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Gian Lorenzo Bernini, dit Le Bernin ou Cavalier Bernin

lundi 22 mars 2021, par lucien jallamion

Gian Lorenzo Bernini, dit Le Bernin ou Cavalier Bernin (1598-1680)

Sculpteur-Architecte et peintre

Artiste très important, son art, typiquement baroque [1], est caractérisé par la recherche du mouvement, la torsion des formes, le spectaculaire et les effets d’illusion. Par son abondante production artistique, il se place comme la figure de proue de l’art baroque à Rome.

Fils d’Angelica Galante et de Pietro Bernini , sculpteur maniériste d’origine florentine. Le couple se rend à Rome en 1605 où Pietro travaille pour le compte du cardinal Scipione Borghese ce qui est l’occasion de faire montre du talent précoce du fils qui travaille auprès de son père.

Pietro Bernini travaille sur les chantiers de Paul V Borghèse, achevant en particulier ce qui est reconnu comme son chef-d’œuvre, “l’Assomption de la Vierge” du baptistère de Sainte-Marie-Majeure [2] et la chapelle Paolina [3] destinée à accueillir la tombe de Paul V et Clément VII pour laquelle Pietro Bernini réalise un couronnement de Clément VII en 1611. Le jeune Gian Lorenzo bénéficie très jeune de l’expérience de son père, en particulier en ce qui concerne l’organisation du travail collectif sur un chantier et la fusion des œuvres architectoniques, picturales, sculpturales dans un ensemble de marbres polychromes.

Sous le patronage du cardinal Scipion Borghèse, alors membre de la famille papale régnante, le jeune Bernini commence à être reconnu comme sculpteur de talent. Ses premières œuvres sont des pièces décoratives destinées à orner le jardin de la villa Borghèse [4], Priape et Flore* ( [5]). Un groupe décoratif des “Quatre Saisons” commandé par Leone Strozzi pour le jardin de sa villa romaine dont les traits sensuels et réalistes des festons de fruits dénotent l’influence des œuvres caravagiennes présentes dans la collection du cardinal et auxquelles Le Bernin n’a pas pu échapper.

Avec les quatre groupes Borghèse qui l’occupent pendant 5 ans, Le Bernin atteint une gloire immédiate. Il s’agit de trois sujets mythologiques et un biblique correspondant aux centres d’intérêt antiquisants de leur commanditaire, le cardinal Scipion Borghèse

Son talent précoce attire l’attention du pape Paul V. Favori des papes, il devient l’architecte de la place Saint-Pierre. Grégoire XV le nomma chevalier

En 1623, succédant à Grégoire XV, le florentin Maffeo Barberini monte sur le trône pontifical sous le nom d’Urbain VIII. Le Bernin trouve en lui le mécène idéal, Urbain mène une politique de grands travaux pour graver dans la pierre la volonté de reconquête de l’église comme force triomphante du paganisme via les missions et du protestantisme via la Contre-réforme : une architecture spectaculaire, une esthétique communicante, persuasive et festive voire fastueuse en seront les vecteurs. Urbain VIII le combla de richesses.

En 1627, le tombeau du pape est commandé au Bernin. Il sera achevé des années plus tard et placé en face de celui de Paul III, l’initiateur de la Contre-Réforme [6] qu’Urbain VIII pensait avoir achevée. C’est l’occasion pour le Bernin de se mesurer, comme il l’a déjà fait avec son “David”, avec Michel-Ange qui avait réalisé le tombeau de Paul III.

En 1644, GianBattista Pamphili dit Innocent X est élu au trône de Saint-Pierre. C’est un pape austère ou aux ambitions artistiques limitées par la crise des finances du Saint-Siège [7]. Coup dur à la réputation du Bernin, c’est aussi l’année de la démolition du campanile de la basilique Saint-Pierre pour des raisons de statique. Ses concurrents en profitent pour faire valoir leur place, Borromini obtient le chantier de Saint-Jean de Latran [8], Carlo Rainaldi construit “le Palazzo Pamphilj” et commence la construction de l’église Sainte-Agnès en Agone [9] sur la de la place Navone [10]

Le Bernin n’est pas en disgrâce mais cela y ressemble presque et il faut l’habile médiation du prince Niccolò Ludovisi pour qu’on lui commande la réalisation de la magnifique “fontaine des Quatre-Fleuves”

Alexandre VII qui monte sur le trône de saint Pierre en 1655 est un pape humaniste et urbaniste.

Il commande au Bernin la colonnade de la place Saint-Pierre lequel trouve une solution urbanistique et symbolique élégante en concevant une colonnade qui s’écarte depuis la basilique comme deux bras qui accueilleraient la foule. Dans son projet, l’architecte aurait souhaité fermer entièrement la place par une troisième aile à l’est de celle-ci, mais la mort d’Alexandre VII, interrompit définitivement les travaux.

De 1658 à 1678, il travaille à l’édification de l’église Saint-André du Quirinal [11] dont le plan elliptique servira de modèle pour nombre d’églises baroques par la suite. Le Bernin, qui a beaucoup contribué à l’embellissement ou la complétion de bâtiments existants et peu construit d’édifices dans leur totalité considère cette église comme son chef-d’œuvre architectural.

Le Bernin est un artiste de réputation internationale et, dès 1664, Colbert l’invite en France pour le compte de Louis XIV qui doit faire pression sur le pape pour qu’il libère son architecte préféré, lequel part pour Paris en avril 1665 pour travailler sur la restructuration du Louvre.

Reçu comme un prince, il réalise alors un buste du roi, mais aucun de ses projets de façade pour le Louvre ne sera retenu, marquant le début du déclin de l’influence italienne sur l’art architectural français. On lui préfère le projet de Claude Perrault . La statue équestre du roi, qu’il avait proposée lors de son séjour en France, et qui sera réalisée quelques années plus tard à Rome, sera livrée, mais exilée dans un coin peu prestigieux du parc de Versailles. Il retourna à Rome dès octobre 1665.

Comme pour Urbain VIII, il réalise le tombeau d’Alexandre VII avec les allégories de la Charité, de la Vérité devant la Prudence et la Justice avec une porte qui symbolise le passage vers l’au-delà.

Sous Clément IX , Le Bernin réalise une série d’anges pour le pont Saint-Ange de Rome [12]. De cette série, seule une statue est de la seule main du Bernin laquelle est aujourd’hui conservée en la basilique Sant’Andrea delle Fratte [13].

Il meurt à Rome en 1680 et est enterré dans la basilique Sainte-Marie-Majeure.

Deux ans après sa mort, la reine Christine de Suède, alors en exil à Rome, commande sa biographie à Philippe Baldinucci .

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Loïc Aubry, Les carnets secrets du Bernin ou La Vérité Dévoilée, roman, Bordessoules, 2009, (ISBN 978-2-916344-43-0)

Notes

[1] Le baroque est un mouvement artistique qui trouve son origine en Italie dans des villes telles que Rome, Mantoue, Venise et Florence dès le milieu du 16ème siècle et qui se termine au milieu du 18ème siècle. Il y a un âge baroque différent selon les domaines, qu’ils soient intellectuels, historiques ou artistiques. Certains critiques y voient une constante culturelle qui revient tout au long de l’histoire comme l’a écrit Eugenio d’Ors.

[2] La basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome est l’une des quatre basiliques majeures. Elle est la propriété du Vatican. C’est le plus grand monument et la plus ancienne église romaine consacrée à la Vierge Marie

[3] La chapelle Pauline (en italien cappella Paolina) est une chapelle de style Renaissance du palais du Vatican, à Rome. Elle doit son nom au pape Paul III, qui la fait bâtir de 1537 à 1539. Deux grandes fresques de Michel-Ange, consacrées aux saints Pierre et Paul, ornent ses murs latéraux. Ce sont les dernières peintures de l’artiste.

[4] À la fin du 16ème siècle, les Borghese (nom francisé en Borghèse), une riche famille originaire de Sienne, acquièrent des terres au nord de Rome, hors de la Porta Pinciana, pour constituer peu à peu un parc immense. Parallèlement, la famille Borghese étend son influence au sein de l’aristocratie romaine, d’autant plus lorsque le cardinal Camillo Borghese fut élu pape en 1605 sous le nom de Paul V. La famille entreprend alors de grands travaux d’édification, dont la construction d’une villa dans son parc du Pincio.

[5] aujourd’hui au Metropolitan Museum of Art

[6] La Contre-Réforme est le mouvement par lequel l’Église catholique réagit, dans le courant du xvie siècle, face à la Réforme protestante. L’expression provient de l’historiographie allemande du 19ème siècle et est employée dans un esprit polémique. Une partie des historiens actuels la distinguent du terme de Réforme catholique et ne l’emploient plus en historiographie, car ils estiment que le terme de « Contre-Réforme » limite la Réforme catholique à un simple processus de réaction face au protestantisme alors qu’elle est bien plus profonde. La Contre-Réforme a pour cadre une aspiration à la réforme et au renouveau religieux qui traverse l’Occident chrétien depuis le 15ème siècle. Elle répond en partie aux objectifs de l’Église catholique visant à faire reculer et disparaître le protestantisme. Elle permet de doter l’Église catholique des outils spirituels et matériels pour amorcer une reconquête partielle des régions acquises aux différentes Églises protestantes et amorcer une renaissance religieuse. Les oppositions postérieures au protestantisme se définissent dans le cadre de l’antiprotestantisme.

[7] fin de la guerre de Trente Ans et traités de Westphalie

[8] L’archibasilique Saint-Jean-de-Latran est l’une des quatre basiliques majeures de Rome, édifiée sur le mont Latran. Son titre exact est basilique du Très-Saint-Sauveur et des saints Jean Baptiste et Jean l’Évangéliste. Premier édifice monumental chrétien construit en Occident, à partir de 320, elle est l’église cathédrale de l’évêque de Rome, le pape. Tout comme le palais du Latran qui lui est contigu, elle est la propriété du Saint-siège et bénéficie à ce titre du privilège d’extraterritorialité. Elle est considérée comme la « mère » en ancienneté et dignité de toutes les églises de Rome et du monde.

[9] L’église Sant’Agnese en Agone, située sur la place Navone à Rome, a été construite sur le lieu où, selon la tradition, la sainte, exposée nue à la vue de la population, fut recouverte miraculeusement par ses cheveux.

[10] La piazza Navona (place Navone en français) est la plus grande place touristique de Rome en Italie. Située dans la partie nord du champ de Mars, à proximité du Panthéon, elle est construite sur les ruines du stade de Domitien du 1er siècle, dont elle conserve la forme exacte. Elle est, avec son décor architectural monumental (fontaine des Quatre-Fleuves de Gian Lorenzo Bernini (dit Le Bernin), église Sainte-Agnès-en-Agone de Francesco Borromini…), l’un des plus beaux ensembles d’architecture baroque de Rome.

[11] L’église Sant’Andrea al Quirinale (en français : Saint-André-du-Quirinal) est un édifice religieux catholique italien de style baroque situé sur la colline du Quirinal à Rome. Construite par Le Bernin durant la seconde moitié du 17ème siècle pour être l’oratoire du noviciat des jésuites, elle est considérée comme un des bijoux du baroque italien. Rattachée au noviciat des jésuites jusqu’en 1773, et de 1814 à 1870, elle est depuis 1925 à nouveau desservie par les jésuites.

[12] Le pont Saint-Ange est un pont de Rome, qui relie les deux rives du Tibre face au château Saint-Ange. Il fut construit en 134 sous le règne de l’empereur Hadrien, qui lui donna son nom, Pons Aelius.

[13] La basilique Sant’Andrea delle Fratte (en français : Basilique Saint-André-des-Buissons) est une basilique mineure romaine située dans le rione de Colonna.