Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Accueil du site > Histoire du 11ème siècle > Hermann de Salm ou Hermann de Luxembourg

Hermann de Salm ou Hermann de Luxembourg

vendredi 8 novembre 2024, par lucien jallamion

Hermann de Salm ou Hermann de Luxembourg (vers 1040/1045-1088)

Comte de Salm et antiroi des Romains de 1081 jusqu’à sa mort

Hermann est un précurseur de la Maison de Salm [1]. On considère généralement que Hermann appartient à la maison d’Ardenne [2] et qu’il est le fils cadet du comte Giselbert de Luxembourg . Son arrière grand-père, Sigefroid de Luxembourg, fut le premier comte d’un territoire sur la Moselle [3] en Lorraine qui allait devenir le comté de Luxembourg [4].

Frère cadet du comte Conrad 1er de Luxembourg , Hermann avait reçu en seigneurie le château de Vielsalm [5], sur la rive de la Salm [6] dans les Ardennes [7], sans doute venu de sa mère. Son homonyme l’évêque Hermann de Metz lui cède l’avouerie de Senones [8]. Lors de son élection, les chroniqueurs n’évoquent pas les qualités qui auraient motivées les électeurs en sa faveur c’est peut-être son effacement et son absence de mérite qui leur convenaient.

Après la mort de l’antiroi Rodolphe de Rheinfelden des blessures reçues le 15 octobre 1080 lors de la bataille de Hohenmölsen [9] au bord de l’Elster Blanche [10], où les troupes impériales avaient été forcées de reculer, Hermann entre en conflit avec Henri IV du Saint Empire dans le cadre de la querelle des investitures [11]. Le roi salien [12] bien qu’excommunié décide de descendre en Italie où il tente de s’emparer de Rome le 21 mai 1081 et de nouveau en 1082. Ce n’est qu’en 1083 qu’il prend la cité et installe Guibert de Ravenne à Saint-Pierre de Rome [13] le 28 juin pendant que le pape Grégoire VII continue à résister dans le Château Saint-Ange [14]. L’antipape Clément III couronne finalement Henri IV le 31 mars 1084 pendant que Grégoire VII va mourir en exil chez ses alliés normands du sud de l’Italie le 25 mai 1085. Le nouvel empereur rentre en Germanie [15] et reprend la direction de l’Empire qui sombrait dans l’anarchie. Dans les diocèses vacants les candidats au siège s’opposent, pendant que les petits vassaux s’affranchissent de tout pouvoirs et usurpent les droits féodaux.

Pendant ce temps en Allemagne le parti réformiste n’avait pas disparu. On avait tergiversé sur le choix du successeur à donner à Rodolphe de Rheinfelden. Le comte Otton de Nordheim, la tête de la révolte des Saxons [16], semblait être le meilleur candidat ; néanmoins, immobilisé par une jambe brisée, il doit laisser le champ libre à Hermann de Salm qui est élu à Ochsenfurt [17] le 6 août 1081, par la noblesse du duché de Saxe [18] et du duché de Souabe [19] réunies. L’archevêque Sigefroi 1er de Mayence le couronne à Goslar [20] le 26 décembre.

L’influence d’Hermann se limite à la Saxe ; même sa parenté de la maison de Luxembourg est restée fidèle à l’empereur. Son plan qui était de rassembler une armée sur les bords du Danube [21] et de marcher sur l’Italie est anéanti par la mort de son principal partisan Otton de Nordheim au début de 1083.

Le nouveau pape Victor III d’esprit conciliateur réussit à ramener la sérénité sur le plan religieux et l’unité du clergé allemand est rétablie. Henri IV accorde le titre de roi en avril 1085 au duc Vratislav II de Bohême afin de sceller leur alliance et lorsqu’il pénètre la même année en Saxe avec une armée, Hermann s’enfuit au Danemark.

Il revient cependant après avoir conclu une alliance avec le duc Welf 1er de Bavière , le margrave [22] Egbert II de Misnie son plus actif partisan, réussit à battre Henri IV à la bataille de Bleichfeld* sur la rivière Main [23] près de Wurzbourg [24] mais cette victoire n’empêche par le parti des révoltés de ce déliter car il ne représentait plus que des intérêts personnels.

Peu après cette victoire alors que Henri IV se fait reconnaître même en Saxe, las d’être un pion entre les mains de grands du royaume, Hermann se retire dans ses états patrimoniaux. Il meurt obscurément près de Cochem [25] le 28 septembre 1088, mettant ainsi un terme à la guerre civile.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Joseph Calmette, Le Reich allemand au Moyen-Âge, Paris, Payot, 1951

Notes

[1] La maison de Salm, est issue de l’ancienne noblesse lotharingienne puis des comtes de Luxembourg anciennement possessionnés dans l’actuel pays de l’Ardenne belge. Elle est surtout connue par la destinée que connut la branche qui s’implanta dans les Vosges qui sut constituer au fil du temps le territoire d’une principauté dont la capitale fut Badonviller puis Senones. Les possessions du nord dans les Ardennes ( Bas-Salm ) sont venues à une lignée de comtes rhénans de Spanheim au 12ème siècle par héritage féminin, tandis que celles du sud dans les Vosges ( Haut-Salm ) sont également venues à une lignée de Rhinegraves par héritage féminin au 15ème siècle. Ces familles s’appelaient alors aussi Comtes de Salm et se divisaient à leur tour en sous-lignages, qui furent plus tard élevés au rang de princes, dont certains existent encore aujourd’hui et appartiennent à la haute noblesse. Les représentants de la dynastie s’illustrèrent notamment en tant que comtes de Trèves, d’Ardenne, palatin de Lorraine (Lotharingie), puis de Salm, roi de Germanie, avoués de l’abbaye Saint-Pierre de Senones, comtes de Salm en Vosge(s), gouverneurs de Nancy, maréchaux de Lorraine et du Barrois, princes du Saint Empire, princes souverains de Salm-Salm.

[2] La Maison d’Ardenne ou Wigéricides, est la dynastie comtale post-carolingienne issue agnatiquement du comte palatin de Lotharingie, Wigéric de Bidgau d’Ardenne ; c’est l’une des premières familles nobles européennes médiévales documentées

[3] La Moselle est une rivière du nord-est de la France, du Luxembourg et de l’ouest de l’Allemagne, affluent en rive gauche du Rhin. Elle donne son nom à deux départements français : la Moselle et la Meurthe-et-Moselle.

[4] Le comté de Luxembourg, en tant que principauté territoriale, est une création des descendants de Sigefroi. Conrad 1er est le premier à porter explicitement le titre de comes de Luccelemburc. Le château fort Lucilinburhuc devient le point d’ancrage à partir duquel s’opère le rassemblement territorial au cours des 11, 12 et 13ème siècles. L’agrandissement du territoire se fait par les mariages, par l’achat de terres, par les liens de vassalité et surtout par la guerre. Les comtes de Luxembourg réussissent à soumettre leurs rivaux, même s’ils subissent parfois des revers comme à la bataille de Worringen en 1288, où le comte Henri VI et trois de ses frères tombent, mortellement blessés. À la fin 13ème siècle, le comté de Luxembourg occupe un vaste espace situé entre Meuse et Moselle. Il a la particularité d’être situé à cheval sur la frontière linguistique, une partie étant germanophone et une autre francophone.

[5] Vielsalm est une commune francophone de Belgique située en Région wallonne dans la province de Luxembourg

[6] La Salm (Le Glain), est une petite rivière de Belgique, affluent en rive gauche de l’Amblève faisant partie du bassin versant de la Meuse. Elle prend source à Beho, baigne les villages de Cierreux, Salmchâteau, Vielsalm (où elle remplit le lac des Doyards), Grand-Halleux, et vient se jeter dans l’Amblève à Trois-Ponts.

[7] L’Ardenne, parfois les Ardennes, est une région géographique de basse et moyenne-montagne qui s’étend sur les territoires belge, français, luxembourgeois et allemand, située à l’est de la Meuse et de la Sambre et limitée au sud par les plaines de Lorraine et de Champagne. Le Massif ardennais est une ancienne chaîne de haute-montagne qui culminait à 8 000 mètres d’altitude, qui a été affectée par les plissements tectoniques calédoniens et varisques (aussi appelés plissements hercyniens). L’érosion ayant fait son travail durant plus de 300 millions d’années, le massif culmine aujourd’hui à 694 mètres au niveau du signal de Botrange.

[8] Senones est une commune française située dans le département des Vosges en Lorraine. Historiquement, Senones fut la capitale de la principauté de Salm-Salm dépendant du Saint-Empire romain germanique érigée vers 1751 et annexée par la Convention en 1793.

[9] La bataille de Hohenmölsen, aussi connue sous le nom de bataille à l’Elster Blanche, est une rencontre militaire du jeudi 15 octobre 1080 près de Hohenmölsen sur l’Elster Blanche, décidant du sort de trois années de guerre civile, entre le roi Henri IV du Saint-Empire et son beau-frère, l’antiroi Rodolphe de Rheinfelden. Bien qu’il fût militairement perdant, Henri sortit politiquement vainqueur de cet affrontement, son rival Rodolphe ayant trouvé la mort au cours de la bataille.

[10] L’Elster Blanche est une rivière d’Europe centrale, longue de 257 km, et un affluent de la Saale, donc un sous-affluent de l’Elbe.

[11] La querelle des Investitures est le conflit qui opposa la papauté et le Saint Empire romain germanique entre 1075 et 1122. Elle tire son nom de l’investiture des évêques. Au Moyen Âge, l’investiture est un acte par lequel une personne met une autre en possession d’une chose. Au 11ème siècle, les souverains estiment que le fait de confier à un évêque ou à un curé des biens matériels leur permet de choisir l’officiant et de lui accorder les investitures spirituelles. Cette mainmise du pouvoir temporel sur le pouvoir spirituel a comme conséquence une défaillance profonde du clergé, qui n’assure plus son rôle. La réforme grégorienne qui débute au milieu du 11ème siècle entend lutter contre les manquements du clergé à ses devoirs, ce qui incite le pape à vouloir le contrôler, au détriment du pouvoir politique. Les monarques du Saint Empire romain germanique, pour qui les évêques sont aussi des relais de l’autorité impériale, s’opposent alors à cette prétention. Après une lutte sans merci entre les empereurs et les papes, la querelle des Investitures aboutit à une victoire provisoire du spirituel sur le temporel.

[12] Tribu franque d’origine germanique installée au 4ème siècle en Toxandrie, région comprise entre la Meuse et l’Escaut. Avec les Francs ripuaires, ils constituent la principale peuplade franque. Ils envahissent la Gaule au 5ème siècle sous l’impulsion de leur chef Mérovée, ancêtre des Mérovingiens. Sous le règne de Clovis, ils se rendent maîtres d’une grande partie de la Gaule et rédigent leurs coutumes dans un texte connu sous le nom de loi salique.

[13] La basilique Saint-Pierre est le plus important édifice religieux du catholicisme. Elle est située au Vatican, sur la rive droite du Tibre, et sa façade s’ouvre sur la place Saint-Pierre. Elle a été construite là où, sous la volonté de l’empereur Constantin 1er, les premiers pèlerins venaient rendre un culte à saint Pierre à l’emplacement du cirque de Caligula et de Néron.

[14] Le château Saint-Ange est un monument romain, situé sur la rive droite du Tibre, face au pons Ælius (actuel pont Saint-Ange), à Rome, non loin du Vatican. Décidé par l’empereur Hadrien en 125 pour être son mausolée, le bâtiment se veut le pendant du tombeau d’Auguste : celui-ci est situé au nord du Champ de Mars (Rome), sur la rive gauche du Tibre, alors que le mausolée d’Hadrien se place sur la rive droite, en face du Champ de Mars. En outre, l’allure générale des deux édifices est similaire. Il est achevé par Antonin le Pieux en 139. Le château, une rotonde massive en travertin, est surmonté d’un quadrige de bronze mené par l’empereur Hadrien figuré en soleil et d’un bosquet d’arbres funéraires. Les cendres d’Hadrien y sont déposées en 139. Caracalla est le dernier empereur à s’y faire ensevelir. Très vite, le bâtiment est détourné de ses fins funéraires pour devenir militaire. Il est intégré à la muraille aurélienne en 403, en tant que bastion avancé. Quand le roi ostrogoth Vitigès attaque Rome en 537, les soldats défendant le castellum se servent des statues de bronze qui le décorent comme projectiles. En 546, le roi ostrogoth Totila s’empare de Rome et inclut l’édifice dans une structure fortifiée protégeant la rive droite. Le quartier prend ainsi le nom de Borgo. Au début de l’époque chrétienne, le quartier du Borgo jouit de sa localisation à proximité du Vatican : les pèlerins affluant, des structures se mettent en place pour les accueillir. Cependant, en 846, les Sarrasins font une incursion soudaine dans la ville, pillent la basilique Saint-Pierre et dévastent le Borgo. Pour le protéger, Léon IV le relie par une muraille au château. La zone ainsi délimitée forme la « cité léonine ».

[15] Le Royaume de Germanie n’a pas réellement existé sous ce nom-là. Avec la fin des Carolingiens, les Ottoniens s’imposent et fondent une dynastie qui règne sur la Francie orientale. Pour marquer la différence avec le Royaume de France, on l’appelle Royaume Teutonique. Ce ne sont que les historiens allemands modernes qui lui donnent le nom de Royaume de Germanie. Ce Royaume correspondait au départ aux territoires de la Franconie, de la Saxe et de la Bavière. Mais avec les nombreuses modifications territoriales, le titre de roi de Germanie est devenu honorifique et s’est même pratiquement confondu avec celui de Roi des Romains.

[16] La révolte des Saxons opposa le roi Henri IV du Saint-Empire, de la dynastie franconienne, aux Saxons de l’été 1073 au 27 octobre 1075. Elle se termina par la soumission des Saxons après la victoire décisive d’Henri à Langensalza.

[17] Ochsenfurt est une ville de l’arrondissement de Wurtzbourg en Basse-Franconie, située à l’extrémité sud du Triangle du Main. La vieille ville historique est une forteresse médiévale en grande partie conservée avec sa muraille et ses nombreuses tours et portes. Dans le centre, on peut voir un grand nombre de vieilles maisons à colombages et d’auberges ornées de statuettes ou d’enseignes en fer forgé.

[18] Le duché de Saxe était un duché médiéval couvrant la plus grande partie du nord de l’Allemagne. Il s’étendait sur les états allemands contemporains de Basse-Saxe, Rhénanie-du-Nord-Westphale, Schleswig-Holstein, Saxe-Anhalt et des parties de la Saxe. Le duc Henri le Lion occupa la région déserte de Mecklembourg Poméranie occidentale. Les Anglo-Saxons avaient quitté cette dernière zone pour l’Angleterre.

[19] La Souabe est une région historique d’Allemagne. Au haut Moyen Âge, le royaume d’Alémanie regroupait de nombreux petits royaumes sur le territoire des Alamans. Ceux-ci sont soumis par les Francs sous Clovis 1er et Théodebert 1er. À partir du début du 6ème siècle, l’Alémanie est un duché sous le contrôle des Francs, jusqu’à ce qu’il soit dissous en 746 en raison du Massacre de Cannstatt. En 829, le royaume de la Souabe se forme sur le même territoire, qui est attribué à Louis II le Germanique et donc à la Francie orientale dans le traité de Verdun en 843. Après la réforme des comtés dans la Francie orientale, le Duché de Souabe est alors formé en 915 ; il s’étendait alors des Vosges dans l’ouest jusqu’au Lech dans l’est et à Chiavenna, aujourd’hui en Italie, dans le sud

[20] Goslar est une ville de Basse-Saxe. Elle est la capitale de l’arrondissement de Goslar. L’ancienne ville libre d’Empire fut fondée au 10ème siècle après la découverte d’argent dans les mines proches du Rammelsberg. Elle en devint particulièrement prospère, ce qui attira l’attention des empereurs romains germaniques.

[21] Le Danube est le deuxième fleuve d’Europe par sa longueur (après la Volga qui coule entièrement en Russie). Il prend sa source dans la Forêt-Noire en Allemagne lorsque deux cours d’eau, la Brigach et la Breg, se rencontrent à Donaueschingen où le fleuve prend le nom de Danube. La longueur du Danube dépend du point de départ considéré : 2 852 km pour la confluence de Donaueschingen mais 3 019 km à partir de la source de la Breg. Il coule vers l’est et baigne plusieurs capitales de l’Europe centrale, orientale et méridionale

[22] Le titre de margrave était donné aux chefs militaires des marches (ou mark), dans l’empire carolingien, puis à certains princes du Saint Empire romain germanique. Le titre équivalent en français est marquis. Le margraviat est la juridiction sur laquelle il a autorité.

[23] Le Main est un cours d’eau allemand, qui arrose notamment Francfort et conflue avec le Rhin sur sa rive droite, entre Wiesbaden et Mayence.

[24] Wurtzbourg ou Würzburg est une ville en Bavière, un land d’Allemagne. La ville est la capitale du district de Basse Franconie et chef-lieu de l’arrondissement de Wurtzbourg.

[25] Cochem est le chef-lieu et la plus grande ville de l’arrondissement de Cochem-Zell du Land de Rhénanie-Palatinat, en Allemagne.