Il donna la première description détaillée du botulisme [1] et fut aussi le précurseur des applications thérapeutiques de la toxine botulique dont il expérimenta les effets sur lui-même et sur de nombreux animaux. Il est l’auteur d’un livre sur “la voyante de Prevorst”.
Justinus Kerner était natif de Ludwigsbourg [2], dans le Wurtemberg [3], où son père occupait la fonction officielle d’Oberamtmann [4], comme l’avait fait avant lui son grand-père.
Après sa scolarité effectuée à Ludwigsbourg puis Maulbronn [5] où son père avait été transféré, il entra d’abord comme apprenti dans une usine de vêtements. Mais il ne tarda pas à trouver ce travail fastidieux et pour se distraire commença à composer des poèmes. Il allait aussi divertir les pensionnaires d’un asile d’aliénés hébergés dans le même bâtiment en leur jouant de la guimbarde [6].
En 1804 il put s’inscrire à l’Université de Tübingen [7], grâce à l’intervention du professeur Karl Philipp Conz qui avait remarqué son talent littéraire. Il y étudia non seulement la médecine mais aussi la littérature en compagnie de Ludwig Uhland et de Gustav Schwab avec lesquels il se lia d’amitié. Tous 3 devaient former plus tard le noyau de l’école poétique souabe [8].
En 1807, Kerner fit la connaissance de celle qui devait devenir sa femme, Friedericke Ehrmann, surnommée Rickele, à qui nombre de ses poésies furent dédiées et qu’il épousa en 1813. De ce mariage sont issus 3 enfants.
Après l’obtention de son diplôme de médecin en 1808 il fit quelques voyages, puis s’établit en clientèle privée à Wildbad [9]. C’est là qu’il termina son “Reiseschatten von dem Schattenspieler Luchs” en 1811, où ses propres expériences sont décrites avec un humour caustique. Il collabora ensuite, pendant l’année 1812, avec Uhland et Schwab, au “Poetischer Almanach” qui fut suivi du “Deutscher Dichterwald” en 1813, 2 revues dans lesquelles il publia certains de ses meilleurs poèmes. Sa maison, située au pied du château historique de Weibertreu, lui avait été offerte par les habitants de la ville. Elle devint une Mecque pour les pèlerins littéraires, qui étaient tous bien accueillis.
Gustave IV Adolphe de Suède y arriva avec un havresac sur le dos. Les poètes Christian Friedrich Alexander von Württemberg et Nikolaus Lenau étaient des invités réguliers.
En 1826 il publia un recueil de Gedichte [10] qui devaient être plus tard complétés par “Der letzte Blütenstrauß” en 1852 et “Winterblüten” en 1859. Parmi ses autres poèmes figurent “la ballade Der reichste Fürst”, une chanson à boire : “Wohlauf”, “noch getrunken” et le pensif “Wanderer in der Sägemühle”. Il donne une description vivante et savoureuse de ses années de jeunesse dans “Bilderbuch aus meiner Knabenzeit” en 1859. Il fait preuve enfin d’un grand talent de conteur dans sa narration de l’assaut donné à la cité de “Weinsberg” au 16ème siècle, “Die Bestürmung der württembergischen Stadt Weinsberg im Jahre” . En 1815 il avait obtenu le poste de médecin officiel du district [11] à Gaildorf [12] et en 1818 fut transféré à Weinsberg [13], où il passa le reste de sa vie. À côté de ces œuvres littéraires, Kerner fut l’auteur de plusieurs livres médicaux populaires traitant du magnétisme animal.
Il fut le premier à faire une recherche sur la vie de Franz Anton Mesmer et à rassembler des documents biographiques s’y rapportant. En 1826 se présenta Friederike Hauffe , fille d’un garde-forestier de Prevors [14] et somnambule extra-lucide dont Kerner relata l’histoire dans son livre Die Seherin von Prevorst, Eröffnungen über das innere Leben des Menschen und über das Hineinragen einer Geisterwelt in die unsere [15] en 1829.
Kener a écrit un fameux mémoire sur l’influence de l’acide sébacique [16] sur les organismes animaux, “Das Fettgift oder die Fettsäure und ihre Wirkung auf den tierischen Organismus” en 1822, lequel contient la première description historique du botulisme.
Il publia aussi un ouvrage consacré à la ville thermale de Bad Wildbad et aux propriétés curatives de ses eaux , “Das Wildbad im Königreich Württemberg” en 1813.
En 1851 une cécité croissante l’obligea à abandonner la pratique médicale et il termina sa vie à Weinsberg entouré des soins attentifs de ses filles. Il fut enterré dans le cimetière de Weinsberg aux côtés de sa femme elle-même décédée en 1854.
Kerner fut l’un des poètes les plus inspirés de l’école souabe. Ses poésies, qui font une large part aux phénomènes de la nature, se distinguent par une profonde mélancolie avec un penchant pour le surnaturel, qui est toutefois tempéré par un humour léger, rappelant celui des “Volkslieder”.