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L’Église Catholique face à la Réforme

lundi 18 février 2013

L’Église Catholique face à la Réforme

L'Église Catholique face à la Réforme

Le vaste mouvement de la réforme qui va induire au 16ème siècle la plus grande révolution européennes depuis les invasions barbares, puisque la moitié de l’Europe va changer de religion, a essentiellement des visées théologiques de réévaluation de la doctrine chrétienne afin de la libérer, de la débarrasser de tous les apports historiques.

En effet, pendant 15 siècles les docteurs de l’Église ont interprété, commenté, glosé sur la bible à laquelle on demandait de répondre à toutes les questions de la vie sociale et politique en oubliant que son essence est de révéler une théologie, une connaissance de dieu.

Au 16ème siècle, le mouvement humaniste de retour aux textes originels et aux traductions d’après l’original, aidé par la découverte de l’imprimerie, va diffuser des écrits bibliques affranchis des exégèses et traduits dans les langues vulgaires compréhensibles par le plus grand nombre.

A la fin du 15ème siècle et au début du 16ème siècle, Rome est la capitale d’un État où la renaissance des arts et des lettres brille de tout son éclat, et le chef de cet État, le pape, est un prince comme les autres souverains. La situation générale en Italie est chaotique puisque la péninsule est depuis 1494, le champ de bataille de l’Europe entre Français et Espagnols.

En outre, le conclave de novembre 1503 élit un bouillant cardinal qui prend le nom de Jules II en mémoire de Jules César. Brouillon, querelleur, violent, amateur d’intrigues et de renversements d’alliances, ses contemporains le jugent cause de toutes les guerres en Europe. Grand protecteur des arts cependant, il est le 1er à donner à la ville éternelle son allure de capitale. Il fait venir Michel-Ange et Raphaël, fait démolir l’ancienne basilique Saint Pierre pour ouvrir le chantier de sa reconstruction. En 1513, le successeur de Jules II est un pape diplomate, aimant les lettres et les arts par goût et non pour raison d’État. Léon X Médicis, fils de Laurent le Magnifique. En 1512, jules II avait convoqué le concile de Latran afin qu’il procède aux réformes nécessaires pour soutenir le pape contre le roi Louis XII.

La 10ème séance du 4 mai 1515, sous l’impulsion de Léon X, prend des mesures pour engager une réforme intérieure de l’église qui est réclamée par de nombreuses voix dans toute la chrétienté. Face à ce balbutiement, un homme devient de plus en plus exigeant. Martin Luther, né le 10 novembre 1483 à Eisleben, fils d’un mineur élevé à la condition d’échevin, reçoit une éducation soignée, lit les classiques latins et entre au couvent des Augustins à Erfurt. En 1512, il est prieur de Wittenberg, docteur en théologie et professeur à l’université nouvellement fondée. Comme tous ses contemporains, Luther est hanté par l’angoisse du siècle (agrandissement de l’espace connu, introduction de découvertes scientifiques, les disettes et épidémies de typhus ou de peste, désunion des chrétiens). Le 31 octobre 1517 Luther fait afficher sur les portes de l’église du château de Wittenberg ses 95 thèses contre les indulgences. En octobre 1518 il est convoqué à Augsbourg pour se justifier devant le légat du pape il semble alors ouvert à un compromis mais sans renier ses thèses. En juillet 1519 à Leipzig, Luther s’emporte contre le théologien Johan Eck et, le 15 juin 1520, Léon X par la bulle Exsurge Domine le somme de se rétracter dans les 2 mois sous peine d’excommunication et du bûcher pour ses écrits. Le 10 décembre de la même année, Luther réplique en brûlant publiquement la bulle pontificale et des livres de droit canon. Luther est sujet des États impériaux et le très catholique empereur Charles Quint le cite à comparaître devant la diète de Worms, le 6 avril 1521. Le voyage de Luther de Wittenberg à Worms est un triomphe à travers l’Allemagne. Il devient le symbole de tous les mécontentements allemands contre Rome, contre l’empereur, contre l’organisation sociale encore féodale. Excommunié par Léon X le 3 janvier 1521, Luther est mis au ban de l’empire le 26 mai 1521.Devenu un enjeu politique, il se réfugie au château de Wartburg chez Frédéric le Sage, électeur de Saxe, et publie toute une série d’écrits théologiques qui constituent les fondements de la Réforme. Il attaque l’église visible, il réaffirme que le simple baptême fait de tout chrétien un prêtre qui peut interpréter les écritures, seul 3 sacrements doivent subsister, baptême, pénitence, communion et seule la Foi est une promesse de salut, les œuvres ne sont que des exercices de discipline. Le 25 septembre 1534, s’éteint avec clément VII le dernier pape de la Renaissance auquel beaucoup ont reproché de ne pas avoir convoqué un grand concile général face à la tourmente de la Réforme luthérienne, calviniste et anglicane. Dès le 15 octobre 1534, le cardinal Alexandre Farnèse est élu pape sous le nom de Paul III. Partisan éclairé d’Érasme, favorable à la réforme intérieur de l’Église par la négociation avec les protestants, défenseur des indiens d’Amérique contre la brutalité espagnole, ouvert aux théories nouvelles, Paul III est un amateur d’art fastueux et le père de 2 fils, Pier-Luigi et Ranuccio.

Face à la vague protestante, il veut engager le dialogue en s’entourant dès 1535 d’un groupe de cardinaux dit érasmiens qui veulent promouvoir une politique de tolérance entre les chrétiens. Ils veulent introduire une vraie action épiscopale d’aide aux pauvres et aux malades, un véritable enseignement aux enfants par une catéchèse claire et simple, une évangélisation des villes et des campagnes par un bas clergé et des prédicateurs plus proches des préoccupations quotidiennes, une redistribution des richesses.

La tentative avortée d’un concile général à Mantoue durant l’hiver 1535-1536 ne décourage pas les prélats érasmiens qui se rendent en avril 1541 à la diète de Ratisbonne. Les théologiens Eck, Gropper et Julius Pflug vont défendre le point de vue de l’Église face aux 3 théologiens luthériens Bucer, Melanchton et Pistorius, le cardinal Contarini est le spiritus rector de ce colloque. Ils parviennent à un accord et les membres de ce saint colloque se séparent convaincus d’avoir œuvré pour l’unification de l’Église. Mais les cardinaux intransigeants comme Gian Pietro Caraffa d’une part et Luther de l’autre repoussent l’union de Ratisbonne le 31 mai 1541. Le pape Paul III convoque le 22 mai 1542 un grand concile oecuménique à Trente. Ce concile débute officiellement le 13 décembre 1545.

Profondément secoué par la scission d’une partie de ses ouailles à l’appel de Luther, Calvin, Zwingli et quelques autres, le Saint-Siège veut engager une grande réforme de l’Église catholique. Il y est encouragé par le nouvel ordre des Jésuites, énergique et passionné. Le concile de Trente répond aux voeux formulés par Luther en 1518, mais il vient trop tard pour renouer les fils entre catholiques et protestants. Il impose de strictes règles de conduite au clergé et en particulier aux évêques. Il améliore la formation des prêtres et promeut l’enseignement du catéchisme. Il confirme aussi la préséance du Saint-Siège à la tête de la hiérarchie catholique.

Le concile clarifie par ailleurs l’interprétation catholique des Saintes Écritures, en particulier le dogme de la justification ou de la grâce à la différence des luthériens qui estiment que Dieu décide in fine de sauver ou non un homme et de lui accorder la vie éternelle, les prêtres conciliaires précisent que l’homme peut être porté aux bonnes actions salvatrices s’il dispose de la grâce et lui concèdent une certaine marge de liberté.

La Contre-réforme catholique ne tarde pas à ramener à l’ancienne foi nombre de régions allemandes, surtout en Rhénanie et dans les Alpes. Elle est conduite par les Jésuites, qui bénéficient de l’argent espagnol et de l’appui des successeurs de l’empereur Ferdinand 1er. La vigueur de la Contre-réforme attise les querelles entre catholiques et luthériens, notamment à propos des principautés ecclésiastiques. Quand il se séparera le 4 décembre 1563, le concile de Trente aura ravivé la foi catholique partout à l’exception notable de l’Europe du nord.

Moines et religieux à l’heure de la Contre-réforme

Le Concile de Trente est certes le moteur d’une réformation catholique, mais il participe aussi d’une volonté antérieure de renouveau et de réconciliation. Si les dogmes de la foi catholique sont réaffirmés durant les 25 sessions, le Concile de Trente a aussi été un temps de réflexion sur la discipline. Ainsi l’assemblée réunie à Trente ne négligea pas de s’intéresser à ces réguliers qui avaient pour particularité de suivre une règle religieuse bien précise et de prononcer des vœux simples qui devenaient ensuite définitifs.

Dans ce contexte, qui tient à la fois de la Contre-réforme puisqu’il est une réponse directe aux différents courants protestants mais qui tient aussi de la Réforme car il est symptomatique d’une volonté de rénovation interne, les anciens ordres religieux vont devoir sortir de leur torpeur face à l’apparition d’ordres nouveaux. Si la Réforme du clergé régulier apparaissait comme nécessaire, elle se traduit par un renouveau des ordres anciens et par la création d’ordres nouveaux.

À l’aube de l’ouverture du Concile de Trente, c’est bien l’idée d’une nécessité d’une réforme des ordres religieux qui prévaut. En effet, les réguliers sont très vite touchés par les idées nouvelles, en témoigne, l’exemple de Luther, qui sortait d’un couvent d’Augustins. Face à cela, l’Église allait réagir en consacrant la 25ème session du Concile de Trente, en décembre 1563, à la réforme du clergé régulier. Le Concile de Trente se prononce alors sur plusieurs points :

il réaffirme l’importance des vœux :"avant tout, ils observeront fidèlement, tout ce qui concerne la perfection de la profession religieuse comme sont les vœux d’obéissances, de pauvreté et de chasteté et tous les autres vœux et préceptes propres à une règle et à un ordre."

les réguliers allaient aussi devoir respecter à la fois l’idée de clôture sur laquelle le Concile se prononce en ces termes :"il ne sera pas permis aux réguliers de sortir de leur couvent même sous prétexte d’aller trouver leurs supérieurs sauf s’ils ont été envoyés ou appelés par ceux-ci."

le Concile s’intéresse également à la mise en pratique et au respect de cette Réforme en proposant à l’évêque dont dépendent les communautés religieuses (ce sont souvent les ordres nouveaux) de les visiter et à celles qui dépendent de Rome de se regrouper en congrégations dans un concile général dan l’année qui suit puis ensuite tous les 3 ans. le Concile allait aussi chercher à remédier aux abus les plus évidents, comme l’interdiction de confier des abbayes à des non réguliers.

Les papes allaient donc tenter de mettre en œuvre cette Réforme. L’un des plus fervents, Pie V se prononça et réaffirma l’idée de clôture qui affirme qu’il faut mépriser le monde et le fuir. Seulement cette réforme pose déjà de nombreux problèmes à ces communautés qui souhaitaient davantage s’ouvrir sur le monde.

Certains réformateurs, allant dans le sens du Concile appliquèrent le décret de manière très appuyée comme Angélique Arnauld, abbesse du monastère cistercien de Port-Royal qui décida de réformer son monastère en appliquant strictement la règle. Cette réforme est symbolisée par la célèbre "journée du guichet" du 25 septembre 1609 où elle refusa de recevoir son père, l’avocat Antoine Arnauld autrement que derrière la grille du parloir.

D’autres en revanche, affichèrent une plus grande volonté d’ouverture sur le monde. Ces mouvements de réforme ne pouvaient satisfaire tous les Catholiques qui souhaitaient s’investir dans la vie religieuse sans pour autant fuir le monde. Ainsi, on voit se créer peu à peu, des compagnies de prêtres soucieuses de concourir à l’éducation et à l’assistance spirituelle comme les Pères de la doctrine chrétienne fondée par César du Bus qui s’illustrèrent par leur vocation vouée à l’enseignement du catéchisme.

Cette ouverture sur le monde se traduisit par l’enseignement avec les chanoines de Windesheim, ou le soin aux malades à domicile des Visitandines. Il faut également remarquer que le fait de refuser la clôture est un trait des nouvelles fondations, en témoigne les Jésuites qui s’affichent comme des clercs réguliers et qui se distingue fondamentalement des moines et allaient mettre en pratique une réforme enseignante prônée par les Humanistes au point de devenir la 1ère congrégation enseignante du monde catholique.

La Contre-réforme engagée par le Concile de Trente soulève, à l’image du problème de la clôture, d’ores et déjà de nombreux enjeux. Il s’agit désormais de s’interroger sur la manière dont cette réforme s’est instaurée au sein des ordres religieux.

Le renouveau des ordres au 16ème siècle

Les Bénédictins sont une congrégation chargée de l’observance monastique, la Contre-réforme va se traduire par une scission entre plusieurs congrégations dont les plus célèbres sont la congrégation de Saint Vannes, créée en 1604 par Dom Didier de la Cour, prieur de l’abbaye de Saint Vannes à Verdun. Cette famille religieuse se caractérise par un grand souci de donner aux moines une solide formation intellectuelle en même temps que spirituelle, cette congrégation rayonnera au-delà de la Lorraine, jusqu’en Champagne, en 1621, les Vannistes français allaient demander au pape de former une congrégation séparée, celle-ci adopta le nom de congrégation de Saint-Maur, qui réunit une grande partie des Bénédictins français.

Les Cisterciens, fondés par Robert de Molesme en 1098, allaient eux aussi être touché par la réforme, s’ils formaient une congrégation nationale, d’autres branches allaient peu à peu se développer à l’image des Feuillants, ordre masculin, créé en 1577 et son équivalent féminin, les Feuillantines, créées en 1588. A côté les Trappistes, adoptèrent, avec l’abbé commendataire de l’abbaye de la Trappe, une réforme très dure, acceptée par le pape en 1666.

Au 16ème siècle Les chanoines réguliers se multiplient aidant le clergé séculier. Chez les chanoines de la Rochefoucauld l’abbé commendataire de Sainte-Geneviève, s’efforça selon le vœu du Concile de Trente de regrouper les abbayes de cet ordre désireuses de se réformer. C’est ainsi que naît la congrégation de France, dite génovéfaine. Cet ordre allait réunir jusqu’à une cinquantaine de maisons dès la fin du 17ème siècle.

C’est sur ce modèle, que les chanoines réguliers de Saint Augustin se sont réformés. En revanche certains chanoines réguliers ont préféré s’affilier à la réforme de Chancelade, plus austère dont les membres étaient réunis dans la congrégation de Chancelade.

Tout autant que les ordres anciens, les ordres mendiants vont devoir se réformer et connaître ainsi un certain renouveau.

Les Dominicains et la congrégation de Saint-Louis qui furent fondé en 1207 par Dominique et approuvé en 1216 par Honorius III se consacra, dès sa fondation, à la lutte contre les hérésies, par la prédication, d’où leur nom de Frères prêcheurs, ils ont aussi joué un rôle important dans l’Inquisition. Ayant apporté aux débats du concile de Trente, une contribution importante, les Dominicains se devaient, eux aussi, de se réformer. Les chapitres généraux réunis de 1553 à 1580 sont à l’origine de cette rénovation, ils ont cherché à remédier au relâchement des frères.

Pour autant une large place a été laissée aux initiatives de certains frères comme Sébastien Michaelis, qui est à l’origine de la congrégation réformée d’Occitanie en 1608, qui deviendra la congrégation de Saint-Louis, en 1629, année où elle s’installe à Paris. D’autres congrégations réformées verront le jour dans les décennies suivantes.

Ce renouveau des ordres mendiants passe aussi par la création de nouveaux ordres, ou plus précisément de nouvelles branches. Les Carmes et Carmélites ont connu au cours du 16ème siècle un renouveau extraordinaire sous l’impulsion de deux personnages, Thérèse d’Avila et Jean de la Croix. En 1562, Thérèse d’Avila, entrée au Carmel de l’Incarnation en 1536, fonde dans sa ville un monastère de carmélites, Saint-Joseph d’Avila. C’est le résultat d’un cheminement mystique de 8 années. Ce couvent, fût le lieu où elle commença à mettre en pratique la règle primitive du Carmel, vivre dans la solitude, la prière et la stricte pauvreté. Devant le succès de cette première tentative, une vingtaine de ces couvents s’implantent alors en Espagne. Puis avec l’aide de Jean de la Croix, elle se lance dans la réforme des monastères masculins de carmes. En 1580, Carmes et Carmélites sont approuvés par le pape Grégoire XII et les Carmes deviennent un ordre indépendant en 1593. La congrégation de France a eu pour initiatrice, Barbe Avrillot, qui avec l’aide de Pierre de Bérulle et de l’Oratoire fonde le carmel de Notre-dame des Champs à Paris, approuvé par Paul V en 1615.

Sur le même principe, les Franciscains donne naissance à une troisième branche, les Capucins. Les Franciscains n’ont jamais cessé d’être travaillé par les mouvements de réformes internes, et ce malgré la séparation de 1517 entre observants et conventuels. À l’origine de ce nouveau rameau franciscain, on place Matthieu de Basci, observant du couvent de Montefalco en Ombrie. Il crée en 1525 à Ancône les Frères mineurs capucins. Il prône un retour à la règle stricte de saint François, ainsi qu’à une plus grande pauvreté. Les Frères mineurs capucins tirent leur nom de leur vêtement, fait d’une tunique grossière et d’un capuchon. Peu à peu, ils vont remplir les mêmes tâches de prédication et de missions que les Franciscains. Mais surtout ils se caractérisent par une ascèse très stricte, et une action sans compromission envers les malades et les pestiférés. Cela leur vaudra une vénération populaire indéniable, mais aussi le soutien de la hiérarchie catholique, dans les conflits qui les opposent aux autres branches de l’ordre de saint François, et qui marquent leurs débuts. Les Capucins passent en France en 1575, ils obtiennent leur autonomie en 1619, ils forment ainsi une troisième branche de l’ordre de saint François.

Ce mouvement de réforme des ordres anciens et des ordres mendiants ne satisfait pas tous les Catholiques, certains désirent certes s’engager dans une vie religieuse, sans pour autant renoncer au monde.

Naissance d’ordres nouveaux

Les Barnabites ou Clercs réguliers de la congrégation de saint Paul ont été fondés en 1530 par Antoine Marie Zaccaria. Les membres de ces 2 congrégations sont des prêtres à part entière avec ce que cela suppose : enseignement, prédication, soin aux malades, mais s’ils prêtent des vœux monastiques, ils ne sont pas astreints ni aux observances, ni à l’office du chœur comme les chanoines. L’un comme l’autre n’ont connu qu’un faible développement, en France, mais aussi dans le reste de l’Europe, et ce peut être du fait d’une certaine austérité dans leur style de vie. Ces deux ordres pour emblématique qu’ils sont de l’émergence des congrégations de clercs réguliers, n’ont jamais eu le rayonnement de l’ordre qui caractérise le mieux les congrégations de clercs réguliers, les Jésuites.

Fondée par Ignace de Loyola, la Compagnie de Jésus est un ordre de clercs réguliers, qui en gardant l’esprit du monachisme a su l’adapté aux nécessités d’un apostolat dans un monde en pleine mutation, la stabilité a été remplacée par une obéissance absolue au pape, l’oraison mentale a été substituée à l’office de chœur, l’exigence d’une forte culture a été imposée. Le 27 septembre 1540, le pape Paul III signe la bulle qui porte fondation de la Compagnie de Jésus par Ignace de Loyola. Cet ordre voué à l’évangélisation et à l’éducation est issu de la rencontre en 1529, à l’Université de Paris, d’un étudiant savoyard, Pierre Favre, d’un jeune noble basque, François de Jassu y Xavier (François-Xavier), et d’un vieux routier basque de 40 ans, boiteux de surcroît, Inigo de Loyola (Ignace de Loyola). Ils partagent la même chambre au Collège de Navarre. Avec quelques autres étudiants désireux comme eux de vouer leur vie au Christ, ils entraînent leur corps et leur esprit par quelques exercices spirituels mis au point par Ignace de Loyola.

Le 15 août 1534, les jeunes gens assistent à la chapelle de Montmartre à une messe de leur ami Pierre Favre, récemment ordonné prêtre. À cette occasion, ils font le voeu d’aller à Jérusalem en pèlerinage. Mais à Venise, empêchés de se rendre à Jérusalem, ils tournent leurs pas vers Rome et proposent leurs services au pape.

L’Europe et la France sont à ce moment-là secouées par la Réforme protestante de Luther. C’est ainsi qu’est fondée la Compagnie de Jésus. La formation des Jésuites est longue et difficile. L’accent est mis sur l’obéissance au pape et la soumission au supérieur. Ce dernier, qui porte le titre de général de la Compagnie de Jésus, est élu à vie comme le pape et dispose d’un pouvoir sans limites. Du fait de leur énergie, de leur compétence intellectuelle, de leur détermination et de leur discipline toute militaire, les Jésuites deviennent le bras armé de la Contre-réforme catholique, en Autriche, en Allemagne, en France, en Amérique du sud.

Claudio Acquaviva, général des jésuites de 1587 à 1615 a défini avec précisions les étapes de la formation des novices, en plaçant sur le même plan contemplation et méditation. Au centre des pratiques quotidiennes qui sont exigées des jésuites, se trouvent un examen de conscience, la lecture spirituelle et la messe. Les jésuites vont s’orienter vers l’enseignement, et mettre cette activité au service de la reconquête catholique, pour autant ils n’excluaient pas la prédication, l’évangélisation, ou encore les recherches historiques ou théologiques. En 1548, l’ordre fonde à Messine le modèle des collèges futurs, puis en 1551, l’ordre inaugure le “Collegium romanum”. À la mort de son fondateur, la Compagnie de Jésus a déjà créé 39 collèges dans 7 pays européens et en Inde. Jusqu’en 1640, la Compagnie de Jésus va connaître malgré certains remous, un essor remarquable.

Les Oratoriens de France et Lazaristes. La congrégation de l’Oratoire de Jésus et Marie ou Oratoire de France à été fondé par Pierre de Bérulle le 11 novembre 1611. Elle a pour objet de réformer le clergé séculier, c’est une société de prêtres, sans vœux ni autres liens que ceux de la charité. Pierre de Bérulle prend exemple ainsi sur l’Oratoire de Philippe Néri fondé en 1575, les maisons de l’Oratoire de France sont placées sous la juridiction des évêques, elles sont à leur service. Cette association va permettre de former de véritables prêtres, mais aussi de développer le niveau de formation du clergé français. À la mort de Bérulle en 1629, le développement reste limité, environ 60 maisons.

Cet Oratoire de France était en concurrence directe avec les Jésuites par l’obligation qui lui était faite de créer des collèges, pour autant leur enseignement est dans sa forme par rapport à celui des Jésuites, original. Il met l’accent sur les sciences modernes et démontre ainsi un véritable esprit d’ouverture.

L’objet premier de la Société des Prêtres de la Mission ou Lazariste s’il concerne aussi l’éducation, ne s’adresse pas au clergé mais au monde paysan. Cette congrégation, qui tire son nom de sa maison mère, le prieuré de Saint-Lazare à Paris, a été fondée par Vincent de Paul le 17 avril 1625.

Elle a pour mission de remédier à l’ignorance des paysans, de les évangéliser. À la mort de Vincent de Paul, en 1660, elle a déjà effectué plus de 700 missions. Les prêtres de la congrégation de la Mission ou Lazaristes sont liés par les trois vœux perpétuels de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, ils doivent aussi respecter la règle de 1658 qui leur commande de se vouer au service spirituel des paysans. Pour autant, cette mission d’évangélisation supposait que les résultats acquis ne pouvaient être conservé que par des prêtres dignes de leur tâche, aussi les Lazaristes vont fonder et diriger des séminaires.

Les mouvements masculins si important qu’ils soient, ne doivent pas faire oublier la création de nouveaux ordres féminins qui participait de la même volonté d’ouverture sur le siècle.

Les Visitandines et Ursulines. En fondant la Visitation Sainte-Marie, à Annecy en 1610, Jeanne de Chantal et François de Sales veulent donner la possibilité à des dévotes de se consacrer aux activités caritatives, à la visite et au soin aux malades à domicile, et ce tout en vivant en communauté. Au départ si cette congrégation est entièrement ouverte sur le siècle, il lui faudra, dès qu’elle essaimera, notamment à Lyon, accepter la clôture. En effet l’archevêque de Lyon, exigera des vœux solennels ainsi que la clôture, il était en accord avec la société qui craignait qu’une femme entrée au couvent pût en ressortir et réclamer sa part éventuelle d’héritage.

François de Sales devra céder et ériger l’institut en ordre féminin, avec des vœux solennels de religion. Les Visitandines devront donc abandonner le soin aux malades, elles développent alors l’enseignement aux petites filles, à l’intérieur de leur couvent, et ce en accordant une large place à la vie contemplative.

Il en va de même pour la congrégation des Filles de sainte Ursuline. Cette congrégation, est fondée en 1535, par Angèle Merici. Cette dernière définit une formule originale. Les compagnes ne prononcent pas de vœux, ne portent pas de costume distinctif, n’ont pas de maisons communautaires, ne récitent pas d’offices, elles vivent dans leur famille et circulent dans la ville pour soigner les malades, catéchiser les enfants, une fois par mois, elles se réunissent à Brescia pour faire le point sur leur activité. Pour autant, en 1568, Charles Borromée, évêque de Milan, leur impose une règle en les introduisant dans son diocèse, elles sont désormais astreintes à la vie commune, au port d’un habit et doivent prononcer trois vœux simples. Cette règle va se durcir pour les Ursulines qui s’installent en France, à partir de 1596, des vœux solennels leur sont imposés, ainsi qu’une clôture rigoureuse. Seules les Ursulines de Brescia restent fidèles à la règle d’Angèle Merici. À partir de 1614, les Ursulines devront aussi prêter le vœu de s’occuper de l’instruction des jeunes filles.

Un clergé séculier de mieux en mieux formé se met en place, le temps, pour celui-ci, de l’ignorance et de la débauche est loin. Surtout, le renouveau monastique a produit un ensemble d’ordres, plus préoccupés par leur sacerdoce, par le peuple des chrétiens, peuple qui devient le centre des préoccupations des ordres nouvellement créés. Enseignement, soins et secours sont devenus les piliers de ces congrégations. Tous ces ordres connaissent un recrutement abondant, les villes voient leur périphérie se remplir de constructions conventuelles. Enfin, il ne faut pas oublier que cette période est celle de la véritable affirmation du monachisme féminin en tant que telle, et non plus subordonné aux ordres masculins.

P.-S.

Cet article est partiellement ou en totalité Extrait d’historia 597 de septembre 96 texte de Marie F. Viallon