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Sylvain (usurpateur) ou Flavius Silvanus

vendredi 5 avril 2024, par lucien jallamion

Sylvain (usurpateur) ou Flavius Silvanus (310/320-355)

Usurpateur romain d’ascendance franque

Ancienne carte historique de la Gaule sous la domination romaine, tirée de l'atlas historique de Droysen, 1886.Général de Constance II, il usurpa le pouvoir en Gaule pendant un mois en 355.

Selon l’historien Ammien Marcellin, Silvanus était fils de Bonitus , chef franc qui servit Constantin 1er contre Licinius. Il s’agirait donc d’un émigré germanique de seconde génération, semble-t-il d’éducation romaine. Sa mère était d’origine incertaine,

Tribun de la schola des armaturae [1], il abandonna l’armée de l’usurpateur Magnence avec ses cavaliers quelques jours avant la bataille de Mursa [2] en septembre 351 pour prendre le parti de Constance II, contribuant ainsi à la victoire de ce dernier. Ce ralliement favorisa sa carrière et celle de son fils, qui apparaissait comme un fidèle soutien du trône impérial.

À partir de 352/353, Silvanus acquit la dignité de comes [3] et remplit les fonctions de magister peditum et equitem per Gallias [4]. Incapable de rétablir l’ordre en Gaule du Nord, Constance II s’était résolu à le nommer maître de la milice [5] en Gaule, alors qu’il n’avait guère dépassé la trentaine.

À la tête de 8 000 auxiliaires, il passa par Augustodunum [6] en 354, dégagea Augusta Treverorum [7], menacée par les Alamans [8] de Chnodomar et installa à Cologne [9] son quartier général.

En 355, alors qu’il combattait les Francs sur le Rhin [10], il fut victime d’une cabale d’officiers. À l’instigation de plusieurs personnalités, entre autres le maître de cavalerie Flavius Arbitio et le préfet du prétoire [11] des Gaules Caius Caeionius Volusianus Lampadius, Dynamius, un personnage de basse extraction qui s’occupait, selon Ammien Marcellin, des bêtes de somme de l’empereur, falsifia des lettres signées de Silvanus invitant à un complot pour usurper le trône impérial, et les présentèrent à Milan à l’empereur Constance II.

Un groupe d’aristocrates, composé majoritairement d’officiers de rang inférieur, francs ou d’origine franque, mais aussi de “potentes” originaires de Campanie [12] prirent sa défense et réclamèrent l’ouverture d’une enquête. Parmi eux, deux officiers francs, Malaric , tribun commandant une unité de la garde, les Tribaux [13], et Mallaubaud 1er , successeur de Silvanus au poste de tribun des scholes palatine [14], se proposèrent d’établir l’innocence de Silvanus, l’un se constituant otage tandis que l’autre partait pour ramener Silvanus à Rome, afin qu’il puisse se défendre.

Après diverses machinations, les faussaires furent confondus, mais Silvanus, affolé et mal informé, craignant d’être condamné pour traîtrise, se fit proclamer Auguste à Colonia Claudia Ara Agrippinensium par ses soldats le 11 août 355 selon Ammien Marcellin, 4 jours après le paiement de leurs arriérés.

Une petite délégation partie de Milan, commandée par Ursicin et comprenant Ammien Marcellin, se rendit à Colonia Claudia Ara Agrippinensium, fit semblant de rendre hommage à Silvanus et suscita son assassinat en soudoyant quelques soldats. Attaqué dans son palais, le matin, alors qu’il se rendait à la messe par une bande de rebelles qui massacrèrent sa garde du corps, Silvanus fut arraché de la chapelle chrétienne où il s’était réfugié en toute hâte et massacré.


Né dans les années 340, son fils serait resté en disgrâce jusque dans les années 370, quand l’empereur, entreprenant de lutter contre les Alamans, accorda son pardon.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Jean-Pierre Joly, « Le premier roi des Francs. La loi salique et le pouvoir royal à la fin de l’Empire », in Giles Constable, Michel Rouche (éd.), Auctoritas : mélanges offerts à Olivier Guillot, vol. 33 de Cultures et civilisations médiévales, Presses Paris Sorbonne, 2006

Notes

[1] tribunus scholae armaturarum en Gaule, une unité de la garde lourdement armée et celle des instructeurs

[2] Mursa fut une ville romaine, et est aujourd’hui la ville de Osijek en Croatie. C’est une antique colonie romaine de Pannonie inférieure, fondée sous Trajan ou Hadrien. Sa situation sur la Drave, et à proximité de son confluent avec le Danube, la situe sur au carrefour des voies stratégiques romaines : l’une vient de l’Italie du Nord par la vallée de la Drave, l’autre longe le cours du Danube depuis la Rhétie, et la réunion des deux se poursuit sur Sirmium, Naïssus, la Thrace et l’Asie. Elle surveille le territoire des Iazyges coincé entre la Pannonie et la Dacie, et constitue un maillon du limes danubien. En septembre 351, Mursa vit l’affrontement des armées de Constance II et de Magnence pour le contrôle de l’Empire romain. A cette même époque, Mursa se range avec son évêque Valens du côté de l’arianisme.

[3] Le terme comes signifie en latin associé, compagnon. Il fut donc utilisé sous la République romaine pour désigner ceux qui accompagnaient un magistrat, comme un gouverneur de province, et formaient son escorte et son conseil, sa cohorte d’amis (cohors amicorum). À l’époque impériale le terme évolue et prend une valeur officielle pour désigner les proches de l’empereur, dans ses déplacements d’abord puis de manière permanente. Dès lors il devint un titre aulique et une dignité, et fut à l’origine du terme comte.

[4] maître de l’infanterie et de la cavalerie en Gaule

[5] Le magister militum est un officier supérieur de l’armée romaine durant l’Antiquité tardive. Son nom est souvent traduit par « maître de la milice » ou « maître des milices ». À l’origine, on distinguait le magister peditum ou commandant de l’infanterie et le magister equitum ou commandant de la cavalerie. Les deux fonctions furent à l’occasion réunies et leur titulaire prit le titre de magister utriusque militiae. Le commandant des corps demeurant à la disposition de l’empereur près de la capitale fut appelé magister militum praesentales. En Orient, la fonction cessa d’exister avec la création des thèmes où le gouverneur (strategos), cumula les fonctions militaires et civiles.

[6] Augustodunum est le nom celtique latinisé de l’ancienne cité d’Autun, formé d’Augusto et dunum. La grande cité apparaît vers 16-13 av. jc, fondée par l’empereur Auguste au bord de l’Atuvaros (Arroux) et sur l’axe majeur des Éduens qui relie Bibracte à Cavillonum. Rome cherche à affirmer son pouvoir et veut éclipser l’oppidum de Bibracte. Chef-lieu de la civitas, la grande cité devient un centre administratif, économique, politique et intellectuel, un relais du pouvoir romain, la capitale des Éduens. Aucune ville de la province de Gaule lyonnaise, mis à part Lugdunum (Lyon), ne peut se comparer à Augustodunum qui se pare du titre de « soror et aemula Romae », (sœur et émule de Rome).

[7] Trèves est une ville et un arrondissement d’Allemagne, dans le Land de Rhénanie-Palatinat. La ville est située sur la Moselle. Cette ville, ancienne colonie romaine, est fondée à l’époque romaine, en l’an 16 av. jc sous le nom d’Augusta Treverorum, sur le site du chef-lieu d’un peuple gaulois, les Trévires. Le pont romain en pierre qui franchit la Moselle est édifié en 45 ap. jc, en remplacement d’un premier pont de bois : c’est le plus ancien pont d’Allemagne encore debout. Colonie romaine et place forte très importante dans la défense contre les « Barbares », elle est dotée d’une enceinte abritant la plus grande surface urbaine de Gaule. Grande métropole marchande à partir du 2ème siècle, devenue l’une des capitales de la Tétrarchie à la fin du 3ème siècle et siège d’un atelier monétaire impérial à partir de 294, Trèves est alors qualifiée de « seconde Rome » ou Roma Secunda. De l’époque romaine subsistent la Porta Nigra (porte noire), le plus grand édifice romain sur le sol allemand, une basilique, où siège un tétrarque (aujourd’hui une église protestante), les restes d’un amphithéâtre, ainsi que des ruines de thermes romains. Au début du 5ème siècle, au cours des invasions germaniques, Trèves est attaquée et pillée plusieurs fois par les Francs. Peu auparavant, la préfecture des Gaules est transférée de Trèves à Arles

[8] Les Alamans ou Alémans étaient un ensemble de tribus germaniques établies d’abord sur le cours moyen et inférieur de l’Elbe puis le long du Main, où ils furent mentionnés pour la première fois par Dion Cassius en 213. Ces peuples avaient pour point commun de rivaliser avec les Francs, sans doute à l’origine un autre regroupement d’ethnies établies plus au nord sur la rive droite du Rhin. Le royaume alaman désigne le territoire des Alamans décrit à partir de 269.

[9] La ville doit son nom de Cologne à l’impératrice romaine Agrippine, épouse de l’empereur Claude, qui éleva son lieu de naissance au rang de colonie en l’an 50, sous le nom de Colonia Claudia Ara Agrippinensium. Les Romains y tenaient une garnison et des axes routiers convergeaient vers un pont de bateaux sur lequel transitait un important commerce avec toutes les régions de la Germanie. En raison de son importance stratégique sur le limes du Rhin et de la présence de l’armée et de la clientèle germanique, l’endroit attira de nombreux marchands et devint un foyer d’artisanat et de commerce. Centre militaire, la ville fut la résidence de l’empereur gaulois Postume de 260 à 268, et le lieu de l’usurpation éphémère de Silvanus en 355. Les Romains introduisirent le christianisme à Cologne, qui devint siège épiscopal à partir du 4ème siècle. Des Francs se sont regroupés au cours de la seconde moitié du 5ème siècle pour fonder un royaume à Cologne, qui est intégré dans le royaume franc de Clovis. À partir du 7ème siècle, ils sont désignés sous le nom de Francs ripuaires.

[10] Le Rhin est un fleuve international d’Europe centrale et de l’Ouest, long de 1 233 km. Il est la colonne vertébrale de l’Europe rhénane, l’espace économique le plus dynamique d’Europe et l’un des grands lieux de puissance du monde. Son bassin versant, de 198 000 km2, comprend le Liechtenstein, la majeure partie de la Suisse et du grand-duché de Luxembourg, une partie de l’Autriche, de l’Italie et de la Belgique, de grandes parties de l’Allemagne et des Pays-Bas et une partie de la France. Il s’agit du plus long fleuve se déversant dans la mer du Nord et de l’une des voies navigables les plus fréquentées du monde.

[11] Le préfet du prétoire (præfectus prætorio) est l’officier commandant la garde prétorienne à Rome, sous le Haut-Empire, et un haut fonctionnaire à la tête d’un groupe de provinces, la préfecture du prétoire, dans l’Antiquité tardive.

[12] La région de Campanie, plus couramment appelée la Campanie, est une région d’Italie méridionale. Elle fut associée au Latium, une des 11 régions de l’Italie romaine créées par l’empereur Auguste au 1er siècle av.jc Érigée en province à part entière au début du 4ème siècle au temps de l’empereur Dioclétien, la Campanie fut ensuite sous domination lombarde puis byzantine. Elle fut ensuite morcelée par l’indépendance que quelques-unes de ses villes adoptèrent.

[13] Gentiles Franci

[14] Les scholæ palatinæ, (garde palatine ou scholes) furent une unité militaire d’élite, dont la fondation est attribuée à l’empereur Constantin pour remplacer les Equites Singulares Augusti, la division équestre de la garde prétorienne. Troupes d’élite du 4ème au 7ème siècle, les scholae se transformèrent en armée de parade lorsque les empereurs cessèrent de commander eux-mêmes les troupes sur le champ de bataille. Elles offrirent alors une perspective de carrière aisée pour les jeunes de bonne famille. Elles subsistèrent dans l’Empire d’Occident jusqu’à leur dissolution par Théodoric le Grand. Dans l’Empire d’Orient, elles furent réformées par Constantin V pour devenir des tagmata, unités de cavalerie lourde stationnées près de Constantinople et constituant le cœur des forces expéditionnaires impériales. Elles furent dissoutes à la fin du 11ème siècle par l’empereur Alexis 1er Comnène.