Né à Gonesse [1], fils de Louis VII et de Adèle de Champagne, Philippe lorsqu’il monte sur le trône en 1179 vient d’avoir 15 ans. Il sera sacré la même année à Reims. Il est déjà très aimé par ses sujets qui ont pu apprécier sa précoce maturité.
Cette maturité se confirme par son premier acte de roi. Il épouse Isabelle de Hainaut, nièce de son tuteur, le puissant comte de Flandre, Philippe d’Alsace. En 1180 elle meurt en lui donnant un fils le futur Louis VIII. Il se remariera avec Ingeburge de Danemark, immédiatement répudiée en 1193, puis Agnès de Méranie en 1196. Le pape l’excommuniera alors pour ce 3ème mariage irrégulier, et frappera le royaume d’interdit.
Son mariage avec Isabelle évidemment politique, d’une portée considérable scelle son union avec une descendante directe de Charlemagne. En l’épousant, Philippe greffait la dynastie capétienne sur la dynastie carolingienne. De son illustre ancêtre par alliance, Philippe a l’ambition et la prudence, l’intelligence et la rapidité de jugement, la ténacité et la ruse. Ne dédaignant ni l’intrigue ni l’art de se servir des gens, ni la négociation plutôt que la guerre, c’est avant tout un politique, au sens moderne du mot. Ayant reçu l’Artois comme dot d’Isabelle, il conquiert Arras en 1185.
Un an avant son sacre, son père malade lui avait presque abandonné le pouvoir. Louis VII avait, pendant la fin de son règne, tout tenté pour éviter un conflit direct avec les Plantagenets. Son fils Philippe n’hésitera pas à s’y engager. Tout au long de son règne, apparaîtra en filigrane la guerre de 100 ans avec l’Angleterre. Il excitera les dissensions entre Henri II et son fils Richard . et en 1187 il fera la guerre avec l’Angleterre, jusqu’à la trêve d’Issoudun. Après l’avènement de Richard en 1189, il ourdit avec l’empereur un guet-apens pour le capturer à son retour de Croisade. Libéré, Richard mena contre son adversaire une guerre sans merci qui le réduisit aux abois. Sa mort imprévue retourna la situation en 1199
A l’appel de l’archevêque de Tyr, ils entreprend avec Richard Cœur de Lion la 3ème croisade, à laquelle se joint l’empereur de Germanie, Frédéric Barberousse. Avant son départ avec Richard Cœur de Lion, il organise par un testament ce que doit être le gouvernement pendant son absence. Échaudé par les malheureuses expériences précédentes, on prépare longuement l’expédition. Ce n’est plus une cohue mais une véritable armée qui s’embarque pour délivrer Jérusalem de l’emprise du musulman Saladin. Malgré les forces engagées, le seul véritable succès des croisés est la prise de Saint-Jean-d’Acre, après un siège pénible et interminable. Philippe Auguste, malade d’une sorte de typhoïde, rentre en France. Il laisse Richard sur place. A-t-il déjà en tête d’envahir la Normandie ? C’est ce qu’il fait en apprenant que Richard, après 14 mois passés en Terre sainte, a été capturé sur la route du retour par le duc d’Autriche en 1193, puis livré à l’empereur de Germanie. Richard est enfin libéré après le versement d’une énorme rançon en 1194. Philippe a été prévenu par l’empereur : “Prenez garde, le diable est lâché.” Le diable, qui est devenu une véritable légende vivante, reprend aussitôt sa lutte contre le roi de France. A Fréteval en juillet 1194, à Courcelles en 1198, il inflige à Philippe Auguste de cuisantes défaites. La situation critique se dénoue quand Richard trouve la mort au siège de Châlus, le 26 mars 1199.
Reste le dernier fils d’Henri II, Jean dit Sans Terre parce qu’il était trop jeune lorsque son père avait partagé ses provinces françaises entre ses enfants. Successeur de Richard, Jean échoue dans une coalition de féodaux menée contre Philippe Auguste. Les 2 souverains se réconcilient momentanément par le traité du Goulet [2] en mai 1200 qui apporte au domaine royal Évreux et le Berry. Mais Jean commet 2 fautes graves, enlèvement de la fiancée du comte de la Marche, assassinat de son neveu Arthur de Bretagne, dont Philippe va profiter.
Refusant de répondre de ses actes devant la justice du roi, Jean se voit déchu de tous ses biens français en 1202. Fort de cette sentence, Philippe entreprend, les armes à la mains, la conquête de la Normandie, qui tombe après le siège mémorable de Château Gaillard en 1204, et l’occupation de l’Anjou, du Poitou, du Maine et de la Saintonge. Par le mariage d’un membre de sa famille avec l’héritière de Bretagne, il affermit son pouvoir sur cette province. En quelques années, l’empire Plantagenêt en France est démembré.
De son royaume d’Angleterre, Jean ne s’avoue pas vaincu. Il tente de reprendre sa revanche en formant contre Philippe Auguste une nouvelle coalition réunissant le comte de Flandre Ferrand de Frandre, le comte de Boulogne Renaud de Dammartin et l’empereur Otton IV de Brunswick en 1213. Jean et les coalisés sont écrasés en 2 fameuses batailles. La Roche aux moines [3], près d’Angers, remportée par le prince Louis, le 2 juillet 1214. Bouvines, en Flandre, conduite par le roi lui-même, le 27 juillet. Le 18 septembre 1214 par le traité de Chinon [4] , Jean renonce à toutes les provinces conquises par son rival. Le retentissement de Bouvines est grandiose. La victoire soulève un immense élan de liesse populaire. Tout au long de son chemin de retour, on honore le roi par des chants, des danses et des décorations. Les rues, les maisons, les routes, de tous les villages et de toutes les villes, sont tendues de courtines et d’étoffes de soie, tapissées de fleurs, d’herbe et de feuillage vert. Paris vit une semaine de fêtes ininterrompues.
C’est d’un domaine agrandi, enrichi et pacifié et d’une monarchie respectée dont le prince Louis, futur Louis VIII, va hériter à sa mort le 14 juillet 1223 à Mantes.