Théodore 1er Ange Doukas Comnène dit Théodore Ange (mort après 1252)
Despote d’Épire de 1215 à 1230-Empereur byzantin proclamé de Thessalonique de 1224 à 1230
Demi-frère du fondateur du despotat [1], Michel 1er Ange , fils de Jean Ange Comnène, lui-même petit-fils de l’empereur byzantin Alexis 1er Comnène.
Le premier fait marquant du règne de Théodore Ange est la capture de l’empereur latin Pierre de Courtenay en 1217.
Fin 1224, il profite de l’absence de Démétrios de Montferrat , roi latin de Thessalonique [2], pour occuper son royaume. Son territoire s’étend alors sur l’Épire [3], la Thessalie [4] et une grande partie de la Macédoine.
En 1225, il enlève aux Vénitiens Corfou et Durazzo [5], aux Latins Xantheia [6] et Didymotique [7], et aux Byzantins de Nicée [8] la ville d’Andrinople [9], à peine prise à l’Empire latin de Constantinople [10]. Pour la prise d’Andrinople, Théodore Ange se rapproche de Jean III Doukas Vatatzès et recherche l’alliance du tsar valaque [11] de Bulgarie, Ivan Assen II .
En 1228, il devient le rival de l’empereur de Nicée en se faisant couronner à Thessalonique par l’archevêque d’Ochrida [12], Dèmètrios Chomatenos .
Le 9 mars 1230, il subit une écrasante défaite contre le royaume bulgare à Clocotniţa [13] en Thrace [14].
Il est fait prisonnier par le tsar Ivan Asen II qui lui fait crever les yeux. Ses possessions restantes sont divisées entre son neveu Michel II Doukas qui devient despote d’Épire, et ses frères Manuel (Thessalonique) et Constantin (Acarnanie [15]).
Théodore Ange est libéré en 1238 et devient le beau-père d’Ivan Asen II, qui épouse sa fille Irène en secondes noces. Il évince alors du trône de Thessalonique son frère Manuel, qui avait régné de 1230 à 1238. Il le remplace par son fils aîné Jean III Doukas Comnène qui règne de 1238 à 1244.
Théodore Ange s’installe ensuite à Nicée où l’empereur Jean III Doukas Vatatzès le fait intervenir auprès de son fils pour qu’il renonce à son titre impérial et se contente de celui de despote en 1242.
De retour à Thessalonique, Théodore Ange assume le gouvernement au nom de ses fils Jean et Démétrios jusqu’à la prise de la ville par Jean III Doukas Vatatzès en 1244.
En décembre 1246, Théodore Ange se retire alors à Vodhena [16].
En 1252, il incite son neveu, le despote d’Épire Michel II, à attaquer Jean III Doukas Vatatzès. Mais l’offensive échoue à la bataille de Pélagonia [17] et Jean III se fait livrer Théodore Ange, qui meurt en prison.
Notes
[1] Le despotat d’Épire est un des États successeurs de l’empire byzantin né après la quatrième croisade en Épire, une région qui s’étend sur la côte adriatique entre le sud de l’Albanie actuelle et le golfe de Corinthe. Le terme de despotat est formé sur celui de despote, qui désigne alors à la cour de Constantinople un membre de la famille impériale. Son équivalent le plus proche est prince ; un despotat serait donc une principauté.
[2] Le royaume de Thessalonique est l’un des États latins qui apparurent après la conquête de Constantinople par les Croisés en 1204. Érigé autour de Thessalonique, qui avait été la deuxième ville en importance de l’empire byzantin, vassal de l’empire latin de Constantinople, son existence fut éphémère, se terminant vingt ans après sa création par la prise de la ville par le despote d’Épire, Théodore 1er l’Ange, et la création d’un « empire de Thessalonique » encore plus éphémère.
[3] Épire est une région montagneuse des Balkans, partagée entre la Grèce et l’Albanie. Épire signifie « continent » en grec.
[4] La Thessalie est une région historique et une périphérie du nord-est de la Grèce, au sud de la Macédoine.
[5] actuelle Durrës
[6] Xánthi est une ville de Macédoine-Orientale-et-Thrace, dans le nord de la Grèce et capitale du nome du même nom.
[7] Didymotique est une ville de Thrace, située au nord-est de la Grèce dans le district régional (préfecture) de l’Évros. Le nom peut être romanisé de plusieurs façons et plusieurs graphies sont donc utilisées. Elle est appelée Le Dimot par les auteurs français du Moyen Âge.
[8] Vestige de l’Empire byzantin ayant résisté à la prise de Constantinople par les croisés en 1204, l’Empire de Nicée était le plus étendu des États impériaux successeurs : l’Empire de Nicée, le despotat d’Épire et l’Empire de Trébizonde. Il occupait, en Asie Mineure occidentale, une large bande de terre s’étendant de la mer Égée à la mer Noire. Si Nicée demeura sa capitale et le siège du patriarcat pendant toute sa brève histoire (1204-1261), les empereurs établirent leur résidence et le siège du gouvernement à Nymphaion (aujourd’hui Kemalpaşa), ville de Lydie, moins exposée aux armées ennemies. Se défendant à la fois contre les États successeurs et le sultanat seldjoukide, Théodore 1er Laskaris réussit à édifier un État politiquement stable et économiquement viable en Asie Mineure. Ses successeurs, Jean III Doukas Vatatzès et Théodore II Laskaris, étendirent le territoire de l’empire en Europe, encerclant progressivement Constantinople. Après avoir écarté Jean IV Lascaris, le successeur légitime de Théodore II, Michel VIII Paléologue n’eut plus qu’à reprendre la ville en 1261 grâce à un concours de circonstances. L’Empire de Nicée redevint ainsi une partie constituante de l’Empire byzantin rénové.
[9] Edirne (autrefois Andrinople ou Adrianople) est la préfecture de la province turque du même nom, limitrophe de la Bulgarie et de la Grèce. La ville est traversée par la Maritsa (Meriç en turc).
[10] L’Empire latin de Constantinople est un État éphémère fondé en avril 1204 sur le territoire de l’Empire byzantin à la suite de la quatrième croisade et la chute de Constantinople aux mains des Latins. Il dure jusqu’en 1261, année de la reconquête de la ville par Michel Paléologue, qui restaure l’Empire byzantin.
[11] Historiquement, avant le milieu du 19ème siècle, « Valaques » était l’exonyme qui désignait les populations locutrices des langues romanes orientales issues de la romanisation des langues thraces et illyriennes (Daces, Gètes, Thraces, Illyres, Dalmates...) à partir du 1er au 6ème siècle dans les Balkans et le bassin du bas-Danube. Il est encore employé dans ce sens par les historiens non spécialistes et notamment dans de nombreux atlas historiques. Les historiens roumains préfèrent employer le terme de « Proto-roumains » (jusqu’au 11ème siècle) et de « Roumains » (depuis le 12ème siècle), d’une part parce qu’à l’instar des autres populations romanophones issues de la désagrégation de l’Empire romain, les « Valaques » se désignaient eux-mêmes par des endonymes comme romani, români, rumâni, rumâri, armâni ou arumâni, d’autre part parce que « Valaques » pouvait aussi être localement employé (notamment dans l’espace ex-yougoslave) pour désigner des montagnards, des bergers ou des fidèles de l’Église orthodoxe non romanophones, ou qui ont cessé de l’être depuis des générations.
[12] La ville d’Ohrid est née pendant l’Antiquité, elle s’appelait alors Lychnidos et possédait un théâtre antique et une acropole. Après les invasions slaves du début du Moyen Âge, la ville devient au 9ème siècle un grand centre religieux et culturel. Saint Clément d’Ohrid y fonde alors un grand monastère et participe à l’établissement de l’alphabet cyrillique et de la culture bulgaro macédonienne. Un siècle plus tard, Samuel 1er de Bulgarie fait d’Ohrid la capitale de son empire. Conquise par les Ottomans, Ohrid connaît un certain déclin avant de devenir au 19ème siècle un foyer de développement du nationalisme macédonien.
[13] Klokotnica est un village de Bulgarie, oblast de Khaskovo, obchtina de Khaskovo, près d’Haskovo, Là, le 9 mars 1230, eut lieu la bataille de Klokotnica qui vit la victoire décisive du Deuxième État bulgare sur le Despotat d’Épire.
[14] La Thrace est une région de la péninsule balkanique partagée entre : la Bulgarie (Thrace du nord), la Grèce (Thrace occidentale ou Thrace égéenne) et la Turquie (Thrace orientale). Elle doit son nom aux Thraces, peuple indo-européen qui occupait la région dans l’Antiquité.
[15] L’Acarnanie est une région occidentale de la Grèce antique, délimitée au nord par le golfe Ambracique, à l’ouest et au sud-ouest par la mer Ionienne. À l’est, le fleuve Achéloos la sépare de l’Étolie.
[16] Édessa ou Édesse est une ville grecque de Macédoine, la capitale du district régional de Pella
[17] La bataille de Pélagonia eu lieu en septembre 1259, entre l’empire de Nicée et une alliance entre la principauté d’Achaïe et le despotat d’Épire. Ce fut un événement décisif dans l’histoire du Proche-Orient, assurant la reconquête byzantine de Constantinople et la fin de l’Empire latin de Constantinople en 1261, et le début de la reconquête byzantine de la Grèce.