Mariano V d’Arborée (1378/1379-1407)
Juge du Judicat d’Arborée de 1387 jusqu’à sa mort
Mariano naît à Castel Genovese [1]. Fils d’ Éléonore d’Arborée et de Brancaleone Doria , un noble appartenant à la célèbre dynastie génoise des Doria [2].
Après le meurtre de son oncle Ugone III d’Arborée et de sa fille Benedetta, Mariano et son frère aîné Federico Doria , sont reconnus par le Doge de Gènes [3] comme héritiers légitimes du Judicat d’Arborée [4], sous la régence de leur mère Éleonore.
Entre temps leur père, Brancaleone, qui se trouvait à la cour du roi d’AragonLe royaume d’Aragon est une entité politique du nord-est de la péninsule Ibérique, née en 1035 de l’union des comtés d’Aragon, du Sobrarbe et de la Ribagorce et disparue en 1707 avec son intégration au sein du royaume d’Espagne par les décrets de Nueva Planta. est arrêté par le roi Pierre le Cérémonieux qui se proclame Roi de Sardaigne [5], Brancaleone est emprisonné à Cagliari [6], rejoint peu après par son fils aîné Federigo.
En 1387 son frère Federigo, meurt dans sa prison et Mariano reste l’unique héritier, pendant que sa mère continue sa lutte contre la couronne d’Aragon. Le 24 janvier 1388 Éléonore d’Arborée réussit à conclure un traité de paix avec ses ennemis qui reconnaissent Mariano V comme souverain et libèrent Brancaleone Doria.
En 1391 Mariano V accompagne son père lors de l’occupation de Sassari [7] et d’Osilo [8] et Mariano V est âgé de 14 ans lorsque sa mère en 1392 promulgue la Carta de Logu [9] qui le déclare majeur.
Son premier acte est de réaffirmer rapidement les pactes conclus avec l’Aragon, mais le pouvoir demeure en réalité pratiquement entre les mains de son père Brancaleone et de sa mère Éleonore, qui meurt en 1404.
Mariano V meurt de la peste quelque temps après elle en 1407, sans laisser d’héritier direct et ouvrant ainsi une crise de succession, qui se termine à l’avantage de Guillaume II de Narbonne, petit-fils de sa tante Béatrice.
Notes
[1] actuellement Castelsardo
[2] La famille Doria, originellement de Auria (provient de filiis Auriae), signifiant « les fils d’Auria », et ensuite de Oria ou d’Oria, est une des familles patriciennes les plus anciennes et les plus illustres de Gênes. La légende veut qu’ils soient issus d’Arduin, vicomte de Narbonne, qui passa par Gênes vers 1050 en se rendant à la croisade. Tombé gravement malade, il fut accueilli pour être soigné dans la maison de la veuve de la famille de Volta. Il tomba amoureux d’une des deux filles de la maison Oria (Orietta) dont il eut un fils Ansaldo, qui fut surnommé fils d’Oria. Puis viennent Emanuele en 1225, seigneur d’Andorre, et Oberto qui acheta Sanremo. La famille possédait autrefois la principauté d’Oneille, mais la vendit avec ses environs au duc de Savoie, Emmanuel-Philibert en 1579.
[3] Le doge de Gênes est le dirigeant de la république de Gênes.
[4] Le Judicat d’Arborée est un des quatre judicats qui naquirent en Sardaigne au 8ème siècle pour remplacer un Empire romain devenu trop lointain (celui de Byzance) et pour se protéger notamment des razzias arabes. L’Arborée se développa dans la partie centre-occidentale de l’île, riche en terres agricoles et pastorales (les autres judicats sont ceux de Logudoro ou de Torres, de Gallura, de Cagliari ou Pluminos). Le Judicat d’Arborée, comme du reste les trois autres judicats était un royaume souverain selon le principe juridique Superiorem non recognoscens, avec un territoire subdivisé en Curatorie, des districts dirigés par un curateur et comprenant des centres habités appelés « ville » (différent du mot français homonyme, du latin villa). Le judicat avait son propre Parlement, la Corona de Logu, composé des représentants des Curatorie. Il possédait son propre domaine public, le Rennu, votait les lois, avait des frontières et frappait monnaie. Son chef était le Judex ius dicens (celui qui dit la loi). Le juge tirait son autorité non seulement de l’hérédité mais également par la reconnaissance de son Imperium par la Corona de Logu.
[5] Le Regnum Sardiniæ et Corsicæ (royaume de Sardaigne et de Corse) est créé le 4 avril 1297 par le pape Boniface VIII afin de résoudre les conflits entre les maisons d’Anjou et d’Aragon au sujet du royaume de Sicile, conflits déclenchés par les fameuses Vêpres siciliennes. C’est donc un royaume de compensation, attribué à Jacques II le Juste d’Aragon. La Sardaigne reste toutefois soumise à de puissants seigneurs portant le titre de judex, elles-mêmes sous l’influence des cités de Pise et de Gênes. En 1323, Jacques II forme une alliance avec le juge d’Arborée, d’origine catalane, et la ville de Sassari, et contrôle les judicats de Cagliari et de Gallura, éliminant de l’île les Pisans. Le contrôle royal n’est toutefois définitif qu’au début du 15ème siècle, quand Martin le Jeune, roi de Sicile et procureur de Sardaigne pour le compte de son père le roi d’Aragon Martin le Vieux, défait les derniers juges d’Arborée, dont Éléonore d’Arborée, célèbre pour sa novatrice charte appelée Carta de Logu, et achète les droits sur le Royaume. La Corse n’est pas conquise et les rois d’Aragon cessent d’y prétendre en 1479, après que la mention et Corsicæ est retirée de l’appellation officielle du royaume. La Sardaigne, rattachée à la couronne d’Aragon, passe avec cette dernière, dans la monarchie espagnole au 16ème siècle.
[6] Cagliari ou Caglier est une ville italienne, capitale de l’île de Sardaigne, région autonome d’Italie. Le nom sarde de Cagliari, Casteddu, signifie « château ». De 1324 à 1848, Cagliari fut la capitale du royaume de Sardaigne, devenu royaume d’Italie en 1861, quand Turin fut érigée en capitale officielle.
[7] Sassari est une ville de la province de Sassari en Italie. Pendant la seconde moitié du 13ème siècle, Sassari est une commune dirigée par un podestà, alliée d’abord avec Pise puis avec Gênes.
[8] Osilo est une commune italienne de la province de Sassari dans la région Sardaigne en Italie.
[9] La Carta de Logu était un code juridique du Judicate d’Arborea, écrit en langue sarde et promulgué par la juighissa Eleanor d’Arborea en 1392. Elle était en vigueur en Sardaigne jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par le code savoyard de Charles Felix en avril 1827. La Carta était une œuvre d’une grande importance dans l’histoire sarde. Il s’agissait d’un travail de législation organique, cohérent et systématique englobant le droit civil et pénal. L’histoire de la rédaction de la Carta est inconnue, mais la Carta elle-même offre un excellent aperçu de la situation ethnologique et linguistique de la Sardaigne médiévale tardive. Dans la Carta, il y a la modernisation de certaines normes et la sagesse juridique qui contient des éléments de la tradition canonique romaine, la tradition byzantine, la jurisprudence bolognaise et la pensée des glossateurs de la culture de la cour catalane, mais surtout l’élaboration juridique locale des coutumes sardes faites par la loi municipale sarde. Une disposition notable du Code est qu’il accordait aux filles et aux fils les mêmes droits de succession.