Arnoul de Montgommery (vers 1068-1118/1122)
Lord de Pembroke et d’Holderness
Il fut un baron anglo-normand qui joua un rôle dans l’Histoire de l’Angleterre, du Pays de Galles [1] et de l’Irlande [2]. Il était le 6ème et dernier fils de Roger II de Montgommery, 1er comte de Shrewsbury [3], et de Mabile de Bellême.
ll est possible qu’Arnoul se soit trouvé dans le château de Rochester [4] durant la rébellion de 1088 [5] contre le roi Guillaume le Roux.
Aux alentours de 1090, allié avec son frère aîné Robert, il s’empare du comté gallois de Pembrokeshire [6], puis fait bâtir un château dans la ville de Pembroke [7]. Il est reconnu par le roi anglais Guillaume le Roux comme lord de Pembroke. Peu après 1093, le roi l’aurait créé comte de Pembroke.
Mais en 1094, la mort de Roger II de Montgomery, l’absence en Normandie du comte de Chester Hugues d’Avranches, l’engagement de Guillaume le Roux dans un conflit avec Robert Courteheuse, et l’évasion réussie de Gruffydd ap Cynan, roi de Gwynedd [8], forment une conjonction d’événements favorables aux Gallois, et conduisent à un soulèvement général du Pays de Galles.
Les Gallois reprennent de nombreuses terres aux Normands [9], et dévastent le Shropshire [10]. À la fin de l’année, toutes les conquêtes des Montgommery sont perdues, même si le château de Pembroke [11] résiste encore.
Ses possessions sont grandement enrichies en 1096 quand le roi lui donne l’honneur [12] d’Holderness [13], qui en plus du grand territoire dans les ridings [14] du Yorkshire de l’Est [15] inclut des terres dans le Lincolnshire [16]. Ces terres ont été reprises au comte d’Aumale [17] après la conspiration échouée de 1095 qui avait pour but de remplacer le roi par Étienne d’Aumale. Étienne est restauré dans ses possessions en 1102 quand Arnoul est dépouillé de ses possessions anglaises.
Il est probable qu’Arnoul ait été l’héritier désigné par son frère Hugues, 2ème comte de Shrewsbury, avec qui il était étroitement associé. Mais à la mort de celui-ci en 1098, son frère aîné Robert réussit à l’écarter de l’héritage, et devint le 3ème comte de Shrewsbury.
Cet événement provoque une dissension entre les deux frères. Néanmoins il participe avec lui à la rébellion de 1101 contre le nouveau roi Henri 1er.
En 1102, le roi décide de se débarrasser de Robert car il était trop puissant et dangereux. Arnoul et Roger le Poitevin sont les victimes collatérales de cette volonté royale. Ils perdent toutes leurs possessions anglaises et galloises, et sont bannis d’Angleterre. Quand la rébellion échoue, il rejoint son frère Robert en Normandie, en plein conflit avec le duc Robert Courteheuse. Mais ensuite, il s’empare de la place forte d’Almenêches [18] et la rend au duc.
Arnoul se tourne en 1103 vers l’Irlande, où l’année d’avant, il a épousé Lafrocoth, la fille du roi suprême d’Irlande Muircheartach Ua Briain . Muircheartach ayant fourni une assistance à son beau-fils pour se rebeller contre le roi d’Angleterre, Henri 1er met un embargo commercial sur l’Irlande. Son beau-père lui demande de l’aide contre le roi de Norvège Magnus III . Arnoul mène la première campagne normande en Irlande et défait les raids norvégiens.
Il est réconcilié avec le roi Henri 1er par l’archevêque Anselme de Cantorbéry, et dans les années 1110, il est témoin de quelques chartes de Foulque V d’Anjou. En 1114, il est témoin d’un acte impliquant sa petite-nièce Philippe ou Philippa de Toulouse , duchesse d’Aquitaine [19], dans le sud de la France.
Il est possible que ces déplacements soit la conséquence de missions diplomatiques, car il est décrit comme un homme de grande probité ayant une très bonne réputation. En 1118, les habitants d’Alençon [20] lui demandent d’approcher Foulque V, le comte d’Anjou, pour qu’il leur vienne en aide dans leur rébellion contre Étienne de Blois, le comte de Mortain [21]. C’est probablement une indication qu’il a une certaine influence à la cour du comte.
Il meurt avant 1122, sans descendance connue.
Notes
[1] Le pays de Galles est une nation constitutive du Royaume-Uni située dans l’Ouest de l’île de Grande-Bretagne. Il partage une frontière avec l’Angleterre à l’est et est bordé par la mer d’Irlande au nord et à l’ouest et le canal de Bristol au sud.
[2] L’Irlande est une île située dans l’océan Atlantique Nord et qui fait partie des îles Britanniques. Troisième plus grande île d’Europe, elle est séparée de la Grande-Bretagne, située à l’est, par la mer d’Irlande. Cette île correspond à la terre traditionnelle du peuple irlandais. L’île est politiquement divisée entre l’État d’Irlande, un État souverain occupant la majeure partie de l’île, et l’Irlande du Nord, une nation constitutive du Royaume-Uni occupant le Nord-Est de l’île
[3] La première création intervient en 1074 pour Roger II de Montgomery, l’un des principaux conseillers du Conquérant. Le titre est confisqué, en 1102, à Robert II de Bellême car il s’était rebellé contre Henri 1er. Le titre fut créé une seconde fois en 1442 pour John Talbot, un général anglais de la guerre de Cent Ans. Il fut aussi fait comte de Waterford, dans la pairie d’Irlande, et Lord High Steward d’Irlande, les deux comtés ont toujours été unis jusqu’à présent.
[4] Le château de Rochester est un château médiéval situé dans la ville britannique de Rochester, dans le comté de Kent en Angleterre. Il se dresse sur la rive orientale de la Medway. Le donjon ou tour de pierre du 12ème siècle, qui est la caractéristique la plus marquante du château, est l’un des mieux conservés d’Angleterre. Situé sur la rive orientale de la Medway et sur Watling Street, Rochester fut un château royal important sur le plan stratégique. Durant la fin de la période médiévale, il contribua à protéger le sud-est de la côte de l’Angleterre contre les invasions. Le premier château de Rochester fut fondé à la suite de la conquête normande. Il fut donné à l’évêque Odon, probablement par son demi-frère Guillaume le Conquérant. Au cours de la Rébellion de 1088 au sujet de la succession au trône d’Angleterre, Odon soutint Robert Courteheuse, le fils aîné du Conquérant, contre Guillaume le Roux. Ce fut pendant ce conflit que le château fut témoin d’une action militaire ; la ville et le château furent assiégés après qu’Odon eût fait de Rochester un quartier général de la rébellion. Après la capitulation de la garnison, ce premier château fut abandonné. Entre 1087 et 1089, Rufus demanda à Gondulf, évêque de Rochester, de construire un nouveau château en pierre à Rochester. Il établit la superficie actuelle du château. Malgré les grands changements survenus au cours des siècles, certaines parties des travaux de Gundulf ont survécu. En 1127, le roi Henri 1er octroya le château aux archevêques de Cantorbéry à perpétuité. Guillaume de Corbeil construisit l’énorme donjon qui domine encore le château aujourd’hui. Au cours du 12ème siècle, le château resta sous la garde des archevêques.
[5] La rébellion de 1088 se déroule en Angleterre durant le printemps et l’été 1088. Elle est provoquée par la volonté de barons anglo-normands de réunir sous un commandement unique le duché de Normandie et le royaume d’Angleterre, que Guillaume le Conquérant a légué, à sa mort en 1087, respectivement à ses fils Robert Courteheuse et Guillaume le Roux. La rébellion est un échec, mais les conséquences sont minimes pour les rebelles.
[6] Le Pembrokeshire ou comté de Pembroke d’après le nom de la ville capitale, est un comté au sud-ouest du pays de Galles, sur les rives de la mer d’Irlande. C’est le comté le plus occidental du pays de Galles.
[7] Pembroke est le nom de l’ancienne capitale du comté du même nom, ou Pembrokeshire, au sud-ouest du pays de Galles, célèbre pour son château commencé en 1093 et achevé pour sa plus grande part en 1296.
[8] Le Gwynedd était un des royaumes ou principautés du Pays de Galles au Moyen Âge, appelé Vénédotie, Winet ou Norgalles au Moyen Âge. Il couvrait une partie du nord-ouest du pays autour de la Snowdonia et comprenait l’île de Môn (Anglesey). Ses dirigeants ont eu à plusieurs reprises le dessus sur leurs rivaux gallois. Les rois et princes de Gwynedd ont résisté longtemps aux projets de conquête des rois d’Angleterre.
[9] Deheubarth, Pembroke, Anglesey etc.
[10] Shropshire aussi appelé Salop est un comté anglais des West Midlands en Angleterre. Il portait le nom anglo-normand de comté de Salopesberie d’où l’abréviation de Salop. Le chef-lieu est Shrewsbury, bien que la ville nouvelle de Telford soit la ville la plus peuplée.
[11] Le château de Pembroke est un château médiéval situé à Pembroke, au pays de Galles. Il a été construit en 1093 par Roger II de Montgommery lors de l’invasion normande, sur un rocher équipé de structures romaines au bord de la rivière Pembroke.
[12] Un honneur est une composante de la féodalité ; il s’agit au Moyen Âge en France et en Grande-Bretagne d’un fief possédé à l’origine par l’un des barons d’un prince ou d’un roi. Il comprend généralement un domaine principal, qui donne son nom à l’honneur, et plusieurs « extensions » plus petites généralement dispersées dans la principauté ou royaume du suzerain dont il dépend. D’une manière générale, le terme d’honneur désignait l’ensemble des terres d’un puissant seigneur
[13] L’Holderness est une zone de l’ East Riding du Yorkshire, sur la côte est de l’Angleterre. Une région riche en terres agricoles, Holderness était un marais jusqu’à ce qu’il fut drainé au Moyen Age.
[14] Un riding désigne une ancienne division territoriale des Îles Britanniques, les plus connues étant les anciennes divisions territoriales du Yorkshire
[15] Le Yorkshire de l’Est est une Autorité unitaire située dans le nord-est de l’Angleterre. Sa capitale est Beverley.
[16] Le Lincolnshire est un comté d’Angleterre situé sur le littoral de la mer du Nord. Il a pour voisins, du nord au sud, les comtés du Yorkshire de l’Est, du Yorkshire du Sud, du Nottinghamshire, du Leicestershire, du Rutland, du Cambridgeshire et du Norfolk. Son chef-lieu est la ville de Lincoln.
[17] Aumale est une actuelle commune du département français de la Seine-Maritime. Son histoire est marquée par le long usage des titulaires de son nom. Vers 1055 ou peu après, Aumale est définitivement rattaché à la Normandie. En 1194, Philippe II Auguste, roi de France, confisque Aumale à Guillaume des Forts. Il confie le comté en 1204 à Renaud de Dammartin, ancien comte de Boulogne. Le système de pairie d’Angleterre continuera à attribuer des titres de comte et duc liés à Aumale, mais en utilisant sa forme latine : Albemarle. Les « honneurs d’Aumale », un ensemble de terres dans le Yorkshire anciennement associé au titre normand, constituera le fief des comtes et ducs anglais
[18] Almenêches est une commune française, située dans le département de l’Orne
[19] Le duché d’Aquitaine est constitué en 675, à la mort de Childéric II. Il se reconstitue au 9ème siècle, comme héritier du royaume d’Aquitaine attribué à Pépin 1er d’Aquitaine (mort en 838). Il fut ensuite l’objet de luttes entre les comtes d’Auvergne, de Toulouse et de Poitiers. Le duc d’Aquitaine était l’un des six pairs laïcs primitifs. L’Aquitaine a regroupé au fil des temps différents territoires. Pendant le règne d’Aliénor d’Aquitaine, Poitiers était la résidence habituelle des ducs.
[20] Alençon est une commune française, préfecture du département de l’Orne. La ville est excentrée par rapport au territoire départemental. Alençon a été au cours des siècles une place administrative (chef-lieu de la généralité d’Alençon) et économique (dentelle d’Alençon, imprimerie), ainsi qu’un carrefour entre communications est-ouest, sur l’axe Paris-Bretagne, et nord-sud, sur l’axe Rouen-Tours.
[21] Mortain est une commune française, située dans le département de la Manche. En 993, Guillaume Longue-Épée prend possession de Mortain, il est le probable fondateur du château (en bois à l’origine). C’est à l’époque de Guillaume Longue-Épée que fut mis en place le comté de Mortain. Le premier comte fut Mauger de Normandie (fils du duc Richard Ier).