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L’histoire pour le plaisir

Brancaleone Doria

dimanche 23 juin 2024, par lucien jallamion

Brancaleone Doria (1337-1409)

Capitaine génois

Par son union avec la Juge Éléonore d’Arborée, il joue un rôle considérable dans le Judicat d’Arborée [1] où il tente de s’imposer comme Juge entre 1407 et 1408.

Fils illégitime de Brancaleone senior, un fils de Barnabò Doria et d’Éleonore Fieschi [2], il est né de la relation de son père avec une concubine, nommé Giacomina issu d’une famille inconnue.

En 1350 son père Brancaleone et son oncle Manfred concluent un accord avec le roi Pierre IV d’Aragon, pour lui céder leurs droits sur Alghero, et obtenir en contrepartie la reconnaissance de leurs fiefs de Monteleone et Chiaramonti, avec les Curatoria [3] de Nurcara, Caputabbas, Bisarcio et Anglona. Un autre frère, Matteo, est pendant quelques années l’âme de la révolte des Doria contre l’occupation aragonaise de l’île de Sardaigne [4]. Après la mort de son oncle l’héritier légitime Matteo Doria, Brancaleone obtient le 16 mars 1357 de Bernardo de Cruilles, gouverneur de Logudoro au nom de Pierre IV d’Aragon les envions de Nurcara [5], Cabuabbas, Anglona [6] et Bisarcio. Cette concession royale avait pour but de prévenir une possible union entre Violante, sa sœur et Ugone, le fils de Mariano IV d’Arborée, allié traditionnel des Doria et de Gènes [7] et de lui offrir tous les prétextes possibles pour poursuivre son ingérence dans les affaires du Logudoro [8].

Deux ans plus tard en mai 1359 Brancaleone Doria considéré comme seigneur légitime par la Couronne d’Aragon obtient en fief les terres ancestrales et les châteaux du nord de la Sardaigne : la seigneurie de Castelgenovese [9], de Monteleone [10] mais pas celle du Castel Doria [11] occupé par les aragonais en 1357. Ces accords font de Brancaleone l’allié le plus fidèle du roi Pierre IV dans l’île et mettent fin à une longue période d’intérêts communs entre la famille Doria et la maison d’Arborée.

Pour renforcer les liens avec le puissant seigneur féodal de Sardaigne, le roi Pierre IV envoie officiellement à Doria en 1361 un plénipotentiaire, afin d’organiser son mariage avec une jeune catalane de son choix Bianca, fille de Pietro de Melany et nièce de Bernardo de Cabrera. Doria accepte la proposition qui, cependant est abandonnée peu après, peut-être du fait de la disgrâce de Cabrera qui est décapité 26 juillet 1364.

Brancaleone Doria engage ensuite des négociations pour épouser Éléonora, la fille de Giovanni d’Arborée , emprisonné depuis 1352 par son frère le Juge Mariano IV. Craignant que Doria ne devienne un danger pour son pouvoir Mariano IV s’oppose à ce projet, trouvant cette fois un allié dans le roi aragonais, qui ne veut pas s’immiscer dans les affaires du Judicat à un moment de grande difficulté pour son royaume, aux prises avec le danger castillan. Du reste Mariano IV conçoit le projet d’une attaque contre l’occupant aragonais et n’hésite pas à ouvrir les hostilités contre Doria, considéré comme le point le plus vulnérable du dispositif du camp ennemi.

Lorsque la rébellion éclate en 1367 dans toute l’île, Brancaleone Doria préfère se joindre dans un premier temps au camp d’Arborée, contribuant à élargir le front des opérations contre les aragonais aux portes de Sassari [12] et d’Alghero [13]. Il retourne cependant rapidement dans l’obéissance envers son suzerain et réussit à stopper la progression fulgurante des troupes d’Arborée.

En mars 1369 il participe à la défense d’Osilo [14], attaqué par Mariano IV ; en avril, il combat pour que Sassari reste entre les mains des catalans. Pierre IV étant contraint de renoncer, à l’envoi de renforts dans l’île pour faire face au danger castillan, Brancaleone Doria assume avec succès sa tâche de défenseur des possessions aragonaises contre les attaques d’Arborée jusqu’en 1370.

Peu de temps après il conclut une trêve avec Mariano IV, bien que les hostilités entre eux continuent sporadiquement jusqu’à 1374, année où Doria s’engage encore dans la défense d’Alghero contre les assauts du Juge. C’est probablement à cette époque que mûrit le projet de mariage entre Brancaleone Doria et Éléonore d’Arborée, fille aînée de Mariano IV et homonyme de sa cousine germaine convoitée antérieurement par Brancaleone.

En 1364/1365, après avoir envisagé d’épouser la fille de Giovanni d’Arborée, environ 10 ans plus tard il s’unit politiquement avec la famille de Bas-Serra en épousant à l’âge de 39 ans avant la mort de Mariano IV d’Arborée, en 1375, sa fille, Éléonore d’Arborée déjà âgée d’environ 36 ans à cette époque, car sa sœur, Béatrice était déjà mariée depuis une douzaine d’années. Le mariage est peut-être célébré à l’église de San-Pantaleo de Sorso [15]. Brancaleone donne ainsi naissance à la dynastie de Doria-Bas qui d’éteint en 1407 avec leur fils Mariano V.

Brancaleone et son épouse occupent en Sardaigne trois domaines : le château de Chiaramonti [16], le rocher des Doria à Castelsardo [17], et à Monteleone Rocca Doria [18]. Ils résident pendant 7 ans, avec une brève parenthèse à Gènes [19], jusqu’en 1382, dans la forteresse de Castelgenovese. C’est là que naissent leurs deux fils Federico en 1377 et Mariano en 1379 qui seront ensuite Juges d’Arborée. Après la mort d’Éléonora et de leurs fils, Brancaleone se retire dans ce château où il sera tué soit par les Aragonais ou peut-être sur ordre du vicomte de Narbonne Guillaume II de Narbonne.

Brancaleone Doria réside également dans le bourg du château de Monteleone Rocca Doria, situé à l’intérieur d’Alghero. Le conte de Monteleone y convoque fréquemment des réunions de ses fidèles afin d’organiser leurs activités militaires.

Lorsqu’il sort de sa prison aragonaise, Brancaleone vit brièvement avec Éleonore dans le palais du Judical d’Oristano* ou dans la résidence d’été de Monreale.

À la suite de l’assassinat en 1383 d’Ugone III, fils de Mariano IV et frère d’Éléonore, et de sa fille et héritière Benedetta, c’est son fils Federico qui devient Juge d’Arborée sous la régence de sa mère Éléonore.

Brancaleone Doria se rend à Barcelone [20]]], en qualité de consort de la régente, pour commencer des négociations de paix, mais après avoir résisté à une tentative de corruption lorsqu’on lui offre le titre de comte de Monteleone, ce qui n’est pas un hasard, rappelle l’endroit où il a jadis vaincu Mariano IV, il est arrêté et conduit comme prisonnier à Cagliari [21].

Éléonore d’Arborée gouverne le Judicat, au nom de son fils Federico, puis après la mort de celui-ci encore en enfance de son puiné Mariano. Le 24 janvier 1388, après de longue tractations une paix est signée entre le royaume de Catalogne-Aragon et le Judicat d’Arborée. Selon les termes de cet accord sont restitués à la Couronne d’Aragon « “la cité et les lieux occupés précédemment par les Juges d’Arborée” ». Brancaleone n’est toutefois libéré que le 1er janvier 1390.

Définitivement lié à l’avenir d’Arborée, Brancaleone Doria reprend la guerre contre les aragonais ; le premier avril 1391 il marche sur le château de Cagliari ; le 16 août, avec son fils Mariano à ses côtés il occupe Sassari et Osilo. En septembre il conquiert les châteaux de la Fava, de Galtellì [22], de Bonvehì et celui de Pedreso, ne laissant à ses adversaires qu’Alghero et Longosardo. Le 3 octobre il entre à Villa di Chiesa [23].

Éléonore, pendant ce temps se consacrait à la mise à jour du Carta Logu, promulgué par son père Mariano IV et son frère Ugone III. Vers 1404 la charismatique Juge qui éclipse la figure de son mari meurt peut-être de la peste. Brancaleone commet l’erreur de vouloir agir comme Juge légitime ce qui provoque des conflits avec son fils Mariano V.

En 1407, pendant qu’il assiège le Château de Castro à Cagliari, son fils Mariano V meurt subitement ce qui le contraint à renoncer au pouvoir et à se retirer à Castelgenovese, probablement à cause du conflit de succession provoqué par le petit-fils de sa belle sœur Béatrice, Guillaume II de Narbonne avec qui il tente brièvement de partager le pouvoir entre 1407 et 1408.

C’est là qu’il est capturé et tué par les catalano-aragonais avant la bataille de Sanluri [24], en janvier 1409. Les causes exactes et le lieu de la mort de Doria sont inconnus et l’hypothèse d’un assassinat a été évoquée.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en italien intitulé « Brancaleone Doria »

Notes

[1] Le Judicat d’Arborée est un des quatre judicats qui naquirent en Sardaigne au 8ème siècle pour remplacer un Empire romain devenu trop lointain (celui de Byzance) et pour se protéger notamment des razzias arabes. L’Arborée se développa dans la partie centre-occidentale de l’île, riche en terres agricoles et pastorales (les autres judicats sont ceux de Logudoro ou de Torres, de Gallura, de Cagliari ou Pluminos). Le Judicat d’Arborée, comme du reste les trois autres judicats était un royaume souverain selon le principe juridique Superiorem non recognoscens, avec un territoire subdivisé en Curatorie, des districts dirigés par un curateur et comprenant des centres habités appelés « ville » (différent du mot français homonyme, du latin villa). Le judicat avait son propre Parlement, la Corona de Logu, composé des représentants des Curatorie. Il possédait son propre domaine public, le Rennu, votait les lois, avait des frontières et frappait monnaie. Son chef était le Judex ius dicens (celui qui dit la loi). Le juge tirait son autorité non seulement de l’hérédité mais également par la reconnaissance de son Imperium par la Corona de Logu.

[2] La famille Fieschi est une famille patricienne de Gênes qui remonte aux premiers temps du Moyen Âge. Elle posséda d’abord en pleine souveraineté et à titre de comté la ville de Lavagna, située à l’est de Gênes, mais la céda à la République en 1198 en échange du droit de bourgeoisie et de noblesse. Les Fieschi possédaient de nombreux fiefs dans la Ligurie, le Piémont, la Lombardie, l’Ombrie, et même dans le royaume de Naples. Ils ont donné à l’Église deux papes (Innocent IV et Adrien V), un grand nombre de cardinaux, de patriarches, d’évêques et d’archevêques. On compte parmi eux plusieurs nobles du Saint-Empire, un maréchal de France sous Louis IX, plusieurs généraux, quatre amiraux.

[3] La curatoria était la principale division administrative, électorale, fiscale et judiciaire des judicats sardes.

[4] La Sardaigne est une île de la mer Méditerranée et une région italienne, qui se trouve à l’ouest de l’Italie continentale, au sud de la Corse. Son chef-lieu est la ville de Cagliari. Lorsque l’affaiblissement de l’Empire romain se propage jusqu’à l’île, cela a pour conséquence l’abandon progressif des terres agricoles et des côtes, ainsi qu’une perte de dynamisme notable de la démographie. Abandonnée à elle-même et sans défense, la Sardaigne est occupée et subit les razzias durant quelque 80 ans (vers 460-530) par les Vandales d’Afrique qui, défaits sous Justinien, laissent l’île sous la domination de Byzance.

[5] Le Meilogu est une région historico-géographique, située dans la partie nord de la Sardaigne, qui peut être considérée comme une sous-région de Logudoro. Bonorva représente la principale commune du territoire.

[6] Anglona est une zone géographique située dans la partie nord de la Sardaigne. Elle est globalement définie comme ayant la ville de Castelsardo comme centre.

[7] La République de Gênes est l’une des grandes républiques maritimes italiennes (ou thalassocratie) qui a duré près de 8 siècles, du milieu du 11ème siècle à 1797, après l’abdication du dernier doge de Gênes, Giacomo Maria Brignole.

[8] Le Logudoro est un vaste territoire du nord-ouest de la Sardaigne. Pendant la période des judicats, il fut le centre d’un des quatre judicats qui partageaient l’île Sardaigne. Le Judicat de Torrès ou encore Judicat du Logudoro ayant comme chef-lieu d’abord Ardara et ensuite Sassari correspondait grosso modo à l’actuelle Province de Sassari, mais s’étendait au sud jusqu’à Nuoro e Macomer. Après la bataille de Meloria en 1284 Pise cède le judicat entier à Gènes qui partage son territoire entre les familles Doria et Malaspina. Au cours du Moyen Âge, la région bénéficia d’une certaine aisance comme en témoignent les églises champêtres de style romanico-pisan. Ce patrimoine est unique sur l’île. Un déclin progressif débuta avec la fin du judicat et après le passage sous le règne des Aragon. Le choix de Cagliari comme siège du gouverneur de l’île provoqua l’isolement administratif du Logudoro.

[9] l’actuelle Castelsardo

[10] Monteleone Rocca Doria est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[11] Santa Maria Coghinas est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[12] Sassari est une ville de la province de Sassari en Sardaigne, Italie.

[13] Alghero est une ville italienne située dans la province de Sassari en Sardaigne, sur la côte nord-occidentale. Une partie de sa population est originaire de Catalogne et la ville préserve l’usage de la langue catalane, reconnue comme officielle par la République italienne et par la région, sous le nom de dialecte alguérois (alguerès). La ville est l’une des principales ville de Sardaigne, étant la cinquième en population et une des portes d’accès à l’île grâce à l’aéroport d’Alghero-Fertilia. L’artisanat et la vente de corail sont l’un des moteurs économiques de la ville.

[14] Osilo est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[15] Sorso est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[16] Chiaramonti est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[17] Castelsardo est une commune italienne de la province de Sassari en Sardaigne. Castelsardo est situé sur un promontoire face au golfe d’Asinara, dans la région historique d’Anglona au nord de la Sardaigne. La côte près de la ville est principalement rocheuse avec de petites criques, à l’exception de la longue plage de Lu Bagnu.

[18] Monteleone Rocca Doria est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.

[19] Gênes est une ville italienne, capitale de la Ligurie, premier port italien et deuxième port de la mer Méditerranée. Gênes est située sur le golfe de Gênes, partie septentrionale de la mer de Ligurie. La ville correspond à l’inclinaison de l’arc de cercle formé à cet endroit par la côte. Au nord de la ville commencent les Apennins, débouchant à proximité sur la plaine du Pô. Gênes offre une façade méditerranéenne au nord de l’Italie, à 193 km de Nice au sud-ouest, à 155 km de Milan au nord et à 518 km de Rome au sud-est.

[20] [[Barcelone est la capitale administrative et économique de la Catalogne, de la province de Barcelone, de la comarque du Barcelonès ainsi que de son aire et de sa région métropolitaines, en Espagne. Lors de la guerre de Succession (1701-1714), Barcelone, comme la plupart de la Catalogne, prit le parti de l’archiduc Charles contre le roi Bourbon, Philippe V. Après le siège de 1697, la ville s’ouvre à l’armée de l’archiduc et le proclame roi sous le nom de Charles III. Barcelone est assiégée par les Franco-Espagnols en 1705 et 1706, puis à nouveau de juillet 1713 à septembre 1714. La capitulation a pour conséquence, dans le cadre de la politique centralisatrice et répressive des Bourbon, la disparition des institutions propres à la Catalogne (conseil de Cent et Generalitat).

[21] Cagliari ou Caglier est une ville italienne, capitale de l’île de Sardaigne, région autonome d’Italie. Le nom sarde de Cagliari, Casteddu, signifie « château ». De 1324 à 1848, Cagliari fut la capitale du royaume de Sardaigne, devenu royaume d’Italie en 1861, quand Turin fut érigée en capitale officielle.

[22] Galtellì est une commune italienne de la province de Nuoro dans la région Sardaigne.

[23] Iglesias est une ville italienne située dans la province du Sud-Sardaigne, dans la région Sardaigne, en Italie.

[24] La bataille de Sanluri a eu lieu le 30 Juin, 1409 dans une vallée au sud du château et du village fortifié de Sanluri , en Sardaigne du Sud, entre les troupes du royaume de Arborée dirigé par Guillaume III de Narbonne et l’armée de Martin 1er de Sicile , héritier de la Couronne d’Aragon et le premier-né Martin d’Aragon dit l’Ancien cinquième roi de Sardaigne.