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Ja far al-Mutawakkil ben al-Muatasim bi-llâh ben Hârûn ar-Rachîd dit Jafar al-Mutawakkil

vendredi 27 décembre 2019, par ljallamion

Ja far al-Mutawakkil ben al-Muatasim bi-llâh ben Hârûn ar-Rachîd dit Jafar al-Mutawakkil (821-861)

Dixième calife abbasside

Dinar du califat abbasside. Al-MutawakkilFils d’une esclave nommée Chajâ a, il succéda à son frère Al-Wathiq en 847.

Il rejeta le mutazilisme [1] et revint à la tradition sunnite [2] du Coran incréé. Le tribunal inquisitorial créé par Al-Ma mûn et chargé du contrôle de l’orthodoxie religieuse. La “mihna” est dissoute. Il met ainsi fin à la période appelée période de l’Épreuve, de l’Ordalie ou de l’Inquisition.

À l’inverse de son père et de son frère, Al-Mutawakkil n’est pas connu pour son intérêt pour les sciences et les arts, mais pour son désir de magnificence et son goût de bâtisseur. On lui doit la construction de la grande mosquée de Samarra [3] qui fut en son temps la plus grande du monde. Son minaret conique en spirale de 55 m de haut est unique en son genre et ses murs étaient décorés de panneaux de mosaïques bleues. Cette mosquée ne représente qu’une partie des agrandissements de Samarra dans un ancien parc de chasse hérité des Lakhmides [4]. On dit qu’Al-Mutawakkil y a fait construire environ 20 palais faisant de l’emplacement actuel de Samarra un des plus vastes sites archéologiques.

Parmi les projets de construction d’Al-Mutawakkil, il y a la ville d’Al-Ja fariyya construite sur les rives du Tigre [5]. Un canal devait y amener l’eau du fleuve, le travail a été confié à deux courtisans ignorant les calculs d’un ingénieur local de bonne réputation. Ils ont préféré ceux de l’astronome et écrivain Al-Farghanī qui n’était pas un spécialiste du génie civil et qui commit des erreurs. L’eau ne pouvait couler dans ce canal que lorsque le fleuve était proche de déborder. Si ces nouvelles avaient été révélées au calife, cela aurait signifié la décapitation pour toutes les personnes concernées. L’intervention de l’ingénieur Sind ben Alî a permis le succès de l’opération bien que ce soit au risque de sa vie. Al-Mutawakkil est mort avant d’être mis au courant de cette affaire.

Al-Mutawakkil avait tendance à se mêler de controverses religieuses ce qui s’est traduit par son attitude à l’égard de certaines minorités. Son père s’était montré tolérant à l’égard des imams chiites [6] qui prêchaient à Médine [7], Al-Mutawakkil a poursuivi cette politique pendant les premières années de son règne. La réputation d’ Ali al-Hadi allait grandissante aussi le gouverneur de Médine, Abd Allah ben Muħammad, se sentit obligé d’en avertir le calife suggérant qu’un coup d’État était en train de se préparer. Al-Mutawakkil invita l’imam à venir à Samarra, une invitation telle qu’on ne peut la refuser. À Samarra l’imam a été mis en résidence surveillée et espionné. Al-Mutawakkil n’a fait aucun autre acte de répression contre l’imam. C’est son successeur qui peu après sa mort a fait empoisonner l’imam et a mené une politique répressive contre les chiites.

Les actions contre les chiites ne se sont pas limitées à la résidence surveillée d’`Alî al-Hadî. Al-Mutawakkil a fait raser les tombeaux d’Hasan et d’Husayn, puis labourer le sol et y semer du blé. Il menaçait d’emprisonnement les pèlerins qui voulaient visiter les mausolées de Karbala [8]. D’un autre côté il affichait un grand respect pour les premiers califes, y compris les omeyyades [9], ce qui lui valait le soutien des Syriens [10].

Al-Mutawakkil avait une dévotion personnelle pour l’étude de la sunna [11]. Il s’en est suivi qu’au cours de son règne le mutazilisme installé par Al-Ma mûn a été renversé. La question du caractère divin et incréé ou non, du Coran a été résolue en adoptant la position traditionnelle sunnite.

Al-Mutawakkil a rencontré le théologien byzantin Cyrille , qui avait été envoyé par l’empereur Michel III pour renforcer les relations diplomatiques entre l’Empire et le Califat.

Sur ce sujet aussi Al-Mutawakkil a pris le contre-pied de ses prédécesseurs. Il a appliqué une politique de discrimination à l’égard des minorités religieuses. En 850 il promulgue un décret imposant aux dhimmis [12] le port d’insignes divers et d’un costume couleur miel, allant jusqu’à exiger que les esclaves de ces dhimmis soient immédiatement identifiables dans les places de marché.

Ces décrets prévoyaient aussi la destruction de toutes les églises et les synagogues construites depuis l’avènement de l’islam. Il a fait confisquer une maison habitée par des chrétiens ou des juifs sur dix, il était précisé que si le lieu s’y prêtait il devait être transformé en mosquée sinon il devait rester ouvert. Les autres maisons devaient être identifiées par des images en bois représentant des démons cloués sur la porte.

Ces décrets stipulaient que les tombes des chrétiens et des juifs ne devaient pas dépasser du niveau du sol montrant ainsi qu’elles n’étaient pas celles de musulmans. Al-Mutawakkil destitua tous les juifs et les chrétiens qui avaient des responsabilités politiques ou administratives. Il fut interdit aux musulmans de les instruire. Toutes ces règles constituaient certainement un moyen de désigner les “infidèles” à la vindicte populaire.

En dépit de toutes ces réformes, le règne d’Al-Mutawakkil fait partie de l’âge d’or des Abbassides [13], il est sans doute le dernier grand calife de la dynastie.

Al-Mutawakkil a poursuivi la politique consistant à s’appuyer sur des ministres et des militaires esclaves turcs pour réprimer les rébellions et mener les guerres hors de l’empire. Ainsi il a pu prendre aux Byzantins la Sicile. Son principal vizir a été le Turc Al-Fath ben Khagan.

Cette relation avec les Turcs s’est retournée contre lui. Un de ses généraux turcs a été assassiné. Cela et sa répression contre les chiites finit par le rendre impopulaire.

Al-Mutawakkil avait écarté son fils aîné Al-Muntasir de la succession et songeait à son second fils Al-Mu tazz . Non seulement Al-Muntasir était l’objet de manques de respect lorsqu’il apparaissait à la cour mais c’était son frère cadet qui présidait la prière lorsque le calife en était empêché. Un jour où Al-Mutawakkil était ivre, il injuria Al-Muntasir si grossièrement que ce dernier décida d’en finir.

Avec des commandants turcs qu’Al-Mutawakkil avait évincés, il organisa la mort de son père. Al-Mutawakkil a été tué à coups de sabre en compagnie de son favori à qui on a attribué le crime.

Ce parricide a eu lieu le 11 décembre 861 à Al-Ja fariyya où il est enterré

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Al-Mutawakkil »

Notes

[1] Le mutazilisme, ou mu‘tazilisme mais aussi Al mu’tazila, est une importante école de théologie musulmane (’Aqîda) apparue au 8ème siècle. Elle s’oppose aux écoles de théologie aujourd’hui dominantes comme l’asharisme, le maturidisme ainsi que d’autres écoles plus littéralistes comme l’école de théologie du hanbalisme. Vivement critiqué par les courants salafiste et wahhabite, le mutazilisme est aujourd’hui peu représenté dans la communauté musulmane, bien qu’il en fut autrefois un courant majoritaire, notamment durant une période du califat des fatimides. Il réfute l’aspect incréée du coran, jugeant cette considération comme irrationnelle. Il met en avant le libre arbitre, place l’amour et l’ascétisme au centre de la recherche spirituelle de l’être humain, et rejette tout dogmatisme religieux. La recherche scientifique et la philosophie y ont une place prépondérante. Le Kalâm et la Falsafa, en sont les notions les plus importantes. L’approche philosophique héritée du mutazilisme reste aujourd’hui utilisée par des chiites, mais uniquement sur certains points. Très rapidement, encouragée par le calife Al-Ma’mun qui fit du mutazilisme la doctrine officielle en 827 et créera la Maison de la sagesse en 832, la philosophie grecque fut introduite dans les milieux intellectuels persans et arabes. Proche du soufisme sur certains points, et reconnaissant tout être humain comme pouvant être bon quel que soit son mode de vie, il est considéré parfois comme un rempart à l’extrémisme.

[2] Le sunnisme est un courant religieux majoritaire de l’islam. 90 % des musulmans sont sunnites. Il est souvent apparenté à une vision orthodoxe de l’islam. Constituant l’une des trois grandes divisions de l’islam, les sunnites sont désignés en arabe comme les gens de la « sunna » et de la majorité religieuse (ahl al-sunna wa’l-djama‘a). Par opposition aux chiites et aux kharidjites, on les appelle parfois « musulmans orthodoxes ». Ce qui distingue les courants de l’islam est principalement l’interprétation de la religion.

[3] Sāmarrā est une ville d’Irak. Son nom est l’abréviation de l’arabe signifiant « celui qui l’aperçoit est heureux », nom que lui avait donné le calife abbasside Al-Mutasim. Elle se situe sur la rive est du Tigre dans la province de Salah ad-Din, à 125 km au nord de Bagdad. Sāmarrā était autrefois l’une des plus grandes villes de Mésopotamie. La ville pré-islamique a été remplacée par une nouvelle ville en 833 par le calife abbasside Al-Mutasim, afin d’y installer ses mercenaires turcs recrutés la même année lors de son accession au califat. Écartée de Bagdad où elle molestait la population locale, la nouvelle garde du calife y vécut en véritable micro-société et Samarra devint alors la nouvelle capitale du monde musulman. Durant le règne de son successeur Al-Wathiq et davantage sous celui du calife Al-Mutawakkil, Sāmarrā se transforme en une ville commerciale. Ce dernier a été le garant de la construction de la Grande Mosquée de Sāmarrā en 847 avec son célèbre minaret en spirale.

[4] Les Lakhmides sont une tribu pré-islamique arabe du sud de l’Irak alliée des Perses, avec pour capitale Al-Hira. Rivaux des Ghassanides, ils faisaient partie de l’Église de l’Orient. Par contre, les souverains lakhmides ne sont pas chrétiens, à l’exception du dernier, An-Nu’man III, exécuté en 602 par les Perses. Ils sont longtemps au service de la politique perse de contrôle des tribus arabes de leur empire. Leurs revenus viennent des bénéfices commerciaux, du butin de leurs expéditions principalement contre les tribus arabes et les autres populations des confins du Shâm, et du tribut versé par les tribus arabes soumises. Après la conquête arabe, l’établissement militaire permanent des conquérants se fait à Kûfa, 6 km au nord est d’Hîra. Alî, émir de Hîra y est assassiné, selon les sources arabes. Les descendants des Lakhmides sont la famille princière Arslan. C’est une famille druze qui a toujours occupé le Mont-Liban.

[5] Le Tigre est un fleuve de Mésopotamie long de 1 900 km. Ce fleuve prend sa source en Turquie comme l’autre grand fleuve de la région l’Euphrate.

[6] Le chiisme constitue l’une des deux principales branches de l’islam, l’autre étant le sunnisme. Il regroupe environ 10 à 15 % des musulmans, dont 90 % de la population iranienne]. Il pensait que les Perses étaient favorables aux Hachémites[[La dynastie des Hachémites désigne les descendants de Hachim ibn Abd Manaf, de la tribu des Quraychites. Les Hachémites ont longtemps été les gardiens de la ville sainte de La Mecque, ils sont aujourd’hui la famille royale régnant en Jordanie, et ont régné sur le Royaume d’Irak jusqu’à la révolution républicaine de 1958.

[7] Médine est une ville d’Arabie saoudite, capitale de la province de Médine, située dans le Hedjaz. C’est là que vint s’installer en 622 à l’hégire le prophète de l’islam, Mahomet, après qu’il eut, selon le Coran, reçu l’ordre de Dieu de quitter La Mecque, ville distante de plus de 430 km. C’est aussi là qu’il mourut et fut enterré en 632. La ville abrite son tombeau dans la Masjid An Nabawi (mosquée du Prophète) ainsi que les premiers califes Abou Bakr et Omar, les autres personnes importantes de l’islam restant au cimetière Al-Baqi.

[8] Kerbala est une ville d’Irak, située à 100 km au sud-ouest de Bagdad. C’est la capitale de la province de Karbala. Les chiites la considèrent comme leur cinquième lieu saint après La Mecque, Médine, Jérusalem et Nadjaf. En 680, lors de la bataille de Kerbala, l’imam Hussein ben Ali a été décapité par les soldats de Yazid 1er parce qu’il venait de refuser de le reconnaître comme calife légitime. Les hommes de Yazid ont montré et fait voltiger sa tête avec joie. Les célébrations de l’Achoura et de l’Arbaïn commémorant la mort et la décapitation d’Hussein, s’y déroulent chaque année. Les chiites déposent leur front à l’endroit même où Hussein a été décapité.

[9] Les Omeyyades, ou Umayyades sont une dynastie arabe de califes qui gouvernent le monde musulman de 661 à 750. Ils tiennent leur nom de leur ancêtre Umayya ibn Abd Shams, grand-oncle de Mahomet. Ils sont originaires de la tribu de Quraych, qui domine La Mecque au temps de Mahomet. À la suite de la guerre civile ayant opposé principalement Muʿāwiyah ibn ʾAbī Sufyān, gouverneur de Syrie, au calife ʿAlī ibn ʾAbī Ṭalib, et après l’assassinat de ce dernier, Muʿāwiyah fonde le Califat omeyyade en prenant Damas comme capitale, faisant de la Syrie la base d’un Califat qui fait suite au Califat bien guidé et qui devient, au fil des conquêtes, le plus grand État musulman de l’Histoire.

[10] La Syrie fut occupée successivement par les Cananéens, les Phéniciens, les Hébreux, les Araméens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Arméniens, les Romains, les Nabatéens, les Byzantins, les Arabes, et partiellement par les Croisés, par les Turcs Ottomans et enfin par les Français à qui la SDN confia un protectorat provisoire pour mettre en place, ainsi qu’au Liban, les conditions d’une future indépendance politique.

[11] La sunna, selon le Coran, englobe les règles ou « lois » de Dieu qui auraient été prescrites à tous les prophètes, y compris le prophète de l’Islam, Mahomet.

[12] Un dhimmi est, suivant le droit musulman, un citoyen non-musulman d’un État musulman, lié à celui-ci par un « pacte » de protection. Le terme dhimmi s’applique essentiellement aux gens du Livre, qui, dans le champ de la gouvernance islamique, moyennant l’acquittement d’un impôt de capitation (jizya), d’un impôt foncier (kharâj), d’une certaine incapacité juridique et du respect de certaines obligations discriminantes édictées dans un « pacte » conclu avec les autorités, se voient accorder une liberté de culte restreinte, certains droits ainsi que la garantie de sécurité pour leur personne et leurs biens. Le terme dhimma désigne ce régime juridique auquel sont soumis les dhimmis et l’expression Ahl adh-dhimma désigne la communauté des dhimmis auxquels l’ensemble de ces règles sera appliqué de façon plus ou moins stricte à travers l’histoire, selon les périodes et les lieux dans le monde arabo-musulman.

[13] Les Abbassides sont une dynastie arabe musulmane qui règne sur le califat abbasside de 750 à 1258. Le fondateur de la dynastie, Abû al-Abbâs As-Saffah, est un descendant d’un oncle de Mahomet, Al-Abbas ibn Abd al-Muttalib. Proclamé calife en 749, il met un terme au règne des Omeyyades en remportant une victoire décisive sur Marwan II à la bataille du Grand Zab, le 25 janvier 750. Après avoir atteint son apogée sous Hâroun ar-Rachîd, la puissance politique des Abbassides diminue, et ils finissent par n’exercer qu’un rôle purement religieux sous la tutelle des Bouyides au 10ème siècle, puis des Seldjoukides au 11ème siècle. Après la prise de Bagdad par les Mongols en 1258, une branche de la famille s’installe au Caire, où elle conserve le titre de calife sous la tutelle des sultans mamelouks jusqu’à la conquête de l’Égypte par l’Empire ottoman, en 1517.