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L’histoire pour le plaisir

Delphine de Sabran

dimanche 20 novembre 2016

Delphine de Sabran (1283-1360)

Religieuse

Le château d'Ansouis, résidence principale d'Elzéar et Delphine de SabranNée à Puimichel [1], dans les Alpes provençales, fille de Guillaume de Signes et de Delphine de Barras.

Orpheline dès l’âge de 7 ans, Delphine entra à l’abbaye de Sainte-Catherine de Sorps [2] qui eut son apogée entre 1255 et 1437.

La famille de Sabran possédait un château à Baudinard [3], proche de l’abbaye. Puis son éducation fut confiée à sa parente la moniale Sibylle de Puget qui lui donna le dégoût du mariage et une totale répulsion face à la maternité en lui lisant les différentes vies des saints et des saintes.

Aussi ce fut elle qui, en 1299, imposa à son jeune époux Elzéar de Sabran le mariage virginal.

Veuve en 1323, Delphine continua à vivre à la cour de Naples où pendant 17 ans elle fut la confidente de la reineSancia, la seconde épouse de Robert d’Anjou , qui depuis 1319 s’était vouée en intention à la vie monastique. Durant toute cette période les deux femmes furent sous l’influence des franciscains spirituels, en particulier de Philippe de Majorque , le propre frère de la reine.

À sa demande, Delphine prononça, en 1331, ses vœux de pauvreté. Pour réaliser sa promesse elle dut vendre les seigneuries et le patrimoine foncier que lui avait légué, en 1317, son époux. Ces biens avaient été rachetés par le frère cadet d’Elzéar, Guillaume de Sabran. La famille, qui gardait avec Louis le comté d’Ariano, dut s’endetter pour reconstituer son patrimoine. Elzéar, le fils de Guillaume, une génération après devait encore rembourser difficilement les prêts consentis à sa famille par les Bodoqui et les Esquirolis.

Elle ne revint en Provence qu’un an après la mort du roi Robert, en 1344, quand la reine Sancia désignée par son époux, sur son lit de mort, comme régente du royaume en attendant les 25 ans de majorité de la reine Jeanne, marqua l’anniversaire de ce décès, le 20 janvier, en trahissant son engagement et en entrant à Santa-Croce, dont on disait que c’était le couvent des enterrées vives. Elle s’y éteignit un an plus tard.

Cette même année 1345, Delphine se fixa à Apt [4], et bien qu’atteinte d’hydropisie [5], elle y continua les exercices de mendicité publique qu’elle avait commencé à Naples. Son attitude choqua beaucoup d’Aptésiens.

Peu après, en 1350, la comtesse allait accomplir son dernier acte de dame noble. Elle s’en fut, à Cavaillon [6], réconcilier ses deux cousins des Baux et d’Agoult. Raymond 1er d’Agoult, comte de Sault, venait en effet de succéder comme sénéchal de Provence [7] à Hugues des Baux, comte d’Avellino, et ce passage de pouvoir avait été source de conflit.

Elle était déjà devenue aux yeux de tous, la sainte comtesse et la dispensatrice de consolation. Cinq ans plus tard, elle se retira, près de Cabrières-d’Aigues [8], à Roubians, le pays natal d’Elzéar.

De retour à Apt, la recluse s’installa dans un pauvre oustaou [9], près du Calavon [10]. Elle prit alors comme confesseur un jeune cordelier [11] du nom d’André Durand.

Le milieu des franciscains qui l’entourait participa largement à la création de sa légende dorée.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Paul Amargier, Dauphine de Puimichel et son entourage au temps de sa vie aptésienne (1345-1360) in, Le peuple des saints. Croyances et dévotions en Provence et Comtat Venaissin des origines à la fin du Moyen Âge, Académie de Vaucluse et CNRS, 1987,‎ 1987

Notes

[1] Puimichel est une commune française, située dans le département des Alpes-de-Haute-Provence. La localité apparaît pour la première fois dans les chartes en 1189. Au cours de ce même siècle, l’église rurale Saint Firmin appartenait à l’abbaye Saint-André de Villeneuve-lès-Avignon, qui en percevait les revenus, l’église paroissiale Notre Dame du Serre relevait elle de l’archidiacre de Riez. La communauté relevait de la baillie de Digne. En 1331, de par son mariage plausible avec Sibile de Puimichel, Lambert de Launcello (Lincel) devient seigneur de Puimichel. La seigneurie appartient d’abord au Puimichel au 13ème siècle, puis aux Lincel (14ème), aux Berre (15ème), aux Villeneuve (15 et 16ème siècles), et enfin aux Glandevès jusqu’à la Révolution. Le village souffre beaucoup au 16ème siècle : épidémie de peste, passage des armées huguenotes et catholiques durant les guerres de religion.

[2] Elle était située à Bauduen, à la sortie des gorges du Verdon

[3] Baudinard-sur-Verdon est une commune française située dans le département du Var. C’est à partir de 1389 qu’Elzéar de Sabran devient seigneur de Baudinard. Cette famille conservera cette seigneurie jusqu’à la Révolution. Seuls subsistent de cette période l’ancien donjon et des murs arasés.

[4] Apt est une commune française, sous-préfecture du département de Vaucluse. Apt est située à 35 km de Cavaillon, 38 km de Manosque, 45 km de Forcalquier, 55 km d’Aix-en-Provence, 53 km d’Avignon (gare TGV) et 780 km de Paris.

[5] Le terme d’hydropisie était anciennement employé pour désigner tout épanchement de sérosité dans une cavité naturelle du corps ou entre les éléments du tissu conjonctif. Il pouvait donc être synonyme d’« œdème ». La plupart du temps, l’hydropisie en tant que maladie désignait la cause principale d’œdèmes généralisés, à savoir l’insuffisance cardiaque congestive.

[6] Cavaillon est une commune française, située dans le département de Vaucluse dans la vallée de la Durance, au sein du Parc naturel régional du Luberon. Elle est un ancien siège épiscopal. Elle est considérée en France comme la capitale du melon. La seigneurie de Cavaillon fut partagée entre l’évêque et les vicomtes de Cavaillon puis le Saint-Siège. Au 12ème siècle, Raymond VI de Toulouse étant marquis de Provence, Cavaillon se trouva impliqué dans la croisade des Albigeois et passa aux mains du Saint-Siège au 13ème. Le 11 mai 1331, Guillaume de Cabannes, damoiseau de Cavaillon, vend à la Cour en son nom et en celui des autres propriétaires, les droits qu’ils possèdent sur le péage d’Orgon, sur la Durance. Alfant Romei, noble, originaire de Cavaillon, viguier de Tarascon (1326) et d’Aix (1327), appartenait à une importante famille cavaillonnaise ; fils d’Alphant Romei, il vendit à la cour tout comme Guillaume de Cabannes sa part du péage d’Orgon à raison de neuf florins par jour de possession

[7] Le grand sénéchal de Provence était un grand dignitaire du comté de Provence, avant et après le rattachement de la Provence au royaume de France.

[8] Cabrières-d’Aigues est une commune française située dans le département de Vaucluse. Le fief de Cabrières relevait du comté de Forcalquier au 12ème siècle. Lorsque ce comté perd son indépendance en 1209, à la mort de Guillaume II, un de ses neveux, Guillaume de Sabran tente de le relever. Après une lutte de dix ans, il passe un accord à Meyrargues le 29 juin 1220 avec Raimond Bérenger IV, comte de Provence et lui aussi héritier du comté de Forcalquier. Par cet accord, la moitié sud du comté, dont Cabrières, lui est donnée. Guillaume de Sabran conserve sa moitié de comté jusqu’à sa mort, vers 1250. Le roi René confirma le 13 février 1459 le rattachement de Cabrières-d’Aigues, La Motte-d’Aigues et Villelaure à Pertuis

[9] Un reclusoir, appelé aussi recluserie, est une petite cellule ou édifice clos, située en abord d’une agglomération, près d’un pont ou annexée à une chapelle, une église et où vivait un reclus ou une recluse. Elle était munie d’une fenestrelle (ou petite fenêtre, souvent grillagée) pour passer la nourriture et le bois de chauffage et d’un hagioscope (fenêtre donnant sur le chœur d’une église, le reclus pouvant entendre la messe ou voir le Saint Sacrement).

[10] Le Calavon ou Coulon est une rivière des deux département français de Vaucluse et Alpes-de-Haute-Provence, affluent droit de la Durance, donc sous-affluent du Rhône, entre le Luberon et les Monts de Vaucluse.

[11] Les Cordeliers est le nom donné aux Franciscains établis en France. Leur nom leur aurait été attribué par Jean de Beaufort lors de la septième croisade. Cette appellation remonte à saint Louis. Pendant la croisade de 1250, le roi ayant remarqué des religieux très combatifs envers les Sarrasins, demanda leur nom. On lui répondit qu’ils étaient « de cordes liés » (cordeliers). En effet, ces moines portaient sur leur robe de bure brune ou grise, une grosse corde, armée de nœuds de distance en distance, qui tombait presque jusqu’à leurs pieds et d’un capuchon court et arrondi. Ils appartenaient à l’Ordre des Frères mineurs, appelés encore Franciscains, fondé par saint François d’Assise, et confirmé par le pape Honorius III en 1223.