En 1409 à Pise, évêques et cardinaux sont réunis pour tenter de trouver une solution au Grand Schisme, qui divise la papauté en 2 camps irréconciliables depuis 1378. Une idée s’impose, déposer les 2 papes du moment, Benoît XIII et Grégoire XII, et les remplacer par un nouveau souverain pontife. Les pères conciliaires élisent Alexandre V. Mais les 2 papes évincés refusent d’abdiquer. La chrétienté a désormais 3 souverains pontifes. Lorsque, un an plus tard, Alexandre V meurt, Jean XXIII prend aussitôt sa place. La situation devient impossible. Sigismond, fils de l’empereur Charles IV, convainc Jean XXIII de convoquer un nouveau concile.
Le 16 novembre 1414 s’ouvre le concile de Constance qui admet en son sein des universitaires, s’ouvre dans une relative tranquillité. Il s’achèvera 4 ans plus tard après avoir mis fin à la crise. L’Église tente d’adopter des réformes pour museler les hérésies et affirmer la supériorité du concile sur le pape. 3 papes sont déposés avant que l’élection de Martin V ne réunifie le clergé. En effet, Jean XXIII consent à abdiquer, à condition que ses 2 rivaux en fassent de même. Grégoire XII est d’accord et abdique le 4 juillet 1415. Sans attendre la réponse de Benoît XIII, qui s’obstinera dans son refus, Jean XXIII s’enfuit, pressentant sans doute que les choses vont mal tourner pour lui. Il sera en effet considéré comme un usurpateur par la suite. Le 6 avril 1415, il publie Sacrosancta, un décret resté célèbre, qui affirme que le concile « tient son pouvoir directement du Christ, tout homme, quel que soit son état ou sa dignité, cette dernière fût-elle papale, est tenu de lui obéir pour tout ce qui touche à la foi et à l’extirpation du schisme susdit, ainsi qu’à la réforme de la susdite Église de Dieu dans sa tête et dans ses membres ». Grégoire XII étant mort le 18 octobre 1417, le concile de Constance élut à l’unanimité 11 novembre 1417 un seul pape le romain Odon Colonna qui prit le nom de Martin V. Ce même concile rappela conformément à la règle en vigueur dans l’Église Chrétienne du premier millénaire, que seul le Concile oecuménique* est l’organe suprême en matière d’autorité et d’enseignement au sein de l’Église.
Maintenant le concile pouvait s’occuper de son 2ème objectif la lutte contre 2 hérésies nées à l’Université. Comme le père de la première hérésie, l’anglais John Wyclif était déjà mort, il ne restait qu’à régler le cas de Jan Hus son disciple. Prêtre, doyen et recteur de l’université de Prague, il avait développé les idées de réforme de l’anglais Wyclif, en prononçant des sermons contre les erreurs du catholicisme. Excommunié en 1411 et 1412, il prit position contre l’antipape Jean XXIII. Cité à comparaître devant le concile de Constance en 1414, il s’y rendit avec un sauf-conduit de l’empereur Sigismond, qui ne lui servit à rien. Le 6 Juillet 1415 il fut brûlé vif à Constance !
Le Grand Schisme est terminé. Échaudés par cette terrible expérience, les pères conciliaires décidèrent, avant l’élection du nouveau pape, que les conciles se réuniront sur une base régulière. Le calendrier des réunions sera plus ou moins tenu au début. Mais très vite, les papes s’opposeront à toute velléité de réforme et à tout amoindrissement de leur pouvoir monarchique. Aucun pape ne respectera le décret Sacrosancta. Néanmoins, la papauté retrouvera un fonctionnement administratif normal durant le 15ème siècle, sans pour autant récupérer sa légitimité morale. Après l’échec du concile de Pavie en 1424, Martin V convoque, comme le prévoit le calendrier élaboré à Constance, un nouveau concile à Bâle en 1431. La réforme est à l’ordre du jour, et les pères conciliaires, parmi lesquels les universitaires forment la majorité, manifestent d’emblée leur hostilité à la suprématie monarchique du pape.
Nombreux sont les pères qui estiment que la souveraineté en matière de foi et de gouvernement doit revenir au corps de l’Église, c’est-à-dire à la foule des croyants. La majorité soutient que le concile a une autorité supérieure à celle du pape, qui reste toutefois nécessaire pour assumer le pouvoir exécutif.
La grande réussite du concile de Bâle est d’abolir les excès du système fiscal du Saint-Siège. En 1433, invoquant la maladie, le nouveau pape italien Eugène IV n’ose pas se présenter au concile de Bâle qu’il voulait oecuménique, et en l’absence de l’Église d’Orient, il le nommera Concile Général. Profitant de son absence, les évêques réaffirmèrent la supériorité d’un concile d’évêques par rapport à la voix d’un pape.
Eugène en profita pour transférer le concile à Ferrare, puis à Florence, où il négocia avec les Grecs. En 1438, afin de pouvoir faire face à la grande menace turque, l’Église d’Orient donna son accord de participation à un concile oecuménique sous réserve qu’il se situa sur les bords de la Mer Adriatique afin qu’en cas d’attaque turque les orientaux puissent retourner rapidement dans leur pays. Eugène IV transféra donc le concile de Bâle à Ferrare. Le pape et le patriarche de Byzance se rencontrèrent le 24 janvier 1439 à Ferrare. Un moment interrompu par une épidémie de peste, le concile s’enlisa 16 mois sur la version byzantine du Credo de Nicée. Mais en 1440 une avancée turque et la mort du patriarche Joseph de Constantinople accélérèrent une rapide proclamation d’union entre les 2 Églises qui n’entra jamais en vigueur ! ... Eugène pu retourner à Rome mais à Byzance ni le monde orthodoxe grec, ni l’Église slave n’acceptèrent cette union sacrée. A part quelques centaines de soldats vénitiens et génois venus défendre leurs intérêts, Constantinople, la vieille Byzance assiégée par les turcs en 1453 sera abandonnée par l’Occident à son sort ! Appelée désormais Istanbul elle sera jusqu’en 1923 la capitale de l’État turc.
Même si la majorité des prélats comprirent le but du transfert du concile à Ferrare, quelques évêques et 300 ecclésiastiques considérèrent ce geste comme un abus d’autorité et s’y opposèrent en élisant le 5 novembre 1439 un antipape Félix V qui ne fut reconnu que par la Lituanie et la Pologne. Agé de 56 ans, intronisé sous le nom de Félix V, le nouveau pape est un heureux homme, bon vivant et pétri de bonne volonté. À 10 ans, il a été marié avec faste à Marie de Bourgogne, fille du puissant duc de Bourgogne, âgée de 17 ans ! Ce mariage consommé 10 ans plus tard s’avère des plus heureux. En 20 ans, Marie donne le jour à 7 enfants avant de mourir en couches. Amédée avait élargi son domaine sous l’œil vigilant de son beau-père. Né comte, il acquiert le titre de duc. Désabusé, il abdique de son pontificat 10 ans plus tard. Son renoncement met un terme final au Grand Schisme.
Le nouveau pape, Nicolas V, décidément bon prince, nomme son rival évêque de Genève, légat pontifical et cardinal du Sacré Collège ! Amédée meurt en 1451, vénéré de tous.
Le conciliarisme, s’il a contribué à sortir l’Église du Grand Schisme, a échoué dans sa prétention à réformer l’Église, en butant sur le refus des papes de voir diminuer leur pouvoir monarchique. Le déclin de la papauté et de la vie religieuse se poursuit.
En Italie, la Renaissance emporte les hommes dans un grand tourbillon artistique et politique, et ne manque pas de happer la papauté, qui à vrai dire n’oppose aucune résistance. A nouveau, la spiritualité fait les frais de papes qui ne pensent qu’au luxe et à la politique. Nicolas V fait de Rome une capitale culturelle, et ordonne la reconstruction de Saint-Pierre et de la ville. Son successeur Calixte III, le premier des Borgia, a recours au népotisme. Sixte IV, à qui l’on doit la construction de la chapelle Sixtine, transforme la monarchie pontificale en une grande puissance italienne. Le Saint-Siège est pris dans les imbroglios de la politique italienne et entretient des relations pacifiques ou guerrières avec les nations d’Europe.
Avec Innocent VIII, la papauté du 15ème siècle touche le fond, corruption, vénalité, népotisme, faux privilèges, fausses bulles, intrigues sont des mesures courantes.
Son successeur Alexandre VI Borgia achète son élection. Sous son règne, des fêtes organisées à la cour papale tournent à l’orgie. Le pape est lui-même le père de Lucrèce et César Borgia, de sinistre réputation. Le dominicain florentin Savonarole, qui s’en prend violemment aux abus de l’Église meurt sur le bûcher en 1498.
Si la papauté se refuse à toute réforme, de peur de perdre ses privilèges, quelques velléités de redressement se font jour dans le monde catholique. Cependant, elles sont trop isolées pour susciter un mouvement d’ampleur. Nombreux sont pourtant les hommes et les femmes qui cherchent un approfondissement de leur vie spirituelle. L’anticléricalisme ne diminue pas la ferveur religieuse.
Grâce à l’apparition de l’imprimerie, le retour à la Bible s’accentue. L’accès facilité au Nouveau Testament, notamment dans sa version originale grecque, et aux Pères de l’Église, permet de mieux comprendre quelles ont été la vie et les pratiques des premiers chrétiens. Le souhait d’une foi directe, qui ne passe pas par l’intermédiaire d’un prêtre et des sacrements, mais qui se joue dans l’intimité de la relation entre l’homme et le Christ, touche de plus en plus de croyants au Nord.