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Nicéphore (César) ou Niképhoros

vendredi 19 février 2021, par ljallamion

Nicéphore (César) ou Niképhoros (756/758-812)

L'Empire Byzantin en 717, lors de la montée sur le trône de Léon III.Fils de l’empereur byzantin Constantin V et de sa 3ème épouse, Eudoxie. Il complote contre son demi-frère Léon IV, ce qui lui coûte son titre, et tente d’usurper le trône sous les règnes de son neveu, Constantin VI, et de la mère de celui-ci, Irène. Aveuglé et exilé dans un monastère, il meurt sur l’île d’Aphousia [1] peu après.

À la mort de Constantin V en 775, Léon monte sur le trône en tant que Léon IV. Il s’aliène rapidement ses demi-frères lorsqu’il confisque une grande quantité d’or qui leur était réservée, pour la distribuer en donativum [2] à l’armée et aux habitants de Constantinople [3].

Au printemps 776, une conspiration menée par Nicéphore et impliquant une série de courtisans de moyen rang est découverte ; Nicéphore y perd son titre, tandis que les autres conspirateurs sont tonsurés et exilés à Chersonèse [4].

Quand Léon meurt à son tour en octobre 780, son seul héritier, le jeune Constantin VI, monte sur le trône ; néanmoins, étant mineur, une régence est instituée sous l’autorité de sa mère, Irène l’Athénienne, ce qui est mal reçu par les principaux personnages du régime : être dirigé par une femme est complètement inhabituel pour ces cercles dominés par les militaires, mais en outre, Irène est une iconodoule [5] confirmée, une hérésie au vu de l’iconoclasme [6] alors en vigueur, qui est particulièrement populaire dans l’armée et chez les officiels fidèles à la mémoire de Constantin V.

Plusieurs d’entre eux, dont le logothète du drome [7] Grégoire, l’ex-stratège [8] des Anatoliques [9] Bardas et le domestique des Excubites [10] Constantin, projettent de placer Nicéphore sur le trône, mais un mois et demi à peine après la mort de Léon, le complot est découvert. Irène fait exiler les conspirateurs, et Nicéphore et ses frères cadets sont ordonnés prêtres, ce qui les retire de la ligne de succession. Afin de rendre ce fait connu de tous, ils sont forcés de donner la communion à Noël 780 à Sainte-Sophie [11].

Ils disparaissent ensuite des sources jusqu’en 792, lorsque le retour au pouvoir d’Irène déposée lors d’une révolte militaire en 790 et la désastreuse défaite de Constantin VI à Marcellai [12] contre les Bulgares [13] provoquent un large mécontentement parmi les troupes. Une partie des tagmata [14] proclame alors Nicéphore empereur, mais Constantin réagit rapidement et fait arrêter ses oncles : Nicéphore est aveuglé, ses frères ont la langue coupée, et ils sont tous emprisonnés dans un monastère à Thérapia [15].

Après la déposition de son fils par Irène en 797, les frères reçoivent dans leur monastère la visite de partisans, qui les persuadent de se réfugier à Sainte-Sophie, mais s’ils espèrent que la population de la capitale va se rallier à l’un d’entre eux, leurs espoirs sont réduits à néant. Aucun soulèvement en leur faveur ne se matérialise, et le fidèle conseiller eunuque [16] d’Irène, Aétios , parvient à les faire sortir et les exile à Athènes [17].

Ils y font de nouveau l’objet d’une conspiration, en mars 799, un certain Akamèros , archonte [18] des Slaves de Belzetia en Thessalie méridionale [19], aidé de troupes locales du thème de l’Hellade [20] dont relève Athènes, projette de proclamer l’un d’entre eux empereur. Le complot échoue, et les frères sont transférés à Panormos [21] sur la mer de Marmara [22], où ils sont aveuglés.

Les frères sont mentionnés pour la dernière fois en 812, lorsqu’un groupe de soldats mécontents tente de les proclamer empereurs au lendemain de la prise de Develtos par les Bulgares.

L’empereur Michel 1er Rhangabé se défait promptement des soldats impliqués et envoie les frères sur Aphousia, où ils meurent par après

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Lynda Garland, Byzantine Empresses : Women and Power in Byzantium, AD 527–1204, New York et Londres, Routledge, 1999 (ISBN 978-0-415-14688-3).

Notes

[1] Avşa ou Türkeli est une île de Turquie située au sud de la mer de Marmara. Durant l’empire byzantin, l’île servait de lieu d’exil et se nommait Aphousia.

[2] Sous l’Empire romain, un donativum est une récompense exceptionnelle accordée à un corps de troupe, généralement équivalente à plusieurs années de solde. Les prétoriens (garde personnelle de l’empereur) reçoivent fréquemment un donativum : lors de l’avènement d’un nouvel empereur, lors d’une naissance ou d’un mariage dans la famille impériale. Les autres corps de troupe (légions, troupes auxiliaires) en reçoivent moins souvent, voire jamais.

[3] Constantinople est l’appellation ancienne et historique de l’actuelle ville d’Istanbul en Turquie (du 11 mai 330 au 28 mars 1930).

[4] Chersonèse fut fondée vers 600 av. jc par des colons grecs venus d’Héraclée du Pont et devint prospère en commerçant avec ses voisins scythes. À la fin du 2ème siècle av. jc, la cité se trouva sous le protectorat du roi du Pont Mithridate VI puis après la chute de celui-ci, elle devint possession romaine. À la fin du 1er siècle, fut également martyrisé, au large de Chersonèse, le pape saint Clément 1er, déporté de Rome en Crimée. Avec la christianisation, l’Empire romain d’Orient devient l’Empire byzantin dont Chersonèse est une importante place commerciale, qui fut aussi un lieu d’exil pour le pape Martin 1er et pour l’empereur byzantin Justinien II.

[5] L’iconodulie ou iconodoulie, est un courant de pensée qui est en faveur des images religieuses ou icônes et de leur vénération, en opposition au courant iconoclaste.

[6] L’iconoclasme est, au sens strict, la destruction délibérée d’images, c’est-à-dire de représentations religieuses de type figuratif (appartenant souvent à sa propre culture) et généralement pour des motifs religieux ou politiques. Ce courant de pensée rejette la vénération adressée aux représentations du divin, dans les icônes en particulier. L’iconoclasme est opposé à l’iconodulie (ou iconodoulie).

[7] Dans la terminologie byzantine, la fonction de logothète désigne au départ une responsabilité d’ordre financier. La charge de logothetes tou dromou ou « logothète de la Course » ou encore « logothète du Drome » dérive de celui de curiosus cursus publici praesentalis, qui dépendait du bureau du maître des Offices.

[8] Un stratège est un membre du pouvoir exécutif d’une cité grecque, qu’il soit élu ou coopté. Dans l’Empire byzantin, à partir du 7ème siècle, un stratège est le commandant d’un thème et de son armée. Il est le détenteur des pouvoirs civils et militaires au sein de cette province. Le terme de monostratège désigne un stratège qui a autorité sur plusieurs thèmes.

[9] Les Anatoliques ou le thème des Anatoliques sont un thème de l’Empire byzantin situé en Asie Mineure (Turquie actuelle). Après la division de l’Opsikion au milieu du 8ème siècle, il devient le plus important des thèmes de l’empire.

[10] Les Excubites furent fondés vers 460 pour servir de garde personnelle aux premiers empereurs byzantins. Leurs commandants acquirent rapidement une grande influence et donnèrent à l’Empire byzantin plusieurs empereurs au 6ème siècle. Si les Excubites disparaissent progressivement des annales vers la fin du 7ème siècle, ils furent reformés vers le milieu du 8ème siècle et devinrent un tagma d’élite formant le noyau professionnel de l’armée byzantine. On les mentionne pour la dernière fois en 1081.

[11] Ancienne église chrétienne de Constantinople du vie siècle, devenue une mosquée au 15ème siècle sous l’impulsion du sultan Mehmet II. Elle est édifiée sur la péninsule historique d’Istanbul. Depuis 1934, elle n’est plus un lieu de culte mais un musée.

[12] La bataille de Marcellae s’est déroulée en 792 à Marcellae (Markeli), près de la ville actuelle de Karnobat dans le sud-est de la Bulgarie, là où avait eu lieu une première bataille en 756. Elle mit aux prises les forces de l’Empire byzantin conduites par l’empereur Constantin VI et celles du khanat bulgare du Danube sous la direction du khan Kardam. Les Byzantins furent défaits, durent battre en retraite jusqu’à Constantinople et accepter de payer un tribut aux Bulgares.

[13] Le Premier Empire bulgare désigne un État médiéval chrétien et multiethnique qui succéda au 9ème siècle, à la suite de la conversion au christianisme du Khan Boris, au Khanat bulgare du Danube (681-864), fondé dans le bassin du bas Danube. Le Premier Empire bulgare disparut en 1018, son territoire au sud du Danube étant réintégré dans l’Empire byzantin. À son apogée, il s’étendait de l’actuelle Budapest à la mer Noire, et du Dniepr à l’Adriatique. Après sa disparition, un Second Empire bulgare renaquit en 1187.

[14] Le tagma était l’unité tactique de l’armée byzantine ayant la taille d’un bataillon ou d’un régiment. Du 8ème au 10ème siècle, les tagmata constituèrent l’armée permanente de l’Empire byzantin par opposition aux thèmes, unités populaires et territoriales, mobilisables pour la défense des provinces. Quoique le terme « tagma » ait été utilisé depuis le 4ème siècle, c’est vraisemblablement Constantin V qui lui a donné son sens technique au milieu du 8ème siècle. Cette réforme qui mettait les tagmata directement sous l’autorité de l’empereur visait à créer une armée qui soit à la fois mobile et loyale à l’empereur, car non seulement les unités thématiques ne pouvaient être utilisées dans les guerres d’annexion au-delà des frontières, mais encore les commandants des unités thématiques cantonnées près de Constantinople avaient tenté à maintes reprises de renverser le pouvoir établi.

[15] Tarabya, en grec Therapia, est l’un des quartiers les plus huppés d’Istanbul particulièrement occidentalisé, situé dans un cadre verdoyant. Il se trouve sur la rive européenne du Bosphore, dans le district de Sarıyer. On y trouve l’un des sites du lycée français Pierre-Loti.

[16] Un eunuque est un homme castré. La castration se limite généralement à l’ablation des testicules mais il arrive qu’elle concerne également le pénis, connue alors sous le nom de pénectomie. Dans la Chine ancienne, la castration était à la fois une punition traditionnelle (jusqu’à la dynastie Sui) et un moyen d’obtenir un emploi dans le service impérial. À la fin de la dynastie Ming, il y avait 70 000 eunuques dans la Cité interdite. La valeur d’un tel poste était importante car elle pouvait permettre d’obtenir un pouvoir immense qui dépassait parfois celui du premier ministre. Cependant, la castration par elle-même fut finalement interdite. Le nombre d’eunuques n’était plus estimé qu’à 470 en 1912, lorsque la fonction fut abolie. La justification de cette obligation pour les fonctionnaires de haut rang était la suivante : puisqu’ils ne pouvaient procréer, ils ne seraient pas tentés de prendre le pouvoir pour fonder une dynastie. À certaines périodes, un système similaire a existé au Viêt Nam, en Inde, en Corée et dans d’autres contrées du monde.

[17] Athènes est l’une des plus anciennes villes au monde, avec une présence humaine attestée dès le Néolithique. Fondée vers 800 av. jc autour de la colline de l’Acropole, la cité domine la Grèce au cours du 1er millénaire av. jc. Elle connaît son âge d’or au 5ème siècle av. jc, sous la domination du stratège Périclès : principale puissance militaire de Grèce, à la tête d’une vaste alliance de cités, elle est également le cœur culturel de la Méditerranée. La démocratie athénienne connaît une vie intellectuelle importante, rassemblant des philosophes antiques (Socrate, Platon, Aristote), des auteurs de théâtre (Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane) et l’historien Thucydide. De nombreux témoignages de cette période faste ont été conservés, comme le Parthénon, l’Agora (qui comprend notamment le temple d’Héphaïstos), l’Olympéion, le théâtre de Dionysos ou encore le Stade panathénaïque. Ellle fut Intégrée au royaume de Macédoine, puis à l’Empire byzantin. Durant la période byzantine, Athènes perdit beaucoup de sa gloire pour ne devenir qu’une petite ville de province.

[18] Dans l’empire byzantin, Il peut désigner un personnage puissant, détenteur d’une forme d’autorité publique. Certains subordonnés de hauts fonctionnaires ou officiers sont désignés par le terme archonte. Au sens technique, un archonte est un gouverneur, un administrateur. Les listes de préséances et les sceaux font connaître des archontes provinciaux (de Crète, Chypre, Dalmatie) au 9ème siècle, et des archontes de villes, plus tard aux 10 et 12ème siècles

[19] La Thessalie est une région historique et une périphérie du nord-est de la Grèce, au sud de la Macédoine. Durant l’antiquité cette région a, pour beaucoup de peuples, une importance stratégique, car elle est située sur la route de la Macédoine et de l’Hellespont. Elle possédait un important port à Pagases. Le blé et le bétail sont les principales richesses de la région et une ressource commerciale vitale. La Thessalie est aussi l’une des rares régions de Grèce où l’on peut pratiquer l’élevage des chevaux, d’où l’importante cavalerie dont disposaient les Thessaliens.

[20] Le thème d’Hellade est un thème byzantin du sud de la Grèce, qui englobait des parties de la Grèce centrale, de la Thessalie et (jusque vers l’an 800) du Péloponnèse. Il a été établi au début du 7ème siècle et a survécu jusqu’à la fin du 11ème siècle.

[21] Bandırma

[22] La mer de Marmara, autrefois appelée la Propontide, est une mer située entre l’Europe orientale et l’Asie Mineure et qui communique avec les Dardanelles au sud-ouest et le Bosphore au nord-est. Par ces détroits, elle constitue une mer transitoire entre la mer Égée (mer Méditerranée) et la mer Noire. La mer de Marmara s’étend sur une superficie de 11 500 km² et a une profondeur maximale de 1 261 mètres. Elle est bordée au nord et au sud par la Turquie et est située sur une faille responsable de nombreux et dramatiques séismes.