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Geoffroy de Montbray ou Geoffroy de Coutances

vendredi 4 novembre 2016, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 27 novembre 2011).

Geoffroy de Montbray ou Geoffroy de Coutances

Évêque de Coutances de 1049 à 1093

La cathédrale de Coutances avec les clochers de Saint-Nicolas et de l'hôtel de ville à droite et celui de Saint-Pierre à gauche.Issu d’une famille de barons normands du Cotentin, seigneurs de Montbray [1]. Il est élu évêque de Coutances [2] en 1049 et est consacré à Rouen le 12 mars 1049.

Au concile de Reims en 1049, il est accusé avec d’autres d’avoir acheté sa fonction d’évêque. Il confesse que son frère a acheté l’évêché pour lui, mais qu’il a refusé la consécration quand il l’a su, et qu’il s’est enfui pour se protéger. Le concile accepte finalement son affirmation sous serment qu’il a été mis en place de force, et confirme sa nomination.

Avant 1066, il est l’un des acteurs principaux des réformes ecclésiastiques en Normandie qui sont patronnées par le duc de Normandie Guillaume le Bâtard. Son diocèse est en triste état et pratiquement laissé à l’abandon depuis quelques dizaines d’années. L’église de Coutances n’a que 5 chanoines et aucune bible. Elle a aussi perdu la plupart de ses propriétés et n’a plus beaucoup de revenus. Geoffroy s’atèle à recouvrer ces terres et à chercher de nouvelles sources de revenus, car sans fonds il ne peut pas réorganiser son diocèse. En avril 1050 il se rend à Rome pour assister à un synode et rencontrer ses paroissiens exilés, les Hauteville, qui règnent sur le sud de l’Italie. Il semble en ramener un trésor, puisque de retour dans son évêché, il aurait acheté la moitié de la ville au duc Guillaume et débuté la construction d’un palais. Il achète aussi des terres un peu partout dans le Cotentin et y encourage le développement économique.

Faisant étalage de son talent pour les affaires séculières, il collecte des fonds pour la construction de la cathédrale Notre-Dame de Coutances  [3] La majeure partie de son travail de restauration de l’évêché de Coutances est fini avant 1066, car à la suite de la conquête, il passe pratiquement tout son temps en Angleterre. Les revenus qu’il y acquiert servent aussi à l’embellissement de la cathédrale.

Son management des chanoines du chapitre cathédral et sa gestion des biens du diocèse lui valent le respect du clergé local et notamment du chanoine Jean, l’auteur du traité “De statu Constantiensis ecclesiae”  [4].

Il entrevoit aussi que le développement économique de son diocèse nécessite un développement urbain et une meilleure circulation des marchandises. Après avoir fait construire un pont en pierre à Saint-Lô, les revenus générés par les droits de péage passent de 15 à 220 livres sterling.

Intime et proche conseiller du duc de Normandie, il l’accompagne dans sa conquête de l’Angleterre en 1066. Guillaume de Poitiers relate qu’avec Odon de Conteville, l’évêque de Bayeux [5] et demi-frère du Conquérant, il n’est présent à la bataille de Hastings [6] que pour aider par ses prières, et qu’ils ne participent pas à la célèbre bataille. Il a aussi un rôle important dans le protocole lors du couronnement de Guillaume le Conquérant à Westminster [7] le 25 décembre 1066, et l’acclamation qu’il mène manque de créer une émeute.

En 1069, il va à la rescousse de la garnison du château de Montacute [8] assiégé par des rebelles anglo-saxons. Faisant partie des hommes de confiance du Conquérant, il est massivement récompensé pour sa participation à la conquête, et reçoit 280 manoirs au total, dont 76 dans le Somerset [9] et 97 dans le Devonshire [10]. Ses terres génèrent 788 livres sterling de revenus annuels, ce qui fait de lui l’un des 10 barons les plus riches du royaume.

Durant la révolte des comtes [11] en 1075, il mène conjointement une armée avec Odon de Bayeux contre Ralph de Gaël, le comte de Norfolk [12]. Ils assiègent et prennent le château de Norfolk. Les rebelles capturés ont le pied droit coupé afin de pouvoir être reconnus ultérieurement. Geoffroy ne prend pas part aux combats et tient strictement un rôle d’encadrement.

Bien que toujours évêque de Coutances, il passe pratiquement tout le règne de Guillaume le Conquérant en Angleterre. Son activité principale est de régler les disputes de terres les plus importantes, comme celle de Penenden Heath en 1072, où Lanfranc, l’archevêque de Cantorbéry [13] revendique des terres qui sont sous le contrôle d’Odon de Bayeux.

Il accompagne Guillaume le Conquérant en Normandie et dans le Maine en 1078 et 1080. En Angleterre, il est l’un des commissaires du Domesday Book [14] pour l’Est-Anglie [15].

À la mort du Conquérant en 1087, Robert Courteheuse reçoit en héritage la Normandie, et Guillaume le Roux l’Angleterre. Cette situation pose un gros problème de loyauté aux barons normands. Quasiment tous ont des possessions des 2 côtés de la manche et doivent donc obéir à deux seigneurs. Geoffroy de Montbray fait partie de ceux qui veulent un retour à un commandement unique. Il participe donc à la rébellion de 1088 [16], qui a pour but de remplacer le roi Guillaume II le Roux par son frère aîné, le duc Robert Courteheuse. Accompagné de son neveu Robert comte de Northumbrie, il met à sac Bristol [17], Bath [18], Berkeley [19] et une grande partie du Wiltshire [20].

La rébellion échoue, mais le roi décide de pardonner massivement aux rebelles. Geoffroy de Montbray essaye de s’insinuer dans les bonnes grâces du roi durant le procès fait à Guillaume de Saint-Calais, accusé d’avoir déserté le roi au moment critique. Mais face à l’hostilité de Lanfranc, il préfère se retirer en Normandie, où il reste jusqu’à sa mort en 1093.

Son neveu Robert de Montbray hérite de ses fiefs anglais mais Guillaume le Roux les lui confisque suite à un complot contre sa personne en 1095.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du livre de Histoire de Geoffroy de Montbray, évêque de Coutances de 1049 à 1093 et compagnon de Guillaume le Conquérant.

Notes

[1] Montbray est une commune française, située dans le département de la Manche

[2] L’ancien diocèse de Coutances est un ancien diocèse français. Jusqu’en 1569, l’évêque de Coutances exerçait une juridiction ecclésiastique sur les Îles de la Manche (qui formaient un doyenné), portant le titre d’« évêque de Coutances et des Îles ». En 1801, les frontières du diocèse sont remaniées à la suite du Concordat (annexion du territoire ou diocèse d’Avranches). L’évêché de Coutances a été supprimé en 1854, son chef-lieu Coutances est alors devenu par décret apostolique du pape Pie IX en date du 12 juin, le siège d’un nouvel évêché de Coutances et d’Avranches. Il appartenait à la province ecclésiastique de Rouen.

[3] Celle-ci est dédicacée le 8 décembre 1056 en présence du duc Guillaume le Bâtard.

[4] L’ouvrage décrit comment il lève des fonds, augmente le nombre de prébendes pour les chanoines et nomme de nouveau dignitaire. Il relate aussi qu’une école est créée pour former les élèves à devenir prêtre des paroisses du diocèse

[5] L’évêque de Bayeux était avant la Révolution considéré comme le second en dignité de la province ecclésiastique de Normandie, après l’archevêque de Rouen.

[6] La bataille d’Hastings s’est déroulée le 14 octobre 1066 à une dizaine de kilomètres au nord de la ville d’Hastings, dans le Sussex de l’Est. Elle oppose le dernier roi anglo-saxon d’Angleterre, Harold Godwinson, au duc Guillaume de Normandie, et se solde par une victoire décisive de ce dernier.

[7] L’abbaye de Westminster est l’un des édifices religieux les plus célèbres de Londres. Sa construction date pour l’essentiel du 13ème siècle, sous Henri III. C’est le lieu de sépulture d’une partie des rois et reines d’Angleterre et aussi des hommes et des femmes célèbres. Le « Coin des poètes » fait honneur aux écrivains du royaume. La quasi-totalité des couronnements des monarques anglais a eu lieu dans cette abbaye. Le vrai nom de l’abbatiale est église collégiale Saint-Pierre. Westminster signifie « abbaye de l’ouest » car celle-ci se situait à l’ouest de la City (en opposition à Eastminster, monastère cistercien qui se trouvait à l’est, au-delà de la tour de Londres, sur le site de l’actuel Royal Mint).

[8] Somerset

[9] Le comté du Somerset en Angleterre du Sud-ouest est limité au nord par la ville de Bristol et le Gloucestershire, le Wiltshire à l’est, le Dorset au sud-est et le Devon au sud-ouest. Il est en partie délimité au nord et à l’ouest par le canal de Bristol et l’estuaire du Severn. Sa frontière traditionnelle du nord est constituée par la rivière Avon mais la limite administrative a glissé vers le sud avec la création et l’expansion de la ville de Bristol et, plus tard, le comté d’Avon.

[10] Le comté du Devon a succédé à l’ancien royaume britton de Domnonée. Après sa conquête par les Anglo-Saxons, la Domnonée fut intégrée partiellement au royaume de Wessex aux 8ème et 9ème siècles. La frontière occidentale avec les Cornouailles a été établie au fleuve Tamar en 936 par le roi anglais Æthelstan.

[11] La révolte des comtes, qui se déroula en Angleterre en 1075, fut une rébellion de trois comtes anglo-normands contre leur souverain Guillaume le Conquérant. Ce fut le dernier acte sérieux de résistance que rencontra le Conquérant sur le sol anglais, mais elle provoqua un affaiblissement de sa position en Normandie face au roi de France.

[12] Le titre de comte de Norfolk a été créé plusieurs fois dans la pairie d’Angleterre. Ce titre est associé au comté de Norfolk. La première dynastie à avoir porté ce titre est celle des Bigot au 12ème et 13ème siècles. Puis plus tard, il a été porté par les Mowbray qui furent aussi ducs de Norfolk. Comme les Bigot étaient descendants par une lignée féminine de Guillaume le Maréchal, ils héritèrent du titre de comte Marshal qui est toujours porté par les ducs de Norfolk aujourd’hui. À la mort de Roger, en 1306, n’ayant pas de descendance, le titre et les possessions revinrent à la couronne.

[13] L’archevêque de Cantorbéry est, après le gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre (c’est-à-dire le monarque du Royaume-Uni), le chef de l’Église d’Angleterre et de la Communion anglicane. Il est le successeur de saint Augustin de Cantorbéry, le premier archevêque de 597 à 605. L’archevêque de Cantorbéry exerce une juridiction métropolitaine sur la province de Cantorbéry qui comprend 30 des 44 diocèses de l’Église d’Angleterre (les quatorze restants, au Nord de l’Angleterre, font partie de la province d’York). Autrefois, les quatre diocèses du Pays de Galles tombaient aussi sous la juridiction de la province de Cantorbéry. Mais, en 1920, les diocèses gallois furent transférés sous l’autorité de l’Église au Pays de Galles.

[14] Le Domesday Book est l’enregistrement du grand inventaire de l’Angleterre terminé en 1086, réalisé pour Guillaume le Conquérant, l’équivalent de nos jours d’un recensement national.

[15] L’Est-Anglie ou royaume des Angles de l’Est, est un royaume anglo-saxon établi au cours du Haut Moyen Âge sur les actuels comtés anglais du Suffolk et du Norfolk. Sa fondation légendaire, vers le milieu du 6ème siècle, aurait été le fait d’envahisseurs germaniques appartenant à la tribu des Angles. Il disparaît comme entité indépendante après les invasions vikings du 9ème siècle, mais le titre de comte d’Est-Anglie continue à être donné au sein du royaume d’Angleterre jusqu’à la fin du 11ème siècle, et la région conserve le nom d’Est-Anglie à ce jour.

[16] La Rébellion de 1088 se déroule en Angleterre durant le printemps et l’été 1088. Elle est provoquée par la volonté de barons anglo-normands de réunir sous un commandement unique le duché de Normandie et le Royaume d’Angleterre, que Guillaume le Conquérant a légué, à sa mort en 1087, respectivement à ses fils Robert Courteheuse et Guillaume le Roux. La rébellion est un échec, mais les conséquences sont minimes pour les rebelles. La chronologie précise et l’ordre de succession exact de certains événements ne sont pas certains à cause du manque de sources contemporaines ou de leur contradiction.

[17] Bristol est une ville britannique située dans le sud-ouest de l’Angleterre (Royaume-Uni), sur la rivière Avon marquant traditionnellement la frontière entre les comtés de Gloucestershire et le Somerset. Dès l’instauration du pouvoir normand, l’un des plus puissants châteaux du sud de l’Angleterre y est construit. Au 12ème siècle Bristol abrite un port important, la majorité du trafic commercial se faisant avec l’Irlande, mais aussi avec la France, en particulier entre la commanderie templière maritime et celle de La Rochelle

[18] Bath est une ville du comté de Somerset, au sud-ouest de l’Angleterre. Elle se situe à 180 km à l’ouest de Londres et à 25 km au sud-est de Bristol. Edgar d’Angleterre fut proclamé roi à l’abbaye de Bath en 973.

[19] Berkeley est une petite ville et une paroisse civile anglaise située dans le district de Stroud et le comté du Gloucestershire. La ville est connue pour abriter un château dans lequel le roi Édouard II fut emprisonné et assassiné. Berkeley fut une place importante à l’époque médiévale. Ce fut un port et un bourg. La paroisse de Berkeley a été la plus importante du Gloucestershire

[20] Wiltshire est un comté cérémonial du sud-ouest de l’Angleterre. Il est bordé par les comtés d’Hampshire, Dorset, Somerset, Gloucestershire, Oxfordshire et Berkshire. Son chef-lieu administratif est Trowbridge, située à l’ouest du comté. Le comté est renommé pour les pierres de Stonehenge, l’énorme cromlech d’Avebury et la cathédrale de Salisbury.