Samuel-Jacques Bernard (1686-1753)
Comte de Coubert en 1739
Aîné des fils de Samuel Bernard , comte de Coubert [1], l’un des plus puissants banquiers français à la fin du 17ème et au début du 18ème siècles, et de Magdeleine Clergeau, sa première épouse. Il porte les mêmes prénoms que son grand-père paternel.
Comme son père, il abjure sa foi calviniste [2], le 29 septembre 1715 à l’Église Saint-Sulpice [3]. Il achète le 4 mars 1718 à Christian Louis de Montmorency-Luxembourg , dernier fils du maréchal de Luxembourg et à sa femme, Louise Madeleine de Harlay-Beaumont, le château de Grosbois [4], dans lequel il fait réaliser d’importants embellissements. Il crée notamment la superbe ferme du château et réaménage les décors intérieurs. En 1731, il est contraint de se séparer de ce domaine, vendu à Germain Louis Chauvelin.
Il est maître des requêtes [5], surintendant des Maison, Domaines et Finances de la Reine Marie Leszczyńska à compter de mai 1725, puis grand doyen des maîtres des requêtes de l’hôtel et conseiller d’État [6] ordinaire. Il est prévôt des maîtres des cérémonies et grand’croix de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis [7] en juin 1728.
À la mort de son père, en 1739, il hérite d’une partie de la fortune paternelle estimée à 33 000 000 de livres, notamment de la terre et comté de Coubert.
Entre 1741 et 1745, il fait réaménager et agrandir un hôtel particulier situé au 46, rue du Bac à Paris [8]. Cet hôtel a été édifié en 1697/1699 pour Jean-Baptiste Voille par un des Bruand, et a été profondément modifié par Germain Boffrand. L’hôtel comptait deux corps de bâtiment disposés perpendiculairement. Seul celui donnant sur la rue du Bac existe encore et abrite aujourd’hui, depuis 1888, la Maison de taxidermie Deyrolle. L’autre bâtiment, le corps de logis, a été démoli lors de l’extension du Boulevard Saint-Germain [9].
Il meuble cet hôtel d’œuvres d’art. La salle à manger est décorée de panneaux en chêne dans leur couleur naturelle à la capucine, sur lesquels Jean-Baptiste Oudry peint en 1742 deux grandes toiles représentant des chiens de chasse, considérées comme étant parmi les chefs-d’œuvre de l’artiste. Les boiseries blanches et or du grand salon, avec leurs dessus-de-porte représentant les Quatre continents peints par 4 peintres et servant de modèle aux tapisserie d’Aubusson : Jacques Dumont dit le Romain , Charles-Joseph Natoire , Charles Restout et Carle Van Loo , aujourd’hui exposées au Musée d’Israël de Jérusalem [10].
Une partie de ces boiseries est aujourd’hui au château de Vaux le Pénil* [11].
Les livres et manuscrits de son importante bibliothèque, vendus aux enchères en 1754 et 1756, sont reconnaissables aux armes entourées du collier de l’Ordre de Saint-Louis et de la devise “Bellicae vitutis praemium” poussées sur leur reliure.
Fastueux, amateur d’art, il fait banqueroute en 1751 emportant notamment 80 000 livres, soit 8 000 livres de rentes, dues à Voltaire , dont il gérait la fortune. Ce dernier y fait allusion dans le Dictionnaire philosophique à l’article “Banqueroute”. De la même manière, il ne peut payer le magnifique surtout de table en argent massif qu’il avait commandé à Thomas Germain en 1729/1731, que les descendants de l’orfèvre finirent par vendre en 1757 au duc d’Aveiro [12] qui lui a laissé son nom.
Son père le marie le 12 août 1715 avec Louise Olive Frotier de La Coste Messelière, fille de Benjamin Louis Frotier, marquis de La Coste Messelière, lieutenant général [13] pour le Roi au gouvernement du haut Poitou [14], gentilhomme ordinaire du duc d’Orléans dit le Régent, et d’Elisabeth Olive de Saint Georges de Vérac [15]. Elle est issue d’une ancienne famille de la noblesse poitevine. Ils eurent 5 enfants.
Notes
[1] Coubert est une commune française située dans le département de Seine-et-Marne. La commune est située à environ 7,2 kilomètres au sud-est de Brie-Comte-Robert et 17,5 kilomètres par la route au nord de Melun
[2] Le calvinisme (ainsi nommé d’après Jean Calvin), aussi appelé tradition réformée, foi réformée ou théologie réformée, est une doctrine théologique et une approche de la vie chrétienne reposant sur le principe de la souveraineté de Dieu en toutes choses. Bien que développée par plusieurs théologiens tels que Martin Bucer, Wolfgang Musculus, Heinrich Bullinger, Pierre Martyr Vermigli, Ulrich Zwingli et Théodore de Bèze, elle porte le nom du réformateur français Jean Calvin en raison de son influence dominante, ainsi que de son rôle déterminant dans les débats confessionnels et ecclésiastiques du 16ème siècle. Aujourd’hui ce terme fait référence aux doctrines et pratiques de la plupart des Églises réformées, presbytériennes et congrégationalistes. Plus rarement, il désigne l’enseignement de Calvin lui-même.
[3] L’église Saint-Sulpice est une grande église du quartier de l’Odéon dans le 6ème arrondissement de Paris. Elle est située place Saint-Sulpice. Elle est dédiée à Sulpice le Pieux, archevêque de Bourges au 7ème siècle.
[4] Le château de Grosbois est situé à Boissy-Saint-Léger dans le Val-de-Marne.Construit au 16ème siècle par un architecte dont le nom est inconnu, le château de Grosbois semble influencé par les créations de Jacques Androuet du Cerceau. De plan en U, il comporte dans sa partie centrale un corps principal incurvé en exèdre, cantonné de pavillons de même hauteur et flanqué de deux ailes plus basses en retour d’équerre. Le château est édifié sur une plate-forme rectangulaire entourée de fossés autrefois en eau ; on y accède par trois passerelles.
[5] Le titre de maître des requêtes est porté en France, ainsi que dans certains autres pays d’Europe, depuis le Moyen Âge, par les titulaires de certaines hautes fonctions judiciaires et administratives. Les maîtres des requêtes ordinaires de l’hôtel du Roi étaient, depuis le Moyen Âge, des officiers propriétaires d’une charge extrêmement prestigieuse et devenue, sous Louis XIV, particulièrement coûteuse. L’office coûtait 200 000 livres en 1710 et 100 000 en 1750. Pour pouvoir devenir maître des requêtes, il fallait avoir exercé pendant 6 ans dans une cour supérieure (Parlement, Chambre des comptes) ; les enfants des magistrats de ces cours bénéficiaient d’une durée réduite de 3 ans seulement. Les maîtres des requêtes étaient les collaborateurs du chancelier de France, dont ils dépendaient étroitement. Ils étaient associés à l’œuvre de justice à travers l’audience du sceau et le Conseil des parties, auquel ils assistaient. Ils siégeaient par quartiers trimestriels. Chaque quartier avait son doyen. Le doyen des doyens avait rang de conseiller d’État. Au Conseil, les maîtres des requêtes étaient debout et découverts. Ils étaient membres du parlement de Paris où ils pouvaient siéger mais pas plus de quatre en même temps. Ils n’étaient justiciables que devant les chambres assemblées du Parlement. Ils étaient fréquemment appelés comme rapporteurs dans les Conseils de gouvernement. Du fait de leurs formations de juges et d’administrateurs, ils formaient le vivier dans lequel se recrutaient naturellement les très hauts fonctionnaires et les membres du Gouvernement royal
[6] Le Conseil du roi était un ensemble d’organes collégiaux, institutionnalisés et permanents chargés de préparer les décisions du roi de France et de le guider de leurs avis. La formule « Car tel est notre plaisir » n’était pas appliquée arbitrairement, mais après consultation. Charles V devait poser le principe, respecté par tous ses successeurs, selon lequel le roi ne décide qu’après « bonne et mûre délibération ».
[7] L’ordre royal et militaire de Saint-Louis est un ordre honorifique français créé par un édit de Louis XIV du 5 avril 1693 pour récompenser les officiers les plus valeureux.
[8] La rue du Bac est une voie située dans le 7ème arrondissement de Paris. Longue de 1 150 mètres, la rue du Bac part des quais Voltaire et Valéry-Giscard-d’Estaing et se termine rue de Sèvres. Elle traverse la place René-Char. La rue a d’abord été appelée « grand chemin du Bac », puis « ruelle du Bac » et « grande rue du Bac ». Elle a été construite sous Louis XIV à l’emplacement du pont Rouge, édifié en bois à partir de 1632 par le financier Le Barbier, sur décision de Louis XIII, après qu’il a assisté à un accident du bac
[9] Le boulevard Saint-Germain est un boulevard de la rive gauche de Paris, ainsi nommé en l’honneur de l’évêque Germain de Paris, et en raison de la proximité de l’église Saint-Germain-des-Prés qui lui est dédiée. Long de 3 150 mètres et large de 30 mètres environ, le boulevard Saint-Germain part de la Seine au coin du quai Saint-Bernard et face à l’île Saint-Louis, dans le 5e arrondissement, longe le fleuve à quelques centaines de mètres au pied de la montagne Sainte-Geneviève, puis traverse le 6e arrondissement et rejoint à nouveau la Seine au niveau du quai d’Orsay, dans le 7e arrondissement. C’est la principale voie du Quartier latin, avec le boulevard Saint-Michel et du faubourg Saint-Germain.
[10] Le musée d’Israël est un musée situé sur la colline de Guivat Ram à Jérusalem, à proximité de la Knesset, de la cour suprême d’Israël, de l’université hébraïque de Jérusalem, du campus national pour l’archéologie d’Israël et du Bible Lands Museum. Fondé en 1965, il est le musée national d’Israël, bien que son financement soit en grande majorité assuré par des fonds privés. Il est l’un des plus grands musées du Proche-Orient.
[11] Le château de Vaux-le-Pénil est un château situé dans la commune de Vaux-le-Pénil dans le département de Seine-et-Marne. Situé à 45 kilomètres au sud-est de Paris, il n’est éloigné de Fontainebleau que de 20 kilomètres. Au bord de la Seine, il surplombe Melun.
[12] Le titre de duc d’Aveiro est créé avant 1535 par le roi Jean III de Portugal, ou plus vraisemblablement par son père Manuel 1er, en faveur de Jean, fils aîné de George de Lancastre, 2ème duc de Coimbra et fils illégitime de Jean II.
[13] n France, sous l’Ancien Régime, l’appellation de lieutenant général des armées du roi, lieutenant général des armées navales pour la Marine, est un grade militaire particulier détenu par un officier général, qui le place entre le grade des maréchaux des camps et chefs d’escadre et la charge tenue par les colonels généraux, ceux-ci n’étant pour leur part surpassés que par les titulaires de la dignité de maréchal de France ou d’amiral de France qui sont des grands officiers de la Couronne titulaires d’une dignité à la fois honorifique et lucrative. En termes de statut et de mission, le grade de lieutenant général des armées constitue aussi dans les faits une charge militaire. On note qu’un lieutenant général porte ce grade et est désigné comme tel dans l’armée, mais que dans la marine, il conserve celui d’amiral. Le grade de lieutenant général des armées ou de lieutenant général des armées navales pour la Marine, était le grade le plus élevé de la hiérarchie militaire d’Ancien Régime, inaccessible à un roturier. Le grade de lieutenant général était l’équivalent du grade actuel de général de division et celui de lieutenant général des armées navales correspondait à celui de vice-amiral de notre époque. Comme c’est aussi le cas dans l’armée d’aujourd’hui pour les officiers généraux de haut rang, il y avait un certain nombre de lieutenants généraux des armées du roi, simultanément au sein de l’armée royale. À partir de 1775, les lieutenants généraux reçoivent des épaulettes à trois étoiles. En 1791, le grade de lieutenant général des armées fut renommé « général de division » pour les troupes terrestres et « vice-amiral » pour la marine. En 1814, le grade de général de division reprit le nom de « lieutenant général des armées », avant de reprendre définitivement l’intitulé de général en 1848.
[14] Le Poitou était une province française, comprenant les actuels départements de la Vendée (Bas-Poitou), Deux-Sèvres et de la Vienne (Haut-Poitou) ainsi que le nord de la Charente et une partie de l’ouest de la Haute-Vienne, dont la capitale était Poitiers. Il a donné son nom au Marais poitevin, marais situé dans l’ancien golfe des Pictons, sur la côte occidentale de la France, deuxième plus grande zone humide de France en superficie après la Camargue ; le marais s’étend de l’Atlantique aux portes de Niort et du sud de la Vendée au nord de La Rochelle.
[15] La famille de Saint-Georges est une famille de la noblesse française, d’ancienne extraction, originaire de la Marche, et dont 2 des 4 branches se sont développées dans le Poitou.
Elle s’est éteinte en 1858 avec sa dernière branche subsistante, la branche de Couhé-Vérac.