Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Accueil du site > Histoire du 9ème siècle > Al-Abbas ibn al-Ma’mun

Al-Abbas ibn al-Ma’mun

vendredi 1er décembre 2023, par lucien jallamion

Al-Abbas ibn al-Ma’mun (mort en 838)

Prince abbasside et général

Fils du calife [1] Al-Mamūn et de sa concubine, Sundus. Il participe activement aux guerres byzantino-arabes [2] mais son oncle, Al-Mutasim, lui est préféré pour succéder à Al-Mamun.

En 828/829, il est nommé comme gouverneur de la Jazira [3]. Il se distingue alors durant plusieurs expéditions. Au cours de l’été 830, il dirige une campagne contre les Khurramites [4], des rebelles basés en Azerbaïdjan [5].

Il est accompagné par des prisonniers byzantins [6] conduits par Manuel l’Arménien, un important général byzantin qui s’est réfugié auprès du calife et qui pourrait bien avoir été le véritable chef de cette armée, étant donné sa grande expérience.

Abbas sort victorieux de cette campagne et, sur le chemin du retour, passe à proximité de la frontière byzantine, à Adata [7]. Dans le même temps, Manuel est parvenu à gagner sa confiance et le convainc de franchir la frontière pour lancer un raid contre les terres byzantines. Une fois en territoire impérial, Manuel profite d’une partie de chasse pour désarmer Abbas et sa suite et faire défection. Il rejoint l’Empire byzantin avec plusieurs prisonniers, tandis qu’Abbas et ses hommes se replient avec le reste de leur armée.

L’année suivante, Al-Abbas accompagne son père et son oncle lors d’une expédition de grande envergure contre l’Anatolie [8] byzantine. L’armée arabe franchit les portes ciliciennes [9] et prennent Héraclée Cybistre [10] au début du mois de juillet. Ensuite, elle se divise en trois corps, dirigés chacun par le calife, son frère et Al-Abbas, pour dévaster la Cappadoce [11].

Cependant, cette région a déjà durement souffert de raids arabes par le passé et a peu à offrir. Al-Abbas est celui qui rencontre le plus de résistance puisque l’empereur Théophile s’oppose à lui, ce qui donne lieu à une escarmouche remportée par les Arabes. En 833, Al-Abbas prend de nouveau part à une grande expédition dirigée par son père. Cette fois, Al-Mamun veut menacer Constantinople [12] et s’implanter durablement en Asie Mineure [13], en y installant des colons. Néanmoins, il meurt au début de l’été, ce qui met un terme à ce projet.

Dès qu’il apprend que son père est malade, Al-Abbas se précipite à son chevet, où il est rejoint par son oncle, Al-Mutasim. Il considère qu’en tant que fils du calife et déjà impliqué dans des campagnes militaires, il est le mieux placé pour prendre la succession. Néanmoins, Al-Mutasim est un sérieux prétendant.

Selon Al-Tabari, Al-Ma’mun lui aurait donné sa préférence sur son lit de mort. Al-Abbas ne tarde pas à s’incliner et à lui jurer allégeance, semble-t-il au grand dam de certains des membres de l’armée prêts à le déclarer calife.

En 838, il est arrêté pour conspiration contre Al-Mutasim et décède en prison.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Matthew S. Gordon, The Breaking of a Thousand Swords : A History of the Turkish Military of Samarra, Albany, State University of New York Press, 2001 (ISBN 0-7914-4795-2)

Notes

[1] Le terme calife, est une romanisation de l’arabe khalîfa, littéralement « successeur » (sous-entendu du prophète), titre porté par les successeurs de Mahomet après sa mort en 632 et, pour les sunnites, jusqu’à l’abolition de cette fonction par Mustafa Kemal Atatürk en 1924. Les ibadites ne reconnaissent plus aucun calife depuis 657. L’autorité d’un calife s’étend sur un califat. Il porte aussi le titre de commandeur des croyants, titre aboli chez les chiites après la mort d’Ali. Les critères de choix sont différents entre les chiites et les sunnites mais le porteur du titre a pour rôle de garder l’unité de l’islam et tout musulman lui doit obéissance : c’est le dirigeant de l’oumma, la communauté des musulmans.

[2] Les guerres entre les Arabes et les Byzantins sont une série de guerres entre les califats arabes et l’Empire byzantin entre le 7ème et le 12ème siècle. Celles-ci débutent en même temps que les premières conquêtes musulmanes, puis sous les califes bien guidés et omeyyades, et se poursuivent sous la forme d’un bras de fer frontalier permanent jusqu’au début des croisades. À la suite de celles-ci, les Byzantins (les Romains ou Rûm dans les chroniques historiques musulmanes) perdent une importante partie de leur territoire.

[3] la Haute-Mésopotamie, région de la frontière avec l’Empire byzantin

[4] Le mouvement khurramite aussi appelé la Khurramiya (La religion joyeuse) était un mouvement religieux et politique iranien qui est apparu en Azerbaïdjan au début du 9ème siècle. Ce mouvement, aussi appelé Surkh jāmgān (aux habits rouges) à cause de leur couvre-chef rouge, était une réaction iranienne, contre le pouvoir arabe et contre l’islam, qui a contribué à affaiblir le califat. Sous la direction de Bâbak, les Khurammites ont commencé à attaquer en Iran et en Irak à partir de 816, sous le règne d’Al-Mamun. Bâbak fut exécuté en janvier 838 à Samarra.

[5] Pays du Caucase situé sur la ligne de division entre l’Europe et l’Asie. Sa capitale est Bakou, sa langue officielle est l’azéri et sa monnaie est le manat. Du 7ème au 10ème siècles, la région connaît un essor politique, sous les Sajides, les Chirvanchahs, les Salarides, les Ravvadides et les Cheddadides. Au 12ème siècle, après l’effondrement de l’Empire seldjoukide, les Atabegs d’Azerbaïdjan règnent depuis leur capitale de Nakhitchevan, puis d’Ardabil, et enfin de Tabriz, sur l’Azerbaïdjan iranien actuel et sur l’Arran (l’Azerbaïdjan moderne). Leur territoire est ensuite conquis par le Khwarezmchahs Jalal ad-Din au 13ème siècle, dont l’État succombe ensuite aux Mongols. Au 13ème siècle, l’Empire mongol des Khulaguides est fondé, avec sa capitale à Tabriz.

[6] L’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient désigne l’État apparu vers le 4ème siècle dans la partie orientale de l’Empire romain, au moment où celui-ci se divise progressivement en deux. L’Empire byzantin se caractérise par sa longévité. Il puise ses origines dans la fondation même de Rome, et la datation de ses débuts change selon les critères choisis par chaque historien. La fondation de Constantinople, sa capitale, par Constantin 1er en 330, autant que la division d’un Empire romain de plus en plus difficile à gouverner et qui devient définitive en 395, sont parfois citées. Quoi qu’il en soit, plus dynamique qu’un monde romain occidental brisé par les invasions barbares, l’Empire d’Orient s’affirme progressivement comme une construction politique originale. Indubitablement romain, cet Empire est aussi chrétien et de langue principalement grecque. À la frontière entre l’Orient et l’Occident, mêlant des éléments provenant directement de l’Antiquité avec des aspects innovants dans un Moyen Âge parfois décrit comme grec, il devient le siège d’une culture originale qui déborde bien au-delà de ses frontières, lesquelles sont constamment assaillies par des peuples nouveaux. Tenant d’un universalisme romain, il parvient à s’étendre sous Justinien (empereur de 527 à 565), retrouvant une partie des antiques frontières impériales, avant de connaître une profonde rétractation. C’est à partir du 7ème siècle que de profonds bouleversements frappent l’Empire byzantin. Contraint de s’adapter à un monde nouveau dans lequel son autorité universelle est contestée, il rénove ses structures et parvient, au terme d’une crise iconoclaste, à connaître une nouvelle vague d’expansion qui atteint son apogée sous Basile II (qui règne de 976 à 1025). Les guerres civiles autant que l’apparition de nouvelles menaces forcent l’Empire à se transformer à nouveau sous l’impulsion des Comnènes avant d’être disloqué par la quatrième croisade lorsque les croisés s’emparent de Constantinople en 1204. S’il renaît en 1261, c’est sous une forme affaiblie qui ne peut résister aux envahisseurs ottomans et à la concurrence économique des républiques italiennes (Gênes et Venise). La chute de Constantinople en 1453 marque sa fin.

[7] Adata, aussi appelée Hadath ou Al-Ḥadath al-Ḥamrā’ (soit Hadath la Rouge en arabe) était une ville et une forteresse située près des monts Taurus dans le sud-est de l’actuelle Turquie. Du fait de sa position proche de la frontière byzantino-arabe, elle joue un rôle important dans les guerres byzantino-arabes.

[8] L’Anatolie ou Asie Mineure est la péninsule située à l’extrémité occidentale de l’Asie. Dans le sens géographique strict, elle regroupe les terres situées à l’ouest d’une ligne Çoruh-Oronte, entre la Méditerranée, la mer de Marmara et la mer Noire, mais aujourd’hui elle désigne couramment toute la partie asiatique de la Turquie

[9] Les Portes de Cilicie ou Portes ciliciennes, en turc Gülek Boğazı « passage de Gülek », forment le principal passage à travers les monts Taurus, reliant les basses plaines de Cilicie et la côte méditerranéenne au haut plateau d’Anatolie. Elles débouchent à 44 km au sud de Tarse. Formées par les gorges étroites de la rivière Gökoluk, elles ont été longtemps uniquement praticables par des caravanes de mules, interdisant, par leur étroitesse, l’accès aux véhicules.

[10] Ereğli est un chef-lieu de district de la province de Konya en Turquie. Elle est appelée en turc : Konya Ereğlisi, c’est-à-dire Ereğli de Konya pour la distinguer des deux villes homonymes de Turquie Ereğli (Karadeniz Ereğlisi) dans la province de Zonguldak et de Ereğli (Marmara Ereğlisi) sur la rive européenne de la mer de Marmara dans la province de Tekirdağ. La ville est sur le plateau anatolien à l’entrée des Portes de Cilicie, cette position sur la route menant de Konya à Adana joue un rôle important dans son histoire.

[11] La Cappadoce est une région historique d’Asie Mineure située dans l’actuelle Turquie. Elle se situe à l’est de la Turquie centrale, autour de la ville de Nevşehir. La notion de « Cappadoce » est à la fois historique et géographique. Les contours en sont donc flous et varient considérablement selon les époques et les points de vue.

[12] Constantinople est l’appellation ancienne et historique de l’actuelle ville d’Istanbul en Turquie (du 11 mai 330 au 28 mars 1930). Son nom originel, Byzance, n’était plus en usage à l’époque de l’Empire, mais a été repris depuis le 16ème siècle par les historiens modernes.

[13] L’Anatolie ou Asie Mineure est la péninsule située à l’extrémité occidentale de l’Asie. Dans le sens géographique strict, elle regroupe les terres situées à l’ouest d’une ligne Çoruh-Oronte, entre la Méditerranée, la mer de Marmara et la mer Noire, mais aujourd’hui elle désigne couramment toute la partie asiatique de la Turquie