De la même façon que les Vikings [1] ont été contraints au voyage du fait de la rudesse de leur climat et de leur pays
les Phéniciens seront pratiquement jetés à la mer par le relief même de leur contrée. Correspondant grossièrement au Liban actuel, la Phénicie formait une étroite bande de terre bordée par de hautes montagnes d’un côté et par la Méditerranée de l’autre. Logiquement, donc, c’est vers la mer que leurs regards vont se tourner, d’où la vocation quasi obligatoire de marins qu’auront les Phéniciens. Mais contrairement aux Vikings, les Phéniciens ne seront jamais de grands marins. Pas plus que leur conquête, purement commerciale, ne deviendra politique ou militaire, n’entraînant, de fait, aucun apport réel de leur civilisation.
Vraisemblablement originaires des côtes du golf Persique et de l’Arabie du Sud, ceux qui allaient constituer le peuple phénicien sont des sémites dont on ne sait quasiment rien. Soumis à de multiples influences, les Phéniciens n’ont même pas de nom, celui employé étant tout simplement un terme d’origine grec signifiant hommes rouges. Un terme qui venait de la commercialisation de la murex [2] qui, au 2ème millénaire avant jc, servait à produire la couleur pourpre.
Les principales cités phéniciennes, Tyr [3], Sidon [4], vont rapidement devenir des plaques tournantes du commerce méditerranéen, aussi bien par voix de terre que par voix de mer. Les épices, les pierre précieuses, les parfums, l’or, les étoffes précieuses provenant aussi bien d’Arabie que du Caucase ou d’Afrique, tout passait entre les mains des commerçants phéniciens. Des commerçants qui, lorsqu’ils utilisaient la voix des mers, se limitaient presque exclusivement au cabotage, comme le prouvent d’ailleurs les multiples comptoirs qu’ils créeront en Méditerranée. Chypre [5], Carthage [6], Cadix sont au nombre de ceux-là. S’il faut y voir un essor admirable, un sens du commerce inégalé à l’époque, difficile de voir dans les Phéniciens un peuple de navigateurs.
Relais d’autres civilisations, maîtres du commerce et donc des richesses, les Phéniciens vont être en proie aux désirs de peuples plus conquérants. Leur déclin, cependant, a autant à voir avec ces velléités de conquêtes qu’avec le manque de cohésion de ce peuple, qui a essaimé à travers toute la Méditerranée. Et ce n’est guère qu’à travers Carthage, fondée par Tyr et Sidon, que se perpétuera le monde phénicien.