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L’histoire pour le plaisir

Constantin Lécapène

vendredi 9 avril 2021, par ljallamion

Constantin Lécapène (912-vers 946)

Co-empereur de 924 à 945

Troisième fils de Romain 1er Lécapène et de Théodora . Avec son frère aîné, Étienne Lécapène , il dépose Romain 1er en décembre 944, ce qui conduit à son propre renversement et exil par l’empereur légitime Constantin VII quelques semaines plus tard. Il est exilé sur l’île de Samothrace [1] où il est tué en tentant de s’échapper entre 946 et 948.

Romain Lécapène arrive au pouvoir en 919 quand il parvient à se nommer comme régent du jeune Constantin VII qu’il marie avec sa fille Hélène. Durant une année, il parvient à passer de la dignité de basiléopator [2] à celle de César avant d’être couronné empereur le 17 décembre 920. Pour consolider son accession au pouvoir et, dans le but de supplanter la dynastie macédonienne par sa propre famille, il élève son fils aîné Christophe comme co-empereur en mai 921, puis ses deux autres fils le 25 décembre 924.

Après la mort précoce de Christophe en 931 et, du fait de la mise de côté de facto de Constantin VII, Étienne et Constantin voient leur importance s’accroître même si, dans la hiérarchie impériale, ils restent à un rang inférieur à celui de Constantin VII. En 939, Constantin se marie une première fois avec Hélène, une fille du patrice Adrien, un Arménien.

Syméon Magistère rapporte qu’Hélène meurt le 14 janvier 940 et, le 2 février, Constantin se marie une deuxième fois avec Théophano Mamas. Il a un fils nommé Romain mais l’identité de sa mère est inconnue et il est castré en 945, peu après le renversement des Lécapène, pour l’empêcher de réclamer le pouvoir impérial. Néanmoins, il poursuit une carrière à la cour impériale, atteignant le rang de patrice [3] et la fonction d’éparque [4] de Constantinople [5].

Étienne et Constantin arrivent au premier plan en 943, quand ils s’opposent à un mariage pour leur neveu Romain II avec Euphrosyne, une fille du célèbre général Jean Kourkouas . Toutefois, si une telle union aurait sûrement consolidé la loyauté de l’armée envers les Lécapène, elle aurait aussi renforcé la position de la dynastie macédonienne légitime, représentée par Romain II et son père Constantin VII, aux dépens d’Étienne et Constantin. Ces derniers parviennent à l’emporter sur leur père, malade et vieillissant, tandis que Jean Kourkouas est mis de côté. Romain II se marie finalement avec Bertha, une fille illégitime d’Hugues d’Arles, roi d’Italie [6].

Alors que Romain 1er approche de la fin de sa vie, la question de sa succession devient prioritaire. En 943, Romain prévoit de laisser Constantin VII comme seul empereur après sa mort. Cette décision mécontente ses deux fils, qui craignent que leur beau-frère ne les déposes une fois arrivées au pouvoir et les force à se retirer dans un monastère.

Ils planifient de prendre le pouvoir par un coup d’état où Étienne doit apparaître comme la maître d’œuvre et Constantin comme un partisan plutôt réticent.

Les autres conspirateurs sont Marianos Argyre , le protospathaire [7] Basile Petenois, Manuel Kourtikès, le stratège [8] Diogène, Clado et Philippe. Toutefois, Georges Cédrène considère que Peteinos a servi comme agent de Constantin VII auprès des conspirateurs.

Le 20 décembre 944, ces derniers mettent leur plan en action. Les deux frères font pénétrer leurs partisans dans le Grand Palais au milieu de la journée. De là, ils conduisent leurs hommes dans la chambre de Romain 1er qu’ils font prisonnier sans difficultés. Ils parviennent à l’emmener au port le plus proche et, de là, à Prote [9], l’une des îles des Princes [10], un lieu classique d’exil. Là, Romain accepte de devenir moine et renonce au trône.

Après être parvenus à déposer leur père sans encombres, les deux frères doivent désormais composer avec Constantin VII. Toutefois, ils sont rapidement aux prises avec des rumeurs qui circulent à Constantinople et selon lesquelles, à la suite de la déposition de Romain, la vie de Constantin VII serait en danger. Très vite, des foules se rassemblent devant le palais, demandant à voir l’empereur en personne. L’historien lombard Liutprand de Crémone note que les ambassadeurs d’Amalfi [11], de Gaeta [12], de Rome et de Provence [13] présents dans la capitale byzantine prennent le parti de Constantin VII. Étienne et son frère doivent se résoudre à reconnaître que leur beau-frère est l’empereur principal.

Ce triumvirat à la tête de l’Empire dure à peu près 40 jours. Les trois hommes nomment rapidement de nouveaux chefs aux offices militaires. Bardas Phocas l’Aîné devient Domestique des Scholes [14] et Constantin Gongylès est placé à la tête de la marine byzantine. Constantin et son frère récompensent aussi leurs partisans. Ainsi, Peteinos devient patrice et Grand Hétériarque [15], Argyre est nommé Comte de l’Étable [16] et Kourtikès devient patrice et drongaire [17] de la garde.

Toutefois, le 26 janvier, sur l’insistance de sa sœur, l’Augusta Hélène, un autre coup d’état renverse les deux Lécapène. Ils sont accusés d’avoir essayé d’empoisonner l’empereur Constantin VII, ce qui aboutit à ce que ce dernier occupe désormais seul le trône impérial

Constantin et son frère sont d’abord envoyés sur l’île de Prote. Là, selon les chroniques byzantines, ils auraient été accueillis par leur père. Toutefois, Liutprand de Crémone rapporte une version différente. Selon lui, Romain reçoit ses enfants avec sarcasme, les remerciant de ne pas l’avoir négligé et les priant d’excuser les moines à propos de leur ignorance quant aux manières de recevoir correctement des empereurs.

Constantin est ensuite envoyé sur Tenedos [18] puis sur l’île de Samothrace. Finalement, il est tué lors d’une tentative d’évasion. La date de celle-ci est inconnue.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Charles Cawley, « Medieval Lands Projet : Byzantium 395-1057 », Foundation for Medieval Genealogy,‎ 14 février 2011

Notes

[1] Samothrace est une île de la mer Égée, dans la partie de la mer de Thrace, entre Imbros et Thasos à proximité des côtes de la Thrace. L’île est peuplée dès l’Antiquité et abrite le sanctuaire des Grands Dieux, un culte à mystères, sans doute d’origine préhellénique ou phénicienne, qui fait de l’île, aux yeux des Grecs, un lieu sacré. Sa position avancée vers la Thrace et l’Hellespont en fait un lieu de syncrétisme religieux.

[2] Basiléopatôr, littéralement le père de l’empereur, est l’une des titres séculiers les plus élevés de l’Empire byzantin. C’est un poste exceptionnel car il n’a été occupé qu’à deux reprises dans l’histoire byzantine. Son détenteur n’est pas le père biologique de l’empereur et bien que les fonctions exactes associées à ce poste restent obscures, il est généralement considéré qu’il équivaut à la fonction de régent en tant que gardien et tuteur du jeune empereur

[3] Patrice est un titre de l’empire romain, créé par Constantin 1er. Dans les années 310-320, Constantin abolit le patriciat romain, vieille distinction sociale qui avait ses racines au début de la république romaine. Le titre de patrice est désormais accordé par l’empereur à des personnes de son choix, et non plus à des familles entières. Dès son apparition, le titre de patrice permet à son titulaire d’intégrer la nobilitas, comme le faisait déjà le patriciat républicain. Le titre était décerné à des personnages puissants mais non membres de la famille impériale ; il vient dans la hiérarchie immédiatement après les titres d’Auguste et de César. Ce titre fut ensuite conféré à des généraux barbares au service de l’empire. Le titre fut encore porté par des notables gallo-romains au 6ème siècle. Sous les Mérovingiens, le titre de patrice était donné au commandant des armées burgondes. Les papes l’ont notamment décerné à plusieurs reprises pour honorer des personnages qui les avait bien servis. Le titre fut également conservé dans l’Empire byzantin, et son importance fut même accrue au 6ème siècle par Justinien 1er, qui en fit la dignité la plus haute de la hiérarchie aulique. C’était une dignité accordée par brevet. Dans les siècles suivants, elle fut progressivement dévaluée par la création de nouveaux titres. La dignité de patrice disparut à Byzance au 12ème siècle.

[4] Dans l’Empire byzantin, l’éparque est la dignité attribuée au préfet de Constantinople. Pendant le Bas Empire romain, l’éparque est le gouverneur d’une province.

[5] Constantinople est l’appellation ancienne et historique de l’actuelle ville d’Istanbul en Turquie (du 11 mai 330 au 28 mars 1930). Son nom originel, Byzance, n’était plus en usage à l’époque de l’Empire, mais a été repris depuis le 16ème siècle par les historiens modernes.

[6] Le royaume franc d’Italie. Charlemagne, roi des Francs, s’étant emparé du royaume des Lombards, qu’il absorba dans le royaume des Francs, ses successeurs carolingiens prirent parfois le titre de roi de Francie médiane, royaume franc couvrant le nord de la péninsule italienne et la Gaule cisalpine. Cependant, des membres d’autres lignées de la noblesse franque, comme les Anscarides et les Unrochides, s’emparèrent de ce trône, en usant quant à eux du titre de roi d’Italie ; ce royaume, à l’instar de celui de Francie médiane, ne recouvrait pas la totalité de la péninsule, certains territoires relevant de l’Empire byzantin ou des États pontificaux.

[7] Un protospathaire est une des plus hautes dignités de l’Empire byzantin à l’époque mésobyzantine (8ème -12ème siècles), conférée aux principaux généraux et aux gouverneurs provinciaux, ainsi qu’à des princes étrangers.

[8] Un stratège est un membre du pouvoir exécutif d’une cité grecque, qu’il soit élu ou coopté. Dans l’Empire byzantin, à partir du 7ème siècle, un stratège est le commandant d’un thème et de son armée. Il est le détenteur des pouvoirs civils et militaires au sein de cette province. Le terme de monostratège désigne un stratège qui a autorité sur plusieurs thèmes.

[9] Kınalıada (Proti, ou Prote) est une des neuf îles constituant l’archipel des Îles des Princes (Adalar en turc, un des trente-neuf districts d’Istanbul), dans la mer de Marmara, en Turquie. C’est l’île la plus proche de la rive européenne d’Istanbul, à seulement une heure de ferry de Sirkeci. Les îles Vordonis se trouvent à mi-chemin entre la côte et l’île de Kınalıada. L’île abritait un monastère pendant la période byzantine et servit de lieu d’exil, comme d’autres Îles des Princes.

[10] Les Îles des Princes sont un archipel de neuf îles dans la mer de Marmara au sud-est d’Istanbul en Turquie. Elles forment l’un des trente-neuf districts d’Istanbul. On les appelait autrefois Panadanisia : « îles des Prêtres », en raison du grand nombre de couvents qui y avaient été construits. Le nom Îles des Princes vient de ce qu’elles servirent de lieu de plaisance ou de réclusion à des princes byzantins.

[11] Amalfi puissance maritime était comme Capoue intéressée à limiter le pouvoir de sa rivale Salerne

[12] Gaeta (aussi nommée en français Gaëte ou Gaète) est une commune de la province de Latina dans le Latium en Italie. Au 11ème siècle, le duché tombe entre les mains des comtes normands d’Aversa, devenus princes de Capoue, et Gaeta est définitivement annexée à leur royaume par Roger II de Sicile en 1135. La cité continue toutefois de battre sa propre monnaie jusqu’en 1229.

[13] La Provence est une région historique et culturelle ainsi qu’un ancien État indépendant et une ancienne province (en tant qu’État associé à la France) avant de disparaître à la Révolution française

[14] La fonction de domestique des Scholes est une fonction militaire élevée dans l’Empire byzantin, du 8ème au début du 14ème siècle. À l’origine simples commandants des Scholai, la plus élevée des tagmata d’élite, ces domestiques gagnent rapidement en importance : au milieu du 9ème siècle, ils deviennent les commandants en chef de l’armée byzantine, juste après l’empereur. La fonction est toutefois éclipsée au 12ème siècle par celle de grand domestique, et, à la période des Paléologue, elle est réduite à une dignité de cour purement honoraire et de niveau intermédiaire.

[15] L’Hétairie est un corps de la garde impériale de l’Empire byzantin. L’hétairie signifie la compagnie en échos aux Compagnons formant l’élite de la cavalerie du Royaume de Macédoine. L’Hétairie impériale est principalement composée de mercenaires et constitue la garde impériale aux côtés de la tagma du 9ème siècle au 12ème siècle. Cependant, le terme s’applique aussi aux petits corps de garde thématiques dirigés par un comte. À partir du 13ème siècle, le terme est aussi employé dans un sens générique pour les suites armées des magnates liés par serment à leurs maîtres.

[16] Le comte des écuries ou comte de l’étable désigne dans l’Empire romain tardif et dans l’Empire byzantin le haut fonctionnaire chargé des écuries de Constantinople et de Malagina, la plus importante zone de campement fortifié d’Asie Mineure. Responsable des écuries impériales, il est chargé pendant les campagnes militaires de la logistique des convois, du ravitaillement des bêtes et des muletiers.

[17] Un drongaire est un rang militaire de la fin de l’Empire romain et de l’Empire byzantin. Il désigne le chef d’un drongos (Le drongos désigne une unité militaire de la taille d’un bataillon).

[18] Bozcaada, en français Ténédos, est une île turque située dans le Nord de la mer Égée. Il s’agit de la troisième île turque par sa superficie, après Gökçeada et Marmara.