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L’histoire pour le plaisir

Charles l’Enfant

mercredi 29 septembre 2021, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 22 octobre 2011).

Charles l’Enfant (vers 847/848-866)

Roi d’Aquitaine du 15 octobre 855 à sa mort en 866

L'Empire carolingien à la suite du partage de 843 dont Pépin II est exclu. Le royaume d'Aquitaine est alors disputé à Charles le Chauve.Il est le second fils du roi Charles II le Chauve et de sa première épouse Ermentrude d’Orléans.

Suite à l’emprisonnement du roi Pépin II d’Aquitaine, les grands d’Aquitaine [1] se révoltent en 853 et font appel à Louis le Germanique.

Ils offrent la couronne d’Aquitaine à son fils Louis le Jeune qui traverse la Neustrie [2] avec une armée et passe la Loire fin septembre ou début octobre 854. Mais le peu de soutien des Aquitains après les exactions de ses soldats et l’intervention de son oncle Charles le Chauve le pousse à la retraite. Dans le même temps, Pépin II d’Aquitaine et son frère Charles parviennent alors à s’échapper du couvent où ils étaient enfermés et prennent la tête du soulèvement.

En octobre 855 à Limoges [3] et afin de satisfaire les grands d’Aquitaine, Charles le Chauve fait proclamé et couronné roi d’Aquitaine son second fils Charles l’Enfant.

Le 7 juillet 856, à l’assemblée de Quierzy [4], Charles le Chauve offre l’amnistie aux Aquitains révoltés qui abandonneraient le parti de Pépin II. Il les convoque à Verberie [5] pour le 26 juillet mais ils ne s’y rendent pas, attendant les renforts de Louis le Germanique.

Comme celui-ci est en campagne contre les Slaves, il n’intervient pas, ils reconnaissent de nouveau Charles l’Enfant au détriment de Pépin. Les Aquitains, de nouveau convoqués par Charles le Chauve au plaid [6] de Neaufles [7] en septembre, refusent de s’y présenter, mais Charles réussit toutefois à se réconcilier avec eux dans le courant du mois et le 14 octobre ils reconnaissent Charles l’Enfant comme roi à l’assemblée de Chartres [8].

Pépin II, isolé, utilise les Normands pour ravager le Poitou [9] l’année suivante. En mars 864, il les engage comme mercenaires et met le siège devant Toulouse [10]. Le Toulousain, le Rouergue [11] et l’Albigeois [12] sont mis à sac, mais Pépin ne peut pas s’emparer de la ville défendue par les missi de Charles le Chauve. Il se retire puis est fait prisonnier par le comte Rannoux de Poitiers dit Ramnulf Ier de Poitiers.

Charles n’a qu’une autorité nominale sur l’Aquitaine. Au début de 862, à peine majeur, il prend comme épouse la veuve d’un comte nommé Humbert, sans l’autorisation de son père, à l’instigation du comte d’Auvergne [13] Étienne et d’Efroi, peut-être l’ancien comte de Toulouse. Le roi Charles le Chauve réagit.

L’entrevue de Meung-sur-Loire [14] en mai suivant, entre Charles l’Enfant, son père et sa mère la reine Ermentrude ne donne rien. Il rentre exaspéré dans son royaume, malgré une apparente soumission.

A l’automne de l’année suivante, la situation s’envenime et Charles le Chauve rassemble des troupes en Bourgogne. Il marche le 2 décembre 863 sur Nevers [15] dans l’intention de franchir la Loire pour aller chercher son fils à Bourges [16], sa capitale. L’Enfant se rend alors à Nevers pour se soumettre avec les grands d’Aquitaine qui renouvèlent leur serment de fidélité au roi de Francie occidentale.

L’Enfant est ramené auprès de son père qui n’a que peu de confiance en sa soumission, alors que l’Aquitaine est ravagée par les bandes de Vikings entrés par la Loire, la Gironde et la Charente. Après le plaid général de Ver en mai 865, à la demande des grands et des évêques, Charles le Chauve envoie Charles l’Enfant de nouveau régner à Bourges comme roi d’Aquitaine.

Un an plus tard, le jeune homme est tué accidentellement dans une chasse. Il ne laisse pas de descendance et est enterré à Bourges.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Jean-François Boyer, « Élites carolingiennes autour des couronnement et sacre de Charles l’Enfant comme roi d’Aquitaine à Limoges en 855 », 2013.

Notes

[1] L’Aquitaine est le nom donné depuis au moins le 1er siècle av. jc à une région ancrée sur la façade Atlantique et le versant nord des Pyrénées. En 507, Clovis, appelé par les évêques de Novempopulanie, l’intègre au royaume des Francs, en battant Alaric II, roi des Wisigoths, à la bataille de Vouillé. 671 voit l’indépendance de l’Aquitaine, dirigée par le duc Loup 1er de Vasconie. Entre 719 et 732, les ducs Eudes et son fils Hunald 1er détiennent l’Albigeois où ils ont des biens. Eudes combat les Sarrasins en Albigeois. En 721, le duc Eudes bat le Califat omeyyade à la Bataille de Toulouse. 732 voit la défaite du duc d’Aquitaine et l’invasion de la Vasconie par l’émir Abd el Rahman, arrêté à la bataille de Poitiers par Charles Martel, qui commence la réunion de l’Aquitaine sous contrôle des Vascons au royaume franc. 742 et 743 voient les campagnes des fils de Charles Martel, Carloman et Pépin le Bref, contre l’Aquitaine et la Vasconie (et la Bavière). Entre 760 et 768, Pépin le Bref entreprend chaque printemps des expéditions sanglantes contre le duc Waïfre, fils d’Hunald 1er. Le 2 juin 768, ce dernier est finalement tué par un des siens, Waratton, sur ordre de Pépin. En 778, l’armée de Roland, piégée par le wali de Saragosse, a été défaite par les Vascons dans les montagnes basques de Roncevaux en revenant de Pampelune. Puis Charlemagne crée en 781 pour son fils Louis le Débonnaire alors âgé de 3 ans, le royaume d’Aquitaine englobant les territoires du Rhône à l’Atlantique.

[2] Royaume franc qui couvrait le nord-ouest de la France actuelle, et avait pour capitale Soissons. Néanmoins, il semble que le terme de Neustrie ne soit apparu qu’un siècle après la création du royaume. La Neustrie avait été créée lors du partage qui suivit la mort de Clovis 1er, en 511, et revint à Clotaire 1er, qui, au terme de son long règne de 50 ans, avait réussi à reconstituer le royaume de son père. Elle fut le 2ème grand royaume franc né lors des partages successoraux mérovingiens à partir des territoires conquis sur Syagrius. Son aire géographique était limitée par la Loire au sud, l’océan Atlantique et la Basse-Bretagne à l’ouest, et la Champagne à l’est. Elle s’étendait jusqu’en Flandre au nord.

[3] À partir du 12ème siècle, Limoges, lieu de couronnement traditionnel des ducs d’Aquitaine, est l’une des principales villes de la dot d’Aliénor d’Aquitaine. La majeure partie de son histoire médiévale se calque sur celle des guerres entre Plantagenêts et Capétiens. Richard Cœur de Lion est couronné duc d’Aquitaine lors de deux cérémonies tenues successivement à Poitiers, puis, dans la grande tradition des monarques d’Aquitaine, à Limoges en 1172. À la tête de l’empire Plantagenêt, le roi-chevalier meurt en avril 1199 à Châlus, place-forte défendant l’accès sud-ouest de Limoges, lors d’une expédition punitive contre son vicomte, Adémar V de Limoges. Au 14ème siècle, les affrontements entre rois de France et rois d’Angleterre, détenteurs du duché d’Aquitaine dont relève Limoges, culminent à l’occasion de la guerre de Cent Ans. Entre deux événements guerriers, Limoges doit faire face aux pillages des routiers et brabançons désœuvrés. Constituant toujours une « ville double », partagée entre la Cité et le Château, les bourgeois (par leurs consuls), évêques et vicomtes de Limoges jouent des alliances et protections, chacun selon les opportunités du moment. Ainsi, en 1370, la Cité ouvre ses portes aux troupes du roi de France, alors que le Château reste fidèle au roi anglais. Cet événement sera d’ailleurs l’occasion, pour le Prince Noir, de mettre à sac la Cité.

[4] Quierzy (nom officiel, mais on voit aussi parfois Quierzy-sur-Oise) est une commune du département de l’Aisne. Située entre Noyon et Chauny, elle est traversée par la rivière Oise. La rivière Ailette rejoint l’Oise à Quierzy. Ancienne villa royale aux temps des Mérovingiens puis palatium impérial avec les Carolingiens, c’est maintenant un paisible village, mais aussi un lieu de mémoire de l’histoire de France, puisqu’il fut le village de France qui eut le passé historique le plus illustre durant le haut Moyen Âge.

[5] Verberie est une commune située dans le département de l’Oise. Charlemagne s’y fait construire un vaste palais allant de la chapelle Saint-Pierre jusqu’au château d’Aramont sur une longueur de 420 mètres. La ville primitive est comparable à nos moyennes villes de province actuelles. Au 6ème siècle, Verberie forme une grande agglomération. Au cours des siècles, Verberie a vu défiler bien des rois : Pépin le Bref, Louis le Débonnaire (830), le roi Eudes (890), plus tard Charles VII. Charles Martel, après sa victoire de Poitiers contre les Sarrasins, vient se reposer à Verberie en 739. C’est là qu’il contracte la maladie dont il meurt 2 ans plus tard ; et qu’il reçoit du pape Grégoire III, les chaînes de saint Pierre et les clefs de son sépulcre. La ville est le siège de plusieurs conciles en 752 (ou 753), 756, 853 et 869. En 856, la fille de Charles le Chauve, Judith, y épouse Æthelwulf, le roi du Wessex.

[6] Aux époques mérovingienne et carolingienne, un plaid est une cour publique ou une assemblée où un souverain, ou un comte le représentant, prend conseil auprès d’aristocrates, appelés barons ou vassaux sur les affaires de son état ou de son domaine. Le plaid organisé par le roi ou l’empereur disparaît après Charles II le Chauve, mais le terme continue d’être employé à la fin du Moyen Âge et à l’époque moderne.

[7] Neaufles-Saint-Martin est une commune française située dans le département de l’Eure. En 856, Charles le Chauve réunit à Neaufles les grands du royaume afin d’organiser une riposte aux attaques vikings. Le château était alors déjà existant, probablement en bois.

[8] Chartres est une commune française, préfecture du département d’Eure-et-Loir. La ville est à environ 90 kilomètres de Paris.

[9] Le Poitou était une province française, comprenant les actuels départements de la Vendée (Bas-Poitou), Deux-Sèvres et de la Vienne (Haut-Poitou) ainsi que le nord de la Charente et une partie de l’ouest de la Haute-Vienne, dont la capitale était Poitiers. Il a donné son nom au Marais poitevin, marais situé dans l’ancien golfe des Pictons, sur la côte occidentale de la France, deuxième plus grande zone humide de France en superficie après la Camargue ; le marais s’étend de l’Atlantique aux portes de Niort et du sud de la Vendée au nord de La Rochelle.

[10] Le comté de Toulouse est un ancien comté du sud de la France, dont le titulaire était l’un des six pairs laïcs primitifs. Le comté de Toulouse est créé en 778 par Charlemagne, au lendemain de la défaite de Roncevaux, afin de coordonner la défense et la lutte contre les Vascons et intégré dans le royaume d’Aquitaine, lorsque celui-ci est créé trois ans plus tard.

[11] Le Rouergue est une ancienne province du Midi de la France correspondant approximativement à l’actuel département de l’Aveyron. Après avoir fait partie du comté de Toulouse, il fut rattaché à la Guyenne avant d’en être détaché lors de la formation de la province de Haute-Guyenne en 1779.

[12] L’Albigeois est le nom donné à l’ancienne vicomté d’Albi, région historique qui faisait partie de la province du Languedoc. La taille de cette région a varié au fil de l’histoire. Elle est nettement plus grande que le Pays d’albigeois région naturelle située autour d’Albi.

[13] Le comté d’Auvergne est l’une des plus anciennes seigneuries de France, puisqu’elle a déjà été érigée à la fin de la période romaine. Durant l’ère mérovingienne, il devient même momentanément un duché. La famille des Comtes d’Auvergne gouverne le comté depuis le dixième siècle. Une crise éclate au sein de la famille en 1155, date à laquelle le comte Guillaume VII d’Auvergne est forcé par son oncle Guillaume VIII d’Auvergne à diviser le comté en deux. Guillaume VIII reprend le comté, tandis que Guillaume VII doit se satisfaire du titre de dauphin d’Auvergne. En 1360, le roi de France Jean II de France crée, sur la vieille Terre royale d’Auvergne, un duché d’Auvergne qui se transmet au sein de la famille royale

[14] Meung-sur-Loire est une commune française située dans le département du Loiret

[15] Le Comté de Nevers est un comté historique au centre de la France. Sa principale ville était Nevers. Il correspond sensiblement à l’ancienne province du Nivernais et au département moderne de la Nièvre. Le comté lui-même date approximativement du début du 10ème siècle. Le comté a été fréquemment associé au Duché de Bourgogne voisin ; il faisait partie des terres et des titres détenus par Henri 1er de Bourgogne. En 1032, le Comté de Nevers est joint au Comté d’Auxerre, mais entre en conflit rapidement avec l’évêque d’Auxerre. Son premier titulaire a été Renaud 1er de Nevers. Nevers est passé sous la domination des comtes de Flandre au 14ème siècle, et à partir de là, est devenu possession de Philippe II le Hardi, Duc de Bourgogne, qui a brièvement réuni les deux terres. Philippe de Bourgogne, le plus jeune fils de Philippe le Hardi, a reçu le comté de Nevers qui est devenu plus tard possession d’une branche cadette des ducs de Clèves. À partir de 1521, les dirigeants de Nevers se sont appelés ducs de Nivernais.

[16] Bourges est une commune française, préfecture du département du Cher. Elle est aussi la capitale historique du Berry, province de l’Ancien Régime correspondant approximativement aux départements actuels de l’Indre et du Cher.