Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Antiphon

dimanche 25 août 2019

Antiphon (vers 480-410 av. jc)

Un des dix grands orateurs attiques

Ce sophiste [1] hédoniste [2] s’était spécialisé dans plusieurs domaines de la sagesse tels que le juridique, l’onirocrisie [3], la mantique [4], la thérapeutique par les mots, la rhétorique. Son fils Épigène est l’un des élèves de Socrate

Aristocrate convaincu, il est l’un des instigateurs de la révolution oligarchique [5] de 411 av. jc à Athènes, aux côtés de Phrynicos et de Théramène. Au rétablissement de la démocratie en 410 av. jc, il est jugé pour sa participation à ce régime par le peuple athénien, condamné à mort et exécuté.

Né dans le dème [6] attique de Rhamnos [7], Antiphon est le fils de Sophilos, un aristocrate sophiste athénien, et le petit-fils d’un fervent partisan des Pisistratides [8].

Antiphon apprend l’art oratoire de son père et entame une carrière de logographe [9] et de sophiste, enseignant à son tour la rhétorique.

Après avoir été le maître de Thucydide, qui le défend ensuite avec chaleur dans ses écrits, il s’engage en politique sur la fin de sa vie.

Antiphon peut être considéré comme un des précurseurs de la psychanalyse. Il est l’inventeur d’une méthode d’interprétation des rêves ainsi que d’une thérapie de l’âme fondée sur le discours. Il prétendait guérir les maladies humaines par l’expression des sentiments par les mots, et l’interprétation rationaliste des rêves.

Antiphon met ses connaissances au service du peuple. Pour aller vers le bonheur, vers l’hédonisme libertaire, il prône une vie selon la Nature, il recommande d’aller à l’encontre des conventions sociales, idée qu’on retrouve également chez les Stoïciens [10], Diogène de Sinope, Aristippe de Cyrène et les Cyrénaïques [11].

Il recommande de tourner le dos aux richesses, aux honneurs et aux valeurs familiales car ces "fausses valeurs" éloignent du bonheur et de l’autonomie. Il veut privilégier l’être sur l’avoir.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Les présocratiques, trad. sous la dir. de Jean-Paul Dumont, avec la collab. de Daniel Delattre et de Jean-Louis Poirier (à propos d’Antiphon), Paris, Gallimard, 1988

Notes

[1] Un sophiste désigne à l’origine un orateur et un professeur d’éloquence de la Grèce antique, dont la culture et la maîtrise du discours en font un personnage prestigieux dès le 5ème siècle av. jc en particulier dans le contexte de la démocratie athénienne, et contre lequel la philosophie va en partie se développer. La sophistique désigne par ailleurs à la fois le mouvement de pensée issu des sophistes de l’époque de Socrate, mais aussi le développement de la réflexion et de l’enseignement rhétorique, en principe à partir du 4ème siècle av. jc, en pratique à partir du 2ème siècle ap. jc. dans l’Empire romain.

[2] L’hédonisme est une doctrine philosophique grecque selon laquelle la recherche du plaisir et l’évitement du déplaisir constituent l’objectif de l’existence humaine.

[3] L’interprétation des rêves ou onirocritique est l’ensemble des pratiques ou techniques, rituelles ou symboliques, qui tentent, au sein d’une culture donnée, de donner un sens au rêve.

[4] La divination est la pratique occulte et métaphysique visant à découvrir ce qui est inconnu : l’avenir, le caché, le passé, les trésors, les maladies invisibles, les secrets, les mystères, etc. et cela par des moyens non rationnels. Qu’il s’agisse de la parole oraculaire ou de la voyance, ceux qui la pratiquent auraient accès à une connaissance paranormale de données normalement inconnues telles que l’avenir (précognition) ou le caché (cryptesthésie). Elle utilise des arts divinatoires : procédés spontanés ou codifiés (oniromancie, lécanomancie), traditionnels (géomancie, Ifa, Yi Jing) ou modernes (runes), populaires (cartomancie) ou savants (astrologie indienne), partie intégrante d’une religion (oracle grec, rishi).

[5] En Avril-mai 411 av.jc a lieu la révolution oligarchique à Athènes. Elle joue sur la lassitude de la guerre des classes sociales les plus riches écrasées de charges financières. Alcibiade vient de se brouiller avec les Spartiates (il aurait séduit la femme du roi Agis II) et se réfugie auprès de Tissapherne. Il souhaite rentrer à Athènes et fait promettre aux hétairies, hostiles au régime démocratique, de l’or (perse) et la paix en échange du renversement du régime. Les hétairies passent aussitôt à l’action, bien que Tissapherne se dérobe et n’envoie pas l’or promis. L’Ecclésia vote sous la terreur l’abolition des principales dispositions fondatrices de la Démocratie. L’essentiel du pouvoir est confié en juin à un corps de 5000 citoyens (les Cinq-Mille) qu’un conseil de 400 oligarques (les Quatre-Cents) est chargé de choisir.

[6] Le dème ou demos est une circonscription administrative de base instaurée lors de la révolution isonomique de Clisthène qui eut lieu de 508 à 507 av jc à Athènes. Le dème est directement lié à la marche d’Athènes vers la démocratie. Ses habitants sont appelés les démotes.

[7] Rhamnonte est un site archéologique situé sur la côte de l’Attique près de Marathon, en Grèce. Le site conserve les vestiges d’une forteresse et de plusieurs sanctuaires de l’époque classique.

[8] Les Pisistratides sont les descendants du tyran d’Athènes, Pisistrate (fin du 6ème siècle av. jc). Au sens restreint, le terme désigne les deux fils de celui-ci, Hippias et Hipparque, qui héritent conjointement du gouvernement d’Athènes à la mort de leur père en 527 av. jc.

[9] Un logographe est un historien chroniqueur antérieur à Hérodote, surnommé « le père de l’histoire ». Thucydide applique le terme à tous ceux qui sont antérieurs à Hérodote et à Hérodote lui-même.

[10] Le stoïcisme est une école philosophique de la Grèce antique, fondée par Zénon de Cition en 301 av. jc.

[11] Le cyrénaïsme est une école de philosophie grecque du 4ème siècle av. jc, fondée par Aristippe de Cyrène, un des « Socratiques », c’est-à-dire un des disciples de Socrate. L’école est surtout associée à l’hédonisme en éthique. L’école demeura surtout dans la cité de Cyrène, en Libye, ce qui explique qu’on les appelle Cyrénaïques (ou Cyrénéens).