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La France sous louis XIV

jeudi 10 janvier 2013

La France sous louis XIV

Dans la France à laquelle Louis XIV impose un pouvoir absolu demeure, étrangeté, ce que l’on nomme des “alleux souverains*”. Ces domaines sont totalement indépendants de la couronne. C’est le cas, par exemple de l’alleu d’Yvetot en Normandie. En outre, des princes étrangers exercent leur pouvoir sur des enclaves dans le royaume même. Avignon et le Comtat Venaissin appartiennent au Pape comme la Lorraine ou l’Alsace dépendent du Saint Empire, de l’Autriche, d’autres princes. Ces étrangetés ne sont pas les seules. Les villes sont jalouses de leurs privilèges, les langues diffèrent d’une province à l’autre, les coutumes n’ont rien de commun. Seul dénominateur commun au royaume, le Conseil du roi qui seul est en mesure de régler les différends entre toutes les juridictions. Le 20 Août 1648 à lieu la bataille de Lens, les Autrichiens et les Espagnols conduits par l’archiduc Léopold avaient, après leur victoire à Courtrai, commencé le siège de Lens. A cette nouvelle, le prince de Condé, auquel Mazarin avait confié la défense du nord du royaume, arriva devant la ville à marche forcée, et défait en 1 heure les armées ennemies. Il leur prend des centaines d’étendards et 120 canons. Un Te Deum fut chanté à Notre-Dame de Paris le 26 août pour célébrer cette victoire. au même instant, à lieu l’arrestation de Broussel, l’un des plus anciens conseillers de la grande chambre du Parlement. On l’arrête à son domicile, sur l’ordre d’Anne d’Autriche. La régente n’admet pas les 27 articles élaborés en commun par les 3 cours souveraines que sont la Cour des comptes, la Cour des aides et le Grand Conseil, qui avaient proclamé, entre autres, un droit de regard sur les finances de l’Etat et la liberté des personnes et des biens et portaient atteinte à l’absolutisme royal. Le Te Deum ne suffit pas à ce que l’arrestation de Broussel passa inaperçue. A Paul de Gondi de Retz, coadjuteur de l’archevêque de Paris qui vient conseiller à la régente d’élargir Broussel, celle-ci rétorque : “ Je l’étranglerais plutôt de mes propres mains. ” Dans la nuit, des barricades se dressèrent à Paris. La libération de Broussel et celle d’autres conseillers, le 29, ne changèrent rien. La Fronde, qui est d’abord parlementaire, commença.

Par le traité de Münster, le Saint Empire romain germanique reconnaît enfin le pouvoir du roi de France sur les 3 Evêchés que sont Toul, Metz et Verdun. Si Louis XIV voulait obtenir des places en Lorraine, c’était pour se ménager un accès vers le Saint Empire. Pour la première fois dans l’histoire, le traité des Pyrénées de 1659 évoqua les frontières naturelles en indiquant que les limites des royaumes se confondaient avec “ la crête des montagnes qui forment les versants des eaux ”.

Le 9 mars 1661, le cardinal Jules Mazarin décède à Vincennes. Le roi, qui a 22 ans, n’a pas oublié sans doute ces phrases d’une lettre de son premier ministre, datée du 29 juin 1659 : “ Si une fois vous prenez en main le gouvernail, vous ferez plus en un jour qu’un plus habile que moi en six mois, car c’est d’un autre poids, ce qu’un roi fait de droit fil que ce que fait un ministre quelque autorisé qu’il puisse être ”. Le roi n’a pas oublié non plus ce qu’il appelle “ ces agitations terribles avant et après ma majorité ” qu’a été la Fronde. Il n’a pas oublié le temps de son enfance pendant la régence d’Anne d’Autriche sa mère. Sur son lit de mort, la veille, Mazarin a dit au roi : “ Sire, je vous dois tout, mais je m’acquitte envers Votre Majesté en lui donnant Colbert ”. Reste que le roi ne fit pas de celui qui fut l’intendant des affaires du cardinal un premier ministre. Louis XIV commença d’exercer le métier de roi seul. Dans les Mémoires pour l’instruction du Dauphin, il écrira plus tard : “ Nous sommes la tête d’un corps dont les sujets sont les membres ”.

l’arrestation du surintendant

Fils d’un armateur breton, Nicolas Fouquet avait servi avec diligence le Premier ministre Mazarin, mort quelques mois plus tôt. Il avait redressé les finances de la France après la guerre civile de la Fronde mais il en avait profité pour beaucoup s’enrichir.

Enivré par ses succès, il s’était donné pour devise : “Quo non ascendam [1]”. Il fut très vite présenté comme le successeur probable de Mazarin à la tête du gouvernement. Mais ce dernier, sur son lit de mort, avait préféré recommander Jean-Baptiste Colbert au jeune roi Louis XIV.

Dès le lendemain, Louis XIV réunit le Haut Conseil et annonça qu’il entendait désormais diriger les affaires. « Monsieur, » dit-il en s’adressant au chancelier Séguier “je vous ai fait assembler avec mes ministres et secrétairs d’État pour vous dire que, jusqu’à présent, j’ai bien voulu laisser gouverner mes affaires par feu M. le Cardinal ; il est temps que je les gouverne moi-même. Vous m’aiderez de vos conseils quand je vous les demanderai...”

Quelques jours plus tard, Louis XIV chargeait son jeune ministre Colbert d’examiner les comptes du surintendant. Celui-ci, qui aspirait à prendre sa place, ne se fit pas prier et dénonça ses malversations au roi. Le roi s’indigna qu’un homme puisse se rendre l’arbitre souverain de l’État.

Mesurant mal la précarité de sa situation, Nicolas Fouquet continua de se comporter avec faste. Homme de goût et grand mécène, il réunit autour de lui les plus grands talents de son époque, Molière, Lully, La Fontaine, Corneille, Scarron, le décorateur Le Brun, l’architecte Le Vau, le jardinier Le Nôtre, le maître d’hôtel Vatel. Sa générosité lui assurait de nombreux appuis parmi les artistes et les personnes influentes de la cour. Du moins le croyait-il.

Le roi voyant en Fouquet une menace pour la monarchie. Il était déterminé à le faire tomber mais, tout roi qu’il était, il devait prendre des précautions car le surintendant avait de nombreux amis et les frondeurs d’il y a tout juste 12 ans pourraient lui apporter leur soutien. C’est alors que le surintendant lance une invitation au roi et à la cour en son nouveau château de Vaux près de Melun, au sud-est de Paris, dont les travaux avaient débuté en 1656, le soir du mercredi 17 août 1661. La fête organisée par son talentueux maître d’hôtel Vatel est somptueuse, trop somptueuse. Elle scelle le sort du surintendant.

Le jeune roi Louis XIV alors âgé de 23 ans arrive à Vaux-le-Vicomte à 6 heures du soir en compagnie de sa mère, la reine Anne d’Autriche, et de quelques 600 courtisans. Le décorateur du surintendant, Le Brun, fit les honneurs du château. Il montra les allégories, écureuils et soleil, qui désignaient le surintendant lui-même, que tout le monde appelait “Monseigneur”.

Le roi apprécia comme on l’imagine cet étalage d’orgueil. Ensuite, les invités furent répartis dans différentes pièces du château pour un buffet. Toute la cour fut servie dans de très luxueux couverts en vermeil. Après la collation, Molière et Lully donnèrent une comédie ballet, “Les Fâcheux”, dans les jardins. En retournant vers le château, le roi et la cour furent éblouis par un feu d’artifice au-dessus de l’édifice. D’après “la gazette”, le roi et la Cour seraient repartis comblés, à 2 heures du matin.

L’idée selon laquelle le roi se serait senti humilié et aurait même regagné son château de Fontainebleau sans attendre la fin de la fête est vraisemblable vu l’étalage de luxe et ceci a dû renforcé sa détermination d’abattre son trop puissant surintendant.

Le surintendant ne tarda pas à mesurer ses maladresses et tenta de rallier la faveur du roi, y compris en lui offrant le domaine de Vaux. Mais rien n’y fit. Début septembre, le roi se rendi avec la cour à Nantes au prétexte de présider les états de Bretagne. Le matin du 5 septembre 1661, après la réunion du conseil, il retint Fouquet auprès de lui pour badiner et endormir sa méfiance. Il s’agissait d’éviter que Fouquet, alarmé, s’enfuit à Belle-Île, dans cette possession personnelle qui lui valait le titre de marquis de Belle-Île. Il y avait fait construire une forteresse en vue de s’y réfugier en cas de besoin !

A la porte du bureau du roi attendaient quelques mousquetaires sous les ordres du sous-lieutenant Charles Batz-Castelmore, sieur d’Artagnan. D’Artagnan avait ordre d’arrêter Fouquet avec discrétion mais à peine le surintendant avait-il franchi la porte du bureau qu’il fut assailli par une foule de solliciteurs. Le mousquetaire ne pu l’empêcher de remonter dans sa chaise à porteurs. C’est finalement sur la place de la cathédrale qu’il le rejoignit et l’interpella. Fouquet fut enfermé à la Bastille. Son procès fut instruit par une cour spéciale constituée sur mesure par le roi lui-même et durera 3 ans. La procédure se déroula uniquement par écrit, sur la base du dossier compilé par Colbert. Le procureur requerra la pendaison pour crime de haute trahison mais les amis de Fouquet firent fléchir la cour et le surintendant fut finalement condamné à un simple bannissement.

Louis XIV, qui aurait préféré que Fouquet soit condamné à mort, usa de son droit régalien pour aggraver la peine. Il transforma le bannissement en une réclusion à perpétuité. Le financier et mécène, passera les 16 dernières années de sa vie dans la prison de Pignerol, dans les Alpes piémontaises. Sa chute brutale survint 6 mois après la mort de son mentor, le Premier ministre Mazarin. Elle laissa le champ libre au jeune roi Louis XIV pour diriger comme il l’entendait les affaires du royaume.

Louis XIV, rassuré, consolida pendant ce temps son pouvoir personnel et acheva l’œuvre centralisatrice de Richelieu et Mazarin avec le diligent concours de son ministre Colbert. Selon l’exemple donné par son malheureux surintendant, il se montra brillant mécène et organisa à son tour de splendides fêtes en son parc de Versailles.

Pour que nul ne doute de l’ordre qui règne, Louis XIV choisit lors de la fête du Carrousel, en juin 1662, l’emblème qui fut désormais le sien “un soleil”. La devise “Nec pluribus impar”, qui signifie qu’il ne saurait être l’égal de quiconque, l’accompagne. La formule “ Sa Majesté a ordonné et ordonne, veut et entend que... ” n’a pas fini de signifier la volonté du roi. La même année à lieu l’achat de la manufacture des Gobelins et en 1663 Débuta la construction du Collège des Quatre Nations à Paris. En 1664 furent Fondés, la compagnie des Indes orientales et la compagnie des Indes occidentales par Colbert.

Du 6 au 13 mai 1664, Louis XIV préside aux somptueuses fêtes des « Plaisirs de l’Île enchantée », pour le plus grand plaisir de sa dévouée maîtresse, Louise de La Vallière, qui fait à cette occasion son entrée officielle à la cour. 600 invités furent conviés à Versailles, dans le parc somptueusement aménagé par Le Nôtre autour du pavillon en briques et en pierres construit par l’ancien roi Louis XIII. Les fêtes furent à peine troublées par Tartuffe. La pièce que Molière présenta le 12 mai scandalisa les dévots groupés autour de la reine mère, Anne d’Autriche. Celle-ci n’hésita pas à faire interrompre la représentation !

Malgré cet incident, les “Plaisirs de l’Île enchantée” laissèrent un délicieux souvenir aux invités. Ce furent les premières des grandes fêtes qui agrémenteront les débuts du règne du Roi Soleil. Avec ces fêtes, le jeune roi ne voulait pas seulement se faire plaisir. Il voulait aussi mettre en scène la toute-puissance de la monarchie française, ce à quoi il réussira parfaitement pendant les 2 premières décennies de son gouvernement. Le 12 décembre 1665. Colbert fut nommé au contrôle général des finances et devint le principal conseiller du roi. Les manufactures d’Aubusson et de Saint-Gobain devinrent manufactures royales sous son impulsion et en 1666 fut fondé l’Académie royale des sciences.

P.-S.

Source : archives ljallamion histoire du 17ème/encyclopédie Imago mundi/ Herodote/Histoire/ Historia ect...

Notes

[1] Jusqu’où ne monterai-je pas ?