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Damien Dalassène

samedi 2 décembre 2023, par lucien jallamion

Damien Dalassène (vers 940-998)

Aristocrate byzantin

L'Empire Byzantin en 867, à la fin du règne de Michel III.Premier membre connu de la famille Dalassène [1]. Il est connu pour avoir servi comme doux [2] d’Antioche [3] en 996-998. Il combattit les Fatimides [4] avec quelques succès jusqu’à ce qu’il soit tué lors de la bataille d’Apamée le 19 juillet 998 [5].


Les débuts de sa vie sont inconnus mais pour des raisons généalogiques, il est estimé que sa naissance remonte aux alentours de l’année 940. Les premières informations à son propos remontent à 995/996, quand Basile II le nomma gouverneur d’Antioche en remplacement de Michel Bourtzès, à la suite de la défaite de ce dernier lors de la bataille de l’Oronte en septembre 994 [6].

Ce poste constituait l’une des plus importantes fonctions militaires de l’Empire byzantin [7] car son détenteur commandait les forces positionnées contre le califat fatimide et les chefs musulmans semi-autonomes de Syrie [8]. Damien Dalassène détenait aussi les titres de patrice [9] selon Jean Skylitzès ou de magistros [10] selon Étienne de Taron .

Damien Dalassène maintint une posture agressive face aux Arabes. En 996, ses forces lancèrent un raid aux alentours de Tripoli [11] et d’Arqa [12] tandis que Manjutakin tenta de nouveau sans succès d’assiéger Alep [13] et Tartous [14] que les Byzantins occupaient depuis l’année précédente. En effet, il fut contraint de battre en retraite lorsqu’arrivèrent les renforts envoyés par Dalassène.

La défaite fatimide fut complétée par le naufrage d’une flotte dont l’objectif était de soutenir l’effort de Manjutakin devant Tartous. En 997, Dalassène répéta ses offensives contre Tripoli, faisant de nombreux prisonniers. Il attaqua aussi Rafanée [15], Awgh et al-Lakma, prenant le dernier et déportant sa population en captivité.

En juin et juillet 998, il dirigea ses troupes vers Apamée [16] pour s’en emparer après qu’un vaste incendie eut détruit ses provisions. Les forces de l’émirat hamdanide [17] d’Alep tentèrent de s’en emparer en premier mais ils se replièrent à l’arrivée des Byzantins. Ces derniers ne pouvaient permettre à une principauté vassale de se renforcer avec la prise de la cité.

Le gouverneur local fatimide, al-Mala’iti, lança un appel à l’aide mais l’armée de secours de Jaysh ibn Samsama fut retardée car elle dut faire face à la rébellion de Tyr [18] soutenue par les Byzantins. Après la soumission de la ville, Jaysh dirigea son armée vers Damas [19] d’où il se prépara à affronter Damien Dalassène.

Ibn al-Qalanisi rapporte qu’à ce moment, Apamée était proche de succomber à la famine. Lors de la bataille qui s’ensuivit, le 19 juillet 998, les Byzantins furent d’abord victorieux mais un officier kurde parvint à tuer Damien Dalassène, ce qui plongea l’armée byzantine dans la panique et la fuite.

Deux des fils de Damien Dalassène qui l’accompagnaient furent capturés et emmenés comme prisonniers au Caire [20] où ils restèrent durant 10 ans.

Nicéphore Ouranos remplaça Damien Dalassène comme doux d’Antioche après que Basile II se rendit personnellement dans la région pour rétablir les positions byzantines.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Jean-Claude Cheynet et Jean-François Vannier, Études prosopographiques, Paris, Publications de la Sorbonne, 1986 (ISBN 978-2-85944-110-4)

Notes

[1] La famille Dalassène est une famille aristocratique byzantine s’étant principalement illustrée à la fin du 10ème siècle et durant le 11ème siècle.

[2] gouverneur militaire

[3] Antioche est une ville de Turquie proche de la frontière syrienne, chef-lieu de la province de Hatay.

[4] Les Fatimides (également appelés Obeydides ou Banu Ubayd depuis le manifeste de Bagdad ont formé une dynastie califale arabe chiite ismaélienne d’ascendance alide qui régna, depuis l’Ifriqiya (entre 909 et 969) puis depuis l’Égypte (entre 969 et 1171), sur un empire qui englobait une grande partie de l’Afrique du Nord, la Sicile et une partie du Moyen-Orient. Issus de la branche religieuse chiite des ismaéliens pour laquelle le calife doit être choisi parmi les descendants d’Ali, cousin et gendre du prophète de l’islam Mahomet, les Fatimides considèrent les Abbassides sunnites comme des usurpateurs de ce titre. L’établissement de leur califat débute au Maghreb, grâce à l’appui des Berbères Kutama, grande tribu qui était établie à l’est de l’actuelle Algérie qui vont renverser le pouvoir local aghlabide. Après un intermède en Ifriqiya, ils finiront par s’établir dans la ville du Caire qui pendant leur règne prendra un essor considérable.

[5] La bataille d’Apamée oppose les forces de l’Empire byzantin à celles du califat fatimide le 19 juillet 998. La bataille s’inscrit dans le cadre d’une série de confrontations militaires entre les deux puissances pour le contrôle du Nord de la Syrie et de l’émirat hamdanide d’Alep. Elle a lieu alors que Damien Dalassène, commandant les forces byzantines de la région, assiège la cité d’Apamée. Les Fatimides envoient des renforts depuis Damas, sous le commandement de Jaysh ibn-Samsama. Dans la bataille qui s’ensuit, les Byzantins sont d’abord victorieux mais un cavalier kurde parvient à tuer Damien Dalassène, ce qui jette la panique dans les rangs byzantins. L’armée byzantine bat en retraite précipitamment, poursuivie par les Fatimides, et perd de nombreux hommes. Cette défaite contraint l’empereur Basile II à se rendre personnellement dans la région l’année suivante. Finalement, en 1001, une trêve de dix ans est conclue entre les deux puissances.

[6] La bataille des gués de l’Oronte s’est déroulée le 15 septembre 994 entre l’Empire byzantin et ses alliés hamdanides commandés par Michel Bourtzès contre les forces du califat famitide de Damas sous les ordres du général turc Manjutakin. La bataille se solde par une victoire fatimide

[7] L’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient désigne l’État apparu vers le 4ème siècle dans la partie orientale de l’Empire romain, au moment où celui-ci se divise progressivement en deux. L’Empire byzantin se caractérise par sa longévité. Il puise ses origines dans la fondation même de Rome, et la datation de ses débuts change selon les critères choisis par chaque historien. La fondation de Constantinople, sa capitale, par Constantin 1er en 330, autant que la division d’un Empire romain de plus en plus difficile à gouverner et qui devient définitive en 395, sont parfois citées. Quoi qu’il en soit, plus dynamique qu’un monde romain occidental brisé par les invasions barbares, l’Empire d’Orient s’affirme progressivement comme une construction politique originale. Indubitablement romain, cet Empire est aussi chrétien et de langue principalement grecque. À la frontière entre l’Orient et l’Occident, mêlant des éléments provenant directement de l’Antiquité avec des aspects innovants dans un Moyen Âge parfois décrit comme grec, il devient le siège d’une culture originale qui déborde bien au-delà de ses frontières, lesquelles sont constamment assaillies par des peuples nouveaux. Tenant d’un universalisme romain, il parvient à s’étendre sous Justinien (empereur de 527 à 565), retrouvant une partie des antiques frontières impériales, avant de connaître une profonde rétractation. C’est à partir du 7ème siècle que de profonds bouleversements frappent l’Empire byzantin. Contraint de s’adapter à un monde nouveau dans lequel son autorité universelle est contestée, il rénove ses structures et parvient, au terme d’une crise iconoclaste, à connaître une nouvelle vague d’expansion qui atteint son apogée sous Basile II (qui règne de 976 à 1025). Les guerres civiles autant que l’apparition de nouvelles menaces forcent l’Empire à se transformer à nouveau sous l’impulsion des Comnènes avant d’être disloqué par la quatrième croisade lorsque les croisés s’emparent de Constantinople en 1204. S’il renaît en 1261, c’est sous une forme affaiblie qui ne peut résister aux envahisseurs ottomans et à la concurrence économique des républiques italiennes (Gênes et Venise). La chute de Constantinople en 1453 marque sa fin.

[8] La Syrie fut occupée successivement par les Cananéens, les Phéniciens, les Hébreux, les Araméens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Arméniens, les Romains, les Nabatéens, les Byzantins, les Arabes, et partiellement par les Croisés, par les Turcs Ottomans et enfin par les Français à qui la SDN confia un protectorat provisoire pour mettre en place, ainsi qu’au Liban, les conditions d’une future indépendance politique.

[9] Patrice est un titre de l’empire romain, créé par Constantin 1er. Dans les années 310-320, Constantin abolit le patriciat romain, vieille distinction sociale qui avait ses racines au début de la république romaine. Le titre de patrice est désormais accordé par l’empereur à des personnes de son choix, et non plus à des familles entières. Dès son apparition, le titre de patrice permet à son titulaire d’intégrer la nobilitas, comme le faisait déjà le patriciat républicain. Le titre était décerné à des personnages puissants mais non membres de la famille impériale ; il vient dans la hiérarchie immédiatement après les titres d’Auguste et de César. Ce titre fut ensuite conféré à des généraux barbares au service de l’empire. Le titre fut encore porté par des notables gallo-romains au 6ème siècle. Sous les Mérovingiens, le titre de patrice était donné au commandant des armées burgondes. Les papes l’ont notamment décerné à plusieurs reprises pour honorer des personnages qui les avait bien servis. Le titre fut également conservé dans l’Empire byzantin, et son importance fut même accrue au 6ème siècle par Justinien 1er, qui en fit la dignité la plus haute de la hiérarchie aulique. C’était une dignité accordée par brevet. Dans les siècles suivants, elle fut progressivement dévaluée par la création de nouveaux titres. La dignité de patrice disparut à Byzance au 12ème siècle.

[10] Le magister officiorum ou maître des offices est un haut fonctionnaire romain de l’époque du Bas-Empire. Sous l’Empire byzantin, il devient une dignité, le magistros, avant de disparaître au 12ème siècle.

[11] Le nom de la cité proviendrait du grec Tripolis. Elle aurait été nommée ainsi du fait de sa séparation en trois parties distinctes par les commerçants venant de Tyr, Sidon et Aradis. À partir de 1070, Tripoli est sous la domination de la famille Banû ’Ammâr, qui s’est rendue indépendante des califes fatimides d’Égypte. En 1102, lors de la première croisade, la ville est assiégée par Raymond IV de Saint Gilles et défendue par le cadi Fakhr al-Mulk ibn-Ammar. Le siège dure près de 10 ans, infligeant de lourds dégâts à la ville, qui tombe aux mains des croisés en 1109. Elle est ensuite, durant le temps des croisades, la capitale du comté de Tripoli, l’un des principaux États francs du Levant.

[12] Tell Arqa ou Arka est un site archéologique situé près du village de Minyara au Liban à 12 km au nord-est de Tripoli. La place est stratégique car elle permet de contrôler les routes menant de Tripoli vers Tartous et Homs. La région est bien arrosée, c’est une plaine alluviale côtière, sans doute favorable à la colonisation humaine depuis longtemps. La rivière passe au pied de la colline de Tell Arqa qui comporte des vestiges remontant au Néolithique.

[13] En 637, le général arabe Khalid ibn al-Walid conquit la Syrie face aux Byzantins. D’abord partie intégrante du califat omeyyade, puis abbasside, la ville d’Alep est confiée à partir du 10ème siècle à des émirs qui se la transmettent héréditairement.

[14] Tartous est une ville côtière de Syrie, abritant le second port du pays après celui de Lattaquié. Elle est également la capitale du gouvernorat du même nom. La ville se situe à environ 160 kilomètres au nord-ouest de la capitale Damas et à 30 kilomètres au nord de la frontière libanaise.

[15] Rafanée ou Raphanée est une ville antique en Syrie dans la province de Hama. C’est un site qui n’a pas fait l’objet de campagnes de fouilles mais seulement de reconnaissances menées par des équipes syro-germaniques. D’après ces recherches, la ville serait située à quelques kilomètres au sud de la forteresse croisée de Montferrand-Ba`rîn entre les villages actuels de Ba`rîn et de Nîsâf

[16] Apamée, actuellement Qal`at al-Madhīq est un site archéologique en Syrie, située près de l’Oronte, à 55 km au nord-ouest de Hama.

[17] La dynastie hamdanide est une dynastie arabe d’émirs chiites (890-1004) originaires de la partie Est de la Djazira, qui règne sur un espace allant du nord de l’Irak à la Syrie. Les capitales de cet émirat sont Mossoul et Alep. La famille des hamdanides descend de ‘Adi b. Ousama b. Taghlib, membre de la tribu des Banu Taghlib. Cette dynastie apparaît dans un contexte d’affaiblissement du pouvoir central abbasside, qui voit dans cette période du 10ème siècle l’émancipation et l’affirmation de petites dynasties qui s’emparent des pouvoirs temporels et spirituels du califat à une échelle locale ou régionale. Les Hamdanides constituent une de ces dynasties autonomes gouvernées par des émirs.

[18] Tyr se situe dans la Phénicie méridionale, à un peu plus de 70 km au sud de Beyrouth et à 35 km au sud de Sidon, presque à mi-chemin entre Sidon au nord et Acre au sud, et à quelques kilomètres au sud du Litani.

[19] Damas est l’une des plus anciennes villes continuellement habitées. Elle est aussi la ville la plus peuplée de la grande Syrie (Assyrie) (des traces archéologiques remontent au 4ème millénaire av. jc). Elle est citée dans la Bible, dans le livre de la Genèse, et plusieurs fois dans les Livres des Rois et des Prophètes. Damas connut l’influence de nombreuses civilisations dont celles des Assyriens, Perses, Grecs, Séleucides, Romains, Arabes et Turcs. De la fin du 12ème siècle av. jc à 734 av. jc, elle est la capitale du royaume d’Aram-Damas. Elle fut l’un des berceaux du christianisme et vit saint Paul prononcer ses premières prédications, notamment dans la maison d’Ananie, où celui-ci a ouvert une église domestique dès l’année 37. Cette dernière est la plus vieille de Syrie (aujourd’hui dans le quartier chrétien de Bab Touma). En 635, Damas se soumit aux musulmans et devint la capitale de la dynastie des Omeyyades de 661 à 750. Avec l’adoption de la langue arabe, elle devint le centre culturel et administratif de l’empire musulman durant près d’un siècle. Par la suite, elle demeura un foyer culturel majeur et un pôle économique de premier plan profitant de sa situation géographique privilégiée, à la croisée des chemins de La Mecque, l’Afrique, l’Anatolie, la mer Méditerranée et l’Asie (route de la soie en direction de la Chine et du commerce des épices avec l’Inde).

[20] Le Caire est la capitale et la plus grande ville d’Égypte. C’est la plus grande ville du Moyen-Orient et la seconde d’Afrique derrière Lagos. Les Fatimides et leur troupes composées de Berbères kotamas d’Algérie fondent le noyau urbain actuel, alors nommé Al-Mansûriyyah, pour en faire leur nouvelle capitale. Située sur la route des épices entre l’Europe et l’Asie, la ville connaît une longue période de prospérité : vers 1340, la population du Caire atteint un demi-million d’habitants, ce qui en faisait déjà l’une des plus grandes villes du monde arabe.