Le 7 novembre 1659, un traité mit fin à l’interminable guerre qui opposait depuis le siècle précédent la dynastie française des Bourbons et la dynastie espagnole des Habsbourg. Il consacra la prééminence de la France en Europe. Ce traité des Pyrénées était l’œuvre de Mazarin, soucieux de réconcilier les deux principales puissances d’Europe. Les négociations de commencèrent en juillet 1656 à Madrid à l’initiative de Hugues de Lionne et don Luis de Haro. Mais elles butèrent longtemps sur la mauvaise volonté du roi d’Espagne, Philippe IV, qui ne souhaitait pas inclure dans le traité le mariage de sa fille, l’infante Marie-Thérèse, avec son cousin, le roi de France, tous 2 âgés de 21 ans.
Pour lever les réticences de Philippe IV au mariage de sa fille, l’habile Mazarin fait croire de marier Louis XIV à sa cousine Marguerite de Savoie. Il se rendit même à Lyon pour la présentation de la fiancée. Dans le même temps, il poursuivit en secret les négociations en vue de marier le roi de France à la fille de Philippe IV.
Ce dernier, apprenant le projet de mariage savoyard, dépêcha aussitôt à Lyon son secrétaire d’État aux affaires étrangères, Antonio Pimentel. Celui-ci traversa le territoire ennemi incognito et brava le danger pour apporter enfin à Mazarin l’accord du roi d’Espagne. Mazarin annula sans plus de façons le mariage savoyard et le traité avec l’Espagne est enfin signé sur l’île des Faisans, au milieu de la rivière Bidassoa qui sépare les deux pays.
D’après le traité, l’Espagne apportait à la France le Roussillon, la Cerdagne, l’Artois et plusieurs places fortes en Flandre et en Lorraine, Gravelines, Thionville, Montmédy et Philippeville. Le duché de Lorraine, amputé, fut occupé par des garnisons françaises.
Philippe IV fit inclure dans le traité la restitution au Grand Condé de ses titres et de ses biens. C’est pour le prince, coupable d’avoir combattu Louis XIV au cours de la Fronde, le début d’un retour en grâce.
L’année suivante, comme prévu, les futurs époux se rencontrèrent à Saint-Jean-de-Luz. Leur mariage fut célébré le 9 juin 1660 par l’évêque de Bayonne dans une atmosphère de liesse. Selon les termes du traité, Marie-Thérèse renonçait pour elle et ses descendants à ses droits sur la couronne d’Espagne moyennant le paiement d’une dot confortable de 500.000 écus. Or, l’habile Mazarin savait que l’Espagne n’aurait jamais les moyens de payer cette dot. Quelques années plus tard, le roi Louis XIV prendra prétexte de cet impayé pour revendiquer ses droits sur la succession espagnole. Ce sera la guerre de “Dévolution”, ainsi nommée d’après un terme de droit privé d’une vieille coutume du Brabant qui stipulait que les filles d’un premier mariage recueillaient l’héritage foncier avant les enfants d’un second mariage du défunt.
Louis XIV, dont la légitimité remontait à une prétendue loi salique qui donnait la primauté aux héritiers mâles, eut le front d’utiliser cet argument dans son “Traité des droits de la reine très chrétienne sur divers États de la monarchie espagnole”, pour revendiquer des régions au nord et à l’est de son royaume.
Avec le traité des Pyrénées, la France s’affirma comme la première puissance européenne. Quant à l’Espagne, épuisée, elle entama un irrésistible déclin, victime de l’absolutisme royal, de l’Inquisition et de la richesse trop facile que lui avait amené les galions d’Amérique, une richesse qui l’avait dissuadée de mettre en valeur son territoire.