Plus jeune fils d’Étienne comte de Blois [1]-Chartres [2], et d’Adèle d’Angleterre fille de Guillaume le Conquérant.
Dès son plus jeune âge, il part au monastère de Cluny, le plus important de son temps, où il devient moine. Il est possible qu’il ait été ensuite brièvement prieur du petit prieuré clunisien de Montacute [3] dans le Somerset [4].
En 1126, Henri est nommé abbé de Glastonbury [5] grâce à l’appui de son oncleHenri 1er d’Angleterre. Il y est particulièrement actif, notamment pour récupérer les terres de l’abbaye usurpées par des propriétaires voisins. Trois ans après, il devient évêque de Winchester [6], l’un des plus hauts postes ecclésiastiques de l’Angleterre médiévale. Il est consacré le 17 novembre 1129. Il conserve l’abbatiat de Glastonbury, qu’il refuse de rendre au grand dam des ordres réformateurs, et restera son abbé jusqu’à sa mort.
Il est souvent présent à la cour royale, et en 1131, il fait partie des ecclésiastiques qui font serment d’accepter Mathilde l’Emperesse, la fille du roi, comme son successeur au trône d’Angleterre.
Il est un acteur capital dans l’obtention du trône anglais pour son frère, Étienne de Blois, après la mort d’Henri 1er. C’est grâce à lui qu’Étienne obtient l’approbation de l’évêque Roger de Salisbury, le chef de l’administration, et de Guillaume du Pont de l’Arche, le gardien du trésor royal. Il parvient alors à obtenir de son frère des garanties pour l’autonomie de l’Église, dans la charte des libertés d’Oxford en 1136 et Étienne promet d’être un souverain modèle envers l’Église.
Dès 1136, il obtient la nomination de l’un de ses anciens administrateurs de Glastonbury, Robert de Lewes, à l’évêché de Bath [7]. Cette même année, il est au siège d’Exeter [8] tenu par les troupes de Baudouin de Reviers. Après la reddition de la garnison, son frère lui confie la garde du château et de la région environnante.
il espérait sans doute pouvoir peser sur la politique anglaise. Mais Étienne est influencé par la puissante famille de Beaumont [9]. Les frères jumeaux Robert de Beaumont, 2ème comte de Leicester [10], et Galéran IV, comte de Meulan [11], utilisent leur influence pour faire élire l’abbé Thibaut du Bec à l’archiépiscopat de Cantorbéry [12] en décembre 1138. Henri avait la garde de l’archevêché depuis la mort de Guillaume de Corbeil en août 1136, et espérait bien obtenir le poste pour lui-même.
Toutefois, il est très probable que la nomination de Thibaut du Bec à l’archevêché fait partie d’un accord passé en Angleterre avec le légat du pape [13] présent à l’élection. En effet, peu après son retour à Rome, le pape Innocent II nomme Henri légat papal de toute l’Angleterre, avec autorité sur l’archevêque.
En juin 1139, Étienne fait arrêter l’évêque Roger de Salisbury, le chancelier du royaume [14], et ses neveux les évêques d’Ely [15] et de Lincoln [16]. Henri de Blois convoque son frère devant la cour qu’il tient en tant que légat, en août 1139. Le roi est accusé de ne pas avoir tenu sa promesse sur les libertés cléricales et doit répondre de cette accusation. Étienne arrive à écarter les charges qui pèsent sur lui, mais ses arrestations lui ont attiré l’hostilité du clergé. Le seul point positif pour Henri de Blois est que son frère a reconnu l’autorité de sa cour.
En septembre 1139, Mathilde l’Emperesse débarque en Angleterre pour venir y contester le trône à Étienne d’Angleterre, son cousin. Dans la guerre civile qui s’ensuit, Henri poursuit une politique indépendante grâce à sa position très favorable de légat, mais seulement jusqu’en 1143. Il sert d’ailleurs de médiateur entre Robert de Gloucester et son frère pour obtenir un sauf-conduit à l’Emperesse, puis il l’escorte jusqu’à Bristol [17]. Il convainc son frère qu’il est mieux de contenir ses ennemis en un seul endroit du royaume. L’année suivante, il œuvre en vain pour la paix en réunissant les deux partis à Bath à l’été.
La défaite et la capture d’Étienne à la bataille de Lincoln [18] en février 1141, le contraint à s’entendre avec Mathilde l’Emperesse. Elle reconnaît son autorité sur le clergé anglais, et en retour il la reconnaît comme Dame des Anglais. Il la reçoit lors d’une cérémonie dans sa cathédrale où elle est accompagnée par une procession d’évêques et d’abbés. Il se prépare à la couronner à Westminster, mais son refus de faire définitivement la paix avec Étienne d’Angleterre et son fils Eustache pousse Henri de Blois à s’éloigner d’elle. Fin juin 1141, elle est chassée de Londres par ses habitants alors qu’elle attend de se faire couronner. Henri change alors de camp. Fin juillet, l’Emperesse prend la décision de marcher sur Winchester pour forcer l’évêque à la couronner. Elle vient l’assiéger dans son château. Une armée menée par l’épouse d’Étienne, Mathilde de Boulogne, vient à son secours et défait les partisans de l’Emperesse. Dans la fuite, le commandant militaire et demi-frère de l’Emperesse, Robert de Gloucester, est capturé. Cela conduit en novembre 1141 à un échange de prisonnier entre les deux camps, que Henri de Blois et Thibaut du Bec sont chargés de négocier.
Les actions d’Henri durant l’année 1141 lui attirent les foudres des deux camps. Les royalistes se sentent trahis par son revirement au profit de l’Emperesse, et le parti angevin de cette dernière lui reproche de l’avoir déserté au moment fatidique. Brian FitzCount lui envoie une lettre en forme de réprimande cinglante sur les vertus de la constance. Selon lui, l’évêque est responsable, par ses actions, du prolongement de la guerre civile. Il le défie d’ailleurs en duel.
À la mort d’Innocent II le 24 septembre 1143, il perd sa mission de légat. Il essaie alors, sans succès de la faire renouveler ou de faire transformer son évêché en archevêché. Henri use ensuite de son pouvoir pour confirmer Guillaume FitzHerbert , comme archevêque d’York [19] en 1143, mais celui-ci est suspendu puis déposé par Eugène III en 1147. Il devient de plus en plus contesté, à la curie, et en 1148, il se voit reprocher d’être à l’origine de la tentative de son frère Étienne d’empêcher les évêques anglais de participer au concile de Reims [20]. Il est alors menacé de suspension, et doit aller à Rome s’expliquer devant le nouveau pape, le cistercien Eugène III, ce qu’il fait avec succès. Sur le chemin du retour, il passe quelque temps à Cluny où il avait commencé sa carrière ecclésiastique.
Il joue un rôle important dans les négociations du traité de Wallingford [21], qui établit la paix entre Étienne d’Angleterre et le futur Henri II Plantagenêt. Ce dernier est le fils de Mathilde l’Emperesse, et il a repris la lutte pour le trône à son compte. Étienne meurt en octobre 1154, et Henri de Blois est présent à la cérémonie de couronnement d’Henri II. Henri II, arrivé au pouvoir, met en place la politique annoncée dans le traité. L’évêque de Winchester comprend que son influence en tant que seigneur séculier va être considérablement réduite. En effet, du temps de son frère, il était de facto comte du Hampshire [22]. Les châteaux qu’il avait fortifiés dans ce comté sont confisqués ou détruits.
Il se retire alors à Cluny pendant au moins 2 ans. Quelque temps plus tôt, il avait d’ailleurs offert une somme d’argent à l’abbaye en profitant du passage en Angleterre de son abbé Pierre le Vénérable. C’est l’archevêque de Cantorbéry Thibaut du Bec qui obtient son retour dans le royaume, lui rappelant qu’il manque à ses devoirs. Il est restauré dans la faveur royale en 1158 et se voit confier un rôle de conseiller.
En 1162, il préside à l’élection et l’ordination de Thomas Becket à la fonction d’archevêque de Cantorbéry. Toutefois, il ne joue plus aucun rôle dominant dans l’histoire de l’Angleterre. Pendant l’affaire Becket, Henri sait rester en bons termes avec les deux camps. Au concile de NorthamptonNorthampton est une ville du Northamptonshire dans les Midlands de l’Est, en Angleterre. Située sur la rive nord de la rivière Nene, la ville est située à 108 km au nord de Londres et à 80 km au sud-est de Birmingham., il prononce le jugement de confiscation des terres de Becket pour ne pas avoir répondu à une convocation royale. Il semble qu’il ait désapprouvé l’extrémisme de Becket lorsqu’il soutient l’arbitrage papal de 1166-1167, mais il garde contact avec lui lors de son exil, le mettant au courant des affaires politiques du pays.
Sa santé décline à partir de 1166, et il devient aveugle sur la fin de sa vie. À la veille de sa mort, dans son palais de Wolvesey, Henri de Blois est demeuré provoquant à l’égard d’Henri II, lui reprochant la mort de Becket l’année précédente. Il meurt le 8 ou le 9 août 1171, et est inhumé dans la cathédrale de Winchester [23]. Pratiquement toutes ses richesses sont distribuées à des causes charitables.
Il fonde l’hôpital de la Sainte-Croix de Winchester, le collège de Marwell [24], et réforme la vieille église collégiale de Christchurch [25], la transformant en un prieuré augustin vers 1150.