Henri II de La Ferté-Senneterre (1599-1681)
Maréchal de France en 1651-Gouverneur de la Lorraine en 1643
Fils d’ Henri 1er de La Ferté-Senneterre dit Henri de Saint-Nectaire , ministre d’État [1] issu d’une vieille famille de la chevalerie auvergnate. Destiné à la carrière des armes, il combattit pour la première fois sous les ordres de Maurice de Nassau, chef de la révolte des Provinces-Unies [2] protestantes contre la domination de la très catholique Espagne.
De retour dans le royaume de France, le jeune homme se distingua pendant le siège de La Rochelle [3], établi en 1622-1623 par Richelieu pour venir à bout de cette ville rebelle à l’autorité du roi de France. Il était alors capitaine d’un régiment payé par son père.
En 1632, l’armée française envahissait la Lorraine [4] et c’est tout naturellement que La Ferté se retrouva devant Nancy [5] en 1633. Le 25 septembre, Louis XIII et Richelieu pénétraient dans cette ville peuplée de 16 000 habitants qui venait d’être évacuée par le marquis de Mouis et sa garnison lorraine.
Devenu mestre de camp [6], Henri de La Ferté se couvrit de gloire contre les Espagnols à Hesdin [7] le 29 juin 1639. Afin de le récompenser, Louis XIII le nomma maréchal de camp [8].
Le 19 mai 1643, alors que le roi Louis XIII était mort depuis 5 jours, Henri de La Ferté-Senneterre participa à la bataille de Rocroi [9] contre les Espagnols au cours de laquelle il commandait en second l’aile gauche française et reçut 4 blessures.
Son père étant un favori de la reine Anne d’Autriche, régente du royaume de France depuis le décès de Louis XIII, ce vaillant combattant est nommé Gouverneur du duché de Lorraine en 1643 en remplacement du lorrain de Lenoncourt.
En 1644, il contrôlait à Nancy 23 compagnies d’infanterie plus une suisse en ville vieille et 7 compagnies d’infanterie en ville neuve. A ces troupes, s’ajoutait la cavalerie. Lieutenant général [10] depuis 1648, il est intronisé maréchal de France [11] le 5 janvier 1651 et resta fidèle à Anne d’Autriche et à Mazarin pendant la Fronde, cette guerre civile qui déchira la France de 1648 à 1652.
Fait prisonnier à Valenciennes [12] en 1656, il vit sa rançon payée par Louis XIV.
En récompense des bons et loyaux services de son titulaire, le marquisat de La Ferté-Senneterre est élevé à la dignité de duché-pairie par Louis XIV en novembre 1665.
Le vieux maréchal meurt le 27 septembre 1681.
Notes
[1] Ministre d’État est un titre gouvernemental utilisé dans divers pays. Dans certains cas, il indique une prééminence protocolaire de son titulaire au sein d’un gouvernement (France, Portugal, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, République démocratique du Congo, Tunisie). En Belgique, c’est un titre accordé par le roi à des personnalités politiques particulièrement méritantes. Aux Pays-Bas, le titre est également honorifique, mais actif et remis par le gouvernement.
[2] Provinces-Unies est le nom usuel donné à la république des Sept Provinces-Unies des Pays-Bas, formée par la sécession en 1581 des sept provinces septentrionales des Pays-Bas espagnols
[3] Le blocus de La Rochelle eut lieu en 1621-1622 lors de la répression de la première des révoltes huguenotes par Louis XIII
[4] Le duché de Lorraine est né du partage de la Lotharingie en 959 par le duc Brunon de Cologne, qui confia la Haute Lotharingie au vice duc Frédéric de Bar. Celui-ci prit le titre de duc de Haute Lotharingie en 977. Au fil du temps, le duché de Haute Lotharingie deviendra le duché de Lorraine, mentionné comme tel en 1067. Les ducs (pour les descendants de Gérard d’Alsace et ceux des Maisons de Vaudémont et d’Anjou jusqu’en 1737) se succédèrent jusqu’en 1766, date de l’annexion par la France où le trône ducal fut occupé par Stanislas Leszczynski, souverain polonais détrôné profitant de la vacance du trône lorrain à la suite du mariage du dernier duc de la maison de Lorraine, François III, avec l’archiduchesse régnante d’Autriche Marie-Thérèse. Ce François III a été élu par la suite roi des Romains et couronné comme Saint Empereur Romain sous le nom de François (premier de ce nom), de sorte qu’on parle de sa femme comme l’Impératrice Marie-Thérèse.
[5] Capitale du duché de Lorraine jusqu’au rattachement de celui-ci au Royaume de France en 1766, évêché depuis 1777, Nancy est le chef-lieu du département de la Meurthe de 1790 à 1871 puis de Meurthe-et-Moselle à partir de 1871. La naissance de Nancy est liée à l’édification d’un château féodal, au cours du 11ème siècle, par Gérard d’Alsace qui y fonde une petite cité qui deviendra la capitale du duché de Lorraine sous ses successeurs au 14ème siècle. En 1218, au cours de la Guerre de Succession de Champagne, sous le règne du duc Thiébaud 1er , la ville est totalement incendiée par l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen. Elle sera reconstruite, agrandie et protégée par un nouveau château.
[6] grade qui correspond au colonel de nos armées contemporaines
[7] Hesdin est une commune française située dans le département du Pas-de-Calais. La ville reste sous contrôle espagnol jusqu’à sa prise par les troupes de Louis XIII, commandées par le Maréchal de la Meilleraye, en 1639.
[8] En France, le grade de maréchal de camp fait son apparition au 15ème siècle où il avait pour mission de répartir les logements des troupes et de les placer sur le champ de bataille. Il évolue ensuite jusqu’à la chute de l’Ancien Régime. Le 21 janvier 1793, le grade de maréchal de camp devient en France celui de général de brigade. Le grade de maréchal de camp revient en usage sous la Restauration et la Monarchie de Juillet. Il n’est plus utilisé en France depuis 1848.
[9] La bataille de Rocroi a lieu le 19 mai 1643 pendant la guerre de Trente Ans. Elle met aux prises l’armée des Flandres, armée espagnole commandée par Francisco de Melo, qui assiégeait Rocroi, et l’armée de Picardie, armée française menée par Louis de Bourbon, duc d’Enghien (le futur Grand Condé). C’est une importante victoire française, qui marque la fin de la suprématie militaire des tercios espagnols et le début du renversement de l’équilibre des forces en Europe.
[10] Le lieutenant général de province était un personnage, issu souvent de la haute aristocratie, qui représentait le roi dans les provinces du royaume. Son rôle était théoriquement d’assurer la suppléance du gouverneur. En fait, les rois espéraient ainsi que leurs influences se neutraliseraient mutuellement, empêchant ainsi toute tentative de révolte. La charge de lieutenant général devint au 17ème siècle et surtout au 18ème siècle purement honorifique : le titulaire résidait à la Cour et se contentait de toucher les revenus sans effectuer de réel travail. De plus, les rois avaient tendance à nommer les fils successeurs de leur père, ce qui fit que les offices de lieutenant général firent quasiment partie du patrimoine de ces familles aristocratiques. Il ne faut pas confondre l’office de lieutenant général avec celui de « lieutenant de roi ». Le lieutenant de roi était subordonné au lieutenant général et son rôle (par essence le même : représenter le roi dans les provinces) n’était tenu que dans des ressorts beaucoup plus réduits.
[11] Depuis la création du titre, en 1185, il y a eu 342 maréchaux de France. L’office de maréchal n’est devenu militaire que depuis le début du 13ème siècle. À son origine, le maréchal de France n’a qu’un rôle d’intendance sur les chevaux du roi. Son office devient militaire au début du 13ème siècle, tout en étant subordonné au connétable. Le premier à porter le titre de maréchal du roi de France avec une fonction militaire était Albéric Clément, seigneur de Mez, désigné par Philippe Auguste, en 1185. Après l’abolition de l’office de connétable par Richelieu en 1624, les maréchaux deviennent les chefs suprêmes de l’armée. Parfois le roi crée une charge de maréchal général des camps et armées du roi, qu’il confie au plus prestigieux de ses maréchaux. Outre leurs fonctions militaires, les maréchaux ont aussi la responsabilité du maintien de l’ordre dans les campagnes, par l’intermédiaire des prévôts des maréchaux, d’où l’appellation de « maréchaussée » donnée à l’ancêtre de la gendarmerie. Jusqu’en 1793, date de l’abolition de cette charge, il y eut 263 maréchaux de France.
[12] Valenciennes est une commune française, historiquement capitale du comté du Hainaut français et aujourd’hui sous-préfecture du département du Nord. Elle est située au confluent de l’Escaut avec la Rhônelle. En 1285, la monnaie du Hainaut fut remplacée par la monnaie de France : l’écu. Valenciennes est une ville en pleine activité, forte de ses nombreuses corporations. À l’abri de son enceinte, un grand nombre de couvents se développe, à l’instar des Dominicains. Au 14ème siècle Albert de Bavière fait construire la tour de la Dodenne, où encore aujourd’hui la cloche sonne en l’honneur de Notre-Dame-du-Saint-Cordon. Au 15ème siècle, le Hainaut, rattaché au duché de Bourgogne, perd de son autonomie, mais Valenciennes jouit d’une grande renommée grâce aux artistes qu’elle protège en ses murs. L’économie de la ville repose essentiellement sur la draperie et le commerce, principalement du vin et des céréales des campagnes environnantes.