Étienne naît à Constantinople dans une famille modeste et pieuse, d’un père, nommé Grégoire, travaillant de ses mains. Il a deux sœurs aînées. Il suit l’école élémentaire à partir de l’âge de six ans, et y étudie les Saintes Écritures.
Arrivé dans sa 16ème année, Étienne est conduit par ses parents au mont Saint-Auxence [1] et présenté à l’ermite Jean, successeur d’Auxence, qui, depuis son ermitage, qui est une grotte, dirige un monastère d’hommes situé à proximité. Jean tonsure Étienne et le revêt de l’habit monastique, et le jeune homme est admis dans le monastère. Il se met au service de l’ermite pour le nécessaire, transportant l’eau de fort loin.
À la mort de son père, il se rend à Constantinople, vend tous les biens de la famille, et ramène avec lui sa mère et une de ses sœurs, appelée Théodote, l’autre étant déjà entrée dans le monastère urbain Tou Monokioniou. Il fait bénir les deux femmes par l’ermite Jean, et les fait entrer dans le monastère féminin des Trikhinaréai, fondé par Auxence à une distance d’un mille de son ermitage.
Quand l’ascète Jean meurt, Étienne est auprès de lui. C’est lui qui frappe le simandre [2] pour faire connaître la dormition du père, attirant ainsi un chœur d’ascètes des monts alentour pour la célébration des funérailles. Il est alors dans sa 31ème année, et prend directement la succession de Jean dans son ermitage
Sa réputation de sainteté se répandant, il attire bientôt des disciples qui le supplient de les laisser habiter avec lui. Il fait alors construire un autre monastère près du sommet du mont, sous le vocable de saint Auxence. Mais dans sa 42ème année, il décide de s’imposer une réclusion plus rigoureuse. Abandonnant la gestion du couvent Saint-Auxence à Marinos, le premier disciple qui s’est présenté à lui, il s’aménage une étroite cellule, creusée dans le sol, dans un lieu inaccessible de l’autre côté du sommet. Il reçoit alors la visite d’habitants de Constantinople venant solliciter sa bénédiction, dont une riche veuve qui retourne vendre tous ses biens, rapporte une partie de l’argent à Étienne qui le confie à Marinos pour le dépenser au profit des paysans du voisinage, et prend l’habit monastique des mains d’Étienne dans le monastère des Trikhinaréai.
Des moines de la région de Constantinople et de Bithynie [3] s’assemblent aussi autour de lui en opposition à la politique iconoclaste [4] menée par l’empereur Constantin V, et notamment aux décrets du concile de Hiéreia [5] en 754.
Il leur recommande l’exil en Tauride [6], en Épire [7], en Italie du sud, dans les régions méridionales de l’Asie Mineure, à Chypre et au Liban. Il leur rappelle que le pape et les patriarches d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem rejettent le dogme infâme des brûleurs d’icônes, ainsi que Jean Damascène mort en 749 et condamné à Hiéreia.
L’empereur envoie un patrice du nom de Calliste auprès d’Étienne pour le faire souscrire aux décrets du concile. L’ermite refuse en répondant que les décrets de ce pseudo-concile sont hérétiques. Calliste ayant rapporté ces propos au souverain, celui-ci, furieux, le renvoie avec une troupe de soldats, qui arrachent l’ermite à sa grotte et l’enferment avec d’autres moines dans le tombeau de saint Auxence. Les soldats, impressionnés par l’ascète, n’exécutent d’ailleurs leurs ordres qu’à contrecœur.
Calliste parvient à corrompre un des disciples d’Étienne, dénommé Serge. Celui-ci se rend auprès du directeur du fisc du golfe de Nicomédie [8], qui porte le surnom d’Aulikalamos, et tous deux rédigent un rapport diffamatoire sur Étienne, l’accusant de tenir des propos injurieux contre l’empereur, d’organiser des complots, et même d’avoir une liaison avec la riche veuve mentionnée plus haut, appelée Anne en religion.
Le rapport est expédié à l’empereur, qui se trouve alors en campagne militaire contre les Bulgares. Il ordonne au patrice Anthès, son représentant à Constantinople, de procéder à l’arrestation de la sœur Anne aux Trikhinaréai et de la lui amener dans son camp. Comme Constantin, sûr de la véracité du rapport, exige d’elle qu’elle avoue tout, elle nie avec détermination, et le souverain ordonne qu’elle soit conduite à Constantinople et incarcérée dans la prison palatiale de la Phialê.
Un dignitaire de la cour nommé Georges se rend au mont Saint-Auxence et se fait tonsurer et admettre dans la communauté des moines par Étienne. L’empereur se plaint en public, à l’hippodrome, que les moines lui enlèvent ses proches serviteurs. Trois jours après sa tonsure, Georges s’enfuit du monastère et revient au Palais. Un nouveau rassemblement populaire est organisé à l’hippodrome et Georges est solennellement dépouillé de son habit monastique, purifié et revêtu d’un uniforme militaire.
Une troupe armée se rend au mont Saint-Auxence, incendie le monastère et l’église, disperse les disciples d’Étienne, porte l’ermite, incapable de marcher, jusqu’à une barque sur la côte, et le conduit au monastère Ta Philippikou, à Chrysopolis [9], où il est enfermé. Ensuite l’empereur promulgue un édit stipulant que tout homme pris à s’approcher de la montagne d’Auxence subira la peine capitale par le glaive.
Une délégation est envoyée à Étienne porteuse de l’horos du concile de Hiéreia et chargée de le lui faire signer. Elle est composée notamment de Théodose, métropolite [10] d’Éphèse [11] et fils de l’ex-empereur Tibère III, de Constantin, métropolite de Nicomédie, de Sisinnios, métropolite de Pergé [12], de Basile, métropolite d’Antioche de Pisidie [13], et de dignitaires laïcs comme le patrice Calliste. Le patriarche Constantin II de Constantinople a refusé de s’y associer, par peur de perdre la face devant Étienne. Après un long débat avec l’ermite, les délégués reviennent bredouilles.
L’empereur, furieux, prononce le bannissement d’Étienne sur l’île de Proconnèse [14]. Le saint quitte le monastère Ta Philippikou, où il est resté dix-sept jours, après avoir guéri l’higoumène [15] d’une forte fièvre. Débarqué sur l’île, il y repère une grotte dans la falaise méridionale et s’y installe, se nourrissant de plantes sauvages. Il est bientôt rejoint par tous ses anciens disciples, sauf deux Serge, corrompu par Calliste, et Étienne, entraîné par Serge et récompensé de sa défection par un poste dans le clergé du palais impérial des Sophianæ, à Chrysopolis, également par sa mère et sa sœur, qui ont quitté le monastère des Trikhinaréai.
La mère, puis la sœur, d’Étienne meurent sur l’île à une semaine d’intervalle, vers la fin de 764. Exaspéré de voir que le saint, même relégué sur l’île, continue de faire des adeptes, l’empereur le fait transférer à Constantinople, dans la prison de la Phialê. Quelques jours plus tard, il l’interroge lui-même sur la terrasse du Phare, dans le Palais. Constantin niant que piétiner une icône, c’est piétiner le Christ représenté dessus, Étienne prend alors une pièce de monnaie portant l’effigie de l’empereur, la jette par terre et la foule aux pieds. Les courtisans voulant se saisir de lui et le précipiter du haut de la terrasse, le souverain les en empêche. L’ermite est emmené enchaîné dans la prison du prétoire, siège de l’éparque [16], afin d’être légalement jugé pour outrage à l’empereur.