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Mutinerie à bord du Bounty

dimanche 21 avril 2024, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 26 juillet 2019).

Mutinerie à bord du Bounty

Le 28 avril 1789, une mutinerie se produit à bord du Bounty [1]. Elle illustre la dureté avec laquelle l’Angleterre de cette époque exerce son règne sur les mers. 2 ans plus tôt, en décembre 1787, la goélette britannique avait quitté le port anglais de Spithead [2] avec 44 hommes d’équipage en vue de gagner Tahiti [3], dans le Pacifique [4], puis les Antilles [5]. L’objectif du voyage était de cueillir des plants d’arbres à pain [6] à Tahiti et de les amener à la Jamaïque [7], où les Britanniques comptaient les cultiver en vue de nourrir à bon compte les esclaves des plantations. La mission fut confiée à un capitaine de 30 ans, William Bligh .

Il avait déjà effectué plusieurs voyages transatlantiques et participé au 2ème voyage du grand explorateur James Cook . Pour les besoins de la mission, il recruta des marins volontaires de préférence à des repris de justice ou à des hommes raflés de force dans les ports selon une triste pratique alors courante dans la marine britannique. Il offre à Christian Fletcher, un ami avec qui il a déjà accompli 3 traversées, la fonction de quartier-maître.

La goélette prend la route de l’ouest en vue de contourner le continent américain par le cap Horn [8]. Mais plusieurs semaines de tempêtes convainquent le capitaine de changer d’itinéraire et il prend la route du cap de Bonne Espérance [9], au sud de l’Afrique. Là, nouveau désappointement, l’absence de vent oblige l’équipage à remorquer la goélette à la rame ! Les dures conditions de la traversée et les manquements à la discipline conduisent le capitaine à brutaliser l’équipage.

Enfin, après 10 mois de dure traversée, le Bounty arrive à Tahiti où il est chaleureusement accueilli par les habitants. Après quelques semaines passées à cueillir les fameux plants d’arbres à pain, n’en est que plus pénible. Sitôt en haute mer, William Bligh restaure la discipline habituelle aux navires britanniques. Mais celle-ci n’est plus guère supportée par les marins volontaires. Elle suscite la révolte d’une partie d’entre eux, avec le soutien de Christian Fletcher, nostalgique des belles Tahitiennes.

Le capitaine Bligh et 18 fidèles sont abandonnés sur une chaloupe de 5 mètres en plein océan Pacifique. Au prix d’une très sévère discipline et grâce à un rationnement extrême de la nourriture, ils réussissent à rejoindre l’île de Timor [10] après un périple de 5.000 kilomètres. William Bligh n’a rien de plus pressé que d’affréter une goélette et de regagner Londres en vue de réclamer un châtiment exemplaire pour les mutins.

Ces derniers, quant à eux, se sont empressés de jeter à la mer les plants d’arbres à pain et sont revenus à Tahiti. Ils ont aidé le roi Pomaré 1er à asseoir son autorité sur l’île. Pour échapper à la traque de la justice anglaise, quelques mutins, dont Christian Fletcher, décident de quitter l’île paradisiaque. Ils ré-embarquent sur le Bounty en compagnie de belles Tahitiennes, de 6 Tahitiens et d’un serviteur noir. Le projet des mutins est de refaire leur vie sur Pitcairn [11]. Christian Fletcher a soin de faire brûler le navire sitôt sur l’île.

Mais l’idylle tourne au cauchemar. Les mutins de Pitcairn massacrent les Tahitiens mâles puis, l’un d’eux ayant fabriqué un alambic de fortune, ils se mettent à l’alcool et commencent à s’entre-tuer. Il ne reste qu’un survivant lorsque des Américains redécouvrent l’îlot en 1808. Celui-ci, surnommé John Adams, a eu la satisfaction de combler sa solitude au milieu d’une dizaine de Tahitiennes et d’une vingtaine d’enfants !

Ayant récupéré une Bible et un livre de prières dans les débris du Bounty, il a entrepris consciencieusement d’éduquer la jeune génération. L’ancien mutin est mort en 1829 à 65 ans, en chef respecté de la petite communauté métisse. Celle-ci compte encore quelques dizaines de personnes qui vivent pieusement et cultivent le souvenir du Bounty.

Quant aux mutins restés à Tahiti, ils ont été retrouvés par le commandant Edward lancé à leur poursuite. Livrés à la justice anglaise par le roi Pomaré, ils passent à Londres devant une cour martiale présidée par Lord Hood . Trois seulement sont condamnés à mort et pendus. Le récit de leur tragédie émeut l’opinion britannique et oblige l’Amirauté à humaniser la discipline à bord de ses navires.

Le capitaine William Bligh, désormais surnommé « Bounty’s Bastard », est de son côté nommé vice-amiral et gouverneur des Nouvelles-Galles du Sud [12], en Australie.

Ayant imposé une discipline trop rigide à ses soldats, il doit faire face à une nouvelle mutinerie qui lui vaut cette fois-ci d’être lui-même déposé et condamné à 2 ans de prison ! Libéré, il s’établit à Londres où il meurt d’un cancer en 1817.

P.-S.

Source : Monique Hermite Historia mensuel - 01/01/2006 - N° 709, Hérodote, Dictionnaire le Petit mourre, encyclopédie Imago Mundi, Wikipédia, Louis XV de François Bluche, les hommes de la liberté tome 1 à 5 de Claude Manceron édition Laffont, Alain Frerejean, Olivier Coquart, Anne Bernet, Etienne Taillemitte, Yves Bruley, Jean-Christian Petitfils Historia thématique - 01/01/2006 - N° 99 - Extrait de la préfecture de Police édité en juin 2000 sous l’Egide du Ministère de l’Intérieur et des services de la préfecture de Police de Paris-La révolution française tome 1 à 5 de Michel Vovelle Edition Messidor/livre club Diderot. H. Léonardon L’Histoire du 18ème siècle Source : Imago mundi Texte de Léonardon/ article de Fabienne Manière/herodote/ evenement/17720428/dossier 414

Notes

[1] Le Bounty était une unité de la Royal Navy britannique. Cette frégate est entrée dans l’histoire en raison de la mutinerie d’une partie de son équipage le 28 avril 1789.

[2] Spithead est une partie du Solent, le bras de mer qui sépare l’île de Wight du reste de l’Angleterre, dans le comté d’Hampshire, à proximité de Portsmouth. Protégée des vents, cette zone est souvent utilisée pour ancrer des navires de la Royal Navy.

[3] Tahiti est une île de la Polynésie française située dans le Sud de l’océan Pacifique. Elle fait partie du groupe des îles du Vent et de l’archipel de la Société. Cette île haute et montagneuse, d’origine volcanique, est entourée d’un récif de corail. L’île est composée de deux parties, Tahiti nui, la plus importante, et Tahiti iti également appelée la Presqu’île, reliées entre elles par l’isthme de Taravao. Avec 1 042 km2, Tahiti est à la fois la plus grande et la plus peuplée des îles de la Polynésie française. Sa surface est comparable à celle de la Martinique ou du Val-d’Oise. L’île concentre l’essentiel des activités économiques de l’archipel polynésien. La ville de Papeete, située sur la côte nord-ouest de l’île, est la capitale de la Polynésie française et en abrite toutes les institutions politiques.

[4] L’océan Pacifique est l’océan le plus vaste du globe terrestre. Le Pacifique fait partie de l’océan mondial et il comporte deux océans : le Pacifique Nord et le Pacifique Sud. Le Pacifique s’étend sur une surface de 165 250 000 km2, soit environ un tiers de la surface totale de la Terre. Sa superficie est également supérieure à celle de l’ensemble des terres émergées de la planète. Il comprend la Polynésie et la Micronésie dans leur totalité. Avec ses mers bordières, il baigne la Mélanésie tandis que ses propres eaux bordent des îles et archipels qui font traditionnellement partie de l’Asie insulaire (Honshū, Hokkaidō et les Kouriles). Plusieurs de ses mers bordières baignent l’Insulinde pendant que d’autres espaces maritimes, comme la mer de Tasman, la mer de Corail et l’océan Indien, bordent l’Australasie.

[5] Les Antilles (ou Caraïbe insulaire) sont un vaste archipel réparti entre la mer des Caraïbes (Grandes Antilles, Petites Antilles et îles Caïmans), le golfe du Mexique (côte nord-ouest de Cuba) et l’océan Atlantique (îles Lucayes, soit l’ensemble regroupant les Bahamas et les Îles Turks-et-Caïcos). L’archipel forme un arc de cercle de plus de 4 500 km de long s’étendant depuis le golfe du Mexique (Cuba) jusqu’au large du Venezuela (Curaçao et Aruba). Elles représentent 235 830 km2 de terre émergée, pour 42 millions d’habitants. La population, de provenance diverse, est mixte. Composée majoritairement de personnes d’origine africaine et de métis comme en Jamaïque ou en Haïti, elle comprend aussi des individus d’origine européenne et asiatique (notamment du sous-continent indien et du Moyen-Orient). Quelques rares survivants des premiers occupants de ces régions, les Amérindiens, y sont encore présents, comme les Caraïbes à l’île de la Dominique.

[6] L’arbre à pain (Artocarpus altilis) est un arbre de la famille des Moracées, originaire d’Océanie, domestiqué dans cette région pour son fruit comestible et aujourd’hui largement répandu sous les tropiques. C’est une espèce proche du jacquier, Artocarpus heterophyllus. C’est une espèce très variable dont les populations d’Océanie ont sélectionné des centaines de cultivars. Son fruit est le fruit à pain, parfois simplement appelé le pain, ou même brioche

[7] La Jamaïque est un État insulaire des Caraïbes. Elle constitue un État souverain indépendant depuis 1962, membre du Commonwealth, et faisant partie des Antilles, situé au sud de Cuba et à l’ouest de l’Île Hispaniola, territoire de la République d’Haïti et de la République dominicaine.

[8] Le cap Horn est un cap situé à l’extrémité sud de l’île Horn, dans la partie chilienne de l’archipel de la Terre de Feu. Ce point est généralement considéré comme étant le plus austral de l’Amérique du Sud. Le cap Horn est également le plus au sud des grands caps et marque la limite nord du passage de Drake. Pendant de nombreuses années, il a été un point de passage crucial des routes commerciales entre l’Europe, l’Amérique et l’Asie. Elles étaient empruntées par les voiliers pour transporter les marchandises tout autour du globe, et ce bien que les eaux océaniques autour du cap présentent de nombreux dangers : tempêtes fortes et fréquentes avec une mer très grosse, courant circumpolaire antarctique et présence possible d’icebergs voire de vagues scélérates.

[9] Le cap de Bonne-Espérance est un promontoire rocheux sur la côte atlantique de l’Afrique du Sud, à l’extrémité de la péninsule du Cap située au sud de la ville du Cap et qui ferme à l’ouest la False Bay. Le cap de Bonne-Espérance fut navigué par la première fois par les Portugais en janvier 1488. Lors de son exploration par l’ouest le long de la côte africaine, la flotte commandée par Bartolomeu Dias est emportée vers le sud.

[10] Timor est une île de l’archipel indonésien, dans l’est des petites îles de la Sonde. Elle est bordée à l’ouest par la mer de Savu, au nord-est par la mer de Banda, et au sud-est par la mer de Timor. La moitié orientale de Timor forme la république du Timor oriental, tandis que la moitié occidentale fait partie de la province indonésienne des petites îles de la Sonde orientales couvrant quatre kabupaten (Belu, Kupang, Timor central Sud et Timor central Nord), ainsi qu’une kota (Kupang).

[11] un îlot inhabité et improprement situé sur les cartes, donc difficile à trouver sauf par hasard

[12] La Nouvelle-Galles du Sud, est le plus peuplé des États australiens. Sa capitale est Sydney, ville la plus peuplée du pays. Elle est située dans le sud-est de l’île principale et partage ses frontières avec le Queensland au nord, avec l’Australie-Méridionale à l’ouest et avec le Victoria au sud. Elle est bordée par la mer de Tasman à l’est. La Nouvelle-Galles du Sud encercle le Territoire de la capitale australienne, où se trouve la capitale de l’Australie, Canberra, ainsi que le Territoire de la baie de Jervis, situé au sud-est et adjacent à la mer de Tasman. Historiquement, elle est le premier État d’Australie. Créé en 1788, il couvre à l’origine la plus grande partie du continent australien ainsi que la Nouvelle-Zélande, les îles Lord Howe et Norfolk.