers problèmes christologiques et condamne en particulier le monophysisme d’Eutychès sur la base de la lettre du pape Léon 1er intitulée Tome à Flavien (nom du patriarche de Constantinople, destinataire de la lettre du pape).

[6] Pays du Caucase situé sur la ligne de division entre l’Europe et l’Asie. Sa capitale est Bakou, sa langue officielle est l’azéri et sa monnaie est le manat. Du 7ème au 10ème siècles, la région connaît un essor politique, sous les Sajides, les Chirvanchahs, les Salarides, les Ravvadides et les Cheddadides. Au 12ème siècle, après l’effondrement de l’Empire seldjoukide, les Atabegs d’Azerbaïdjan règnent depuis leur capitale de Nakhitchevan, puis d’Ardabil, et enfin de Tabriz, sur l’Azerbaïdjan iranien actuel et sur l’Arran (l’Azerbaïdjan moderne). Leur territoire est ensuite conquis par le Khwarezmchahs Jalal ad-Din au 13ème siècle, dont l’État succombe ensuite aux Mongols. Au 13ème siècle, l’Empire mongol des Khulaguides est fondé, avec sa capitale à Tabriz.

[7] La dignité de curopalate fut d’abord une fonction de la cour impériale byzantine avant de devenir l’un des titres les plus prestigieux du 6ème au 12ème siècle. Réservée aux membres de la famille impériale et à divers rois et princes du Caucase, elle finit par se déprécier et être reléguée à la fin des listes de préséance avant de tomber en désuétude sous les Paléologues. L’épouse d’un curopalate portait le titre de kouropalatissa.

[8] Le nakharar est un satrape héréditaire en Arménie. Ce titre est de premier ordre au sein de la noblesse arménienne antique et médiévale. Durant cette période, l’Arménie est divisée en larges domaines, propriétés d’une famille noble et gouvernés par l’un de ses membres, auquel les titres nahapet (« chef de famille ») ou tanuter (« maître de maison ») sont donnés. Les autres membres d’une famille de nakharar gouvernent à leur tour des portions plus petites du domaine familial. Les ’nakharark’ jouissant d’une grande autorité sont reconnus comme ishkhans (princes).