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L’histoire pour le plaisir

Guillaume de Tyr

lundi 3 juillet 2023, par ljallamion

Guillaume de Tyr (vers 1130-1184/1186)

Archevêque de Tyr-Historien des croisades au Moyen Âge-Précepteur du roi de Jérusalem Baudouin IV le Lépreux

Guillaume est né à Jérusalem [1] vers 1130 parmi les latins d’Orient de la seconde génération. Enfant, il fut éduqué à Jérusalem, mais à la fin de l’année 1145 ou au début de 1146, il part finir ses études en Europe, à l’époque où les chevaliers et souverains occidentaux s’apprêtent à partir dans la seconde croisade [2]. Il fréquente les plus prestigieuses universités de l’époque, Paris [3] pour la théologie et Bologne [4] pour le droit et reçoit l’enseignement des professeurs les plus remarquables.

De retour en Terre Sainte en 1165, il obtient un bénéfice dans l’église d’Acre [5] et devient un proche du roi Amaury 1er. Le 11 septembre 1167, le roi le fait nommer archidiacre [6] de Tyr [7] et peu après lui demande de rédiger une “Historia rerum in partibus transmarinis gestarum” [8].

En 1168, il effectua une mission diplomatique pour le roi auprès de l’empereur byzantin [9] Manuel 1er Comnène, et en 1169 il est envoyé à Rome. À son retour, Amaury le nomme précepteur de Baudouin, le fils et héritier d’Amaury.

C’est Guillaume de Tyr qui fait la peu enviable découverte de la lèpre de Baudouin, qui ne réussit pas à en guérir, malgré tous les efforts des médecins appelé par le roi. Amaury meurt le 11 juillet 1174, et le prince devient roi sous le nom de Baudouin IV sous la régence de Miles de Plancy , puis de Raymond III de Tripoli.

En 1174 Baudouin nomme Guillaume à la charge de chancelier de Jérusalem [10]. En 1175 Guillaume devient archevêque de Tyr, occupant ainsi des fonctions parmi les plus importantes au sein de l’Église et de l’État.

En octobre 1178, il s’embarque avec 7 prélats palestiniens [11] pour participer au troisième concile du Latran [12], qui s’ouvre le 5 mars 1179. Plusieurs des conclusions, également appelés canons, du concile concernent l’Orient et portent probablement la marque de Guillaume.

Guillaume et ses compagnons ont probablement profité de ce concile pour décrire la précarité des états latins d’Orient et appelé à une nouvelle croisade.

Si le roi de France Louis VII et l’empereur Frédéric Barberousse répondent favorablement à cet appel, la mort du premier et la guerre civile du second avec les Guelfes [13] empêcha le départ de cette croisade. En outre, l’évêque Josse d’Acre, un des compagnons de Guillaume est porteur d’une mission auprès du duc Hugues III de Bourgogne , lui proposant la main de Sibylle, sœur du roi, ainsi que la succession au trône de Jérusalem.

Il ne rentre pas immédiatement en Terre sainte, car Baudouin IV l’avait chargé d’une mission d’ambassade auprès de l’empereur Manuel 1er Comnène, afin de discuter du passage de la prochaine croisade à travers l’empire byzantin et de la collaboration militaire entre le royaume de Jérusalem et l’empire byzantin.

En février 1180, il assiste au mariage de Rénier de Montferrat avec Marie Comnène , fille de l’empereur. En mars 1180, c’est le mariage de l’héritier, Alexis II Comnène, avec Agnès de France, fille de Louis VII. Guillaume ne rentre dans le royaume que le 12 mai 1180, après une absence de 22 mois.

Amaury de Nesle , patriarche de Jérusalem [14], meurt le 6 octobre 1180. Guillaume est considéré comme le meilleur candidat pour devenir patriarche de Jérusalem. Cependant, les manœuvres politiques de la reine mère Agnès de Courtenay l’en écartent, et son rival Héraclius d’Auvergne est choisi.

Il semble même qu’Héraclius l’excommunia en 1183. Les circonstances de sa mort ne sont pas certaines.

Il meurt peut-être en Europe en octobre 1184, lors de son voyage pour se justifier devant le pape. Son successeur comme archevêque de Tyr étant mentionné pour la première fois le 21 octobre 1186, il est possible qu’il soit mort le 29 septembre de l’année 1186, à Jérusalem.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Pierre Aubé, Baudouin IV de Jérusalem, le roi lépreux, Hachette, coll. « Pluriel », 1981 (réimpr. 1996), 498 p. (ISBN 2-01-278807-6)

Notes

[1] Ville du Proche-Orient que les Israéliens ont érigée en capitale, que les Palestiniens souhaiteraient comme capitale et qui tient une place centrale dans les religions juive, chrétienne et musulmane. La ville s’étend sur 125,1 km². En 130, l’empereur romain Hadrien change le nom de Jérusalem en « AElia Capitolina », (Aelius, nom de famille d’Hadrien ; Capitolina, en hommage au dieu de Rome, Jupiter capitolin) et il refonde la ville. Devenue païenne, elle est la seule agglomération de la Palestine à être interdite aux Juifs jusqu’en 638. Durant plusieurs siècles, elle est simplement appelée Aelia, jusqu’en 325 où Constantin lui redonne son nom. Après la conquête musulmane du calife Omar en 638, elle devient Iliya en arabe, ou Bayt al-Maqdis (« Maison du Sanctuaire »), équivalent du terme hébreu Beit ha-Mikdash (« Maison sainte »), tous deux désignant le Temple de Jérusalem, ou le lieu du voyage et d’ascension de Mahomet, al-Aqsa, où se situait auparavant le temple juif

[2] La deuxième croisade commença en 1147 après avoir été lancée en décembre 1145 par le pape Eugène III à la suite de la chute d’Édesse en 1144. Elle s’acheva en 1149 par un échec total pour les croisés, qui rentrèrent en Europe sans avoir remporté de victoire militaire en Orient.

[3] L’université de Paris était l’une des plus importantes et des plus anciennes universités médiévales. Apparue dès le milieu du 12ème siècle, elle est reconnue par le roi Philippe Auguste en 1200 et par le pape Innocent III en 1215. Elle acquiert rapidement un très grand prestige, notamment dans les domaines de la philosophie et de la théologie. Constituée comme l’association de tous les collèges parisiens situés sur la rive gauche, elle assurait la formation de tous les clercs, c’est-à-dire de tous les cadres et agents administratifs des institutions royales (conseil d’État, parlements, tribunaux, cours des comptes, impôts, etc.) et ecclésiastiques (enseignement, hôpitaux, libraires, recherche, évêques, abbés).

[4] Fondée en 1088, l’université de Bologne est considérée comme la première et la plus ancienne université européenne. Elle est la première institution à utiliser le terme université (en latin universitas) ainsi que la première université reconnue comme telle par le pape. Sa devise est Petrus ubique pater legum Bononia mater, « Saint Pierre est le père de tous les lieux et Bologne la mère de la loi ».

[5] Acre est une ville d’Israël, située au nord de la baie de Haïfa, sur un promontoire et dotée d’un port en eaux profondes. Acre est située à 152 km de Jérusalem et dépend administrativement du district nord. Cette ville côtière donne son nom à la plaine d’Acre qui comporte plusieurs villages. Son ancien port de commerce florissant dans l’Antiquité, est devenu une zone de pêche et de plaisance de moindre importance. Elle devient au 13ème siècle la capitale du Royaume de Jérusalem et le principal port de Terre sainte.

[6] Un archidiacre est un vicaire épiscopal à qui l’évêque confie certaines fonctions administratives pour un groupe de paroisses.

[7] Tyr se situe dans la Phénicie méridionale, à un peu plus de 70 km au sud de Beyrouth et à 35 km au sud de Sidon, presque à mi-chemin entre Sidon au nord et Acre au sud, et à quelques kilomètres au sud du Litani.

[8] monumentale œuvre littéraire qui contient 23 livres, mais reste inachevée

[9] L’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient désigne l’État apparu vers le 4ème siècle dans la partie orientale de l’Empire romain, au moment où celui-ci se divise progressivement en deux. L’Empire byzantin se caractérise par sa longévité. Il puise ses origines dans la fondation même de Rome, et la datation de ses débuts change selon les critères choisis par chaque historien. La fondation de Constantinople, sa capitale, par Constantin 1er en 330, autant que la division d’un Empire romain de plus en plus difficile à gouverner et qui devient définitive en 395, sont parfois citées. Quoi qu’il en soit, plus dynamique qu’un monde romain occidental brisé par les invasions barbares, l’Empire d’Orient s’affirme progressivement comme une construction politique originale. Indubitablement romain, cet Empire est aussi chrétien et de langue principalement grecque. À la frontière entre l’Orient et l’Occident, mêlant des éléments provenant directement de l’Antiquité avec des aspects innovants dans un Moyen Âge parfois décrit comme grec, il devient le siège d’une culture originale qui déborde bien au-delà de ses frontières, lesquelles sont constamment assaillies par des peuples nouveaux. Tenant d’un universalisme romain, il parvient à s’étendre sous Justinien (empereur de 527 à 565), retrouvant une partie des antiques frontières impériales, avant de connaître une profonde rétractation. C’est à partir du 7ème siècle que de profonds bouleversements frappent l’Empire byzantin. Contraint de s’adapter à un monde nouveau dans lequel son autorité universelle est contestée, il rénove ses structures et parvient, au terme d’une crise iconoclaste, à connaître une nouvelle vague d’expansion qui atteint son apogée sous Basile II (qui règne de 976 à 1025). Les guerres civiles autant que l’apparition de nouvelles menaces forcent l’Empire à se transformer à nouveau sous l’impulsion des Comnènes avant d’être disloqué par la quatrième croisade lorsque les croisés s’emparent de Constantinople en 1204. S’il renaît en 1261, c’est sous une forme affaiblie qui ne peut résister aux envahisseurs ottomans et à la concurrence économique des républiques italiennes (Gênes et Venise). La chute de Constantinople en 1453 marque sa fin.

[10] Il y avait 6 offices permanents dans le royaume de Jérusalem : connétable, maréchal, sénéchal, chambellan, bouteiller et chancelier. Les quatre premiers étaient des Grands Offices. Durant certaines périodes, il y eut aussi des baillis, des vicomtes et des châtelains. Ces offices sont calqués sur ceux qui existaient dans le nord du royaume de France au 11ème siècle, la terre d’origine des premiers rois de Jérusalem. Ces offices continuèrent à se développer en France et en Angleterre, mais à Jérusalem, ils évoluèrent peu ou pas du tout. Après la chute du royaume de Jérusalem en 1291, ils continuèrent à être attribués à titre honorifique par les rois de Chypre, héritiers des rois de Jérusalem.

[11] Le nom Palestine désigne la région historique et géographique du Proche-Orient située entre la mer Méditerranée et le désert à l’est du Jourdain et au nord du Sinaï. Si le terme « Palestine » est attesté depuis le 5ème siècle av. jc par Hérodote, il est officiellement donné à la région par l’empereur Hadrien au 2ème siècle, désireux de punir les Juifs de leur révolte en 132-135. Elle est centrée sur les régions de la Galilée, de la Samarie et de la Judée. Ses limites sont au nord la Phénicie et le mont Liban et au sud la Philistie et l’Idumée. À l’époque des croisades, le Pérée au nord-est de la mer Morte, la Batanée et la Décapole au-delà du Jourdain y étaient attachés. La Palestine peut désigner le territoire situé uniquement à l’ouest du Jourdain. Historiquement, elle correspond à Canaan, à la Terre d’Israël et fait partie de la région de Syrie (Syrie-Palestine). Les Arabes, qui ont conquis la Palestine sur les Byzantins dans les années 630, divisent la province d’al-Sham en cinq districts (jund), dont l’un garde le nom de « Palestine » et s’étend du Sinaï jusqu’à Akko (connue par les Chrétiens sous le nom de Saint-Jean-d’Acre) ; son chef-lieu est d’abord Ludd (Lod) puis, dès 717, ar-Ramlah (Ramla) et plus tard Jérusalem. Les autres villes les plus importantes sont Rafah, Gaza, Jaffa, Césarée, Naplouse et Jéricho. Ce district de « Palestine » était bordé au nord et à l’est par celui de « Jordanie », al-Urdunn, qui avait pour capitale Tibériade et incluait Akko et Tyr. Les frontières entre ces deux districts ont plusieurs fois varié au cours de l’histoire. À partir du 10ème siècle, cette division a commencé à tomber en désuétude, pour faire place finalement au royaume chrétien de Jérusalem. Sous le gouvernement des Croisés, est fondé en 1099, le royaume latin de Jérusalem ; Jérusalem redevient capitale d’un État. Après la défaite et le départ des Croisés, aux 12ème et 13ème siècles, les jund (districts) arabo-musulmans sont réintroduits, mais leurs frontières sont sans cesse redéfinies.

[12] Le troisième concile du Latran est le 11ème concile œcuménique de l’Église catholique. Il se tient à Rome en mars 1179, à la suite de la paix de Venise conclue entre l’empereur Frédéric Barberousse et la Ligue lombarde fomentée par le pape Alexandre III. Il met fin au schisme survenu au moment de l’élection d’Alexandre III en 1159. Le concile réunit environ 200 pères conciliaires. Il se tient en trois sessions : les 5, 7 (ou 14) et 19 (ou 22) mars 1179. Il donne lieu à 27 décrets, portant sur des sujets très variés.

[13] Les guelfes et les gibelins sont deux factions (parti ou, plus souvent, brigate ou sette) médiévales qui s’opposèrent militairement, politiquement et culturellement dans l’Italie des Duecento et Trecento. À l’origine, elles soutenaient respectivement deux dynasties qui se disputaient le trône du Saint Empire : la pars Guelfa appuyait les prétentions de la dynastie des « Welf » et de la papauté, puis de la maison d’Anjou, la pars Gebellina, celles des Hohenstaufen, et au-delà celles du Saint Empire. Conflit en apparence limité au Saint Empire, l’opposition entre Guelfes et Gibelins va se transporter dans diverses parties d’Europe, principalement dans les villes de la péninsule italienne. Dans cette bipolarisation, parfois surestimée, les allégeances dynastiques sont parfois secondaires, les adhésions fluctuantes, et il faut attendre le règne de Frédéric II pour que papauté et empire deviennent des symboles forts de ralliement et que se construise une véritable division antithétique. Ce clivage trouve des manifestations dans le domaine civique et religieux et cristallise les tensions entre les villes italiennes, au sein de leurs élites et parfois entre la ville et son contado. L’écho du conflit se manifeste à des époques ultérieures, en revêtant de nouveaux caractères et en stigmatisant des oppositions idéologiques nouvelles.

[14] Le Patriarche latin de Jérusalem est l’un des patriarches catholiques orientaux. C’est le titre le plus ancien parmi tous les patriarches catholiques orientaux puisqu’il date de 1099 et le seul de rite latin. En effet, après la prise de Jérusalem par les croisés en 1099, une structure religieuse, le patriarcat latin, est créée à Jérusalem en complément d’une structure temporelle, qui sera le royaume de Jérusalem.