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Jean de Crescenzi ou Crescentius dit Jean XIII

vendredi 4 octobre 2019, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 7 novembre 2011).

Jean de Crescenzi ou Crescentius dit Jean XIII (938-972)

pape de 965 à 972

Après le décès du pape Jean XII en 964, Benedictus Grammaticus fut élu comme son successeur sous le nom de Benoît V .

Cependant, l’empereur Othon 1er amena à Rome l’antipape Léon VIII , qu’il avait promu en 963, et bannit Benoît à Hambourg [1]. Léon VIII étant mort en mars 965, les Romains demandèrent à l’Empereur de leur rendre Benoît comme pape.

Cependant, Othon refusa, et Benoît mourut peu de temps après en juillet 965. En présence des envoyés impériaux, Liutprand de Crémone , évêque de Crémone, et Otgar, évêque de Spire [2], le candidat impérial, Jean Crescentius, évêque de Narni, fut élu pape et couronné le 1er octobre 965 sous le nom de Jean XIII.

Il appartenait à la famille de Théodora l’Ancienne, qui par son mariage avec le sénateur Théophylacte, eut une fille, Théodora la Jeune qui épousa le consul Jean. Ce dernier entra plus tard dans les ordres et devint évêque. De cette union naquirent 2 filles et 3 fils, dont le futur Jean XIII qui entra jeune dans la prêtrise à Rome et devint plus tard évêque de Narni.

Ce descendant de la noblesse fut donc élu par les électeurs au trône pontifical. Certains nobles étaient hostile au nouveau pape, candidat de l’Empereur et, lorsque ce dernier essaya de réprimer leurs intercessions, ils complotèrent contre lui et en décembre 965, lors d’une émeute conduite par le préfet Pierre Cesi et l’armée du comte Rotfred de Campanie, parvinrent à s’emparer de sa personne sous les quolibets et l’enfermèrent au château Saint-Ange [3] avant de le déplacer dans une forteresse en Campanie [4]. Il parvint à s’échapper, et trouva refuge et protection auprès du prince Pandolf Tête de Fer . A Rome, une réaction se produisit en faveur du pape exilé et, lorsqu’en 966 l’empereur Othon monta une nouvelle expédition vers l’Italie, les Romains terrifiés permirent à Jean de regagner la ville le 14 novembre. L’empereur arriva en décembre, et dispensa une justice expéditive, pendaisons, décapitations, aveuglements. Pierre Cesi fut pendu par les cheveux à la statue de Marc Aurèle sur la place du Latran et remplacé par le frère de Jean XIII. Plusieurs consuls furent déportés en Allemagne.

Le Pape était alors allié de façon étroite avec l’empereur. Il voyagea avec Othon jusqu’à Ravenne [5] où, en avril 967, il tint un synode durant lequel l’élévation de Magdebourg [6] en archevêché métropolite fut confirmée avec la subordination comme suffragants des diocèses de Brandebourg [7] et de Havelberg [8], des disputes furent réglées, des privilèges conférés à certaines églises et couvent et Ravenne et son territoire furent restitués au Pape comme partie intégrante des États pontificaux.

Les relations entre l’Empereur et le Pape continuèrent à être cordiales. Le jour de Noël 967, Othon II vint à Rome et se fit couronné empereur conjointement à son père. Peu de temps après, lors de l’un des synodes qui furent tenus à Rome, le monastère fondé par l’empereur à Meissen [9] en Saxe [10] fut élevé au rang d’évêché.

Jean XIII favorisa aussi les négociations qui se tenaient avec les Byzantins pour une alliance matrimoniale entre Othon II et la princesse Théophano Skleraina, princesse porphyrogénète [11] de Byzance et nièce de Jean 1er Tzimiskès . Le mariage eut lieu à Rome, et fut béni par le Pape lui-même le 14 avril 972.

Après les décès de l’archevêque Guillaume de Mayence et de l’évêque Bernard d’Halberstadt [12] en 968, l’épiscopat métropolite de Magdebourg en territoire slave, pour lequel l’Empereur avait œuvré avec force et confirmé par le Pape en 967, fut créé. A Noël 968, l’abbé Adalbert fut consacré premier archevêque de Magdebourg, et à son tour consacra les premiers évêques de Mersebourg [13], Meissen et Zeitz [14].

Il fut aussi actif à étendre son réseau hiérarchique dans d’autres pays. Au début de son pontificat, il avait élevé Capoue [15] au rang d’archevêché par gratitude envers le prince Pandulf qui l’avait recueilli.

Lors d’un synode romain en 969, Bénévent [16] reçu la même dignité. Il confirma les décrets des synodes tenus en Angleterre et en France. Des privilèges furent accordés à des églises et monastères, et particulièrement à Cluny, et le Pape décida de nombreux points de loi ecclésiastique, qui lui étaient soumis depuis différents pays. La volonté du duc de Bohème Boleslas II de fonder un évêché à Prague, bien qu’approuvée par le Pape, ne fut pas immédiatement concrétisée. Benoît VI succéda à Jean XIII après le décès de ce dernier.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, 2003 (ISBN 2-213-618577)

Notes

[1] Hambourg est une ville et l’un des 16 Länder composant l’Allemagne. Située au nord du pays, près de l’embouchure de l’Elbe et à proximité de la mer du Nord, Hambourg est la deuxième plus grande ville d’Allemagne (après Berlin) et le premier port du pays. Hambourg était membre fondateur de la ligue hanséatique. Cette ancienne appartenance est encore aujourd’hui revendiquée par la ville, comme élément caractéristique de son identité. C’est ainsi que le code de la ville sur les plaques d’immatriculation est HH, qui signifie Hansestadt Hamburg et que le nom officiel de la ville est Freie und Hansestadt Hamburg (ville libre et hanséatique de Hambourg).

[2] Le diocèse de Spire est une église particulière de l’Église catholique en Allemagne. Son siège est la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption-et-Saint-Étienne de Spire. Érigé en 346, il est un des plus anciens diocèses d’Allemagne.

[3] Le château Saint-Ange est un monument romain, situé sur la rive droite du Tibre, face au pons Ælius (actuel pont Saint-Ange), à Rome, non loin du Vatican.

[4] La région de Campanie, plus couramment appelée la Campanie, est une région d’Italie méridionale. Elle fut associée au Latium, une des 11 régions de l’Italie romaine créées par l’empereur Auguste au 1er siècle av.jc Érigée en province à part entière au début du 4ème siècle au temps de l’empereur Dioclétien, la Campanie fut ensuite sous domination lombarde puis byzantine. Elle fut ensuite morcelée par l’indépendance que quelques-unes de ses villes adoptèrent.

[5] Ravenne est une ville italienne de la province de Ravenne en Émilie-Romagne. Elle est considérée comme la capitale mondiale de la mosaïque. Ravenne fut une cité de première importance au tournant de l’Antiquité et du Moyen Âge. En 402, pendant le règne d’Honorius, elle fut, du fait de sa position stratégique plus favorable, élevée au rang de capitale de l’Empire romain d’Occident en lieu et place de Milan, trop exposée aux attaques terrestres des barbares. Son port de grande capacité, sur l’Adriatique, la mettait en communication aisée avec Constantinople, capitale de l’Empire romain d’Orient. La cité continua d’être le centre de l’Empire d’Occident jusqu’à la chute de celui-ci en 476. Elle devint alors la capitale du royaume d’Italie d’Odoacre, puis à partir de 493 celle du royaume des Ostrogoths, sous Théodoric le Grand, qui englobait l’Italie, la Rhétie, la Dalmatie et la Sicile. En 540, sous le règne de Justinien 1er, Ravenne fut conquise par le général de l’Empire d’orient Bélisaire ; elle fut ensuite reconquise par les Ostrogoths avant d’être à nouveau reprise par le général de l’Empire d’orient Narsès en 552. C’est pour contrer le danger né de l’invasion des Lombards en Italie à partir de 568, que Ravenne devint le siège de l’exarchat byzantin d’Italie, par décision de l’empereur Maurice. La concentration de tous les pouvoirs civils et militaires entre les mains de l’exarque, représentant personnel de l’empereur byzantin favorisa, à long terme, l’émancipation des territoires du nord de l’Italie vis-à-vis du pouvoir impérial. Ravenne fut prise en 752 par Aistolf, roi des Lombards. Deux ans après, Pépin le Bref, roi des Francs, la lui enleva et la donna au Saint-Siège.

[6] Choisie par le premier empereur germanique Othon 1er vers 936 pour être la nouvelle capitale de l’Empire, Magdebourg a toujours été une des villes majeures de la vallée de l’Elbe. Centre d’échanges agricoles et de commerce des Saxons, à proximité des riches terres lœssiques des Börde, au contact de la grande plaine du nord et des massifs hercyniens, port fluvial d’importance capitale sur l’Elbe, Magdebourg est la cité archi-épiscopale pivot de l’évangélisation chrétienne des peuples du nord et de l’est avant d’être pendant longtemps une des plus importantes cités du Saint Empire romain germanique.

[7] Fondé en 948, le diocèse de Brandebourg dépend dans un premier temps de l’évêché de Mayence, puis à partir de 968, de celui de Magdebourg. L’évêque Mathias de Jagow va promouvoir la Réforme, ce qui aboutira à l’intégration du diocèse dans le margraviat de Brandebourg et les princes électeurs seront désormais désignés comme administrateurs du diocèse et à la sécularisation de celui-ci en 1598

[8] Havelberg est une ville allemande situé en Saxe-Anhalt, dans l’arrondissement de Stendal. C’est une ville historique, située au confluent de la Havel et de l’Elbe, et le siège de l’ancien diocèse de Havelberg fondé au 10ème siècle.

[9] Meissen ou Misnie est une ville de Saxe, en Allemagne. La ville est internationalement connue pour la production de la porcelaine de Meissen, qui, en 1708, fut la première porcelaine produite en Europe. Cette ville fut fondée par Henri 1er de Saxe en 922 sur un rocher surplombant l’Elbe. En 929, il fit fortifier la montagne située à l’endroit stratégique constitué par un gué sur l’Elbe. Durant plusieurs siècles, Meissen fut une ville florissante dont il reste toujours de nombreux vestiges dans les quartiers anciens : ruelles médiévales, château (Albrechtsburg) qui a abrité, entre 1710 et 1865, la manufacture nationale de porcelaine, Dom (cathédrale Saints-Jean-et-Donat), construite à partir de 1250 sur les vestiges d’une église romane et terminée vers la fin du 15ème siècle.

[10] Le duché de Saxe était un duché médiéval couvrant la plus grande partie du nord de l’Allemagne. Il s’étendait sur les états allemands contemporains de Basse-Saxe, Rhénanie-du-Nord-Westphale, Schleswig-Holstein, Saxe-Anhalt et des parties de la Saxe. Le duc Henri le Lion occupa la région déserte de Mecklembourg Poméranie occidentale. Les Anglo-Saxons avaient quitté cette dernière zone pour l’Angleterre.

[11] « né dans la pourpre », la pourpre symbolisant l’empereur

[12] L’évêché d’Halberstadt est un ancien évêché fondé en 804, diocèse suffragant de la Province ecclésiastique de Mayence, dont le siège a été localisé à Halberstadt en Saxe. Avec le diocèse de Hildesheim, il fut un cœur de l’évangélisation de la région d’Ostphalie dans la Saxe païenne à l’époque carolingienne. Le prince évêché d’Halberstadt, une principauté ecclésiastique historique du Saint Empire romain, a été formé vers l’an 1180.

[13] L’évêché de Mersebourg est un diocèse médiéval de l’Église catholique aujourd’hui disparu. Fondé en 968, comme suffragant de l’archidiocèse de Magdebourg, son siège a été localisé à Mersebourg sur la Saale dans la partie orientale du duché de Saxe. Avec Magdebourg et les diocèses de Zeitz et de Meissen, il fut un cœur de l’évangélisation de la marche de l’Est saxonne à l’époque des souverains ottoniens et saliens. En tant qu’évêché (Hochstift), Mersebourg fut également une principauté ecclésiastique et un État du Saint Empire romain. Les frontières de la principauté et du diocèse de Mersebourg ne coïncidaient pas. Les évêques, seigneurs temporels, faisaient partie du collège des princes ecclésiastiques à la Diète d’Empire.

[14] L’évêché de Naumbourg-Zeitz est un ancien évêché dans le centre de l’Allemagne entre Leipzig à l’est et Erfurt à l’ouest. Le siège de l’évêché est Zeitz et sa cathédrale de 968 à 1029 puis Naumbourg et sa cathédrale jusqu’en 1615. Sur la suggestion de l’empereur Otton, le pape Jean XIII créé au synode de Ravenne trois évêchés : Meißen, Mersebourg et Zeitz. Ces trois évêques sont suffragants du diocèse de Magdebourg.

[15] Capoue est une commune, située dans la province de Caserte en Campanie, dans l’Italie méridionale. Capoue se trouve dans le territoire de la Terre de Labour dont elle fut un temps la capitale (principauté de Capoue) et le chef-lieu (époque napoléonienne). L’agglomération se trouve sur un bras du fleuve Volturno, position stratégique au cours de l’Histoire, au pied du mont Tifata où est située la frazione de Sant’Angelo in Formis.

[16] La province de Bénévent est une province italienne située dans la région de Campanie. Elle a une superficie de 2071 km² et comprend 78 communes,. Le chef-lieu provincial est Bénévent. Au Moyen Âge, la place forte de Bénévent est cependant prise par les Ostrogoths du roi Totila qui la rasent en 542 et vers 571, elle est prise par un détachement de Lombards venus du Nord de l’Italie et dirigés par le duc Zotton, premier duc lombard de Bénévent. Ce puissant duché se rend très vite autonome par rapport au roi des Lombards, siégeant à Milan puis à Pavie et ne fut qu’épisodiquement soumis au pouvoir royal. En 662, le duc Grimoald, devient roi des Lombards et rattache Bénévent au royaume lombard. Bénévent tombe plus tard aux mains des Normands dirigés par le comte Drogon d’Apulie en 1047, avant d’être ratachée à la Papauté en 1053. Elle devient dès lors possession papale jusqu’en 1806, quand Napoléon l’accorde à Talleyrand avec le titre du prince de Bénévent. Rendue au pape en 1814, elle est réunie au royaume d’Italie en 1860.