Napoléon Orsini ou Napoléon Orsini Frangipani (1263-1342)
Homme d’Église italien du Moyen Âge
Neveu du pape Nicolas III, qui fut cardinal-diacre au titre de Saint Adrien de 1288 à 1342.
Fils cadet de Rinaldo Orsini, un frère du pape Nicolas III. Il commença sa carrière ecclésiastique comme chanoine [1] des chapitres cathédraux de Paris [2] et de Reims [3].
Ce fut Nicolas IV, lors du consistoire du 16 mai 1288, qui lui remit le chapeau de cardinal-diacre de Saint-Adrien
Dès le 8 mars 1306, Clément V l’envoya en tant que légat [4] pour pacifier l’Italie. Après 3 ans de vaines tentatives, le 12 juin 1309, il rejoignit le pape qui s’était installé au couvent des dominicains d’Avignon [5]. Puis il résida à Carpentras [6] où s’était établie la Curie [7].
Après la mort de Clément V, il fallut attendre 2 ans pour réunir un nouveau conclave à Lyon. Il commença ses travaux dans l’église des dominicains, au début du mois de mars 1316, avec un certain mauvais vouloir. Le 28 juin, Philippe V, alors régent du royaume de France, fit cerner les cardinaux par les troupes de Guigue de Forez puis murer portes et ouvertures. Le remède sembla radical.
Cependant, il fallut attendre jusqu’au 7 août 1316, pour que Napoléon Orsini s’entendit avec ses collègues Francesco Caetani et Arnaud de Pellegrue . Les trois cardinaux proposèrent d’élire Jacques Duèze, ancien évêque d’Avignon [8] et cardinal de Porto [9].
Philippe V, pour attacher à la France ce fervent partisan du retour de la papauté à Rome, lui offrit de nombreux fiefs en Languedoc [10] et une rente sur le péage de Pont-Saint-Esprit [11].
Le torchon brûla rapidement entre le pape et les franciscains [12] exigeant la pauvreté totale de l’Église. Le cardinal Orsini, auquel Jean XXII devait d’être élu, prit sous sa protection Ubertin de Casale , le chef de file des contestataires. Il en fit son pénitencier.
Au début de l’année 1322, celui-ci fut sollicité par le pape pour lui présenter une relation motivée sur la question de la pauvreté. Ses conclusions ayant été condamnées, prudent, le cardinal Orsini se débarrassa de son encombrant pénitencier en chargeant Ubertin de porter cette décrétale auprès du roi d’Aragon [13].
Jean XXII sema la perturbation dans l’Église avec sa vision béatifique. Tout commença par un sermon, le 1er novembre 1331. Commentant un texte de Bernard de Clairvaux, le pape affirma que les âmes des élus, selon lui, ne jouissaient pas immédiatement de la vision béatifique. On pensa à un lapsus.
Mais le pontife remit ça 15 jours plus tard en expliquant qu’il fallait attendre le jugement dernier pour que les âmes bénéficient de la vie éternelle. Le dérapage devint inconvenance. D’autant que le 5 janvier 1332, il concluait sa nouvelle orientation théologique en déclarant que les damnés n’iront en enfer qu’après la résurrection des corps.
Orsini, le cardinal au train de vie le plus opulent du Sacré Collège [14], lâcha Jean XXII, se rapprocha de ses ennemis les spirituels et l’on parla de destitution.
En 1333, Philippe de Majorque, fut même pressenti pour lui succéder. Ce frère de la Pauvre Vie [15], devint le candidat du cardinal Napoléon qui œuvra pour un concile déposant le pape hérétique.
Tout se calma avec le décès du pape qui se rétracta sur son lit de mort. Après le conclave d’Avignon qui désigna Benoît XII, ce fut le cardinal Orsini qui eut l’honneur de couronner le nouveau pontife. Dès lors, il se retira le plus souvent dans son hôtel de Villeneuve-lès-Avignon [16], au pied de la Tour Philippe-le-Bel.
Napoléon Orsini, cardinal à 25 ans, siégea pendant 54 ans dans le Sacré Collège, en devenant le doyen dès 1305, connaissant 8 papes différents après avoir joué un rôle décisif dans l’élection de certains d’entre eux.
Il écrivit la biographie de sainte Claire de Montefalco . Il mourut à Avignon le 24 mars 1342 et fut inhumé dans l’église du couvent des franciscains de cette cité.
Notes
[1] un chanoine est un clerc (voire laïc) appartenant à un chapitre ou à une congrégation, et consacré à la prière liturgique au chœur, voire à l’enseignement, à la prédication, au secours des pauvres, au chœur professionnel (le « bas-chœur ») et à la maîtrise, etc. Au haut Moyen Âge, le mot pouvait désigner certains membres du personnel laïc des églises. Aujourd’hui, il existe des chanoines ecclésiastiques (séculiers ou réguliers), des chanoines laïcs et des femmes religieuses régulières (chanoinesses).
[2] La cathédrale Notre-Dame de Paris, communément appelée Notre-Dame, est l’un des monuments les plus emblématiques de Paris et de la France. Elle est située sur l’île de la Cité et est un lieu de culte catholique, siège de l’archidiocèse de Paris, dédiée à la Vierge Marie. Commencée sous l’impulsion de l’évêque Maurice de Sully, sa construction s’étend sur plus de 2 siècles, de 1163 au milieu du 14ème siècle.
[3] La cathédrale Notre-Dame de Reims est une cathédrale catholique romaine située à Reims, dans le département français de la Marne en région Grand Est. Elle est connue pour avoir été, à partir du 11ème siècle, le lieu de la quasi-totalité des sacres des rois de France.
[4] Le légat apostolique, ou plus communément légat du pape, ou légat pontifical, est un représentant extraordinaire du pape chargé d’une mission spécifique, généralement diplomatique. Il se distingue en cela du nonce apostolique qui est un ambassadeur permanent du Saint Siège auprès des gouvernements étrangers.
[5] Avignon est une ville du Sud de la France, située au confluent du Rhône et de la Durance. Surnommée la « cité des papes » en raison de la présence des papes de 1309 à 1423, elle est actuellement la plus grande ville et la préfecture du département de Vaucluse. C’est l’une des rares villes françaises à avoir conservé ses remparts et son centre historique, composé du palais des papes, de l’ensemble épiscopal, du rocher des Doms et du pont d’Avignon
[6] Carpentras est une commune française, située dans le département de Vaucluse. Elle devient cité latine puis, au moment de la christianisation, accueille un siège épiscopal (ce siège alternera entre Carpentras et Venasque, en fonction des événements historiques). La ville accueille des juifs depuis au moins le 28 février 1276, selon des rôles d’impôts de cette période. En 1155, Raymond V de Toulouse, marquis de Provence, envoie son chancelier Raous à Raymond 1er, l’évêque de Carpentras pour confirmer les privilèges du marché qui se tient à Carpentras. Au début de la papauté d’Avignon, l’évêque Bérenger Forneri voulut, sans succès, interdire le cimetière au marché. Le pape Clément V établit sa curie à Carpentras en 1313. Lorsqu’il meurt en 1314, son successeur donne sa préférence à Avignon. Cependant, capitale du Comtat Venaissin en 1320, la ville profite de la munificence pontificale : gouvernée par ses évêques, elle s’étend et s’entoure d’une enceinte dont il ne reste plus que la porte d’Orange. Le marché s’étend, en 1385, sur la place de la Fusterie, actuelle place des pénitents noirs
[7] La curie romaine est l’ensemble des dicastères et autres organismes du Saint-siège qui assistent le pape dans sa mission de pasteur suprême de l’Église catholique. « La Curie romaine dont le Pontife suprême se sert habituellement pour traiter les affaires de l’Église tout entière, et qui accomplit sa fonction en son nom et sous son autorité pour le bien et le service des Églises, comprend la Secrétairerie d’État ou Secrétariat du Pape, le Conseil pour les affaires publiques de l’Église, les Congrégations, Tribunaux et autres Instituts ; leur constitution et compétence sont définies par la loi particulière ».
[8] La Papauté d’Avignon désigne la résidence du pape en Avignon (France). Cette résidence, qui déroge à la résidence historique de Rome (Italie) depuis saint Pierre, se divise en deux grandes périodes consécutives : La première, de 1309 à 1378, celle de la papauté d’Avignon proprement dite, correspond à une époque où le pape, toujours reconnu unique chef de l’Église catholique, et sa cour se trouvent installés dans la ville d’Avignon au lieu de Rome. La seconde, de 1378 à 1418, coïncide avec le Grand schisme d’Occident où deux papes rivaux (et même trois si l’on considère l’éphémère pape de Pise) prétendent régner sur la chrétienté, l’un installé à Rome et l’autre en Avignon
[9] Le diocèse de Porto est une église particulière de l’Église catholique au Portugal. Son siège se situe dans la cathédrale de Porto. Créé au 4ème siècle, il est suffragant de l’archidiocèse de Braga et s’étend sur 3,010 km².
[10] Le Languedoc est un territoire du sud de la France traditionnellement divisé en Haut Languedoc, qui correspond approximativement à l’actuelle région Midi-Pyrénées, et Bas Languedoc, qui correspond approximativement à l’ancienne région Languedoc-Roussillon. Le Languedoc fait partie de l’Occitanie, vaste espace géographique de langue d’oc. Le territoire du Languedoc (région où l’on parle la langue d’oc) est rattaché au domaine royal au 13ème siècle à la suite de la croisade contre les Albigeois mettant fin au catharisme. Le territoire sous contrôle des États de Languedoc s’est ensuite progressivement réduit à l’ancienne province du Languedoc. C’est en 1359 que les villes des trois sénéchaussées de Beaucaire, Carcassonne et Toulouse concluent entre elles une « union perpétuelle » puis exigent des officiers royaux d’être « convoquées ensemble » et non plus séparément, par sénéchaussée. Vers la fin du 14ème siècle, pays des trois sénéchaussées, auquel le nom de Languedoc allait être réservé, désigne les deux sénéchaussées de Beaucaire Nîmes et de Carcassonne et la partie occidentale de celle de Toulouse, conservée au traité de Brétigny. Le pays de Foix, qui relève de la sénéchaussée de Carcassonne jusqu’en 1333 puis de celle de Toulouse, cesse d’appartenir au Languedoc. En 1469, le Languedoc est amputé de presque toute la partie de la sénéchaussée de Toulouse située sur la rive gauche de la Garonne. Le roi Louis XI détache les deux jugeries de Rivière (Montréjeau) et de Verdun (aujourd’hui Verdun-sur-Garonne) de la sénéchaussée toulousaine pour les incorporer au duché de Guyenne, apanagé à son frère, le prince Charles. En contrepartie, le roi incorpore au Languedoc quelques communautés d’habitants du diocèse de Comminges, situées sur la rive droite de la Garonne, connues comme le Petit Comminges
[11] Pont-Saint-Esprit est une commune française située dans le nord-est du département du Gard,
[12] Moines de l’ordre mineur de frères laïcs mendiants fondé par saint François d’Assise en 1209, sur les principes rigoureux de l’humilité totale et de la pauvreté extrême. Les franciscains ont une mission de prédication itinérante. Au 13ème siècle, l’ordre se divise, malgré les tentatives de conciliation de saint Bonaventure, entre les adeptes de la règle de pauvreté originelle et les spirituels, qui jugent la mission d’enseignement incompatible avec la misère matérielle. Malgré ces dissensions, et les diverses branches qui en découlent, les franciscains poursuivent une lutte active contre les hérésies et se répandent rapidement au travers de la chrétienté. Les franciscains portent une robe brune avec une corde pour ceinture (ce qui leur a valu le nom de cordeliers), habit des pauvres de leur temps. A la fin du 13ème siècle, il existe déjà 1500 maisons de franciscains. L’ordre franciscain s’est diversifié en trois courants : les frères mineurs, les frères mineurs conventuels et les frères mineurs capucins. Il existe aussi un tiers ordre de laïcs. Les franciscains sont partis en mission dans le monde entier.
[13] Le royaume d’Aragon est une entité politique du nord-est de la péninsule Ibérique, née en 1035 de l’union des comtés d’Aragon, du Sobrarbe et de la Ribagorce et disparue en 1707 avec son intégration au sein du royaume d’Espagne par les décrets de Nueva Planta.
[14] Le Collège des cardinaux ou Collège cardinalice, appelé autrefois « Sacré Collège », est l’ensemble des cardinaux de l’Église catholique. C’est sous le pontificat du pape Eugène III que les cardinaux formèrent en 1150 le Sacré Collège. Au fil des siècles, leur nombre a augmenté passant d’une dizaine à un peu plus de deux cents, et leur origine s’est diversifiée avec l’expansion du catholicisme. Certains cardinaux occupent des positions particulières au sein du Collège cardinalice : son doyen porte le titre honorifique d’évêque d’Ostie ; le camerlingue assure la gestion temporelle du Saint-Siège lors des périodes de vacances pontificales ; le protodiacre assure des fonctions cérémonielles comme l’annonce des résultats de l’élection pontificale. Les événements qui réunissent le Collège cardinalice sont le conclave ou un consistoire. Les papes sont élus par l’ensemble des cardinaux lors de conclaves.
[15] une branche des fraticelles ou zelanti en Italie
[16] Villeneuve-lès-Avignon ou Villeneuve-lez-Avignon est une commune française située dans le département du Gard.