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Polycrate de Samos

samedi 16 septembre 2023, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 6 mai 2013).

Polycrate de Samos

Tyran de l’île de Samos de 538 à 522 av.jc

Représentation de Polycrate de Samos Tyran de l'île de Samos de 538 à 522 av.jc par Alexandre Iacovleff. Source : wiki/Polycrate de Samos/ domaine publicFils d’Alakes, un riche habitant de Samos [1], il profite de la situation nouvelle dans laquelle se trouve le monde grec depuis la conquête du royaume de Lydie [2] par Cyrus II. Celui-ci, en effet, impose aux cités ioniennes [3] d’Asie mineure [4] le paiement d’impôts et la fourniture de soldats. Suite à sa prise de Babylone [5], Cyrus et la flotte phénicienne qu’il contrôle menacent les îles grecques, et notamment Samos. Cela crée une situation de crise dont profite Polycrate pour prendre le pouvoir.

Avec ses frères Pantagnotos et Syloson, il prend le pouvoir lors d’un festival en l’honneur d’Héra.

Soutenus par le peuple, ils assassinent les chefs des familles aristocratiques de l’île. Mais peu après, Polycrate assassine aussi son premier frère et exile le second afin de régner seul.

Il a la réputation d’être un guerrier féroce et un tyran éclairé. Il se comporte en souverain absolu, et, grâce à sa flotte de corsaires, impose une sorte de blocus aux cités de la côte ionienne en Asie mineure, jusqu’à ce qu’elles acceptent de lui payer tribut. Plus tard, avec une flotte de 100 pentécontères [6] et une armée de 1000 archers, il pille les îles de la mer Égée [7] et celles des cités ioniennes qui lui résistaient ou se rebellaient, battant leurs flottes et réduisant en esclavage les populations de Lesbos [8] et Milet [9]. Il profite ensuite des relations commerciales étendues de ces villes, notamment de Milet.

Polycrate noue ultérieurement une alliance avec Cyrène [10], puis avec le pharaon d’Égypte Ahmosis II, et avec le tyran [11] de Naxos [12], Lygdamis. Il conquiert aussi la petite île de Rhénée [13] qu’il relie à Délos [14] par une chaîne pour la dédier à Apollon. Il fait construire à Samos un aqueduc [15], un grand temple à Héra auquel Ahmosis II fera de nombreuses offrandes, et un palais que reconstruira l’empereur romain Caligula. Il est aussi le protecteur des poètes Anacréon et Ibycos mais aussi du médecin de Crotone [16], Démocédès .

L’alliance avec Ahmosis II fut sans doute brisée suite à un accord entre Polycrate et le Grand Roi perse Cambyse II contre l’Égypte, qui devient une province perse. À cette époque, le Samien fait construire une flotte de 40 trières [17], certainement la première du monde grec utilisant ce nouveau type de navires. Il fait embarquer sur ces vaisseaux des hommes qu’il juge enclins à la révolte et demande au monarque perse de les exécuter. Mais ceux-ci, se doutant du piège, quittent l’Égypte et reviennent à Samos pour attaquer le tyran. Celui-ci perd contre eux une bataille navale puis se retranche sur les hauteurs de l’île d’où les insurgés ne parviennent pas à le déloger. Ils font alors voile vers la Grèce continentale pour solliciter l’aide de Sparte [18] et de Corinthe [19] qui envahissent l’île et font le siège de la cité de Samos pendant 40 jours, sans succès.

Vers la fin du règne de Cambyse, le satrape [20] Oroitès de Sardes [21] décide de tuer le tyran, soit parce qu’il n’a pas réussi à intégrer Samos à l’empire perse, soit parce que Polycrate aurait infligé une rebuffade à un ambassadeur perse. Quoi qu’il en soit, il se rend à Sardes où il est invité, malgré les mises en garde de sa fille, et y est assassiné. Il n’est pas fait mention par l’auteur des circonstances de sa mort mais il semblerait que l’illustre tyran ait connu une fin peu glorieuse, peut-être par crucifixion.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Biographie de Polycrate de Samos par Jona Lendering/traduit par mes soins de l’anglais

Notes

[1] Samos est une île grecque de la mer Égée, proche de l’Asie Mineure et située à 70 kilomètres au Sud-ouest de Smyrne, aujourd’hui Izmir en Turquie. Elle forme un dème (municipalité) et un district régional de la périphérie d’Égée-Septentrionale. Son chef-lieu est la ville de Vathy ; les deux autres villes sont Chora et Pythagorion (Tigani).

[2] La Lydie est un ancien pays d’Asie Mineure, situé sur la mer Égée et dont la capitale était Sardes. Elle était connue par Homère sous le nom de Méonie. La Lydie est évoquée dans les légendes d’Héraclès et Omphale, ou de Tantale et Pélops. La Lydie était une région occidentale de l’Asie Mineure, bordée au nord par la Mysie, au sud par la Carie et à l’est par la Phrygie. Comprenant les vallées de l’Hermos et du Méandre, la Lydie était située sur le parcours des grandes routes commerciales, et disposait de nombreuses ressources minières propres.

[3] L’Ionie est une région du monde grec antique située à l’ouest de l’Asie mineure, entre Phocée et Milet. Elle correspond à la région située dans un rayon de 170 km autour de la ville actuelle d’Izmir. Elle emprunte son nom à Ion, ancêtre légendaire des peuples de cette région. C’est en Ionie que se sont développées les premières formes de science de la philosophie en Occident, chez les penseurs appelés Présocratiques. Les côtes ioniennes présentent beaucoup d’avantages économiques : de bons abris naturels facilitant l’établissement de ports pour le commerce avec des communications aisées vers l’arrière-pays, un climat agréable, des vallées ouvertes pour la culture des céréales et l’élevage des chevaux, des plateaux pour l’élevage des moutons, des collines pour les arbres fruitiers et les oliviers. Dans l’Antiquité, elle fédérait douze cités grecques, du continent et des îles : Chios, Éphèse, Érythrée, Clazomènes, Colophon, Lébédos, Milet, Myonte, Phocée, Priène, Samos et Téos. Halicarnasse les rejoignit après. Brillant foyer de la civilisation hellénique aux 7ème et 6ème siècle av. jc, elle appartient à une ensemble plus vaste appelé « Grèce d’Asie » ou « Grèce de l’Est ».

[4] L’Anatolie ou Asie Mineure est la péninsule située à l’extrémité occidentale de l’Asie. Dans le sens géographique strict, elle regroupe les terres situées à l’ouest d’une ligne Çoruh-Oronte, entre la Méditerranée, la mer de Marmara et la mer Noire, mais aujourd’hui elle désigne couramment toute la partie asiatique de la Turquie

[5] Babylone était une ville antique de Mésopotamie. C’est aujourd’hui un site archéologique majeur qui prend la forme d’un champ de ruines incluant des reconstructions partielles dans un but politique ou touristique. Elle est située sur l’Euphrate dans ce qui est aujourd’hui l’Irak, à environ 100 km au sud de l’actuelle Bagdad, près de la ville moderne de Hilla. À partir du début du 2ème millénaire av. jc, cette cité jusqu’alors d’importance mineure devient la capitale d’un royaume qui étend progressivement sa domination à toute la Basse Mésopotamie et même au-delà, sous le règne de Hammurabi dans la première moitié du 18ème siècle av. jc.

[6] Le pentécontère ou pentécontore est un bateau de guerre à 50 rameurs d’où son nom auquel il faut ajouter un barreur et peut-être d’autres marins. Il mesurait environ 35 mètres de long, pour 5 mètres de large. Les premiers pentécontères apparaissent vers le 12ème siècle av. jc, à l’époque de la Guerre de Troie. Selon Hérodote, ce sont les Phocéens qui, les premiers à avoir accompli des navigations lointaines, voyagent non pas à bord de vaisseaux ronds mais sur des vaisseaux à cinquante rames. Ce type de navire disparaît avec le développement de la trière, qui s’impose à partir du 6ème siècle av. jc.

[7] La mer Égée est une mer intérieure du bassin méditerranéen, située entre l’Europe et la Grèce à l’ouest, et l’Asie et la Turquie à l’est. Elle s’étend de la côte thrace et du détroit des Dardanelles au nord jusqu’à la Crète au sud.

[8] Lesbos est une île grecque de la périphérie d’Egée Septentrionale, souvent aussi appelée du nom de sa capitale Mytilène. L’île présente plusieurs centres d’intérêt, notamment culturel (vestiges antiques), géologique, gastronomique et religieux. Lesbos est aussi connue dans le monde antique pour la qualité de ses vins et de son bois de construction pour les navires et pour son marbre bleu clair.

[9] ancienne cité grecque d’Ionie, aujourd’hui en Turquie

[10] Cyrène, l’ancienne ville grecque (en Libye actuelle), est la plus ancienne et la plus importante des cinq colonies grecques dans la région et lui donne son nom de Cyrénaïque, qui est encore utilisé aujourd’hui. Ancien évêché, elle se situe dans la vallée de Djebel Akhdar.

[11] Dans la Grèce antique, un tyran était un homme qui disposait d’un pouvoir assuré par la force ; ce pouvait être un ancien magistrat, parfois même un esclave, arrivé au pouvoir après un coup d’État, par ruse plus que par violence. Les tyrans ne prirent jamais officiellement le titre de tyran, et il n’y eut pas de titre général et officiel pour les désigner, c’est pourquoi on leur donne le nom dont leurs ennemis les stigmatisaient.

[12] Naxos est une île grecque de la mer Égée appartenant aux Cyclades. C’est la plus grande et la plus haute île de l’archipel. Elle est située pratiquement au cœur de l’Égée, à approximativement 140 km de la Grèce continentale et de la Turquie continentale.

[13] Rhénée est une île grecque de la Mer Égée, située dans l’archipel des Cyclades immédiatement à l’ouest de l’île de Délos, à 9 km au sud-ouest de l’île de Mykonos, dont elle dépend administrativement, et à 140 km au sud-est d’Athènes. Rínia est orientée globalement nord-sud sur une longueur de 8 km. Elle se compose de deux parties reliées entre elles par un isthme de 1,2 km de long pour 70 m de largeur à son point le plus étroit. L’île a une superficie totale de 13,8 km². Dans l’Antiquité, l’île de Rhénée sert notamment de nécropole aux habitants de l’île de Délos, puisqu’il est interdit de naître et de mourir sur cette île consacrée au dieu Apollon. L’île était également habitée et exploitée, on y trouve notamment des fermes. Rhénée fut conquise par Polycrate de Samos et consacrée en partie à l’Apollon Délien.

[14] Délos est l’une des îles des Cyclades, en Grèce. Minuscule (3,5 km²), aride, inhabitée depuis longtemps, elle se situe en face de l’île de Rhénée (14 km², inhabitée) et à proximité de Mykonos. Ses pentes sont douces et la colline Cynthe (Kynthos) ne dépasse pas 113 m. Le port a toujours été exposé aux vents qui, dès qu’ils se lèvent, rendent l’île inaccessible. Dans la partie basse se trouvait jadis un lac sacré d’eau douce, aujourd’hui à sec.

[15] le fameux tunnel d’Eupalinos

[16] Crotone est une cité située dans le Bruttium sur la côte occidentale du golfe de Tarente sur un promontoire qui s’avance dans la mer Ionienne. Elle est fondée en 710 av. jc par des Achéens et des Spartiates. Assez rapidement elle devient prospère et s’oppose à Sybaris la grande rivale dont les mœurs relâchées contrastent avec Crotone.

[17] Une trière ou trirème, est une galère de combat antique, développée à partir de la pentécontère. Plus court que son prédécesseur, c’est un navire équipé d’une voile dans lequel prennent place 170 rameurs étagés sur trois rangs, d’où son nom. Léger et agile, il permet le développement de la manœuvre d’éperonnage grâce au rostre de bronze monté sur sa proue, technique qui donne lieu aux premières batailles à caractère réellement naval.

[18] Sparte était une ville-état de premier plan dans la Grèce antique . Dans l’Antiquité, la ville-état était connue sous le nom de Lacedaemon, tandis que le nom de Sparte désignait son établissement principal sur les rives de la rivière Eurotas en Laconie, dans le sud-est du Péloponnèse. Vers 650 av. jc, elle est devenu la puissance terrestre militaire dominante dans la Grèce antique. Compte tenu de sa prééminence militaire, Sparte fut reconnu comme le chef de file des forces grecques combinées pendant les guerres gréco-perses. Entre 431 et 404 av. jc, Sparte fut le principal ennemi d’ Athènes pendant la guerre du Péloponnèse

[19] Corinthe était l’une des plus importantes cités de la Grèce antique, située dans les terres au pied de son acropole, l’Acrocorinthe. Elle abritait autrefois un célèbre temple d’Aphrodite.

[20] Un satrape est le gouverneur d’une satrapie, c’est-à-dire une division administrative de l’Empire perse.

[21] Sardes est une ancienne ville d’Asie mineure, capitale de la Lydie, sur la rivière Pactole, dans la vallée de l’Hermos.