Bienvenue sur mon site historique. Bon surf

L’histoire pour le plaisir

Accueil du site > Histoire du 16ème siècle > Une Europe bouleversée par les religions 3ème partie

Une Europe bouleversée par les religions 3ème partie

vendredi 22 février 2013

Une Europe bouleversée par les religions 3ème partie

Un réformateur

Un autre personnage, à l’opposé de Michel Servet, fidèle ami et disciple de Jean Calvin, est Pierre Viret. Né à Orbe, prés de Lausanne, de milieu aisé, il est destiné à la prêtrise et, à partir de 1528, fait ses études à Paris.

Travailleur et exigeant, confronté à une diversité de pensée, il prend la décision de quitter l’Église. De retour à Lausanne en 1531, après avoir entendu une prédication de Guillaume Farel, son adhésion à la Réforme est acquise. Il voyage, prêche à Neuchâtel, Payerne, se rend à Genève où il rencontre souvent Calvin qui lui fait confiance et accepte que Viret le remplace lors de ses absences, notamment lorsqu’il sera à Strasbourg. Puis il s’installe à Lausanne, les bernois le trouvent trop rigoureux et l’obligent à partir. Il retourne donc à Genève où il sera mieux apprécié et où il sera d’ailleurs reçu “bourgeois”. Alors qu’il est à Genève, Pierre Viret est invité à se rendre dans le sud de la France. Il quitte Genève et arrive à Nîmes en octobre puis il est à Montpellier en janvier 1562. En mai de cette même année, il se rend à Lyon où il va séjourner plusieurs mois.1561,1565 sont en France les années difficiles où les conflits entre les deux religions s’aggravent, années ponctuées par le colloque de Poissy en 1561, les premiers troubles des premières guerres de religion, les premiers édits qui seront des trêves entre les guerres. Il s’agit alors pour Viret de faire preuve à la fois d’autorité et de prudence dans un royaume où seule le catholicisme fait loi, dans ses déplacements lorsqu’il prêchera et étant, en outre, dans un mauvais état de santé quasi constant. En 1563-1564, il est à Lyon mais en est expulsé sur ordre du roi Charles IX. Ce dernier s’y trouve en effet lors du grand tour du royaume que sa mère, Catherine de Médicis, avait organisé, pour, d’une part, présenter le jeune roi à ses sujets, et d’autre part rencontrer nobles, catholiques, protestants. Viret se rend donc en Dauphiné, puis de nouveau à Orange en 1565 et encore à Montpellier pour consulter des médecins, mais il en est également expulsé.

C’est alors qu’il répond à l’invitation de Jeanne d’Albret qui l’avait rencontré à Lyon et qui souhaitait un pasteur à Pau. Pierre Viret arrive donc en Béarn en mars 1567 avec son épouse Sébastienne Laharpe et leur fille. La famille s’installe à Pau qu’elle ne quittera plus, entourée de respect et d’affection, et où le père retrouve d’anciens étudiants de l’Académie de Genève, envoyés par Calvin. Pierre Viret aura désormais une existence matériellement assurée, une situation privilégiée, jusqu’à ce que la guerre rattrape son histoire. Catholiques et protestants se déchirent en Béarn. En avril 1569, Pau se rend, Viret est arrêté, emprisonné, et tout le temps de sa détention qui durera 2 ans, il saura réconforter ses compagnons d’infortune. Il fait partie des otages qui ne seront relâchés que lorsque Pau sera libéré par les troupes protestantes. Début 1571, Pierre Viret rédige son testament en béarnais et le malade toujours plus affaibli meurt en avril de cette année. Il laisse derrière lui une tradition de courage, de travail et de pondération mêlée de belle énergie. Pierre Viret a été le modérateur de synodes béarnais de 1567 à 1570. Particulièrement attaché à la discipline ecclésiastique, il est attentif à la prédication et à la communion pour laquelle il partage l’idée de l’excommunication pour le respect de la Parole de Dieu et du ministère. Les pasteurs d’ailleurs, à Pau comme à Genève, sont surveillés et doivent présenter toute garantie de moralité. Viret est également attaché aux questions de langues. Il a encouragé la traduction des psaumes en béarnais et celle du Nouveau Testament en basque. Il a su comprendre l’importance de l’identité régionale, tout en restant pasteur du plus grand nombre, et proche de Jeanne d’Albret.

Ces mêmes doctrines vont être encore soutenues et développées par un autre personnage, un autre ami de Jean Calvin, Théodore de Bèze. De son vrai nom Dieudonné de Bèze, puis Deodatus, puis Théodore, il naît à Vézelay. Ses premières études se font à Orléans et Paris où le jeune homme reçoit un enseignement humaniste ou il s’avère être un futur homme de lettres, poète et qui s’intéresse aux langues.

Mais, touché par une épidémie de peste, il frôle la mort, remet en question son savoir et, déjà sensibilisé aux idées de la Réforme, au sortir de l’épreuve physique et morale, décide de se convertir. Condamné par le Parlement de Paris en 1548, il fuit vers la Suisse. D’abord appelé à Lausanne par Viret, il va enseigner le grec à l’Académie qui vient de s’ouvrir.

Puis il est reçu à Genève par Calvin en 1558, après avoir du quitter Lausanne à la suite du conflit entre cette ville et Berne. Il est alors nommé professeur de théologie et sera ensuite recteur de l’Académie fondée par Calvin. Mais les troubles religieux grondent en France. En 1561 a lieu le colloque de Poissy et Calvin, qui connaît les qualités de débatteur de son ami, l’y envoie.

Là tous sont réunis, catholiques et protestants, mais ce colloque, d’où on espère sortir dans le calme, est un échec. Aucun compromis n’a pu être trouvé, et notamment lorsque Théodore de Bèze soutient fortement la doctrine sur la communion. Ce colloque se termine comme il a commencé, dans le désaccord et la menace de guerre. Un an plus tard en effet, c’est la guerre, la première de 8 guerres qui ensanglanteront le royaume de France. Guerres de religion, guerres civiles, où se trouve impliqué Théodore de Bèze qui sera aumônier dans l’armée du prince de Condé, Louis de Bourbon.

En 1564, Jean Calvin meurt et Théodore de Bèze rejoint Genève. Il sera dés lors le fidèle successeur de son maître, attentif à voir les Ordonnances ecclésiastiques toujours appliquées, à veiller au bon fonctionnement de l’Académie, et sera le Modérateur de la Compagnie des pasteurs jusqu’en 1570. En France, les guerres se poursuivent entrecoupées de courtes trêves pendant lesquelles on tente de négocier. En vain. Comme en 1572, lorsque Catherine de Médicis exige l’union de sa fille Marguerite de Valois avec Henri de Navarre, union que refuse Jeanne d’Albret, contrainte d’accepter mais qu’elle ne verra pas car elle meurt le 9 juin 1572 et le mariage a lieu le 18 août. Une semaine plus tard, le 25 août, a lieu le massacre de la Saint Barthélemy, dont la première victime est l’amiral de Coligny. De Genève, Théodore de Bèze, qui l’a appris, publie “Du droit des magistrats sur leurs sujets” où il préconise le droit de résister contre la tyrannie. Car le successeur de Calvin, outre ses qualités de professeur et de théologien est également l’auteur de nombreux ouvrages. Après la poésie, il s’intéresse aux psaumes. Il poursuit l’œuvre de Clément Marot après sa mort en 1544, la transposition des psaumes en rimes françaises, qui sera “Le psautier huguenot”. Puis ses “Annotations du Nouveau Testament” feront école, comme sa “Tabula praedestinationis”, où il défend la doctrine de la prédestination de Calvin. Théodore de Bèze est aussi historien, avec une tragédie tirée de l’Ancien Testament en 1550, “Abraham sacrifiant” et surtout son “Histoire ecclésiastique des Églises réformées du royaume de France”. Enfin, il était conscient de l’importance d’une volonté politique pour maintenir la paix entre catholiques et protestants. Très âgé et affaibli, en 1601, il avait tenu à rencontrer Henri IV prés de Genève, où le roi était alors en campagne, pour s’assurer que l’Édit de Nantes serait maintenu et respecté.

Ailleurs en Europe le calvinisme aura des répercussions. En Angleterre notamment, John Knox en sera l’artisan. Le réformateur, né en Écosse à Haddington, était sans doute de milieu modeste et il fréquente d’abord l’école de sa ville natale. Il savait le latin et le français, quelque peu l’hébreu et le grec, et devait être ordonné prêtre. Dans les années 1540, il est saisi de doutes quant à l’Église catholique qu’il quitte en 1545. Dés cette date naîtront des conflits entre John Knox et l’Angleterre où vont régner Édouard VI et dont Knox sera l’aumônier, puis Marie la catholique, puis Elizabeth 1ère. Dans la période la plus dangereuse pour les réformés anglais, John Knox est à Genève, de 1530 à 1558, où il s’imprègne des doctrines de Calvin qu’il s’efforcera d’introduire en Écosse. C’est à Genève que naîtront ses deux fils de son mariage avec Marjorie Bowes. Il rentre en Écosse en 1559 et n’aura de cesse d’implanter les doctrines calvinistes. Il impose la Confession de foi, l’autorité du pape est officiellement abolie, la messe est interdite. John Knox publie également le “Livre de la discipline” largement inspiré des Ordonnances de Genève, tout empreint de sévérité. Cette rudesse est d’ailleurs reprochée au réformateur écossais dont la virulence peut choquer. En 1560 il prépare la publication de la “Bible de Genève” qui sera à la base de la Réforme anglophone et qui sera rééditée de nombreuses fois jusqu’en 1611. En 1564, veuf, il se remarie avec Margaret Stewart et cette nouvelle union comptera trois filles.

Même dans la maladie, qui le laisse presque handicapé, après une apoplexie en 1569, Knox reste véhément dans ses écrits et ses prédications. L’annonce de la Saint Barthélemy dés les derniers jours d’août 1572 sera l’occasion de discours virulents contre “le cruel assassin et traître roi de France”. Certains applaudiront à ce ton quand d’autres le regretteront, tous conscients que le réformateur avait souvent risqué sa vie dans la droiture et l’honnêteté.

Jean Calvin a donc été suivi et ses doctrines adoptées par ses disciples et la majorité des réformés francophones. Cependant sa querelle et son attitude envers Michel Servet ont eu des conséquences. En Europe de l’Est aujourd’hui, Lituanie, Pologne, Roumanie, Hongrie, le conflit Calvin Servet a nourri la conception antitrinitaire. En effet précédemment Vaudois et Hussites s’étaient réfugiés en Pologne et l’homme de la Réforme dans ce pays est Jean Laski. Prêtre orthodoxe humaniste, il quitte l’Église en 1534 mais doit émigrer à Londres puis aux Pays-Bas, puis en Allemagne où il restera environ 20 ans attaché aux leçons de Luther et de la nouvelle Réforme. En Pologne la Réforme s’implante assez vite mais reste le fait de lettrés et de nobles alors que le peuple et les paysans ne se sentent pas concernés par ces besoins de réformes et iront jusqu’à piller les temples.

Parallèlement à la Réforme officielle va se développer l’unitarisme, la conception antitrinitaire propagée par les voyageurs suisses notamment.

Le martyr de Michel Servet y est rapporté et, dés 1556, au synode de Secemin, Pierre de Goniatz dira : “La Trinité n’existe pas, ce n’est qu’une invention récente. Le credo d’Athanase est à rejeter, c’est une affabulation.

Dieu le Père est le seul Dieu, en dehors de lui il n’y en a aucun. Christ est le serviteur du Père”. Peu après Pierre de Goniatz publie “Du Fils de Dieu un homme, Christ Jésus”, polémique qui signe la rupture avec les calvinistes.

Ainsi dans les années 1565 se forme “l’Ecclesia minor”, la plus petite Église de chrétiens antitrinitaires. Les membres de “l’Ecclesia minor” s’appellent entre eux Frères ou Frères polonais, ils ont leurs propres synodes, et sont menacés de mort ou d’expulsion par les protestants traditionnels. Pourtant à Rakow sera publié le “Catéchisme de Rakow” en 1569, qui sera traduit en allemand en 1608, en latin en 1609, en anglais en 1652 puis réédité en Hollande en 1884. “L’Ecclesia minor” sera interdite en 1658 et on donnera 2 ans aux Frères pour rentrer dans l’Eglise catholique ou s’exiler. Toujours en Pologne les Socins auront aussi une influence considérable, Lelio et Fausto Socin. Lelio Socin, né à Sienne, se consacre d’abord à des études juridiques, tout en s’attachant à la lecture de la Bible et à la théologie.

D’esprit curieux, il étudie et émet des critiques face à certains dogmes catholiques, notamment celui de la Trinité. Dés 1544 Lelio Socin voyage en Europe. France, Angleterre, Suisse où il rencontre Jean Calvin à Genève. Ce dernier est en désaccord avec les idées de Lelio Socin, en particulier ses critiques du concept de Trinité ou de celui de la prédestination. Lelio Socin gagne ensuite l’Allemagne et se lie d’amitié avec Melanchton, qui a succédé à Luther. Puis c’est la Pologne, alors ouverte à toute idée réformée, que Lelio Socin traverse avant de revenir à Zurich, via l’Italie où il est inquiété par l’Inquisition. Il meurt à Zurich en 1562.

Fausto Socin neveu du précédent est né à Sienne et fait des études de droit parallèlement à la théologie. Il réside à Lyon de 1539 à 1562, puis se rend à Zurich. Il publie bientôt anonymement “L’explication des premiers chapitres de l’Évangile de Jean” où ses idées antitrinitaires sont déjà bien présentes. Il est de retour en Italie jusqu’en 1574 puis en Pologne. Il quitte Cracovie en 1583, mais reste en Pologne où il se marie et réside sous la protection d’un seigneur polonais. Il meurt dans ce pays d’adoption en 1604.

Enfin, en Transylvanie, le réformateur hongrois Ferencz David laisse une marque profonde. Né à Cluj, formé à Wittenberg, David est d’abord luthérien, il se rallie ensuite au calvinisme, pour choisir définitivement l’unitarisme. Il écrira “Dieu m’est témoin que ce que j’ai appris et enseigné ne vient ni du Coran, ni du Talmud, ni de Servet, mais de la Parole du Dieu vivant. Mon enseignement se fonde uniquement sur ce que contient la Bible”. Contre la violence, il dira aussi en 1568 à Torda, à la Diète de Transylvanie : “Nous décrétons que tout prédicateur est libre de prêcher et d’expliquer l’Évangile tel qu’il le comprend. Aucun prédicateur ne doit être inquiété et sanctionné par les autorités civiles ou ecclésiastiques à cause de son enseignement. Personne ne doit être privé de travail ni emprisonné ni puni de quelque manière que ce soit à cause de ses opinions religieuses. Car la foi est un don de Dieu et elle vient de l’écoute de la Parole de Dieu”.

Mais en 1571 meurt le roi Sigismond qui soutenait David. Dés lors, ce dernier est menacé, arrêté, jugé. Les calvinistes réclament la peine de mort, mais la condamnation sera l’emprisonnement à perpétuité. Enfermé au château de Déva, David meurt en 1579, sans avoir pu laisser beaucoup de traces, écrites ou orales, sur ses dernières années.

Et cependant l’unitarisme a continué à se développer en Hongrie, où, toujours minoritaire, il n’en est pas moins resté présent.

La Réforme, après l’humanisme, et avec les nouveaux savoirs intellectuels ou techniques, est un des tournants entre le Moyen-âge et l’époque moderne. Le consensus politique et religieux ancien n’est plus et un dualisme existe désormais entre les deux domaines. L’articulation se fait de plus en plus inévitable, cette articulation toujours existante était acceptée par tous, mais elle devra dés lors être imposée et donc induira des conflits avivés par l’aspect religieux. Les deux religions, catholique et protestante, seront indissolublement liées, en miroir, ou en contraste, ou en guerre. Aux dogmes intouchables on répond doctrines à toujours repenser, aux certitudes on rétorque interrogations et réflexions, face à la tradition on déclare la Réforme “semper reformanda”, à l’Église catholique on oppose les Églises réformées, et enfin l’autorité cléricale est remplacée par le sacerdoce universel .

Au 16ème siècle, l’Europe donc, est divisée et le restera, par les religions, celles-ci induisant, avec une démarche intellectuelle et une philosophie différentes, une économie et une société tout autant différentes. Le nord de l’Europe se voit en effet acquis au luthéranisme, l’est européen est en partie favorable à la Réforme également, tandis que le sud reste latin et catholique. La France, en tenaille, doit choisir. François 1er le fait en 1534. Il faut attendre Henri IV qui, par son abjuration toute politique de 1593, pourra signer l’Édit de Nantes en 1598. Seul édit de paix crédible et réel qui ne durera que 12 ans jusqu’à l’assassinat du roi. Dans le domaine religieux, la Réforme donnera naissance à la Contre Réforme catholique. L’Église et les fidèles ne sont restés ni indifférents ni seulement hostiles à la nouvelle Église qui s’imposait, ils se sont engagés dans une lutte intérieure et extérieure. Intérieure pour être mieux compris et mieux comprendre hommes, pensées et événements. Extérieure en diffusant un savoir mieux adapté et recentré sur l’essentiel du catholicisme. Paris et Louvain, par leurs universités, vont exceller dans cet effort. Érasme s’opposera à Luther, John Fisher en Angleterre paiera de sa vie son opposition à Henri VIII dans sa rupture avec Rome. En Espagne, Ignace de Loyola, blessé en 1521, met à profit son immobilité pour choisir sa voie. Bientôt la Compagnie de Jésus sera approuvée par le pape Paul III en 1540, comptera environ 1000 membres, ouvrira des collèges et dispensera une formation poussée et reconnue. C’est principalement le concile de Trente qui sera le moteur de la Contre -Réforme.

Par son travail considérable de 1540 à 1562, le Concile, en voulant enrayer les thèses protestantes, a approfondi et affirmé les siennes. Ainsi va-t-on expliquer à nouveau et enseigner les sept sacrements, la tradition apostolique, l’autorité ecclésiastique ou la transsubstantiation. Les besoins de réformes des humanistes chrétiens ont été entendus et désormais tout possesseur de bénéfice ecclésiastique doit résider sur son territoire. Les religieux devront obéissance stricte à la règle, et les évêques devront prêcher et visiter leurs diocèses tous les ans. Enfin plus tard, mais la réflexion est engagée, on instituera un Index des livres interdits en 1564, un catéchisme en 1566, un bréviaire en 1568 et un missel en 1570. Cette Réforme catholique ne sera pas accueillie avec le même succès dans tous les pays, notamment en Allemagne où les États sont divisés et les princes électeurs jaloux de leur pouvoir. Le Saint Empire, partagé entre nord et sud comprend donc catholiques et protestants, et rencontre donc des difficultés supplémentaires. La carte de l’Empire reste la même géographiquement, mais elle est à présent très différente religieusement et politiquement.

Dans cet éclatement, l’Europe conserve au 16ème siècle le tracé de l’empire romain qui séparait le nord du sud et qui désormais sépare Réforme et Contre-réforme, protestantisme et catholicisme.

La montée de la réforme au 16ème siècle en Poitou

Peu de temps après que Luther eût rédigé les “Grands Écrits Réformateurs”, ce qui provoqua sa condamnation par le Pape en 1521, ses idées parvinrent, par la mer et les îles d’Arvert, jusqu’au Poitou. En 1531, le Parlement condamna au bûcher, comme hérétique, un habitant de Loudun. 3 ans plus tard, en 1534, Jean Calvin, originaire de Noyon au nord de Paris, converti aux idées luthériennes et, de ce fait, poursuivi par la Sorbonne, arriva à Poitiers. Âgé de 25 ans, ayant déjà soutenu son doctorat en droit et publié, il est accueilli par des universitaires et honoré car il avait été l’hôte de la reine de Navarre. Il resta 2 mois dans la ville. C’est alors qu’il décida de se séparer de l’Église de Rome et de fonder sa propre Église. Il exposa ses idées sur l’eucharistie dans des réunions secrètes. A-t-il prêché devant des étudiants dans une des nombreuses grottes dites de Calvin ? Dans les caves du Collège Sainte Marthe (l’actuel Collège Henri IV) ? Calvin a laissé 4 disciples qui propagèrent ses idées sur la Réforme en ville et alentours. Parmi eux, un procureur et un professeur de droit romain.

3 abbayes des environs passèrent à la Réforme. Un premier noyau s’établit alors qui toucha des universitaires, des juristes et de riches commerçants.

Les persécutions furent violentes. 1 libraire fut brûlé en 1541. Sous Henri II, elles redoublèrent. Ceux qu’on appelait encore hérétiques, encouragés par Calvin qui leur écrit de Genève, se réunissaient en secret, lisant la Bible et chantant les Psaumes. Mais, jusqu’en 1554, Calvin leur conseilla de s’abstenir de la Cène.

Il leur envoya, en 1555, un des premiers pasteurs formés à Genève, pour organiser l’Église de Poitiers.

2 ans plus tard, en 1557, des juristes, membres de l’Église, élaborèrent des textes qui définissaient les rôles respectifs des ministres, des diacres et des anciens, élus selon des règles démocratiques. Ce sont les “Articles polytiques de l’Église de Poitiers”.

A la fin de 1558, une assemblée de pasteurs des environs se réunit, sous la direction du pasteur de Paris, Antoine de Chandieu, dans l’hôtel édifié 4 ans plus tôt par un riche marchand de soie, Jean Beaucé. Elle décida de la tenue du 1er Synode de l’Église réformée, qui se réunit à Paris, clandestinement, en 1559. Celui-ci rédigea la Confession de Foi, dite de La Rochelle, et une discipline qui s’inspira largement des “Articles polytiques”. Ceux-ci furent donc à l’origine du système presbytéro-synodal des Églises de la Réforme calvinienne. En 1561, c’est à Poitiers que se réunit le second Synode national.

L’année suivante marqua un arrêt définitif dans le rôle de Poitiers comme capitale protestante de l’Ouest. En mars 1562 débutèrent en effet les guerres de religion qui se poursuivront pendant 40 ans. Louis de Condé, alors à Orléans, était le chef des armées protestantes. Il fit occuper la ville de Poitiers dès le mois de mai et envoya un de ses amis comme gouverneur. Jeanne d’Albret lui expédia du Béarn une troupe de Gascons qui traversèrent la ville et la pillèrent. Les trésors des églises furent fondus dans les dépendances de l’Hôtel Beaucé.

Les chefs réformés de la ville organisèrent alors un iconoclasme sélectif, encore visible sur les façades de la Cathédrale et de l’église Notre-dame la Grande. Reprise par les troupes royales au début d’août, la ville avait perdu tout son éclat. Elle bascula définitivement dans le camp catholique. Coligny en fit le siège, sans succès, dans l’été 1569. 2 mois plus tard, son armée fut décimée à Moncontour. De nombreux chefs huguenots furent tués ou faits prisonniers.

Malgré l’Édit de pacification de Saint Germain, favorable aux Réformés, les prêches ne furent pas autorisés à Poitiers. En 1572, la Saint Barthélemy ne toucha guère la ville mais on nota cependant des départs vers l’étranger ou les places de sûreté.

En 1577, Henri III signa, au Doyenné Saint Hilaire, l’Édit de Poitiers qui restreint, une fois de plus, les droits des Réformés. Le culte se fit alors chez François de la Noue, à Montreuil Bonnin puis à Châtellerault.

En 1588, Poitiers se jeta avec enthousiasme dans le camp de la Ligue. Les chefs de famille réformés et leurs amis catholiques modérés durent s’exiler pendant 5 ans jusqu’au rachat de la ville par Henri IV, en 1593.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de histoire du 16ème siècle/ Le 16ème siècle en France (archives Ljallamion, petit mourre, encyclopédie imago mundi, l’histoire, ect....)