Originaire de Bretagne, elle fut la maîtresse du roi d’Angleterre Charles II pendant une quinzaine d’années, mais aussi l’agent secret du roi de France, Louis XIV.
Louise Renée de Penancoët de Keroual est née au château de Keroual en Guilers [1], près de Brest. Elle est la fille de Guillaume de Penancoët de Keroual et de Marie de Plœuc, dont le mariage fut célébré en 1645. Louise suit des études au couvent Sainte-Ursule de Lesneven [2] où une de ses tantes est religieuse.
Elle est remarquée par le duc de Beaufort François de Bourbon Vendôme, cousin du roi qui l’a nommé grand maître de la navigation [3]. Il lui fait vainement la cour, s’engageant même à ce qu’elle devienne demoiselle d’honneur de Madame, la duchesse d’Orléans Henriette d’Angleterre et belle-sœur de Louis XIV. La promesse du duc de Beaufort sera tenue post-mortem. En 1669, Louise Renée arrive au château de Versailles pour se mettre au service de Madame.
Elle est remarquée par le roi, dont la favorite officielle est la duchesse de La Vallière mais la favorite officieuse Madame de Montespan ; plutôt que d’en faire sa maîtresse, il juge qu’elle lui sera diplomatiquement plus utile. Aux côtés de Madame, mal mariée et qui, au début de son mariage, avait eu un début de liaison avec le roi, Louise Renée perd sa réserve et apprend vite les us et coutumes de la cour.
En 1670, à la suite de Madame, chargée d’une mission diplomatique par le roi, elle embarque pour l’Angleterre. Charles II n’a pas vu sa sœur depuis 9 ans. Il a peu de sympathie pour le royaume de France et guère plus pour son souverain et cousin. En revanche, à l’instar de son cousin français, il apprécie beaucoup la compagnie des dames, ce que Louis XIV n’est pas sans savoir.
Le roi accueille sa sœur au château de Douvres [4]. La réception est somptueuse, outre les retrouvailles familiales, et la curiosité du roi a été piquée par les propos de George Villiers 2ème duc de Buckingham , au sujet de la nouvelle dame de compagnie de celle-ci.
La signature du Traité de Douvres [5] rapproche les deux royaumes : Charles II se convertit au catholicisme et fournit des troupes, en échange de quoi, Louis XIV lui verse une rente annuelle de 200 000 livres. En remerciement des cadeaux reçus, la duchesse d’Orléans propose à son frère de choisir un bijou dans sa cassette et c’est Louise Renée qui doit le lui remettre ; posant sa main sur celle de la jeune fille, le roi aurait dit : Voilà le seul bijou que je désire !.
De retour à Versailles, la jeune fille aurait émis le souhait de rentrer au couvent, ce dont on l’aurait dissuadé. Elle repart donc pour l’Angleterre.
Elle est logée dans un immense appartement du palais de Whitehall [6] et le roi d’Angleterre vient lui faire sa cour tous les soirs. Du reste, supervisée par Charles Colbert de Croissy marquis de Croissy , l’ambassadeur de France, Louise Renée connaît parfaitement les impératifs de sa mission.
Au mois d’octobre 1671, elle est invitée à une réception donnée par la comtesse d’Arlington, en présence du roi et de nombreux invités. Le roi, marié à l’infante Catherine de Bragance qu’il a vite délaissée car elle ne lui a pas donnée d’enfant, arrive à la fête sans la reine.
Un faux mariage est organisé, mais la nuit de noces a bien lieu avec Louise Renée de Penancoët de Keroual. Celle-ci devient la maîtresse du roi d’Angleterre. Elle est officiellement nommée demoiselle d’honneur de la reine Catherine : le roi peut ainsi visiter son épouse et voir sa maîtresse.
Louis XIV est informé par son ambassadeur que son agent a beaucoup de pouvoir sur son amant. En 1672, elle donne naissance à un garçon, Charles Lennox , créé duc de Richmond [7] en 1675. La mère reçoit des terres et est titrée duchesse de Portsmouth [8], comtesse de Fareham et baronne de Patersfield, avec une pension annuelle de 138 000 livres. Si son influence dure environ une quinzaine d’années, jusqu’à la mort du roi le 6 février 1685, sa position n’est pas sans inspirer des haines et des jalousies farouches. En effet, le retour du roi au catholicisme est attribué à sa maîtresse ce qui la rend d’autant plus impopulaire.
En 1684 Louis XIV, à la demande de Charles II qui fait valoir que cette terre avait appartenu à ses ancêtres les Stuarts [9], la fait duchesse d’Aubigny [10] et pair de France. Cette même année, elle fait l’acquisition du château de Trémazan [11], auquel elle joint les terres de Keroual. Elle possède aussi un château à Évry dit château du Mousseau, détruit en 1860.
Après avoir résidé au château de La Verrerie [12], la bonne Dame d’Aubigny, comme l’appelaient les habitants, meurt à Paris, rue des Saints-Pères [13], le 14 novembre 1734, ayant perdu une partie de sa fortune.